Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 6
ARRET DU 15 JUIN 2022
(n° 2022/ , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/00990 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7DTV
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Novembre 2018 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LONGJUMEAU – RG n° 16/00646
APPELANTE
SAS ALLIANCE prise en la personne de Me [S] [O] ès qualités de mandataire liquidateur de la société ADENTS HIGH TECH INTERNATIONAL
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Hubert MARTIN DE FREMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : 1702
INTIMÉE
Madame [K] [G] épouse [C]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Emmanuel PIRE de l’AARPI WTAP, avocat au barreau de PARIS, toque : r28
PARTIE INTERVENANTE
Association AGS CGEA IDF OUEST
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Hélène NEGRO-DUVAL de la SAS DUVAL LEGAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0197
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 avril 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre
Madame Nadège BOSSARD, Conseillère
Monsieur Stéphane THERME, Conseiller
Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats
ARRÊT :
– contradictoire,
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS ET DU LITIGE
Mme [G] épouse [C] a été embauchée par la société Adents High Tech International par contrat à durée indéterminée en date du 4 novembre 2013, en qualité de responsable service client.
Cette société comptait plus de onze salariés.
La convention collective du personnel des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil (SYNTEC) était applicable.
La rémunération brute mensuelle de la salariée s’élevait à 4 035 euros.
Le contrat de travail de Mme [G] épouse [C] a fait l’objet d’un avenant en date du 22 juin 2015, la soumettant à un forfait annuel en jours.
Par courrier recommandé en date du 5 avril 2016, Mme [G] épouse [C] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 14 avril 2016.
Par courrier en date du 19 avril 2016, elle a été licenciée pour un motif personnel lié à un comportement inadapté et à des insuffisances professionnelles.
Le 22 juillet 2016, Mme [G] épouse [C] a saisi le conseil de prud’hommes pour contester son licenciement et solliciter l’annulation de son son forfait annuel en jours ainsi que la condamnation de la société au paiement de diverses sommes.
Par jugement en date du 15 novembre 2018, le conseil de prud’hommes de Longjumeau a :
– dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;
– jugé que le forfait annuel en jours de Mme [C] est nul et de nul effet.
– condamné Adents à verser à Mme [G] épouse [C] :
– 2.398,53 euros à titre de rappel d’heures
– 239,85 euros au titre des congés payés afférents ;
avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation.
– 25.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement.
– 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Par déclaration en date du 9 janvier 2019, la société Adents High Tech International a interjeté appel contre ce jugement.
Par jugement en date du 7 octobre 2020, sur déclaration de cessation des paiements, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte par le tribunal de commerce de Nanterre et la SAS Alliance, prise en la personne de Me [O], a été désignée en qualité de liquidateur.
Une assignation en intervention forcée était donc signifiée à cette dernière.
Dans ses conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 8 février 2022, auxquelles il est fait expressément référence, la SAS ALLIANCE, prise en la personne de Maître [S] [O], es qualité de liquidateur judiciaire de la société ADENTS HIGH TECH INTERNATIONAL, SAS demande à la cour de :
A titre principal :
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Adents à verser à Mme [G] épouse [C] la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 2.398,53 euros à titre de rappels de salaire sur heures supplémentaires, outre la somme de 239,85 euros au titre des congés payés y afférents, et la somme de 900 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Et statuant à nouveau
– La débouter de l’ensemble de ses demandes
– La condamner à payer à la société Adents prise en la personne de son liquidateur la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile ;
– La condamner aux entiers dépens en ce compris les éventuels dépens d’exécution.
A titre subsidiaire :
– Dire et juger irrecevables toutes demandes de condamnation ;
– Réduire les montants dans de plus justes proportions.
En tout état de cause :
– Rejeter la demande d’article 700 du code de procédure civile.
– Débouter Mme [G] épouse [C] de toute demande de condamnation.
– Dire que les sommes fixées sont brutes de charges et cotisations sociales et d’imposition.
– Dire et juger que le jugement de liquidation judiciaire a définitivement arrêté le cours des intérêts.
