14 mars 2023
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
19/02717
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 19/02717 – N° Portalis DBVH-V-B7D-HNHG
YRD/JL
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE D’ANNONAY
13 mai 2019
RG:18/00051
[C]
C/
S.A.S. [F] ELECTRIC FIELD
Grosse délivrée le 14 MARS 2023 à :
– Me PERICCHI
– Me POMIES RICHAUD
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 14 MARS 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ANNONAY en date du 13 Mai 2019, N°18/00051
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président,
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère,
Madame Leila REMILI, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 5ème chambre sociale, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l’audience publique du 01 Février 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 14 Mars 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANT :
Monsieur [E] [C]
né le 03 Mai 1993 à [Localité 3] ([Localité 3])
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représenté par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Mathilde BAETSLE, avocat au barreau de VALENCE
INTIMÉE :
SAS [F] ELECTRIC FIELD société par action simplifiée au capital de 100 000 euros immatriculée au RCS d’Aubenas sous le N°518 505 920 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es-qualité au siège social sis
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Eric POUDEROUX, avocat au barreau de LYON
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 14 Mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [E] [C] a été engagé à compter du 3 novembre 2016, suivant contrat à durée déterminée d’une durée de 12 mois, en qualité d’ingénieur de mise en service, niveau 1-1 coefficient 95, par la SAS [F] Electric Field.
La convention collective applicable est celle des bureaux d’études techniques et cabinets d’ingénieurs conseils dite SYNTEC.
À l’issue du contrat à durée déterminée, le contrat de travail de M. [E] [C] s’est poursuivi avec un contrat à durée indéterminée, en qualité d’ingénieur de mise en service niveau 1-2, coefficient 100.
M. [E] [C] a été placé en arrêt de travail du 9 avril 2018 au 3 août 2018.
Par courrier du 9 juillet 2018, suite à des échanges de courriers avec la SAS [F] Electric Field, M. [E] [C] a notifié sa prise d’acte au motif d’un manquement grave lié à la qualification incompatible avec le forfait jour, que la SAS [F] Electric Field a refusé de régulariser.
Par requête du 20 juillet 2018, M. [E] [C] a saisi le conseil de prud’hommes d’Annoray aux fins de requalifier le contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ; dire et juger que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail doit avoir les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la SAS [F] Electric Field au paiement de diverses sommes indemnitaires.
Par jugement du 13 mai 2019, le conseil de prud’hommes d’Annoray a :
– déclaré recevable la saisine de M. [E] [C],
– condamné la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] une indemnité d’un mois de salaire soit 2.051 euros au titre de la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
– condamné la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de 13
860.85 euros au titre des heures supplémentaires ou de compensation en absence de récupération,
– débouté M. [E] [C] de sa demande d’indemnités pour travail dissimulé,
– condamné la SAS [F] electric field à payer 1.500 euros de paiement de dommages et intérêts pour préjudice lié à l’exécution fautive du contrat de travail,
– condamné la SAS [F] electric field au titre de prime de vacances,
– débouté M. [E] [C] de sa demande de qualification de sa prise d’acte en licenciement sans cause, ainsi que des indemnités associées,
– débouté la SAS [F] electric field de sa demande reconventionnelle pour le paiement d’une facture de téléphonie mobile,
– condamné la SAS [F] electric field à payer la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à M. [E] [C],
– ordonné la fourniture des documents légaux rectificatifs dans un délai d’un mois à compter du prononcé de la présente affaire sous astreinte de 50 euros par jour de retard au delà de ce délai avec un plafond de 1.500 euros,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes,
– condamné la SAS [F] electric field aux entiers dépens.
Par acte du 5 juillet 2019, M. [E] [C] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 16 janvier 2023, M. [E] [C] demande à la cour de :
– révoquer l’ordonnance de clôture au jour des plaidoirie,
– dire et juger l’appel recevable et bien fondé,
En conséquence,
– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Annoray le 13 mai 2019 en ce qu’il a :
– débouté M. [E] [C] de sa demande de rappel de salaire sur la base des minimas conventionnels et de la convention de forfait et condamné la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de 13 860,85 euros au titre des heures supplémentaires ou de compensation en l’absence de récupération,
– débouté M. [E] [C] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé,
– condamné la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de 1500 euros seulement à titre de dommages et intérêts pour
préjudice lié à l’exécution fautive du contrat de travail,
– condamné la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de 392 euros seulement au titre de la prime de vacances,
– débouté M. [E] [C] de sa demande de qualification, de sa prise d’acte en licenciement sans cause et aux indemnités associées (indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, indemnité conventionnelle de licenciement et dommages et intérêts pour licenciement sans cause),
– débouté M. [E] [C] du surplus de ses demandes,
– confirmer le jugement déféré en toutes ses autres dispositions,
Puis, statuant à nouveau sur les chefs du jugement critiqué :
– fixer le salaire de M. [E] [C] à 4167,72 euros à titre principal, 6622 euros à titre subsidiaire, ou 2698,02 euros à titre infiniment subsidiaire,
– condamner la SAS [F] electric field à verser à M. [E] [C] à titre de rappel de salaire :
– à titre principal : la somme de 44 146,40 euros outre 4 414,64 de congés payés y afférents,
– à titre subsidiaire : la somme de 91 852 euros à titre subsidiaire outre 9 185,20 euros de congés payés y afférents,
– à titre infiniment : la somme de 40 336,92 euros outre 4 033,69 euros de congés payés y afférents,
– condamner la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de
833,54 euros à titre principal ou 1 310,60 euros à titre subsidiaire, ou 795,45 euros à titre
infiniment subsidiaire, à titre de rappel de prime de vacances,
– dire et juger que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de M. [E] [C] doit avoir les effets d’un licenciement sans cause,
Par conséquent,
– condamner la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] les
sommes suivantes :
– au titre de l’indemnité compensatrice de préavis : 12 503,16 euros à titre principal ou 19 866 euros à titre subsidiaire, ou 8 094,06 euros à titre infiniment subsidiaire,
– au titre des congés payés sur indemnité compensatrice de préavis : 1 250,32 euros à titre principal ou 1 986,60 euros à titre subsidiaire, ou 809,41 euros à titre infiniment subsidiaire,
– au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement : 2 315,40 euros à titre principal ou 3 678,89 euros à titre subsidiaire, ou 1498,90 euros à titre infiniment
subsidiaire,
– à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause : 8 335,44 euros à titre principal ou 13 244 euros à titre subsidiaire ou 5 396,04 euros à titre infiniment subsidiaire,
– dire et juger que la SAS [F] electric field n’a pas respecté les dispositions
légales et conventionnelles liées aux durées maximales quotidiennes et hebdomadaire de
travail, au repos quotidien, et à la mise en place d’un outil de suivi pour assurer le respect des
temps de repos, au contingent d’heures supplémentaires et à l’interdiction du travail le 1er mai,
Par conséquent,
– condamner la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de 6000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
– condamner la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de 25 006,32 à titre principal ou 39 732 à titre subsidiaire, ou 16 188,12 euros à titre infiniment subsidiaire, à titre d’indemnité pour travail dissimulé,
– ordonner la remise d’une attestation pôle emploi et d’un certificat de travail rectifiés sous astreinte de 50 euros par document et par jour de retard à compter de l’arrêt à intervenir,
– débouter la SAS [F] electric field de l’ensemble de ses demandes fins et
conclusions,
– condamner la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de
4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la SAS [F] electric field aux entiers dépens.
M. [E] [C] soutient que :
– le motif indiqué pour recourir à un contrat à durée déterminée n’est pas de ceux prévus par le du code du travail,
– l’application d’un forfait jours conduit à la reconnaissance de sa classification de cadre position 3 et, à tout le moins, induit la reconnaissance d’une rémunération annuelle supérieure à 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale,
– si la convention de forfait jours n’est pas applicable, il justifie des nombreuses heures supplémentaires effectuées, il était en effet dans l’obligation d’effectuer des trajets qui sont assimilés à du temps de travail effectif et contraint de rester pendant la durée de ses missions sous la subordination de son employeur sans pouvoir vaquer à ses occupations personnelles,
– il n’a pas bénéficié de la prime de vacances,
– les manquements de l’employeur justifiaient qu’il prenne acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de ce dernier.
En l’état de ses dernières écritures en date du 13 décembre 2022, contenant appel incident, la SAS [F] Electric Field a demandé de :
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Annonay du 13 mai 2019 en ce que cette juridiction a :
– débouté M. [E] [C] de sa demande de qualification de sa prise d’acte en licenciement sans cause, ainsi que des indemnités associées,
– réformer le jugement entrepris en ce que la juridiction de première instance a :
– condamné la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] une indemnité d’un mois de salaire soit 2 051 euros au titre de la requalification du
contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
– condamné la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de 13 860,85 euros au titre des heures supplémentaires ou de compensation, en l’absence de récupération,
– condamné la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] 1 500 euros de dommages-intérêts pour préjudice lié à l’exécution fautive du contrat de travail,
– condamné la SAS [F] electric field à payer à M. [E] [C] la somme de 392 euros à titre de prime de vacances,
– débouté la SAS [F] electric field de sa demande reconventionnelle au
titre du paiement d’une facture de téléphonie mobile,
– condamné la SAS [F] electric field à payer la somme de 1 500 euros titre
des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à M. [E] [C],
– ordonné la fourniture de documents légaux rectificatifs dans un délai d’un mois à compter du prononcé sous astreinte de 50 euros par jour de retard avec un plafond de
1 500 euros,
– condamné la SAS [F] electric field aux entiers dépens,
Et statuant à nouveau,
– débouter M. [E] [C] de sa demande de requalification de son contrat de
travail en contrat à durée indéterminée, la transformation étant déjà intervenue par la
signature d’un contrat à durée indéterminée,
– débouter M. [E] [C] de sa demande au titre de rappels de salaire à
hauteur de 44 146,40 euros, l’employeur ayant fait la démonstration de ce que ce salarié avait
été embauché en qualité de cadre de niveau 1-1, coefficient 95, puis de cadre de niveau
1-2, coefficient 100, et l’employeur ayant commis une erreur d’interprétation de la convention collective SYNTEC et de la législation en considérant que les déplacements à l’étranger devaient forcément impliquer la mise en place d’un forfait jour, alors pourtant que M. [E] [C] a été rémunéré sur la base d’un temps de travail mensuel classique de 151,67 heures,
– dire et juger que M. [E] [C] n’est pas en droit d’obtenir une rémunération calculée sur la base de celle d’un ingénieur de catégorie 3 en l’absence de démonstration de sa part de disposer des compétences d’un ingénieur expérimenté, et alors au contraire que l’employeur établit qu’il était un cadre débutant presque toujours encadré par un ingénieur confirmé,
– débouter en conséquence M. [E] [C] de sa demande au titre de rappels
de salaire,
– le débouter en outre de sa demande de rappel de prime de vacances, en l’état de ce que l’employeur démontre que son montant, limité à la somme de 363,27 euros, avait déjà été
acquittée par l’attribution à M. [E] [C] de primes très conséquentes entre le 1er mai 2017 et le 31 octobre 2017,
– débouter M. [E] [C] de sa demande visant à voir qualifiée la prise d’acte
de la rupture du contrat de travail comme étant constitutive d’un licenciement sans cause
réelle et sérieuse,
– le débouter en conséquence de ses entières demandes afférentes au versement d’une
indemnité compensatrice de préavis, d’une indemnité conventionnelle de licenciement, d’une indemnité au titre des congés payés sur préavis, et enfin au titre du licenciement prétendu sans cause réelle et sérieuse,
– débouter en outre M. [E] [C] de sa demande à hauteur de 6 000 euros à
titre de dommages et intérêts pour non-respect prétendu des dispositions légales et indemnisation d’un préjudice moral,
– constater en effet que l’employeur fait la démonstration que le nombre d’heures et de
jours de travail effectif de M. [E] [C] est inférieur aux minimas légaux et qu’il bénéficiait de repos compensateurs systématiques pour tenir compte de la durée
de ses déplacements professionnels,
– débouter M. [E] [C] de sa demande au titre d’un prétendu travail dissimulé, en application de l’article L.8223-1 du code du travail, l’employeur faisant la démonstration que le nombre d’heures de travail réel M. [E] [C] est inférieur aux minimas légaux,
– débouter M. [E] [C] de sa demande visant à lui voir remettre sous astreinte une attestation Pôle emploi et un certificat de travail rectifiés, en l’état de ce que le conseil de prud’hommes aura jugé que la prise d’acte doit être analysée comme une démission,
– débouter M. [E] [C] de sa demande au titre des frais irrépétibles et des dépens,
A titre reconventionnel,
– condamner M. [E] [C] à payer à la SAS [F] electric field la somme de 19 372,27 euros en remboursement des consommations de données à l’étranger à partir de la ligne de téléphone portable numéro [XXXXXXXX01] ,
– condamner M. [E] [C] à payer à la SAS [F] electric field la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés devant le premier juge et à hauteur d’appel,
– condamner M. [E] [C] aux entiers dépens, tant de première instance
d’appel.
La SAS [F] Electric Field fait valoir que :
– le contrat à durée déterminée s’étant poursuivi en contrat à durée indéterminée, la demande de requalification n’a plus d’objet,
– c’est par erreur qu’elle a soumis M. [C] à une convention de forfait jours alors qu’il était inexpérimenté et débutant dans la profession, en outre il commettait de nombreuses erreurs,
– en vertu de l’alinéa 2 de l’article 31 de la convention collective SYNTEC, toutes les primes et gratifications versées à M. [C] peuvent être considérées comme primes de vacances, d’autant plus qu’elles représentent un montant très supérieur aux 10 % prévus à l’alinéa 1 de cet article 31,
– les revendications de M. [C] n’étant pas fondées, sa prise d’acte de rupture s’analyse en une démission,
– M. [C] a abusé du téléphone portable mis à sa disposition générant des consommations d’un montant excessif dont elle demande le remboursement.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 19 août 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la révocation de l’ordonnance de clôture de la procédure du 26 avril 2022 et fixé la clôture de la procédure au 21 décembre 2022.
MOTIFS
Sur le rabat de l’ordonnance de clôture et le rejet des conclusions d’appelant du 16 janvier 2023
M. [C] relate que par ordonnance en date du 24 février 2022, le conseiller de la mise en état avait ordonné la clôture de la procédure à effet au 26 avril 2022 à 16h et fixé l’affaire à l’audience des plaidoiries du 10 mai 2022, qu’il a reconclu le 7 avril 2022 sans que la société [F] Electric Field manifeste son désir de répliquer, que le 29 avril 2022 la société [F] Electric Field a formé par RPVA une demande de renvoi avec révocation de l’ordonnance de clôture sans toutefois la motiver, que par courrier RPVA du 4 mai 2022 il s’est opposé à la demande de révocation de l’ordonnance de clôture, en ajoutant qu’il ne s’opposerait pas à ce que la partie adverse sollicite une autorisation pour faire une note en délibéré, que le jour de l’audience de plaidoirie, le magistrat a rejeté la demande de révocation de clôture, de sorte que la société [F] Electric Field a demandé le renvoi de l’affaire en formation collégiale, que son conseil a alors indiqué qu’elle serait en congé maternité de fin octobre jusqu’à fin janvier, son congé maternité prenant fin le 31 janvier 2023, et demandé à ce que cette indisponibilité soit prise en compte lors de la fixation de la prochaine audience de plaidoirie.
Il ajoute que par ordonnance du 19 août 2022, le magistrat de la mise en état a révoqué l’ordonnance de clôture au motif pris que cette demande aurait été faite par « l’ensemble des parties » et fixé la date de clôture à la date de l’audience de plaidoirie, l’audience de plaidoirie étant fixée au 4 janvier 2023, pendant le congé maternité de son conseil.
Il conteste s’être associé à la demande de révocation de l’ordonnance de clôture et a sollicité un renvoi de la date de plaidoirie au motif pris du congé maternité de son conseil, que par message RPVA du 14 septembre 2022 le président de chambre a indiqué ne pas rapporter son ordonnance, qu’il a alors redemandé un renvoi de l’audience de plaidoirie, lequel a été accordé pour le 1er février 2023, date de reprise de son conseil, et la date de clôture fixée au 21 décembre 2022.
Il fait valoir que la société [F] Electric Field a pour sa part pris de nouvelles conclusions et déposé de nouvelles pièces le 13 décembre 2022, qu’il a sollicité un report de la date de clôture, ce qui a été accepté par la société [F] Electric Field le 20 décembre 2022, que dès lors, conformément aux dispositions des articles 907 et 784 du code de procédure civile en vigueur au moment de l’ouverture de la procédure en cours, il y a donc lieu d’ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture, dans l’intérêt de l’administration d’une bonne justice.
Ce faisant M. [C] ne démontre pas l’existence d’une cause grave de nature à justifier la révocation de l’ordonnance de clôture.
Il n’y a donc pas lieu de révoquer l’ordonnance de clôture et d’accueillir les conclusions de M. [C] déposées le 16 janvier 2023 postérieurement à la clôture.
La cour ne prendra en compte que ses conclusions du 7 avril 2022.
Sur la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée
M. [C] sollicitait devant le conseil de prud’hommes d’Annonay la requalification du contrat à durée déterminée conclu le 2 novembre 2016 en contrat à durée indéterminée en application des dispositions de l’article L.1245-1 du code du travail et l’allocation d’une indemnité de requalification conformément aux dispositions de l’article L.1245-2 du même code.
Le conseil de prud’hommes a condamné la société [F] Electric Field à une indemnité de « 2051 € au titre de la requalification du CDD et CDI », estimant que le CDD n’avait pas été conclu pour des motifs conformes à l’article L1242-1 du Code du travail.
Au dispositif de ses écritures M. [C] demande à la cour de :
Infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes d’Annonay le 13 mai 2019 en ce
qu’il a
– Débouté Monsieur [E] [C] de sa demande de rappel de salaire sur la base des
minimas conventionnels et de la convention de forfait et Condamne la société
[F] ELECTRIC FIELD à payer à Monsieur [E] [C] la somme de
13 860,85 euros au titre des heures supplémentaires ou de compensation en l’absence
de récupération
– Débouté Monsieur [E] [C] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé
– Condamné la société [F] ELECTRIC FIELD à payer à Monsieur [E]
[C] la somme de 1500 € seulement à titre de dommages et intérêts pour
préjudice lié à l’exécution fautive du contrat de travail
– Condamné la société [F] ELECTRIC FIELD à payer à Monsieur [E]
[C] la somme de 392 € seulement au titre de la prime de vacances.
– Débouté Monsieur [E] [C] de sa demande de qualification, de sa prise
d’acte en licenciement sans cause et aux indemnités associées (indemnité
compensatrice de préavis et congés payés y afférents, indemnité conventionnelle de
licenciement et dommages et intérêts pour licenciement sans cause)
– Débouté Monsieur [C] du surplus de ses demandes
Confirmer le jugement déféré en toutes ses autres dispositions.
Contrairement à ce qu’indique la société [F] Electric Field, M. [C] n’a pas sollicité l’infirmation du jugement sur ce point, mais sa confirmation.
La société [F] Electric Field sollicite par contre l’infirmation du jugement sur ce point.
Selon l’article L1242-1 du code du travail, le contrat à durée déterminée « ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. »
Le recours au contrat à durée déterminée n’est autorisé que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement pour les cas de recours visés à l’article L.1242-2 du code du travail.
En l’espèce le contrat litigieux a été conclu pour le motif suivant :
« la montée en compétence de Mr. [C] [E], par sa mise en situation de travail et sa formation aux essais spécifiques ».
Ce motif n’est pas l’un de ceux énumérés à l’article L.1242-2 susvisé. Peu importe qu’un nouveau contrat ait été établi par la suite, lequel prévoyait en outre une période d’essai.
Le jugement mérite confirmation de ce chef.
Sur le rappel de salaire
– Sur la validité de la convention de forfait et les demandes de rappel de salaire y afférentes.
1) Sur l’application de la position 3 de la grille de classification :
Le contrat de travail de M. [C] prévoyait « Le temps de travail est d’un commun accord annualisé en vue de répondre au mieux aux conditions des marchés. En outre la fonction de Mr [C] [E] implique une difficulté à prédéterminer une durée de travail. L’exercice des fonctions de Mr [C] [E] nécessitant une large autonomie dans l’organisation de son emploi du temps. Mr [C] [E] ayant la capacité de fixer et de répartir lui-même le temps nécessaire à la réalisation de la mission qui lui est confiée, il est rémunéré sur la base d’un forfait défini en fonction d’un certain nombre de jours de travail sur l’année s’établissant à 217 jours. »
M. [C] invoque les dispositions de la convention collective SYNTEC et le paragraphe 4-1 de l’accord national du 22 juin 1999 étendu par arrêté du 21 décembre 1999 modifié par avenant du 1er avril 2014, qui prévoit concernant les conditions du forfait annuel en jours :
« Peuvent être soumis au présent article 4 les personnels exerçant des responsabilités de management élargi ou des missions commerciales, de consultant ou accomplissant des tâches de conception ou de création, de conduite et de supervision de travaux, disposant d’une large autonomie, de liberté et d’indépendance dans l’organisation et la gestion de leur temps de travail pour exécuter les missions qui leur sont confiées. Les salariés ainsi concernés doivent bénéficier de dispositions adaptées en matière de durée du travail ; ils sont autorisés, en raison de l’autonomie dont ils disposent, à dépasser ou à réduire la durée conventionnelle de travail dans le cadre du respect de la législation en vigueur. La rémunération mensuelle du salarié n’est pas affectée par ces variations.
Pour pouvoir relever de ces modalités, les salariés concernés doivent obligatoirement disposer de la plus large autonomie d’initiative et assumer la responsabilité pleine et entière du temps qu’ils consacrent à l’accomplissement de leur mission caractérisant la mesure réelle de leur contribution à l’entreprise. Ils doivent donc disposer d’une grande latitude dans leur organisation de travail et la gestion de leur temps. Ils relèvent au minimum de la position 3 de la grille de classification des cadres de la convention collective nationale ou bénéficient d’une rémunération annuelle supérieure à deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale ou sont mandataires sociaux. »
M. [C] en conclut qu’il relevait a minima de la position 3 de la grille de classification.
L’employeur prétexte une erreur.
Il appartient au salarié qui se prévaut d’une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu’il assure effectivement de façon habituelle, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu’il revendique.
Or selon la convention collective, les ingénieurs et cadres de position 3 sont :
Position 3 :
3.1. Ingénieurs ou cadres placés généralement sous les ordres d’un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en ‘uvre non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer, toutefois, dans leurs fonctions, une responsabilité complète et permanente
qui revient en fait à leur chef
Coefficient : 170
3.2. Ingénieurs ou cadres ayant à prendre, dans l’accomplissement de leurs fonctions, les initiatives et les responsabilités qui en découlent, en suscitant, orientant et contrôlant le travail de leurs subordonnés. Cette position implique un commandement sur des collaborateurs et cadres de toute nature
Coefficient : 210
3.3. L’occupation de ce poste, qui entraîne de très larges initiatives et responsabilités et la nécessité d’une coordination entre plusieurs services, exige une grande valeur technique ou administrative
Coefficient : 270
Or, M. [C], embauché au niveau 1-2 coefficient 100 qui ne présente aucun diplôme d’ingénieur ni aucune expérience pouvant être jugée équivalente ne peut prétendre à la classification revendiquée en dépit de la clause de forfait insérée à son contrat de travail.
En effet, ce n’est pas l’insertion d’une clause de forfait inapplicable au statut du salarié qui détermine sa classification mais le niveau d’études et de compétences et les tâches réellement exercées.
2) Sur la reconnaissance d’une rémunération annuelle supérieure à deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale
Se référant toujours à l’article 4-1 de l’accord RTT du 22 juin 1999 selon lequel les salariés qui se voient appliquer une convention de forfait jours bénéficient d’une rémunération annuelle supérieure à deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale ( soit 77 232 euros pour 2016 et 78 456 euros pour 2017) , M. [C] réclame le paiement d’un rappel de salaire équivalent à ce montant.
Or, précisément comme la rémunération octroyée à M. [C] était inférieure à deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale, il ne pouvait se voir appliquer une convention de forfait en jours.
Il convient donc d’en conclure que M. [C] ne pouvait être soumis à une convention de forfait en jours en sorte qu’il était par contre assujetti à l’horaire légal de travail.
– Sur les heures supplémentaires
Dès lors que M. [C] ne répondait à aucune des conditions envisagées par l’article 4-1 de l’accord du 22 juin 1999 susvisé, la clause de forfait jours est privée d’effet et il peut solliciter le paiement des heures supplémentaires accomplies.
Aux termes de l’article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
À défaut d’éléments probants fournis par l’employeur, les juges se détermineront au vu des seules pièces fournies par le salarié
Après analyses des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l’opposition à l’exécution de celle-ci de l’employeur se trouvant alors indifférente.
Le salarié peut revendiquer le paiement d’heures supplémentaires à raison de l’accord tacite de l’employeur.
Cet accord tacite peut résulter de la connaissance par l’employeur de la réalisation d’heures supplémentaires par le biais de fiche de pointage et l’absence d’opposition de l’employeur à la réalisation de ces heures.
M. [C] produit en pièce n°29 le tableau récapitulatif des heures supplémentaires qu’il soutient avoir effectuées duquel apparaît :
– 116 heures supplémentaires (dont 5h30) ouvrant droit à majoration de 25%
– 199 heures supplémentaires (dont 53h) ouvrant droit à majoration de 50%
– et 1270 heures supplémentaires (dont 367h30) ouvrant droit à majoration de 100% (dimanches, jour fériés ou heures réalisées au-delà du contingent d’heure).
Il rappelle que l’article 35.1 de la convention collective énonce :
« Le travail du dimanche et des jours fériés est subordonné aux dispositions de la législation du travail, et spécifiquement au titre II du code du travail portant sur les repos et congés. Par conséquent, lorsqu’une société est amenée à exercer des travaux non dérogatoires au repos dominical, elle doit faire la demande auprès du préfet du département et reste, en outre, tenue de respecter les dispositions légales (1).
Le nombre de dérogations est limité par la présente convention collective à 15 autorisations par année et par salarié. » Il précise avoir travaillé plusieurs dimanches et jour fériés sans autorisation préfectorale.
Toutefois, M. [C] inclut dans son décompte d’heures supplémentaires les temps de trajet notamment pour se rendre à l’étranger et les temps de présence sur les sites des clients de la société, décomptant quasi systématiquement 12 heures de travail par jour lorsqu’il se trouvait en déplacement en Ecosse, 10 heures/jour au Sénégal ou Algérie et 8 heures/jour en Turquie et Maroc. Son contrat de travail prévoyait le paiement d’une indemnité forfaitaire journalière pour ces déplacements.
Au sens de l’article L 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.
L’article L3121-4 p précise que «Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif.
Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail n’entraîne aucune perte de salaire.»
Dès lors ce temps de trajet ne peut être assimilé à du temps de travail effectif ouvrant droit au paiement d’heures supplémentaires.
Les prestations facturées au client sont par ailleurs déconnectées des temps effectifs de travail et ne peuvent être prises en compte dans l’examen des prétentions du salarié.
La société [F] Electric Field produit par ailleurs, en pièce n°30, un courriel du dirigeant à son avocat du 3 juin 2020 accompagné d’un calendrier complet de l’ensemble du temps de présence de M. [C] dans l’entreprise tendant à établir que les horaires de travail réalisés par M. [C] sont, en moyenne, en-deçà du temps de travail légal de 35 heures et qu’au contraire, la plupart du temps, le temps réel de travail était nettement inférieur à cette durée.
Au demeurant les échanges de courriels entre M. [C] et son employeur le 28 juin 2017 démontrent qu’il pouvait librement vaquer à ses occupations bien qu’il se soit trouvé sur une plate forme off-shore :
– M. [C] à 18h : « Salut [I], ils viennent de me demander si j’étais disponible pour rester jusqu’au 13 juillet, je leur ai dit oui mais que je te demandais confirmation. Rien de particulier à faire, je reste ici »
– M. [I] [F] à 18h13 : « oui oui pas de problème »
M. [C] à 18h17 : « D’accord je leur dis. Mais je suis vraiment là pour rien faire c’est fou. »
M. [I] [F] à 18h17 : « Si si tu prends des sous et ça c’est pas rien ».
Il résulte de la confrontation des éléments produits par les parties qu’il n’est pas établi que M. [C] a effectué des heures supplémentaires.
Sur le rappel de prime de vacances
M. [C] rappelle que les dispositions de l’article 31 de la convention collective qui stipule que « L’ensemble des salariés bénéficie d’une prime de vacances d’un montant au moins égal à 10% de la masse globale des indemnités de congés payés prévues par la convention collective de l’ensemble des salariés.
Toutes primes ou gratifications versées en cours d’année à divers titres et quelle qu’en soit la nature peuvent être considérées comme primes de vacances à conditions qu’elles soient au moins égales aux 10 % prévus à l’alinéa précédent et qu’une partie soit versée pendant la période située entre le 1 er mai et le 31 octobre ».
L’employeur produit en pièce n° 18 la totalité des fiches de paie de M. [C] pendant ses 20 mois d’activité, montrant qu’il a très régulièrement perçu des primes, y compris au cours de la période du 1er mai au 31 octobre de l’année 2017 et soutient qu’en vertu de l’alinéa 2 de l’article 31 précité, toutes ces primes et gratifications peuvent être considérées comme primes de vacances, d’autant plus qu’elles représentent un montant très supérieur aux 10 % prévus à l’alinéa 1 de cet article 31.
Or les sommes versées à M. [C] ne constituent pas des primes ou gratifications mais des indemnités de déplacement versées en exécution de l’annexe au contrat de travail de celui-ci : 30 euros nets/jour en Europe, 45 euros nets/jour autres pays et 80 euros nets/jour sur base de vie ou off-shore.
Concernant le calcul des sommes revenant à M. [C], il convient de se référer à l’attestation Pôle Emploi mentionnant une rémunération brute du 1er novembre 2016 à juin 2018 d’un montant de 36 327,44 euros, le montant de la prime de vacances s’élève donc à 10 de 3.632,74 soit 363,27 euros.
Le jugement sera amendé en ce sens.
Sur la prise d’acte de la rupture du contrat de travail
M. [C] a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier recommandé du 9 juillet 2018 distribué le 11 juillet 2018.
Il invoquait la problématique de la convention de forfait et le non paiement de ses heures supplémentaires dont il vient d’être constaté qu’aucune somme ne lui est due à ce titre.
Il conclut que «la prise d’acte résulte du comportement de son employeur qui l’a fait travailler un nombre d’heures très important, bien au-delà du contingent d’heures supplémentaires, en lui faisant croire qu’il était au forfait, sans le payer de manière adéquate». Or M. [C] considère comme temps de travail effectif ses temps de trajet et de présence sur le sites de la clientèle ce qui ne correspond pas à la définition qu’en donne l’article L 3121-1 du code du travail.
La prise d’acte produit en conséquence les effets d’une démission.
Sur le non respect des dispositions légales et conventionnelles et préjudice moral
M. [C] fait valoir que les dispositions conventionnelles relatives au forfait jour rappellent que :
« les salariés au forfait jour ne sont pas soumis aux durées légales maximales quotidiennes et hebdomadaires. Ils bénéficient d’un repos quotidien minimum de 11 heures consécutives et d’un repos hebdomadaire de 35 heures (24 heures + 11 heures) minimum consécutives.
L’effectivité du respect par le salarié de ces durées minimales de repos implique pour ce dernier une obligation de déconnexion des outils de communication à distance.
L’employeur veillera à mettre en place un outil de suivi pour assurer le respect des temps de repos quotidien et hebdomadaire du salarié.
Il s’assurera des dispositions nécessaires afin que le salarié ait la possibilité de se déconnecter des outils de communication à distance mis à sa disposition. »
« Conformément aux dispositions issues de la convention collective, le forfait annuel en jours s’accompagne d’un décompte des journées travaillées au moyen d’un suivi objectif, fiable et contradictoire mis en place par l’employeur.
L’employeur est tenu d’établir un document qui doit faire apparaître le nombre et la date des journées travaillées, ainsi que le positionnement et la qualification des jours non travaillés en repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre du respect du plafond de 218 jours.
Ce suivi est établi par le salarié sous le contrôle de l’employeur et il a pour objectif de concourir à préserver la santé du salarié. »
« Afin de garantir le droit à la santé, à la sécurité, au repos et à l’articulation vie professionnelle et vie privée, l’employeur du salarié ayant conclu une convention de forfait annuel en jours assure le suivi régulier de l’organisation du travail de l’intéressé, de sa charge de travail et de l’amplitude de ses journées de travail.
Cette amplitude et cette charge de travail devront permettre au-à la salarié-e de concilier vie professionnelle avec vie privée. »
« Afin de se conformer aux dispositions légales et veiller à la santé et la sécurité des salariés, l’employeur convoque au minimum 2 fois par an le salarié ainsi qu’en cas de difficulté inhabituelle, à un entretien individuel spécifique.
Au cours de ces entretiens seront évoquées la charge individuelle de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie privée et enfin la rémunération du salarié.
Lors de ces entretiens, le salarié et son employeur font le bilan sur les modalités d’organisation du travail du salarié, la durée des trajets professionnels, sa charge individuelle de travail, l’amplitude des journées de travail, l’état des jours non travaillés pris et non pris à la date des entretiens et l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Une liste indicative des éléments devant être abordés lors de ces entretiens est également transmise au salarié.
Au regard des constats effectués, le salarié et son-sa responsable hiérarchique arrêtent ensemble les mesures de prévention et de règlement des difficultés (lissage sur une plus grande période, répartition de la charge, etc.). Les solutions et mesures sont alors consignées dans le compte-rendu de ces entretiens annuels.
Le salarié et le responsable hiérarchique examinent si possible également à l’occasion de ces entretiens, la charge de travail prévisible sur la période à venir et les adaptations éventuellement nécessaires en termes d’organisation du travail. »
S’il est exact que la convention de forfait jour a été appliquée à tort par l’employeur, ce dernier n’était pas pour autant dispensé de s’assurer des conditions de travail du salarié dans les termes qui précèdent à défaut de contrôler les horaires réellement effectués par celui-ci.
M. [C] indique qu’il n’a jamais bénéficié d’un suivi de sa charge de travail ni d’aucun entretien individuel spécifique en lien avec son forfait jour.
La cour ne retiendra pas les développements de M. [C] sur l’importance des heures de travail accomplies étant rappelé qu’il persiste à assimiler à du temps de travail effectif des temps qui n’en sont pas.
Par contre, l’employeur sur lequel incombe la charge de la preuve, ne démontre pas avoir permis à son salarié de bénéficier des temps de pause et de repos tels que prévus par le code du travail.
En effet, les seuls documents à caractère commercial produits par la société intimée concernant ses relations avec ses clients sont insuffisants à démontrer le respect par l’employeur des dispositions concernant les temps de pause et de repos ainsi que les durées maximales de travail.
Par ailleurs M. [C] fait observer que la pièce n°19 de l’employeur est peu probante :
– la société note des volumes d’heure par jour sans en rapporter la preuve,
– elle a volontairement masqué en noir sur les feuille de temps des clients les temps d’attente imposés par le client et donc pleinement facturés pour pouvoir ensuite les enlever des jours travaillés et diminuer ainsi artificiellement son forfait, alors qu’il devait rester sur le site pour que ces journées soient justement pleinement facturées au client et ne pouvait donc pas vaquer à ses occupations personnelles ou rentrer chez lui,
– des jours qui figurent pourtant comme des jours travaillés sur les feuilles de temps signés des clients n’ont pourtant pas été reportés sur le tableau (ex. du 8 au 10 décembre 2017).
C’est à bon droit que les premiers juges ont alloué à l’appelant la somme de 1.500,00 à titre de dommages et intérêts à ce titre.
Sur le travail dissimulé
L’application à tort d’une convention de forfait en jours ne suffit pas à établir l’intention de l’employeur de se soustraire à ses obligations déclaratives.
Par ailleurs l’existence d’ heures supplémentaires n’ayant pas été reconnue, il ne peut être allégué en l’espèce un travail dissimulé.
La demande est en voie de rejet.
Sur la demande reconventionnelle de la société [F] Electric Field en paiement d’une somme de 19 372,27 euros en remboursement d’une facture téléphonique
La société [F] Electric Field produit aux débats la facture de consommation du téléphone portable de la société datée du 20 novembre 2017 et émanant de la société Bouygues Telecom Entreprise, produite en pièce numéro 7, montrant la consommation sur le téléphone portable confié à M. [C] portant le numéro [XXXXXXXX01] pour la période du 20 octobre 2017 au 19 novembre 2017. Ce dernier bénéficiait d’un forfait de base d’un coût de 81 euros HT par mois, qui lui permettait de disposer d’un volume de données de 2Go lors de ses déplacements à l’étranger, hors union européenne puisque la gratuité y est désormais acquise, outre un volume de conversations téléphoniques.
Le total des consommations téléphoniques s’élève à 19 372,27 euros HT dont la société demande le remboursement.
Or d’une part le salarié n’est civilement responsable vis-à-vis de son employeur qu’en cas de faute lourde qui suppose la démonstration d’une intention de nuire laquelle n’est pas rapportée en l’espèce, d’autre part il appartenait à l’employeur qui envoyait régulièrement son salarié en mission à l’étranger de le doter d’un appareil téléphonique de fonction bénéficiant d’un abonnement adapté à la situation ce qui n’était manifestement pas le cas en sorte que les conséquences des communications hors forfait doivent rester à la charge de l’employeur. Enfin, l’annexe au contrat de travail de M. [C] mentionnait expressément «téléphone inclus l’usage personnel» en sorte que l’employeur ne peut à présent reprocher à son salarié l’usage qu’il a fait de son téléphone.
L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en l’espèce.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort
Dit n’y avoir lieu de révoquer l’ordonnance de clôture du 19 août 2022 avec effet au 21 décembre 2022 et rejette les conclusions de M. [C] déposées le 16 janvier 2023 postérieurement à la clôture,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a condamné la Société [F] Electric Field à payer à M. [E] [C] les sommes de :
– 392 euros au titre de la prime de vacances
– 13 860,85 euros au titre des heures supplémentaires ou de compensation, en l’absence de récupération,
Statuant à nouveau des chefs réformés,
Déboute M. [C] de sa demande en paiement des heures supplémentaires,
Condamne la société [F] Electric Field à payer à M. [E] [C] la somme de 363,27 euros au titre de la prime de vacances.
Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [C] aux dépens d’appel.
Arrêt signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, et par Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT