14 juin 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
21/02778
COUR D’APPEL
DE VERSAILLES
19e chambre
Prud’Hommes
Minute n°
N° RG 21/02778 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UX3J
AFFAIRE : [E] C/ S.A.S. RX FRANCE,
ORDONNANCE D’INCIDENT
prononcée le QUATORZE JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,
par Madame Laure TOUTENU, conseiller de la mise en état de la 19e chambre, avons rendu l’ordonnance suivante, après que la cause en a été débattue en notre audience, le douze mai deux mille vingt trois,
assistée de Madame Dévi POUNIANDY, Greffier,
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DANS L’AFFAIRE ENTRE :
Monsieur [S] [E]
[Adresse 1]
[Adresse 1] – France
Représentant : Me [P], Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS
APPELANT
C/
S.A.S. RX FRANCE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Bertrand MERVILLE de la SCP LA GARANDERIE AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0487 – N° du dossier 11157
INTIMEE
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Expéditions exécutoires délivrées aux avocats le —————
EXPOSE DU LITIGE
M. [S] [E] a été engagé par la société Reed Midem suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 27 juin 2005 en qualité de directeur stratégie innovation business développement, coefficient 270, position 3.3, avec le statut de cadre.
La relation de travail était régie par la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils, sociétés de conseil, dite Syntec.
M. [E] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 18 février 2019.
Par lettre du 26 février 2019, l’employeur a licencié le salarié pour insuffisance professionnelle.
Contestant son licenciement, le 9 juillet 2019 M. [E] a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin d’obtenir la condamnation de la société Reed Midem au paiement de dommages et intérêts pour licenciement nul, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse et de diverses sommes au titre de l’exécution et de la rupture du contrat de travail.
La société RX France est venue aux droits de la société Reed Midem par voie de fusion absorption le 1er janvier 2021.
Par jugement en date du 1er juillet 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a:
– jugé que le licenciement de M. [E] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– condamné la société Reed Midem à lui payer les sommes suivantes :
* 180 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 4 921,8 euros à titre de rappel de congés payés,
* 4 583,85 euros à titre de rappel de variable,
* 458,38 euros au titre des congés payés afférents,
* 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– l’intérêt légal sur le tout à compter du prononcé à compter de la saisine s’agissant des créances salariales avec capitalisation en application de l’article 1154 du code civil, et à dater du prononcé du présent jugement s’agissant des dommages-intérêts,
– ordonné à la société Reed Midem l’exécution provisoire de droit,
– ordonné d’office à la société Reed Midem le remboursement aux organismes concernés des indemnités chômage versées à M. [E] à hauteur de 6 mois,
– condamné la société Reed Midem aux entiers frais et dépens de la présente instance et au paiement des éventuelles sommes retenues par l’huissier instrumentaire en cas d’exécution forcée du présent jugement.
Le 23 septembre 2021, M. [E] a interjeté appel à l’encontre de ce jugement.
Par conclusions d’incident signifiées par voie électronique le 10 mai 2023, la société RX France, demande à la cour de :
– en tout état de cause, écarter l’attestation de M. [Z],
– ordonner le rejet des conclusions numéros 2, 3 et 4 de M. [E] et bordereaux liés,
Subsidiairement,
fixer un nouveau calendrier de procédure faisant injonction à M. [E] de régulariser ses écritures au fond sous un mois à compter de la décision du juge de la mise en état,
octroyer à la société un délai d’un mois à compter de la notification par RPVA des nouvelles conclusions de M. [E] pour compléter, elle-même, si elle l’estime nécessaire, de nouvelles conclusions,
fixer une date de clôture,
fixer une date d’audience au fond sous forme collégiale.
Par conclusions d’incident signifiées par voie électronique le 28 avril 2023, M. [E] demande à la cour de :
A titre principal
– rappeler que la clôture de la mise en état est intervenue le 11 avril 2023,
– rejeter les conclusions n°2 de la société ainsi que ses nouvelles pièces 31 et 32 transmises le
7 avril 2023, la Cour statuant au vu des conclusions n°1 déposées par la société RX France le 18 mars 2022,
– déclarer recevables ses conclusions n°3 (transmises le 23 mars 2023 dans le RPVA) qui reprennent les conclusions n°2 avec le simple ajout de la demande relative aux congés payés,
– autoriser la correction de l’erreur de plume sur le bordereau.
A titre subsidiaire
– rappeler que la clôture de la mise en état est intervenue le 11 avril 2023 ,
– déclarer recevables les conclusions n°4, la pièce n°115 et le bordereau actualisé (transmis le 10 avril 2023 dans le RPVA),
– déclarer recevables les conclusions n°2 et les pièces 31 et 32 de la société (transmises le 7 avril
2023).
A titre infiniment subsidiaire
– fixer une nouvelle date de clôture,
– déclarer recevables les conclusions n°4, la pièce n°115, le bordereau actualisé (transmis le 10 avril 2023),
– déclarer recevables les conclusions n°2 et les pièces 31 et 32 de la société (transmises le 7 avril 2023),
– interdire tout nouvel échange d’écritures afin d’éviter de voir la société RX France poursuivre ses man’uvres dilatoires.
En tout état de cause
– constater que les pièces 113 et 114 ont été régulièrement transmises en temps utile (le 13 février 2023 avec les conclusions n°2), et en conséquence les déclarer recevables,
– fixer une date pour une audience de plaidoirie,
– rejeter toutes les demandes de la société RX France.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIVATION
Sur la demande de voir écarter l’attestation de M. [B]
L’employeur demande au salarié d’écarter l’attestation de M. [U] puisque d’une part, ce dernier a demandé que son témoignage ne figure pas dans le dossier et que d’autre part, la communication de cette pièce ne respecte pas les dispositions de l’article 768 du code de procédure civile.
Le salarié fait valoir que le témoin ne s’est manifesté que tardivement avant la clôture et qu’il a fait l’objet de pressions évidentes de l’employeur et de son conseil, alors que la transaction qu’il a conclue ne l’oblige pas à renoncer à son droit fondamental à témoigner devant un tribunal. Il précise que la pièce est numérotée et expressément visée dans les conclusions. Il soutient que l’avocat n’a pas d’obligation déontologique de retirer le témoignage.
En application des dispositions de l’article L. 1121-1 du code du travail, un salarié a la liberté de témoigner en justice, sous réserve de l’abus.
En l’espèce, M. [U], a rédigé une attestation le 29 juin 2022 produite régulièrement aux débats par M. [E].
Peu avant la date de clôture devant la cour initialement prévue le 11 avril 2023, M. [U] a écrit au conseil de M. [E] les 3 et 7 avril 2023 ainsi qu’au magistrat aux fins de retrait de son attestation des débats, sans toutefois revenir sur l’authenticité des propos tenus dans cette attestation et sans expliquer le motif de cette demande tardive, autrement que par des ‘raisons personnelles’.
Ainsi, l’attestation a été régulièrement communiquée à l’employeur lors de la procédure et le témoin n’invoque pas de difficulté dans la véracité des propos tenus.
Par ailleurs, aucune obligation déontologique n’impose au conseil de retirer une pièce qui a été régulièrement communiquée.
En outre, l’attestation, pièce numérotée 113, est bien visée dans les conclusions de M. [E] pages 5 et 52 des conclusions n°2 contrairement aux allégations de l’employeur, le bordereau comportant effectivement une erreur de plume qui a été corrigée lors de la transmission des conclusions n°4 et d’un nouveau bordereau.
Par conséquent, la demande de voir écarter l’attestation de M. [U] des débats doit être rejetée, celle-ci n’étant pas fondée.
Sur la recevabilité des conclusions et pièces
L’employeur a conclu le 7 avril 2023, soit peu avant la date initialement prévue pour la clôture le 11 avril 2023.
Le salarié n’est pas fondé à solliciter le rejet des conclusions ainsi que des pièces 31 et 32 transmises le 7 avril 2023 en vertu du principe du contradictoire alors qu’il en a pris connaissance et a eu le temps de répliquer à nouveau le 10 avril 2023.
Par conséquent, les conclusions n°2 de l’employeur transmises le 7 avril 2023 et les pièces 31 et 32 de la liste de pièces transmises le 7 avril 2023 doivent être déclarées recevables, de même que les conclusions n°2, 3 et 4 du salarié transmises les 13 février 2023, 23 mars 2023 et 10 avril 2023 et les pièces figurant au bordereau actualisé transmis le 10 avril 2023.
Sur les autres demandes
L’affaire est renvoyée à la mise en état, il n’y a pas lieu de fixer par la présente ordonnance un nouveau calendrier de procédure ou de fixer de nouvelles dates de clôture et d’audience de plaidoirie.
La société RX France succombant à la présente instance, sera condamnée aux dépens de l’incident.
PAR CES MOTIFS
Le conseiller de la mise en état statuant par ordonnance contradictoire,
Constate que la mise en état n’a pas fait l’objet d’une ordonnance de clôture,
Rejette la demande de voir écarter des débats l’attestation de M. [U] formée par la société RX France,
Rejette la demande de voir écarter des débats les conclusions n°2, 3 et 4 de M. [S] [E] et bordereaux liés formée par la société RX France,
Déclare recevables les conclusions n°2, 3 et 4 de M. [S] [E] transmises les 13 février 2023, 23 mars 2023 et 10 avril 2023 et les pièces figurant au bordereau actualisé transmis le 10 avril 2023,
Déclare recevables les conclusions n°2, les pièces 31 et 32 de la liste de pièces de la société RX France transmises le 7 avril 2023,
Renvoie l’affaire à la mise en état,
Condamne la société RX France aux dépens de l’incident,
Le greffier, Le conseiller de la mise en état