Dans ses conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 19 avril 2022, auxquelles il est fait expressément référence, Mme [G] épouse [C] demande à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a jugé son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;
– infirmer le jugement en ce qu’il lui a alloué la somme de 25.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
En conséquence, fixer au passif de la société Adents la somme suivante :
‘ 50.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– confirmer le jugement en ce qu’il a jugé nul le forfait annuel en jours auquel Mme [C] était soumise
– Infirmer le jugement en ce qu’il lui a alloué les sommes de :
‘ 2.398,53 euros à titre de rappel d’heures
‘ 239,85 euros au titre des congés payés afférents ;
En conséquence, fixer au passif de la société Adents au versement des sommes de :
‘ 17.416,65 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires
‘ 1.741,6 euros à titre d’indemnité de congés payés sur heures supplémentaires
– fixer au passif de la société Adents le versement de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– Bulletin de paie et attestation de pôle emploi conformes sous astreinte de 50 euros par document et par jour de retard, dont la cour se réservera la liquidation
– Mettre les entiers dépens à la charge de l’employeur
Dans ses conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 20 décembre 2021, l’AGS demande à la cour de :
– Donner acte à la concluante des conditions d’intervention de l’AGS notamment dans le cadre des dispositions du code de commerce rappelées ci-dessus, et des limites et plafonds de la garantie de l’AGS prévus notamment par les articles L.3253-6 à L.3253-17, L.3253-19 à L.3253-20 du Code du travail ;
– Dire que la décision à intervenir ne pourra être déclarée opposable à l’AGS que dans ces conditions, limites et plafonds ;
– Infirmer le jugement dont appel ;
– Débouter Mme [G] épouse [C] de ses demandes, fins et conclusions ;
– Subsidiairement, rejeter les demandes de fixation de créances qui ne sont ni fondées dans leur principe ni justifiées dans leur montant et en tout état de cause, réduire aux seuls montants dûment justifiés les créances susceptibles d’être fixées, notamment à titre de salaires et à titre d’indemnités et dommages et intérêts.
La clôture a été prononcée par ordonnance en date du 15 février 2022.
MOTIFS
Sur la rupture du contrat de travail
Il ressort de l’article L. 1235-1 du code du travail qu’en cas de litige, le juge à qui il appartient d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties; si un doute subsiste il profite au salarié.
Le licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse et être motivé. Les faits sur lesquels repose ce licenciement doivent être exacts, c’est à dire être la véritable raison du licenciement, ils doivent être précis, existants, et objectifs c’est à dire être matériellement vérifiables. Pour que la cause soit sérieuse, les faits invoqués par l’employeur doivent présenter un certain degré de gravité et doivent rendre le licenciement nécessaire pour la bonne marche de l’entreprise.
La lettre de licenciement qui fixe l’objet du litige doit elle-même être rédigée dans des termes précis, et les griefs ne doivent pas être formulés en termes généraux ou évasifs, afin de caractériser le fondement vérifiable permettant au juge d’en apprécier le caractère réel et sérieux.
En l’espèce, la société a notifié le licenciement à Mme [G] épouse [C] pour un motif personnel lié d’une part à un comportement inadapté qui n’était pas en phase avec les attentes de la société ainsi qu’à des insuffisances professionnelles répétées dans l’exécution de ses fonctions.
Sur le premier point, force est de relever que la société fait état de griefs particulièrement évasifs et non circonscrits dans le temps puisqu’elle reproche à sa salariée d’avoir « récemment » tenu des propos « particulièrement déplacés » à l’égard de la société et notamment sur « ses pratiques » qui seraient contraires à la réglementation applicable au droit du travail. La société ajoute dans des termes tout aussi imprécis que par e-mail du 1er avril 2016, la salariée lui avait fait part de son souhait de poursuivre la collaboration chez Adents, tout en faisant peser sur la société et ses dirigeants des propos « inacceptables ». L’employeur indiquait en outre qu’il ne pouvait que « craindre » que la salariée ternisse l’image de la société en répandant des messages de cette nature. Il lui faisait encore grief, au travers de son dernier e-mail du 19 avril, de prétendre que la société ne respecterait pas la réglementation applicable en droit du travail. Enfin, la société visait de manière tout aussi laconique « l’absence de perspective d’amélioration ».
Le courriel du 1er avril 2016 ne fait pas particulièrement mention de propos « déplacés ». La salariée précise simplement qu’elle refuse la proposition faite au titre de la rupture conventionnelle, qu’elle souhaite que ses 6,6 mois d’heures supplémentaires soient intégrés en tant qu’heures supplémentaires et non en tant que indemnité, qu’elle n’appréciait pas la situation de chantage d’un licenciement pour insuffisance professionnelle alors même qu’elle n’avait jamais eu de reproche écrit sur le travail qu’elle avait réalisé et que son entretien d’évaluation de juillet 2015 l’avait décrite comme étant impliquée et disponible pour mener à bien ses missions, ses objectifs de juillet 2015 ayant été atteints. Elle avait en effet fait mention d’une surcharge de travail et d’une pression exercée par son employeur. Pour autant, Mme [C] n’avait fait qu’user de sa liberté d’expression, dans des termes d’ailleurs nullement insultants ou irrespectueux, et dans le cadre d’un échange de courriels n’impliquant qu’elle-même et la directrice des ressources humaines suite à l’entretien qu’elles avaient eu dans le cadre de la rupture conventionnelle.
Le courriel du 19 avril 2016, aux termes duquel la salariée aurait porté de graves accusations à l’encontre de la société, retrace simplement la réponse de Mme [C] à l’attention de la directrice des ressources humaines aux termes de laquelle elle fait valoir qu’elle ne se rendra pas à l’entretien préalable au licenciement dans la mesure où elle considère que la société a déjà pris sa décision. Force est de relever que ce message ne porte aucune accusation « grave » à l’endroit de la société mais fait simplement part du ressenti de la salariée, dans des termes révélant toute l’amertume de celle-ci.
Il résulte de tout ce qui précède que le grief tiré du « comportement inadapté » de Mme [C] n’est pas fondé.
La lettre de licenciement, qui fixe l’objet du litige, mentionne ensuite une insuffisance professionnelle de Mme [C].
L’insuffisance professionnelle est caractérisée par l’inaptitude du salarié à exécuter son travail de manière satisfaisante. Elle ne résulte pas d’un comportement volontaire, mais révèle l’incapacité constante du salarié à assumer ses fonctions. Elle constitue une cause de licenciement et doit être, ici encore, caractérisée par des éléments réels et objectifs. En application des articles L1232-1 et L 1235-1 du code du travail dans leur rédaction applicable à l’espèce, l’administration de la preuve du caractère réel et donc existant des faits reprochés et de leur importance suffisante pour nuire au bon fonctionnement de l’entreprise et justifier le licenciement du salarié, n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et, au besoin, après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute persiste, il profite au salarié.
La société soutient que l’insuffisance professionnelle de Mme [C] est caractérisée par :
– son défaut de mise en place des outils nécessaires permettant un service après-vente de qualité (pas de liste des fournisseurs, pas de liste des contrats de maintenance en cours, pas de contrats de maintenance avec certains clients).
– son absence d’initiative et de propositions.
– son défaut de rigueur et d’implication quant à la réalisation de la mission qui lui était confiée.
– ses importantes difficultés relationnelles avec les clients ainsi que ses difficultés dans le suivi logistique du service dont elle avait la responsabilité, et dans la communication avec les autres services de la société.
– son défaut de respect des procédures qualité en vigueur.
-son absence de maîtrise de l’outil OTRS, fondamental au sein de la société.
-son absence de maîtrise de l’organisation de la société et de ses sujets.
Mme [C] n’est pas contredite lorsqu’elle indique avoir changé à cinq reprises de supérieur hiérarchique en quelques années et que les outils du service après-vente ont à chaque fois été mis en place par ces responsables et validés, en leur temps, par le service qualité et la direction générale. Le fait qu’elle n’ait pas été consultée par ces derniers sur la mise en place de ces outils n’est pas davantage discuté.
Si la société fait valoir que le 15 janvier 2016, la salariée avait dressé une liste «inexploitable» des prestations récurrentes du service après-vente et du temps associé et se prévaut à cet égard d’un courriel en pièce 10, il reste que les termes de ce message, émanant de son supérieur hiérarchique lui donne des consignes pour l’élaboration de cette liste mais ne lui adresse aucun reproche. Il n’apparaît pas davantage qu’il se soit agi d’une intervention pour « pallier les lacunes de la salariée »ainsi que l’affirme la société.
Mme [C] établit ensuite que la liste des fournisseurs était disponible sur le réseau et elle l’adressait à son supérieur hiérarchique (sa pièce 13). Elle lui adressait également la liste des contrats de maintenance le 15 janvier 2016 (sa pièce 14). Elle présentait une dernière version de la nouvelle base de données clients Access le 3 mars 2016 à son supérieur hiérarchique (sa pièce 15).
Les causes de l’incident de production rencontré par le client «Taittinger» le 8 septembre 2015 n’apparaît pas exclusivement imputable à Mme [C] puisque l’employeur a également requis les explications du collègue de cette dernière. Surtout, le message produit dans sa pièce 31 démontre que le client était au moins pour partie responsable de l’anomalie constatée.
La société affirme que la salariée, chargée de mandater une société d’audit chez le client « Bollinger » n’aurait pas assuré le suivi de la mission diligentée par le prestataire. Toutefois, les éléments dont la société se prévaut dans ses pièces 23, 33-3, 48 et 49 ne mettent nullement en exergue un quelconque manquement de Mme [C] à cet égard et celle-ci n’apparaît pas personnellement mise en cause.
Pour le dossier Les Celliers de [Localité 7], il était reproché à Mme [C] son absence d’action menée après réception d’un terminal AID à analyser. Elle démontre néanmoins, au travers de sa pièce 32 avoir réglé le problème. Du reste, le dossier ne semblait pas du ressort du SAV mais de la gestion de projet.
Les autres insuffisances reprochées par la société n’apparaissent pas davantage établies en l’état des pièces du dossier, étant surtout observé que la salariée était en poste depuis 2013 et n’a jamais fait l’objet d’une quelconque remontrance ni encore moins d’un quelconque avertissement.
Compte tenu de ces éléments, l’insuffisance professionnelle de Mme [C] n’est pas établie et le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la nullité du forfait annuel en jours
Il est constant que Mme [C] était soumise à un forfait annuel en jours pour le décompte de son temps de travail depuis l’avenant à son contrat de travail signé le 22 juin 2015.
Il reste néanmoins que selon les dispositions de l’article 4.1 de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, attaché à la convention collective applicable, les salariés pouvant être soumis à un forfait annuel en jours devaient relever au minimum de la position 3 de la grille de classification des cadres de la convention collective nationale ou bénéficier d’une rémunération annuelle supérieure à deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale ou être mandataires sociaux.
Toutefois, Mme [C] ne remplissait pas ces conditions.
En effet, elle justifie qu’elle ne relevait pas de la position 3 de la grille de classification, étant positionnée au niveau 2.3, coefficient 150. Elle ne bénéficiait pas d’une rémunération annuelle supérieure à deux fois le plafond du PASS qui était de 38.616 euros en 2016. En effet, sa rémunération annuelle brute s’élevant à 47.000 euros, elle se trouvait donc en deçà des 77.232 euros requis pour mettre en place un forfait annuel en jours. Enfin, elle n’était pas mandataire social.
L’ accord d’entreprise signé en juin 2015, applicable au 5 octobre 2015, pris en son article 5 relatif au forfait annuel en jour, opère un renvoi à l’avenant du 1er avril 2014 incluant ces conditions et ne contient aucune disposition qui pourrait y déroger.
Dès lors le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a annulé la convention de forfait jours de Mme [C].
Sur le rappel des heures supplémentaires
Il sera rappelé tout d’abord qu’en application des dispositions d’ordre public tirées des articles L 622-21 et L 625-3 et suivants du code de commerce, les instances introduites ou en cours durant la procédure collective ne peuvent tendre qu’à la fixation des créances et aucune condamnation ne peut intervenir à l’encontre de la société liquidée ou de son représentant.
En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du code du travail. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence de rappels de salaire, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Mme [C] produit les photocopies de ses agendas sur lesquels apparaissent des mentions manuscrites qui semblent établir ses horaires. Elle produit également un tableau excel. Bien que ces éléments manquent de précision, il sera observé que l’employeur, auquel incombe pourtant le contrôle du temps de travail, ne verse pour sa part aucun document comptable de nature à avérer les horaires de sa salariée.
Selon les bulletins de salaire de Mme [C], celle-ci est passée au forfait annuel en jours à compter du mois d’octobre 2015. Auparavant sa durée de travail était de 35 heures par semaine et la convention collective Syntec précise que le recours aux heures supplémentaires ne peut être faite qu’à la demande de l’employeur ou à la condition que ce dernier ne s’y oppose pas. Mme [C] sollicite le paiement d’heures supplémentaires sur cette période au motif que sa charge de travail le nécessitait. Aucun élément du dossier ne vient cependant établir l’existence d’une telle charge, qu’elle n’a au demeurant jamais dénoncée au cours de la relation de travail. En revanche, le forfait annuel en jours de Mme [C] étant nul, son annulation implique le paiement à titre d’heures supplémentaires de toute heure travaillée au-delà de la 35e heure sur la période de l’annulation. Au vu des éléments présentés par les parties, Mme [C] se verra dédommagée à ce titre de la somme de 4 407,91 euros outre 440,79 euros au titre des
congés payés afférents et ces montants seront fixés à la liquidation judiciaire de la société au bénéfice de Mme [C]. Le jugement entrepris sera infirmé.
Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Il est constant qu’à la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, Mme [C] avait au moins deux ans d’ancienneté dans une entreprise de 11 salariés et plus ; il y a donc lieu à l’application de l’article L. 1235-3 du code du travail dont il ressort que le juge octroie une indemnité au salarié qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération de Mme [C], de son âge (48 ans), de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu’ils résultent des pièces versées aux débats par celle-ci, la cour retient que l’indemnité à même de réparer intégralement le préjudice de la salariée a justement été estimée par les premiers juges à la somme de 25 000 euros. Le jugement entrepris sera néanmoins infirmé en ce qu’il a condamné la société ADENTS à paiement de ce chef alors qu’il convient de fixer cette créance au passif de la liquidation judiciaire.
Sur les frais irrépétibles et les autres demandes
L’article 700 du code de procéure civile dispose que la partie perdante doit êre condamnée à verser à l’autre partie une certaine somme au titre des frais exposés par celle-ci qui ne sont pas compris dans les dépens. Mais ce même texte prévoit que ce principe peut recevoir exception pour des motifs d’équité ou lié aux situations économiques respectives des parties. La situation de la société ADENTS HIGH TECH INTERNATIONAL, placée en liquidation judiciaire, justifie de débouter Mme [C] de sa demande fondée sur le texte précité .Toutefois, la SAS ALLIANCE, prise en la personne de Me [S] [O], es qualité de liquidateur judiciaire de la société ADENTS HIGH TECH INTERNATIONAL, qui succombe, supportera les dépens.
Il sera rappelé que le jugement d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous intérêts de retard et majorations.
Il sera ordonné à la SAS ALLIANCE, prise en la personne de Me [S] [O], es qualité de liquidateur judiciaire de la société ADENTS HIGH TECH INTERNATIONAL, de remettre à Mme [C] ses bulletin de paie et attestation de Pôle Emploi conformes. Il n’y aura cependant pas lieu à astreinte de ce chef.
Le présent arrêt sera déclaré commun et opposable à l’AGS CGEA Ile de France Ouest dans les limites de sa garantie légale.
PAR CES MOTIFS
La cour,
INFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il a jugé que le licenciement de Mme [K] [C] pour insuffisance professionnelle n’était pas fondé sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a jugé que le forfait annuel en jours de celle-ci était nul et de nul effet.
Statuant à nouveau des chefs infirmés
FIXE au passif de la société ADENTS HIGH TECH INTERNATIONAL, représentée par la SAS ALLIANCE, prise en la personne de Me [S] [O], es qualité de liquidateur judiciaire, les sommes suivantes :
– 25.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– 4 407,91 euros au titre des rappels de salaires pour heures supplémentaires outre 440,79 euros au titre des congés payés afférents
RAPPELLE que le jugement d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous intérêts de retard et majorations.
ORDONNE à la SAS ALLIANCE, prise en la personne de Me [S] [O], es qualité de liquidateur judiciaire de la société ADENTS HIGH TECH INTERNATIONAL, de remettre à Mme [C] ses bulletins de paie et attestation de Pôle Emploi conformes.
DIT toutefois n’y avoir lieu à astreinte de ce chef.
DÉCLARE le présent arrêt commun et opposable à l’AGS CGEA Ile de France Ouest dans les limites de sa garantie légale.
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.
CONDAMNE la SAS ALLIANCE, prise en la personne de Me [S] [O], es qualité de liquidateur judiciaire de la société ADENTS HIGH TECH INTERNATIONAL aux dépens.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE