COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
21e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 13 OCTOBRE 2022
N° RG 20/01035 – N° Portalis DBV3-V-B7E-T3RM
AFFAIRE :
Société GIE MC2M UES GROUPE MARIE CLAIRE
C/
[D] [J]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 12 Mars 2020 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT
N° Chambre :
N° Section : E
N° RG : F 17/01255
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Franck LAFON
Me Yves PAUTTE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TREIZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX, après prorogation du SIX OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX, les parties en ayant été avisées.
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Société GIE MC2M UES GROUPE MARIE CLAIRE
N° SIRET : 499 806 701
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Gwenaëlle ARTUR de la SCP CABINET ASTON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Représentant : Me Franck LAFON, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618
APPELANTE
****************
Madame [D] [J]
née le 14 Décembre 1964 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Yves PAUTTE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0911
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 28 Juin 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,
Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,
Madame Odile CRIQ, Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU,
FAITS ET PROCÉDURE
Suivant contrat de travail à durée indéterminée, Mme [J] a été engagée à compter du 1er février 2010 en qualité de ‘Directrice internet Commercial France et International’, qualification IC, position 3.1 coefficient 170 de la convention collective des bureaux d’étude techniques dite Syntec, par le groupement d’intérêt économique MC2M.
En 2015, le groupe Marie-Claire a décidé une refonte de son modèle économique, suite aux conclusions de l’audit Greene 6, dans un contexte difficile de la régie publicitaire papier et la fusion de la Régie digitale avec la régie Papier du Groupe.
Convoquée le 3 janvier 2017 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 11 janvier suivant, Mme [J] a été licenciée par lettre datée du 16 janvier 2017 énonçant une cause réelle et sérieuse.
Se plaignant d’un harcèlement moral et contestant son licenciement, Mme [J] a saisi, le 22 septembre 2017, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt aux fins d’entendre juger le licenciement nul et subsidiairement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.
La société s’est opposée aux demandes de la requérante et a sollicité sa condamnation au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement rendu le 12 mars 2020, notifié le 12 mai 2020, le conseil a statué comme suit :
Dit et juge que le licenciement n’est pas nul pour cause de harcèlement moral et qu’il n’est pas conséquent à l’exécution de mauvaise foi du contrat de travail,
Dit et juge que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
Dit et juge que le licenciement n’a pas de caractère vexatoire,
Dit et juge qu’il n’y a pas eu de préjudice moral,
Dit et juge qu’il y a eu un préjudice économique,
Dit et juge qu’il n’y a pas eu atteinte portée aux droits de la défense en privant le salarié de la faculté d’accéder aux documents indispensables pour contester les faits motivant le licenciement,
Dit et juge qu’il n’y a pas sous classement du poste et qu’il n’y a pas lieu à expertise,
Dit et juge qu’il n’y a pas absence de formation en cours de contrat,
Dit et juge qu’il n’y a pas lieu à rappel de salaire au titre du 4 ème mois de préavis,
Dit et juge qu’il y a lieu de payer une indemnité compensatrice de congés payés,
Dit et juge qu’il y a lieu à rembourser les frais irrépétibles au titre de la présente action.
Condamne en conséquence la société à payer à Mme [J] :
– 140 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice économique,
– 3 880,62 euros à titre de rappel de salaire à titre de rémunération variable au cours du préavis,
– 591,49 euros à titre d’indemnité compensatrice de jours de RTT,
– 2 295,13 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,
– 1 248 euros à titre de remboursement de frais engagés sur le véhicule de fonction,
– 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Ordonne à la société de remettre une attestation Pôle Emploi rectifiée, un certificat de travail rectifié, un solde de tout compte rectifié et un bulletin de paie final rectifié conformes aux dispositions du présent jugement sous astreinte de 250 euros par semaine à compter du 15 ème jour suivant la mise à disposition.
Condamne la société à payer 6 mois de salaire arrondis à 66 000 euros à Pôle Emploi.
Reçoit la société en sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’en déboute,
Met les éventuels dépens à la charge de la société.
Le 28 mai 2020, la société GIE MC2M UES Groupe Marie Claire a relevé appel de cette décision par voie électronique.
Par ordonnance rendue le 15 juin 2022, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 28 juin 2022.
‘ Aux termes de ses dernières conclusions, remises au greffe le 14 juin 2022, la société GIE MC2M demande à la cour d’infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a dit et jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse, dit et jugé qu’il y a un préjudice économique, dit et jugé qu’il y a lieu à rappel de salaire pour rémunération variable en cours de préavis, dit et jugé qu’il y a lieu de payer une indemnité de jours de RTT, dit et jugé qu’il y a lieu de payer une indemnité compensatrice de congés payés, dit et jugé qu’il y a lieu de rembourser les frais engagés sur le véhicule de fonction, dit et jugé qu’il y a lieu de rembourser les frais irrépétibles, et l’a condamnée à payer à Mme [J] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et à Pôle-emploi 6 mois de salaires arrondis à 66 000 euros, et statuant à nouveau, de :
Juger que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
Débouter en conséquence Mme [J] de l’intégralité de ses demandes,
Confirmer le jugement de première instance pour le surplus,
Condamner Mme [J] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Franck Lafon, Avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
‘ Selon ses dernières conclusions notifiées le 19 mai 2022, Mme [J] demande à la cour de :
Dire et juger le licenciement nul pour cause de harcèlement moral,
Condamner le GIE MC2M à lui payer les sommes de 25 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour absence de prévention des faits de harcèlement, outre 300 000 euros, à titre d’indemnité réparant la rupture du contrat de travail sur le fondement de l’article L. 1152-3 du code du travail consécutive au harcèlement moral de 2015 à 2017,
Subsidiairement et si le conseil ne retenait pas le harcèlement moral 300 000 euros, à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article L. 1222-1 du code du travail manquement à l’exécution de bonne foi du contrat de travail,
Très subsidiairement et si le conseil ne retenait pas par extraordinaire ce manquement,
Dire et juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et par voie de conséquence allouer 300 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Dire et juger que le licenciement a un caractère vexatoire et par voie de conséquence allouer 60 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour conditions vexatoires de licenciement,
Dire et juger qu’il y a eu un préjudice moral, et par voie de conséquence allouer 60 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
Dire et juger qu’il y a eu un préjudice économique et par voie de conséquence allouer 60 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour préjudice économique,
Dire et juger qu’il y a eu atteinte portée aux droits de la défense et par voie de conséquence allouer 15 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour atteinte portée aux droits de la défense en privant le salarié de la faculté d’accéder aux documents indispensables pour contester les faits motivant le licenciement,
Dire et juger qu’il y a eu sous classement du poste et par voie de conséquence allouer 20 000 euros, à titre de dommages et intérêts liés au sous classement du poste,
Dire et juger qu’il y a absence de formation et par voie de conséquence allouer 5 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour absence de formation en cours de contrat,
Dire et juger qu’il y a lieu à rappel de salaire pour rémunération variable en cours de préavis et par voie de conséquence allouer 3 880,62 euros, rappel de salaire correspondant à la rémunération variable en cours de préavis,
Dire et juger qu’il y a lieu de payer une indemnité compensatrice de jours de RTT et par voie de conséquence allouer 591,49 euros, à titre d’indemnité compensatrice de congés RTT (solde),
Dire et juger qu’il y a lieu de payer une indemnité compensatrice de congés payés et par voie de conséquence allouer 3 034,15 euros, à titre d’indemnité compensatrice de congés payés (solde),
Dire et juger qu’il y a lieu de rembourser les frais engagés sur le véhicule de fonction et par voie de conséquence allouer 1 248 euros, à titre de remboursement des frais engagés /véhicule de fonction,
Dire et juger qu’il y a lieu de rembourser les frais irrépétibles au titre des actions de première instance et d’appel et allouer par voie de conséquence 8 000 euros, en remboursement des frais irrépétibles, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Ordonner à Marie-Claire de lui remettre, sous astreinte de 250 euros, par jour de retard, et par pièces, à compter de la mise à disposition de l’arrêt de la Cour, ses bulletins de paie rectifiés et conformes aux décisions de l’arrêt (de janvier à mai 2017, décembre 2017), l’attestation employeur destinée à Pôle Emploi rectifiée, son solde de tout compte rectifié, le courrier de poste et/ou avenant à son contrat de travail précisant son coefficient et définition de poste correspondant à ses tâches de 2015 à 2016 et le certificat de travail rectifié,
Ordonner une expertise, du fait d’un sous classement de la salariée,
Condamner le GIE MC2M aux entiers dépens et Intérêt légal à compter de la date de la réception de la convocation devant le Bureau de Conciliation, en application de l’article 1153 du code civil.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
MOTIFS
Il est constant que dans un ‘contexte économique difficile de la régie publicitaire et notamment un marché du digital qui progressait sur des leviers de croissance non exploités’, ainsi que le qualifie la société, la direction a décidé en 2015 de rapprocher la régie digitale et la régie print dite GMC.
Pour accompagner cette réorganisation la société justifie avoir mandaté le cabinet de conseils Green6 Partners jusqu’en juin 2015, cet intervenant ayant notamment identifié diverses actions à mener en concertation avec les membres de la direction, Mme [J] étant associée aux réunions de travail, ainsi qu’il ressort de la note établie par ce cabinet le 2 mars 2015 (pièce n° 10 de l’appelant), le prestataire signalant aux membres de la direction (M. [I] directeur-général délégué, M. [R] directeur digital, Mme [H], Directrice de la régie et Mme [Y], directrice des ressources humaines) dans un message adressé le 10 décembre 2014, faisant un point d’étape, plusieurs points d’attention dont le suivant : ‘le cadrage des rôles et missions de [D] ([J]) dans ses nouvelles fonctions […], une ‘guerre de pouvoir possible au sein de la régie à bien contrer carrer’, ‘négo de sa Rem à mettre sous contrôle’ et ‘fiche de poste à caler asap’ (Pièce n°9 de la société appelante)
Au mois de mai 2015, la direction générale réunissait les deux services lesquels déménageaient au 6ème étage.
Dans le cadre de cette réorganisation, il était confié à Mme [J], qui ne dirigeait jusqu’alors que la régie web et celle du magazine Famili, la direction des six pôles suivants : Digital, Parental, OPS (print et digital), Brand Publishing, Développement et Diversification, et Production. (pièce n°42 de la société appelante)
La salariée était placée sous l’autorité de Mme [XB] [H], directrice de la régie, qui supervisait en outre l’activité de trois services ‘cible’, ‘marques’ et ‘développement’.
I – Sur l’atteinte portée aux droits de la défense :
Mme [J] fait grief à l’employeur de s’être empressé de la dispenser d’activité dès la convocation à un entretien préalable de licenciement, pour l’éloigner et lui retirer les codes et accès à son outil de travail via son ordinateur, puis d’avoir refusé de lui communiquer son dossier professionnel et son dossier personnel.
Elle ne justifie avoir sollicité, dans le cadre de la présente instance, que la communication du Livre des entrées et sorties du personnel depuis le 1er février 2002 et les dossiers de ses supérieures, Mmes [H] et [O] (contrat de travail, définition de poste, lettre de licenciement et bulletins de salaire).
Il n’est pas établi que l’employeur aurait refusé de lui communiquer ses dossiers professionnel et personnel, ni sa messagerie professionnelle et qu’elle aurait ainsi porté atteinte aux droits de la défense.
Pour le surplus, il appartient au juge de tirer les conséquences qu’il estime utile de l’abstention de l’employeur de communiquer les motifs du licenciement de Mme [H], lequel a précédé de quelques mois celui de Mme [J], dans le contexte invoqué par le GIE d’un échec de la mise en oeuvre de la fusion des régies ‘print’ et ‘web’, dont la responsabilité était confiée à la supérieure hiérarchique de la salariée.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a déboutée sur ce point.
II – Sur le sous classement de son poste :
Mme [J], qui reproche à l’employeur de l’avoir maintenue pendant toute la relation contractuelle au coefficient 170 de la grille de la convention collective Syntec, se plaint d’un ‘sous classement’ et sollicite une mesure d’expertise afin que soit évalué son préjudice à ce titre, ainsi que le paiement d’une indemnité à ce titre, évaluée à 18 000 euros dans le corps de ses écritures, mais portée à 20 000 euros au dispositif de ses conclusions.
Elle fait valoir que son coefficient ne correspondait plus aux tâches et responsabilités qui lui ont été confiées en particulier depuis 2014 et encore plus à compter de 2015, ce qui n’a pas été sans incidence, sur le montant de sa rémunération, inférieure à celle de ses homologues, notamment masculins, et la pénalise par ailleurs dans sa recherche d’emploi en l’absence de courrier ou d’avenant à son contrat de travail définissant les périmètres et fonctions qu’elle occupait, sachant que ces documents sont régulièrement demandés par les cabinets de recrutement.
La société appelante s’oppose à cette réclamation.
Rappel fait que la qualification d’un salarié se détermine relativement aux fonctions réellement exercées par lui, la charge de la preuve incombe en la matière au salarié qui sollicite un repositionnement conventionnel, dont il peut être relevé en l’espèce qu’il n’est pas associé à une demande de rappel de salaire fondée sur la rémunération minimale garantie.
En l’espèce, la position 3.1 coefficient 170 à laquelle était classée la salariée correspond, selon la grille conventionnelle, aux emplois d’ingénieurs ou cadres placés généralement sous les ordres d’un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en oeuvre non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer toutefois, dans leurs fonctions, une responsabilité complète et permanente qui revient en fait à leur chef. Cette position emporte des initiatives et responsabilités sous les ordres d’un directeur-général ou d’un directeur auquel il rend compte et une position de commandement.
La salariée ne précise pas à quel niveau relèverait les fonctions qu’elle exerçait concrètement au dernier état de la relation contractuelle.
Rappel fait que le juge n’a pas à pallier la carence des parties dans l’administration de la preuve et encore moins celle de déterminer la portée de leur réclamation, à savoir en l’espèce à quelle position de la grille Mme [J] considère qu’elle aurait dû être classée, les demandes d’expertise et en paiement de dommages-intérêts formées de ce chef seront rejetées.
III – Sur la formation :
Selon l’article L. 6321-1 du code du travail, dans sa version en vigueur depuis le 1er mai 2008, l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille notamment au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.
Certes, l’employeur justifie que Mme [J] a suivi une formation en stratégie digitale qui s’est déroulée les 28 août et 16 octobre 2014.
Toutefois, alors que Mme [J] s’est vu confier de nouvelles responsabilités à l’occasion de la réorganisation de la régie impliquant notamment le management d’une quarantaine de collaborateurs, il n’est pas démontré par la société appelante, hormis l’accompagnement par le cabinet de conseil Greene 6 dont a bénéficié, non pas spécifiquement la salariée, mais le groupement dans les premiers mois suivants la mise en oeuvre de la réorganisation, une formation adaptée à l’évolution de ses fonctions.
L’objection élevée par la société intimée, selon laquelle la salariée n’aurait jamais manifesté l’intention de suivre une formation est inopérante.
En l’état de ces éléments et au regard de l’évolution de ses fonctions, l’employeur ne justifie pas avoir pleinement satisfait à son obligation de formation.
Par suite, le jugement sera infirmé sur ce point et le préjudice subi par la salariée réparé par l’allocation de la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts.
IV – Sur le harcèlement moral :
Mme [J] énonce avoir subi à compter d’octobre 2015 une dégradation de ses conditions de travail ayant eu une incidence sur son état de santé, imputable à sa responsable hiérarchique, Mme [H], qui a exercé sur elle un harcèlement moral et psychologique et qui l’a isolée du directeur digital, M. [K] [R], avec lequel Mme [H] était en conflit, ainsi qu’avec M. [C] [I], directeur général délégué. Elle ajoute s’être ainsi trouvée dans une triangulaire subissant les luttes de pouvoir, d’égo et de périmètre entre 2 Directeurs Généraux (MM. [R] et [I]) et la directrice de la régie (Mme [H]), risque que le cabinet de conseils Greene 6 avait envisagé dès 2014 dans la perspective de la réorganisation de la régie. Elle ajoute que cette situation a eu un impact non seulement sur son état de santé, qui s’est dégradé, mais également sur ses équipes qui se sont désintégrées générant de nombreux départs, un turn-over important face aux tensions et manque de visibilité sur la stratégie du Groupe et ses investissements pour garder le digital au niveau.
La société réfute tout harcèlement, soulignant notamment que la salariée n’en a fait nullement état dans sa lettre de contestation de son licenciement en date du 2 mars 2017. La société appelante plaide que Mme [J], promue dans le cadre de cette nouvelle organisation ‘directrice commerciale France et international’, s’est avérée incapable, malgré l’accompagnement dont elle a bénéficié, de tenir son rôle ce qui s’est traduit par un management clanique et une désintégration de ses équipes, ce qui a paralysé l’activité et conduit à une contre-performance du chiffre d’affaires des OPS. Elle considère que l’entrave dans l’exercice de ses fonctions, la pression psychologique et l’attitude agressive de Mme [H] à son égard, ne reposent que sur des attestations rédigées a posteriori, et lui oppose l’appréciation de sa supérieure qui faisait état non pas d’un problème d’entente entre elles, mais d’envergure et d’implication de Mme [J] dans sa fonction de directrice commerciale, et qu’en définitive, il ne s’agit que de difficultés relationnelles liées à un manque de compétence sur la stratégie à mener qui a entraîné des luttes d’influence nocives au sein du service.
En application des articles L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Selon les dispositions de l’article L. 1154-1 du code du travail, dans ses versions applicables au litige, à savoir antérieure et postérieure à la réforme de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, en cas de litige, lorsque le salarié établit des faits, ou présente des éléments de fait, constituant selon lui, un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer ou laisse supposer l’existence d’un harcèlement et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Plusieurs éléments illustrent, selon l’intimée, le harcèlement dont elle se plaint, qu’elle relate dans ses conclusions dans les termes suivants :
1 – Pressions de Mme [H] sur le chiffre d’affaires du bimédia, lui faisant refaire des tableaux de reporting, en formulant de nouvelles exigences toujours plus fortes, en l’affectant à des tâches inutiles et humiliantes comme comptabiliser l’ensemble des espaces possibles de tous les sites web, qui dépendait du parcours de l’internaute en sachant qu’elle ne disposait pas des outils, ni des ressources indispensables pour la récupération de ce type de données, véhiculant une mauvaise image du service en interne et auprès du marché ; exigeant et imposant encore une nouvelle organisation au sein du service OPS en avril 2016 ne répondant à aucune logique, ni stratégie.
La seule attestation de M. [U], délégué du personnel, qui exerçait les fonctions de responsable du pôle base de données, visée par Mme [J] dans ses conclusions à titre de justificatif, aux termes de laquelle ce témoin indique que lorsqu’il ‘intervenait sur les outils informatiques de Mme [J] dans son bureau, il avait découvert les multiples tableaux Xls que Mme [H] exigeait, affectant Mme [J] à des tâches inutiles et humiliantes, comme comptabiliser l’ensemble des espaces possibles sur tous nos sites web – Mme [H] ne comprenait pas que cela dépendait du parcours de l’internaute […]’ objective que la salariée produisait ce type de documents. (pièce n° 122 de l’intimée)
L’imprécision de cette attestation, qui ne fait nullement état d’instructions que la supérieure hiérarchique aurait effectivement données à Mme [J] en ce sens, ne permet pas d’objectiver que la salariée accomplissait de telles tâches qualifiées d’inutiles et humiliantes sur instructions de sa supérieure hiérarchique.
Alors que l’employeur verse aux débats des messages de Mme [H] de recadrage de ce qu’elle attendait des interventions de sa collaboratrice (pièce n°34, 35 et 17 de l’appelante) par lesquels Mme [H] pouvait lui demander de faire des présentations plus synthétiques, ‘trop d’informations nuit à une compréhension stratégique’, l’intimée n’établit pas le grief allégué selon lequel il était exigé d’elle des reportings inutiles et humiliants.
En revanche, il est établi par le témoignage de Mme [VD] que Mme [H] a exigé une nouvelle organisation du services des OPS en avril 2016. Ce dernier fait, qui sera développé ci-après, est établi.
2 – Mme [H] s’acharne sur (elle), qui, épuisée, de devoir tout justifier ou expliquer a développé un zona en mai 2016, formulant des critiques de plus en plus dures, suivi de harcèlement oral continu et du retrait de ses responsabilités, à dessein de lui faire perdre son autonomie dans la prise de décision budgétaire, (plan d’action, développement),
Hormis les critiques orales (cf. Infra point n°3) et le développement du zona (cf infra point n°6), les allégations de la salariée quant à un retrait de ses responsabilités ne sont pas étayées ni justifiées.
3 – Mme [H] la contredit de façon systématique pour essayer de la ridiculiser jusqu’à l’humilier, lors de réunions plénières, en présence de l’ensemble de la régie ; […] elle fait l’objet des interventions et remarques méprisantes de Mme [H] publiques et répétées, ainsi que d’autres personnes’, et de propos qualifiés d’honteux par l’intimée : « tu n’es qu’une petite DCA, je n’ai pas à écouter tes propositions elles ne m’intéressent pas » ; sa supérieure lui interdit de communiquer oralement ou par écrit avec MM. [I] et [R], directeur délégué et directeur digital,
‘ M. [UM] atteste avoir été témoin des interventions et remarques méprisantes de Mme [H] publiques et répétées à l’égard de la salariée ou d’autres personnes, ‘tu n’es rien qu’une petite DCA’, ‘je n’ai pas à écouter tes propositions, elles ne m’intéressent pas’, et de ‘l’interdiction formelle qui lui était faite de communiquer avec MM. [I] et [R]’, le témoin affirmant, par ailleurs, que Mme [J] les protégeait du mieux qu’elle pouvait. (pièce n° 25 de l’intimée),
‘ Mme [N] certifie que ‘Mme [H] prenait un malin plaisir à contredire systématiquement
Mme [J] en essayant de la ridiculiser jusqu’à l’humilier publiquement lors de réunions plénières notamment lorsque l’ensemble de la régie était présente’.
‘ Après avoir longuement présenté la responsabilité de Mme [H] dans les modifications d’organisation intervenues en janvier 2016 (non remplacement de trois départs, arrêt des binômes print/web mis en place par Mme [J]), puis en avril 2016 au sein du service OPS, et les tentatives de Mme [J] de raisonner sa supérieure, décisions qui ont, selon cette collaboratrice, fragilisé ce service, Mme [VD], directrice de clientèle des OPS, atteste que de mai à juillet 2016, [D] a tenté de raisonner Mme [H] qui lui faisait des critiques de plus en plus dures, la harcelait oralement, ne lui laissait aucune autonomie dans la prise de décisions […] prenant un malin plaisir par exemple à (la) contredire systématiquement en essayant de la ridiculiser, jusqu’à l’humilier publiquement lors de réunions plénières notamment lorsque l’ensemble de la régie était présente.
‘ Mme [S], corrobore ces témoignages et déclare que ‘Mme [H] manquait de respect publiquement à l’égard de Mme [J] et de l’équipe. Elle instaurait une ambiance délétère et malsaine entre ses managers et critiquait systématiquement nos actions. J’ai été témoin lors des réunions hebdomadaires appelés ‘synergie’ dans son bureau. […] Mme [H] considérait ouvertement que l’équipe des OPS était incompétente ; elle n’avait aucune écoute face aux propositions de coordination print/web de Mme [J]. Pour le marketing de l’offre nous devions nous débrouiller sans ressources. Mme [J] subissait les humiliations en public ‘tu n’es qu’une petite DCA comme les autres’, ‘tu n’as qu’à me dire ce que je dois faire’, ‘le digital de ce groupe est affligeant, l’éditeur digital n’est pas à la hauteur’, ‘je t’interdis d’avoir le moindre contact avec [K] [R]’ – que le témoin présente comme l’ancien manager de Mme [J]. ‘Pendant plus de 6 mois j’ai personnellement constaté que Mme [J] pro-active, dynamique positive par nature et bienveillante avec ses équipes, maigrissait de jour en jour. Sous pression continue son état moral et physique m’a personnellement inquiété. Nous l’évoquions avec d’autres collaborateurs et je lui en ait personnellement fait part. […] Mme [J] est devenue le souffre-douleur de Mme [H] comme cela s’était déjà produit avec [W] [A].’
Ces témoignages concordants ne sont pas utilement critiqués par le GIE.
M. [G] [U] atteste également avoir personnellement constaté les humiliations constantes et publiques à l’égard de Mme [J] , le manque de respect de Mme [H] à l’égard de cette dernière devant ses équipes à l’occasion d’une intervention sur le matériel informatique (pièce n°122). Il atteste également avoir reçu en sa qualité de délégué du personnel, les doléances de l’ensemble des équipes du GIE MC2M, puis du groupe à compter de la fusion avec le groupe Marie-Claire, lesquelles évoquaient l’ambiance délétère que Mme [H] faisait régner au 6ème étage où étaient regroupées les équipes digitales.
Si l’employeur, qui critique la valeur probante de ce dernier témoignage, établit que ni M. [U], ni un autre délégué du personnel n’a fait remonter une quelconque alerte sur la période considérée sur les agissements de Mme [H], dans le contexte de pressions décrits par les témoins, cette seule abstention des délégués du personnel n’est pas de nature à retirer toute valeur probante à ce témoignage lequel est, du reste, corroboré par plusieurs collaborateurs qui travaillaient concrètement sous l’autorité de Mme [J].
De surcroît, l’intimée relève à juste titre que dans ses conclusions l’employeur indiquait que « c’est dans ces conditions que la société a dû faire appel au cabinet Stimulus pour bénéficier de l’accompagnement d’un partenaire expert, consécutifs aux multiples difficultés et dysfonctionnements identifiés au sein du service » et souligne que Mme [Y], directrice des ressources humaines, en réponse à la question ainsi posée par un membre du comité d’entreprise « quel est le sentiment de la DRH sur le rapport de Stimulus, y a-t-il un problème de crise au 6ème étage (Régie) ‘ », déclarait lors de la réunion du comité en date du 30 juin 2016 ceci : « c’est confirmé’ je n’ai jamais été dans le déni par rapport à ça. J’ai fait intervenir Stimulus pour qu’un tiers vienne le dire et le confirmer » – (pièce n°71).
Ce grief est établi.
4 – ‘Elle n’avait plus aucune liberté d’action en matière de nomination, d’affectation, et missions de ses collaborateurs’.
Outre le témoignage établi par Mme [HC], qui exerçait jusqu’en décembre 2015 les fonctions de ‘directrice de clientèle digitale’, qui atteste dans des termes généraux avoir constaté que ‘Mme [J] n’avait plus aucune liberté d’action, harcelée par des directives allant à l’encontre de notre activité’, la salariée verse aux débats celui rédigé par Mme [L], également ‘directrice de clientèle digitale’. Cette personne indique notamment que ‘la nouvelle organisation était décousue, les équipes ‘print’ étaient privilégiées, elles bénéficiaient de formations, elles avaient plus de liberté pour intervenir sur les OPS et le digital ce qui venait clairement cannibaliser notre travail, notre expertise n’était pas prise en considération et à aucun moment la direction n’a pris en compte les alertes des équipes de Mme [J]’ et déclare que ‘malgré les efforts et la volonté de la salariée pour défendre et protéger ses équipes, ses propositions étaient systématiquement refusées et qu’elle perdait au fil du temps toute liberté d’action’, le témoin concluant que ‘n’étant pas convaincue et en phase avec la stratégie digitale mise en place par la direction ([R]/[I] et [H])’ avoir quitté l’entreprise en décembre 2015 (pièce n° 28 de l’intimée).
En l’état de ces seuls éléments, il n’est pas justifié que la salariée a été privée de toute liberté d’action, mais que sa supérieure s’immisçait effectivement dans les responsabilités qui lui étaient en principe dévolues.
5 – sa supérieure lui impose 3 changements d’organisation en 1 an et demi ; créant une ambiance délétère et anxiogène en divisant les personnes entre elles, afin d’asseoir son pouvoir sur l’équipe.
Mme [VD], atteste que Mme [H] a exigé sans explication, ‘au moment où elles commençaient à prendre leur marques et assumer leurs responsabilités’ que Mme [J] stoppe les binômes print/digital mis en place par la salariée dans le cadre de la fusion. Elle indique que le ‘marketing de l’offre des OPS, créé par Mme [J] , a été détaché du service’ de sorte qu’elles n’avaient plus accès à cet outil indispensable au bon développement du service OPS’ et que Mme [H] a exigé une nouvelle organisation du service en avril 2016, dont le témoin affirme qu’ ‘elle ne répondait à aucune logique ni stratégie’, troisième organisation que Mme [J] a finalement mis en oeuvre en juillet après l’avoir faite valider par la direction. (Pièce n°24)
6 – elle travaillait sous la pression constante de Mme [H] qui profitait de son absence (zona) pour semer la discorde et installer une ambiance pernicieuse et toxique, en particulier auprès du service des opérations spéciales.
En l’état du message de Mme [N], en date du 1er août 2016, que la salariée vise dans ses conclusions (Pièce n°95), par lequel cette collaboratrice remercie l’évolution de poste qui lui est proposée, l’intimée établit qu’au cours d’une réunion de bouclage, le 3 juin précédent, à laquelle Mme [J] n’était pas présente, Mme [H] a tenu les propos suivants à l’égard du témoin : ‘votre travail c’est ça !’ et ce selon Mme [N] avec ‘un ton méprisant en pointant du doigt mon chemin de fer devant mes collègues’.
Seule cette intervention est établie à ce titre.
7 – Ce harcèlement moral a entraîné une dégradation de son état de santé.
Outre les témoignages de plusieurs de ses collègues, décrivant le dépérissement physique qu’ils indiquent avoir observé, Mme [J] communique divers éléments attestant de la dégradation de son état de santé au cours de la période litigieuse, sans que pour autant un lien objectif puisse être retenu entre la dégradation de ses conditions de travail dénoncée par la salariée et la dégradation de son état de santé, les éléments médicaux émanant de professionnels de santé n’ayant fait aucune constatation sur les conditions d’emploi de l’intéressée ; c’est ainsi que Mme [J] verse aux débats :
– des échanges de mails au sujet d’un zona qu’elle a développé en mai 2016 pour lequel elle ne souhaitait pas s’arrêter et qui conduira la direction à requérir qu’elle ne se présente pas aux bureaux, (pièce n°26 de l’appelante),
– le certificat de M. [GU], psychiatre qui atteste avoir vu pour la première fois Mme [J] le 6 juin 2016 (le 6 de 2016 surchargeant un le chiffre 7) à la demande de son médecin traitant et qu’ ‘elle présentait à cette consultation une grande souffrance morale et psychique, présentait un état dépressif sévère avec tristesse, pleurs angoisse, asthénie, troubles cognitifs’, […], ‘lui avoir prescrit un antidépresseur un somnifère et un anxiolythique’. Il ajoute que ‘lors des entretiens, Mme [J] lui parle uniquement des difficultés relationnelles avec sa hiérarchie de sa surcharge de travail pour expliquer son état psychique et qu’elle recevait des ordres contradictoires des trois managers dont elle dépendait’ […]. Il indique lui avoir prescrit un arrêt de travail du 6 au 16 juin 2016 pour souffrance au travail qu’elle a refusé d’envoyer à son employeur de peur de représailles […] Depuis janvier 2017 et son licenciement elle nécessite une prise en charge spécialisée […]’,
– l’avis de travail évoqué par le psychiatre du 6 au 16 juin 2016 non adressé à l’employeur,
– diverses ordonnances à compter du mois d’avril 2016 de Prazepam, Zolpidem, Lexomil, Stilonx qu’elle qualifie d’antidépresseurs.
Pris dans leur ensemble, les faits ci-avant identifiés comme établis, concordants, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement.
Certes, l’employeur communique quelques messages adressés par Mme [H] à Mme [J], au contenu professionnel et dépourvu de toute agressivité (pièce n° 11, 31, 33 et 26 de l’appelante) et relève que la salariée a pu exposer le 3 août 2016 dans le message adressé à la DRH, avoir eu ‘une belle opportunité extérieure mais avoir fait le choix de rester dans l’entreprise’, choix qui serait, selon l’appelante, contradictoire avec la situation de harcèlement dénoncée.
Si l’employeur établit l’insatisfaction éprouvée par Mme [H] relativement à la prestation de travail fournie par Mme [J] et les désaccords de fond entre les deux salariées pour parvenir à la fusion des deux régies, que Mme [J] a décrit dans sa note du 2 août 2017 comme ‘non pas comme un problème de personne entre elles mais plus un problème d’acceptation mutuelle sur les bonnes méthodes et les directives à mettre en place pour faire fonctionner cette fusion’, ces désaccords ne sauraient justifier objectivement le comportement irrespectueux et humiliant adopté par Mme [H] à l’égard notamment de sa subordonnée, lequel est décrit par plusieurs salariés ayant travaillé dans différents pôles placés sous la responsabilité de l’intimée, et participé de la ‘crise’ dont la directrice des ressources humaines devait concéder aux représentants du personnel avoir conscience en déclarant à réception du rapport Stimulus, ‘ c’est confirmé’ je n’ai jamais été dans le déni par rapport à ça. J’ai fait intervenir Stimulus pour qu’un tiers vienne le dire et le confirmer’.
De même si dans la note du 2 août la salariée ne dénonce pas expressément un harcèlement moral, elle y mentionne expressément le manque de respect, les réactions violentes et humiliantes de Mme [H] ‘j’ai un vrai problème de professionnalisme à ton égard de manager cassant et humiliant, mais surtout, tu ne suscites chez moi plus aucune admiration’, ‘tu n’a cessé de me rabaisser, de me faire douter de mes compétences […] précisant au passage que je n’étais qu’une petite DCA comme les autres et que je t’avais été imposée’, agressivité et propos déplacés réitérés que la salariée relèvera également dans sa lettre de contestation du licenciement, datée du 2 mars 2017.
Si la société considère qu’il ne s’agit pas « d’atteinte à sa dignité », ni d’une « stratégie s’acharnant sur Mme [J] », ni de « manque de respect », mais de simples difficultés relationnelles liées à un manque de compétence sur la stratégie à mener, qui a entraîné des luttes d’influence nocives au sein du service, l’employeur se borne à produire deux éléments pour tenter d’établir que la salariée aurait participé activement à ce que l’employeur présente comme une ‘guerre de tranchée’, à savoir un message de Mme [F], dont l’intimée précise qu’elle ne travaillait pas sous son autorité, qui évoque ‘un échange avec [D] qui m’a beaucoup surpris à la fois par sa virulence et par son ton agressif à (mon) égard’, et le message adressé par Mme [M] le 6 avril 2016 à M. [I], l’alertant sur le ‘fonctionnement des dossiers avec [D] car il y a des tensions qui ressortent’, la directrice marketing du groupe signalant au directeur-général délégué que s’agissant des offres que [E] a développées, [D] les démonte en disant que [E] n’a pas les dernières infos d'[K] ‘depuis qu’elle n’est plus au marketing digital, c’est à dire que notre organisation marketing ne marche pas’. Ces messages, rédigés par des salariées qui ne travaillaient pas au sein des services placés sous l’autorité de Mme [J], non contextualisés, n’objectivent pas la participation de l’intimée à une ‘guerre de tranchée’ ou ‘lutte d’influence’ qui l’aurait opposée à sa supérieure hiérarchique.
Si l’employeur fait valoir qu’il a été noté sur le compte-rendu de réunion du comité d’entreprise du 27 octobre 2016 qu’« en dépit des groupes de travail et l’intervention de Stimulus, les salariés se plaignent que l’attitude des managers n’a pas changé, le directeur-général délégué aurait même laissé entendre que le départ de la directrice exécutive de GMC Media augurait de changements importants et qu’il y aurait d’autres départs […] ils ont l’impression que le but de l’intervention de Stimulus était surtout de faire partir la directrice commerciale », la salariée qui relève que les managers visés ne sont pas cités, soutient qu’elle n’est pas concernée par ces propos lesquels concernaient la guerre que se livraient Mme [H] et MM. [I] et [R]. Elle verse aux débats près d’une dizaine d’attestations de collaborateurs attestant de manière concordante son rôle positif et pacificateur et qu’elle faisait le tampon entre ses équipes et Mme [H].
M. [U], délégué du personnel, atteste par ailleurs n’avoir jamais eu la moindre remarque ou plainte de la part des équipes de Mme [J] (digital, Ops, Brand et publishing) concernant ses méthodes de travail, bien au contraire, (elle) était un manager respecté, respectueux et bienveillant à l’égard de ses équipes qu’elle défendait, portant seule les dérives managériales de Mme [H] […].
Alors que Mme [J] avait connu de 2010 à 2015 une évolution professionnelle remarquable, attestant de la reconnaissance par l’employeur de ses qualités professionnelles, et qu’elle communique des témoignages concordants de plusieurs collaborateurs placés sous son autorité attestant de ses qualités professionnelles et humaines, faute pour l’employeur de justifier objectivement par des éléments étrangers à tout harcèlement, le comportement agressif et humiliant adopté de manière itérative par sa supérieure à l’égard de la salariée, devant ses équipes, et nonobstant le niveau hiérarchique élevé de cette dernière dans l’organisation du Groupement et les responsabilités de management qui lui étaient confiées, il sera jugé que le harcèlement moral dénoncé par la salariée est établi.
Le jugement sera infirmé de ce chef. Dans la mesure où il est établi que la direction des ressources humaines qui n’ignorait pas la ‘crise’ au sein des services de la régie, laquelle est notamment le fruit d’une dérive managériale imputable à Mme [H], ne justifie pas de mesure conservatoire prise avant le licenciement de Mme [H], prononcé courant septembre 2016, il sera jugé que l’employeur ne justifie pas avoir pris les mesures appropriées pour faire cesser une situation potentiellement source de souffrance au travail. Le préjudice en résultant pour la salariée sera réparé par l’allocation de la somme de 4 500 euros à titre de dommages-intérêts.
V – sur le licenciement
La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi libellée :
‘Suite à votre entretien avec [Z] [O]-[X] et moi-même, qui s’est tenu le 11 janvier 2017, et lors duquel vous étiez accompagnée de [V] [B], délégué du personnel, nous vous informons par la présente que nous avons décidé de vous licencier pour insuffisance professionnelle.
Vous avez été engagée le 1er février 2010 en qualité de Directrice Internet Commerciale France et International du GIE MC2M.
À ce titre, vous étiez notamment chargée d’encadrer et manager l’équipe commerciale de MC2M pour assurer l’atteinte d’objectifs, assurer les relations avec les autres services commerciaux du Groupe Marie Claire, assurer le reporting commercial.
En juillet 2015 a eu lieu l’intégration dans l’UES Marie Claire du GIE MC2M et de Magic Maman, et ainsi la fusion des régies commerciales print et web, permettant d’offrir une approche globale inédite aux annonceurs qui auraient désormais à faire à une seule et même équipe puissante et homogène d’interlocuteurs au sein du Groupe.
À la suite de cette fusion, et jusqu’à aujourd’hui, le rôle que vous deviez jouer était primordial dans la conduite de ce changement.
Par le rapprochement des équipes print et Web, vous deviez prendre la responsabilité du pilotage des OPS (opérations spéciales), la production, le pôle digital, le développement, la diversification, et le pôle parental, dans le but de vendre d’une seule voix auprès des clients.
Malheureusement, cette mission cruciale qui était la vôtre s’est soldée par un échec.
1/Un échec des réorganisations, au niveau humain et managérial
Une première réorganisation du pôle parental qui n’a pas porté ses fruits. Vous avez opéré une deuxième réorganisation de l’équipe GMC Creative, qui s’est soldée par un échec avec le service des OPS, délaissé et mis à l’écart des équipes digitales.
En effet, en septembre dernier, alors que les équipes print et digitale travaillaient à fusionner depuis un an, vous avez entrepris de replacer les natives des OPS print, au print, et les OPS digitales au digital sans les concerter, ni leur en expliquer les raisons.
A l’occasion de l’arrivée de la nouvelle Directrice Executive régie, cette dernière a rencontré tous les collaborateurs de la régie print et web.
Unanimement, les collaborateurs ont soulevé des dysfonctionnements majeurs en interne : aucune organisation et aucune collaboration entre les équipes digitales et les OPS, un dénigrement des équipes entre elles (les OPS sont vues par les équipes digitales comme ‘démodées’, ‘vieillissantes’, et les services digitaux sont vus par les OPS comme ‘inexpérimentés’).
Les services ne collaborent donc pas ensemble. Les OPS n’ont pu trouver leur élan puisque vous n’avez été à l’origine d’aucune réflexion pouvant déclencher une dynamique constructive dans ce service.
Par ailleurs, il apparaît que vous ne savez pas expliquer en quoi consistent les OPS alors que vous en êtes aussi la Directrice. Vous ne défendez que le digital, ce qui a eu pour conséquence un management clanique, excluant les OPS.
En effet, vous n’avez pas su intégrer la dimension globale des OPS et êtes restée axée sur le digital, alors même que cette fusion de la régie print et web avait pour but de créer une force globale inédite pour les annonceurs.
L’incompréhension de votre positionnement sur la stratégie digitale de l’éditeur a été néfaste à la réussite de la fusion et au bon fonctionnement de la régie. Vous avez naturellement véhiculé auprès de vos équipes une insatisfaction permanente et une ambiance contre productive, ce qui a eu pour effet de démotiver les collaborateurs.
A ce titre, les élus ont fait part de leur inquiétude sur des démissions et des arrêts de travail prolongés au sein de vos équipes digitales et OPS.
En définitive, votre management et votre incapacité à piloter l’équipe commerciale OPS fusionnée ont anéanti la qualité du travail et la cohésion des services entre eux.
Les équipes sont perdues, démobilisées, et les OPS ont le sentiment d’être mises sur la touche.
Cette situation paralyse l’activité et entrave le travail des collaborateurs qui sont démotivés et se sentent dévalorisés.
Ces dysfonctionnements ont eu pour conséquence directe une contre-performance du chiffre d’affaires sur 2016.
2/ la chute des résultats du réalisé des OPS (print + web) en 2016
Le réalisé 2016 est bien en dessous du réalisé 2015, avec 5,41 millions de chiffre d’affaires en 2015 contre 4,14 millions en 2016. Le print a accusé une baisse de -19% du CA et le web de -31,4%, soit une perte de – 25% du CA global sur 2016.
Cela s’explique en partie par l’insuffisance de rendez-vous commerciaux auprès des agences et annonceurs, votre absence de réseau personnel et votre engagement business très limité.
Enfin, nous déplorons votre présentation du budget 2017 à la Direction : vous n’étiez pas synthétique, êtes restée uniquement dans la critique quant aux équipes, au groupe, aux outils, sans assumer la responsabilité de ces résultats, ni proposer la mise en application de solutions.
À votre niveau de responsabilité, nous avons été très déçus de faire ce constat, et de voir que vous n’étiez pas à même de nous accompagner dans la dynamique cruciale de redéploiement de la régie.
Vos explications recueillies lors de l’entretien ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation.
L’ensemble de ces faits démontre une absence de résultats par rapport à ce que nous attendions d’un poste de Directrice commerciale, et caractérise un licenciement pour insuffisance professionnelle.
Votre préavis d’une durée de 3 mois débutera à la date de présentation de cette lettre, dont nous entendons vous dispenser’.
Par lettre en date du 2 mars 2017, Mme [J] a contesté le bien-fondé de son licenciement pour insuffisance en rappelant l’évolution professionnelle dont elle a bénéficié depuis son embauche. Elle y fait essentiellement valoir :
d’une part, que la nouvelle définition de son poste, aux termes de laquelle ses responsabilités ont été accrues (management de 40 personnes) sans qu’elle soit formée en conséquence, n’a pas donné lieu à l’établissement d’un avenant et la contraignait à devoir naviguer entre 2 managers, le directeur du digital et la directrice de la régie bi média,
de deuxième part, que la responsabilité de cette fusion avait été confiée à Mme [H] licenciée depuis lors, et non à elle-même,
de troisième part, qu’elle était placée sous l’autorité de trois managers en compétition et en opposition formulant au gré de leurs intérêts des demandes divergentes par mail, d’une responsable hiérarchique ‘qui partait dans tous les sens, changeant de discours et ses recommandations orales sans aucune stratégie écrite ni directive claire […] refusant de respecter et d’appliquer les recommandations de l’audit Greene 6″, la privant ainsi de toute autonomie,
de quatrième part, la présentation erronée faite par l’employeur des réorganisations du service OPS, Mme [H] lui ayant imposé en novembre 2015 une réorganisation qui n’est pas évoquée dans la lettre de licenciement, la 3ème et dernière réorganisation provisoire qui lui est reproché d’avoir mis en place en septembre 2016, lui ayant été imposée par sa supérieure hiérarchique,
de cinquième part, que la société, qui a licencié Mme [H], n’ignore rien de ‘son comportement agressif, suite à l’audit Stimulus, tant vis-à-vis d’ elle (Mme [J]) que de l’ensemble de ses collaborateurs’, lequel n’a pas été sans incidence sur le nombre de départs, d’abandon de poste pour burn-out, démissions, arrêts maladies prolongés du fait également de l’absence de stratégie et de directive claire de la part du Groupe,
et, enfin, qu’il ne pouvait lui être imputé une baisse du chiffre d’affaires des OPS en 2016 alors que les pages print liées aux OPS étaient demeurées sous la responsabilité directe de son ancienne responsable hiérarchique, les marges réalisées en 2016 par les centres de profit OPS placés sous sa seule responsabilité ayant quant à eux progressé.
En vertu de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Aux termes de l’article L. 1235-1 du même code, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.
Ainsi, l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
Selon l’article L. 1152-3 du code du travail ‘toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 est nulle.
GIE MC2M soutient que la salariée, en difficulté, s’est enfermée dans un système de clans et de luttes d’influence, situation qui a paralysé l’activité et entravé le travail des collaborateurs ce qui a conduit à une contre-performance du chiffre d’affaires des opérations spéciales en 2016.
Aucun élément probant de nature à étayer ce fonctionnement clanique n’est versé aux débats. Les propos anonymisés que Mme [O], qui a succédé à Mme [H], attribue à divers collaborateurs du service, n’est pas utilement conforté par l’attestation rédigée en ce sens par la nouvelle supérieure hiérarchique de Mme [J], le 7 janvier 2017, soit postérieurement à la convocation à l’entretien préalable de Mme [J], auquel elle participera en assistance de la représentante de l’employeur et au cours duquel, selon le compte-rendu de cet entretien établi par le conseiller du salarié, elle a assumé la responsabilité de l’engagement de la proédure de licenciement.
Ces propos rapportés sont formellement remis en question par les nombreux témoignages concordants établis par une dizaine de collaborateurs ayant travaillé sous l’autorité de Mme [J] au sein de différents services durant cette réorganisation, qui décrivent de manière concordante un management bienveillant et dynamique.
En outre et surtout, il ressort des attestations ci-avant analysées que les réorganisations des OPS de novembre 2015 et de juillet 2016 ont été imposées à la salariée par Mme [H] dans un contexte de turn-over et de recul des effectifs.
Si la salariée critique les résultats communiqués par l’employeur, lesquels sont toutefois authentifiés par le directeur financier qui en atteste, force est de constater que la salariée ne contestait pas la situation d’échec du service dans la correspondance qu’elle adressait à M. [P], directeur-général, le11 août 2016, sur le sujet des ‘possibilités d’amélioration des performances de la régie’, qu’elle structurait en deux parties ainsi libellée : 1 – ‘pourquoi cela ne fonctionne-t-il pas », 2 – ‘les solutions. Ce dont j’ai besoin pour que cela fonctionne’.
À la question ‘pourquoi cela ne fonctionne-t-il pas », la salariée faisait le constat d’un ‘marché difficile […] même si nous pourrions faire mieux’, d’une offre de qualité, ‘nous bénéficions de belles marques et de beaux sites, mais des points stratégiques restent à améliorer, soit la puissance de nos audiences, la vidéo, le programmatique, le mobile et une data propre est différenciante de celle de Nuggad’, mais soulignait des difficultés d’organisation : ‘il y a un mal être général, l’audit l’a confirmé ; le turn over le prouve. Les équipes sont démotivées. Les équipes print ont été formées au digital, certes sur une vente en mono marque, en silo, avec une pression sur le digital inutile, non organisée et destructrice de valeur. Il y a superposition des actions commerciales générant une perte de productivité et laissant percevoir notre désorganisation.
Les équipes web pensaient avoir l’appui du print pour entrer chez les annonceurs, mais cela n’a pas été fait. L’enrichissement mutuel n’a pas été orchestré. Pourtant , j’avais évalué à 1M€ le CA potentiel supplémentaire lors des budgets du 29/10/2015.
Mes contacts annonceurs high level sont suivis par [XB][H] ([XB] [H]) avec 2 DCA ou la direction générale mais sans représentant digital ! […]
nécessité d’installer un management avec un leadership positif et proactif, à l’écoute des suggestions et possibilités à mettre en place, ce qui n’est pas le cas à date.’. (pièce de l’appelante n° 20) .
S’agissant des résultats, si Mme [J] affirme que dans le cadre de cette réorganisation, elle s’est vue confier la direction du pôle OPS pour l’ensemble des OPS du Groupe (11 personnes), mais qu’elle n’était responsable que de la marge des frais technique – les pages OPS print (papier) demeurant sous la responsabilité de Madame [H], cette affirmation ne résulte en aucune façon de l’organigramme visé comme pièce justificative de cette affirmation et paraît en contradiction avec les objectifs qui lui étaient assignés lesquels n’étaient pas limités à la seule partie web.
Il est est établi que le 30 mai 2016, Mme [J] adressait un mail à Mme [H] et [K] aux termes duquel elle revenait sur ce qui avait été évoqué lors de la réunion des synergies sur le fait que la société ‘prennait du retard sur les OPS 100% digitales’ et transmettait une note sur l’activité de la concurrence dans ce domaine dont l’intérêt était de répondre à trois objectifs, voir, suivre et comprendre les plus créatifs de la concurrence, […] les OPS en ligne que nous aurions perdues afin d’en comprendre les raisons et découvrir et connaître l’existence de celles en place et pour lesquelles nous n’aurions pas été interrogés (pb de suivi commercial ou de transparence de l’ag concernée ‘), sa supérieure se félicitant à réception de ce message que sa collaboratrice prenne enfin conscience de la situation des OPS sur laquelle sa supérieure affirme l’alerter depuis début février (pièces n°15 et 16 de l’appelante).
Le 25 octobre 2016, Mme [J] transmettait à sa nouvelle supérieure, Mme [O] un message sur l’organigramme SDM des pôles aux termes duquel elle lui indiquait que ‘compte tenu du retard et des pb que nous avons rencontré sur le suivi des OPS 100% digitales, il a été convenu à la demande de VD et AP en accord avec (la direction) courant juillet que les 2 digitales natives OPS se consacreraient exclusivement aux OPS digitales en période test, de sept à déc 2016″, mais que cela ‘n’a pas à date amélioré le trend OPS 100% digital. Comme précisé hier, lors du budget, nous avons un pb de niveau, de compétence et aujourd’hui de motivation et d’implication au sein des équipes OPS. Il y a eu trop de changements et surtout un manque d’accompagnement récurrent pour une mise à niveau des besoins et attentes du marché’.
Il ressort de ces éléments que Mme [J] acte un constat d’échec d’un service relevant historiquement de son autorité dont elle devait assurer la fusion avec le service OPS.
Toutefois, compte tenu du fait que ce recul, avéré, s’est inscrit dans un contexte caractérisé :
– en premier lieu, par la fusion des régies décidée en raison d’une situation économique difficile, fusion dont la responsabilité était confiée non pas à Mme [J] mais à Mme [H], dont il n’est pas contesté que le Groupement l’a licenciée en septembre 2017 pour des motifs qu’elle se refuse à présenter, alors même que la salariée est légitime à s’en prévaloir, les dits motifs étant susceptibles de constituer un élément d’appréciation déterminant pour sa défense relativement au caractère sérieux des griefs qui lui sont faits, observation faite que la salariée avait été maintenue à l’occasion de l’accroissement de ses responsabilités sous la positions 3.1 coefficient 170,
– en second lieu par le harcèlement moral subi par la salariée, ci-avant établi,
– en troisième lieu, par de tensions existant entre les personnels, entre anciens (print) et modernes (web), et un turn-over des équipes important,
– et au bénéfice du doute qui profite à la salariée, dont il convient de retenir également qu’il n’est pas justifié par l’employeur qu’elle ait bénéficié de formations adaptées en matière de management,
il sera jugé que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse.
Le harcèlement moral ci avant caractérisé étant partiellement en lien avec les manquements professionnels reprochés par l’employeur au soutien de ce licenciement injustifié, ce dernier sera annulé par application des dispositions de l’article L. 1152-3 du code du travail.
Le jugement sera réformé en ce sens.
VI – Sur l’indemnisation du licenciement nul :
Au jour du licenciement Mme [J] âgée de 52 ans, totalisait une ancienneté de près de sept années et percevait un salaire mensuel brut de base de 8 750 euros bruts, et un salaire de référence de 10 950,40 euros calculé sur les douze derniers mois travaillés, rémunération variable comprise.
Lorsque le salarié dont le licenciement est nul ne demande pas sa réintégration dans son poste, il a droit d’une part aux indemnités de rupture et d’autre part à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Mme [J] justifie de vaines recherche d’emploi. Elle établit s’être inscrite à Pôle-emploi et avoir été prise en charge au titre de l’allocation de retour à l’emploi à compter de septembre 2017 pour un montant de l’ordre de 5 500 euros nets et ce jusqu’en septembre 2020, allocation Pôle-emploi qu’elle a pu cumuler avec le revenus dégagés par une activité en nom propre d’agent immobilier qui lui procure une rémunération annuelle de l’ordre de 60 000 euros annuels (62122 en 2019, 59098 en 2020 et 58217 en 2021).
Rappel fait que l’indemnité pour licenciement nul indemnise l’ensemble des chefs de préjudice moral et financier, à l’exception du préjudice complémentaire lié aux circonstances brutales ou vexatoires, en l’état de l’ensemble de ces éléments, le conseil de prud’hommes a justement apprécié les préjudices subis par la salariée au titre de la perte injustifiée et illicite de son emploi.
Le jugement sera confirmé sur le montant de l’indemnité allouée sauf à préciser qu’elle est versée à titre de licenciement nul et non de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le licenciement étant déclaré nul, l’employeur est tenu de rembourser les indemnités de chômage conformément aux dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail dans la limite de six mois d’indemnité chômage.
VII – Sur le licenciement vexatoire :
Tout salarié licencié dans des conditions vexatoires ou brutales peut prétendre à des dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct de celui résultant de la perte de l’emploi. Il en est ainsi alors même que le licenciement lui-même serait fondé, dès lors que le salarié justifie d’une faute et d’un préjudice spécifique résultant de cette faute, distinct de celui résultant de la perte de son emploi.
En l’espèce, Mme [J] se prévaut du témoignage imprécis et non circonstancié de Mme [T] indiquant que le ‘ licenciement particulièrement violent dans sa forme’ sans préciser en quoi ‘ et injustifié a choqué ses équipes’.
Par ailleurs, si la salariée affirme que son licenciement aurait été annoncé par voie de presse elle ne justifie en aucune façon que la société ait donné une quelconque publicité de sa décision. Aucun élément ne permet d’imputer à l’employeur la source de l’articulet publié par ‘pressenews’ annonçant le départ de M. [I], directeur-général délégué de l’entreprise, qui fait référence au non remplacement de Mme [J] qui vient d’être licenciée’.
Faute de caractériser et de justifier une faute de l’employeur dans l’engagement de la procédure de licenciement, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la salariée de ce chef.
VIII – Sur le préjudice moral :
Il suit de ce qui précède que la salariée est indemnisée au titre du harcèlement moral, établi, et de l’ensemble des conséquences préjudiciables résultant de la perte injustifiée et illicite de son emploi.
La demande est fondée ‘sur le fait que son licenciement a été annoncé en interne, avant l’entretien préalable à un éventuel licenciement et la notification de son licenciement et de surcroît par voie de presse. Aucun élément communiqué ne permet d’étayer la thèse selon laquelle son licenciement aurait été annoncé en interne avant même l’organisation de l’entretien préalable. Il suit de ce qui précède que la source de l’articulet publié par Pressenew est inconnue. Aucun manquement de l’employeur n’est caractérisé à ce titre.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [J] de ce chef.
IX – Sur le préjudice économique :
Mme [J] sollicite le paiement de la somme de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice économique en ce que,
– d’une part, le GIE MC2M a volontairement refusé de verser à Madame [J] l’intégralité de son salaire variable durant son préavis, malgré ses demandes, notamment par courrier recommandé du 17 mars 2017 (pièce n°21), spontanément son 4ème mois de préavis, qui ne lui a été versé qu’avec un important retard (alors qu’il n’ignorait pas qu’elle était seule à élever ses 3 enfants à charge à 54 ans), ainsi que, l’intégralité de ses RTT et de ses congés payés et a déduit à tort le montant des indemnités journalières de sécurité sociale perçu directement par l’employeur, subrogé dans les droits de sa salariée, au mépris des dispositions de la convention collective Syntec prévoyant le maintien du salaire intégral,
– d’autre part, elle a appris le 24 avril 2018 qu’elle n’était plus couverte depuis le 16 avril 2018 et qu’elle était ainsi privée de mutuelle, alors que licenciée le 17 janvier 2017 avec un préavis de 4 mois, le GIE MC2M devait assurer la portabilité pendant un an soit du 18 mai 2017 au 18 mai 2018,
– enfin, le conseil de prud’hommes a retenu qu’elle avait subi un préjudice financier important en ce que malgré ses efforts elle n’a pas retrouvé un emploi et a été contrainte de se réorienter et de démarrer une activité professionnelle sous le régime de la micro-entreprise.
Conformément aux dispositions de l’article 1231-6 du code civil, dans les obligations qui se bornent au paiement d’une certaine somme, les dommages et intérêts résultant du retard dans l’exécution ne consistent jamais que dans une condamnation aux intérêts au taux légal, le créancier auquel le débiteur a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard pouvant obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance à charge de justifier de ce préjudice.
Il est constant que l’obligation pour l’employeur de verser l’indemnité compensatrice de préavis a donné lieu à deux régularisations en septembre et décembre 2017, l’employeur ayant omis de tenir compte de la rémunération variable et de son obligation au titre d’un quatrième mois de préavis.
Sans qu’il soit nécessaire de caractériser le caractère fautif des griefs formulés par la salariée, faute pour celle-ci de démontrer l’existence d’un préjudice distinct du retard dans le paiement, lequel est d’ores et déjà réparé par l’allocation des intérêts de retard sur les sommes salariales dues à compter de la vaine mise en demeure du 17 mars 2017 pour les sommes échues à cette date, la demande de dommages-intérêts du premier chef n’est pas fondée.
En ce qui concerne la portabilité, la salariée ne justifie pas d’un quelconque préjudice en lien avec l’annonce de la privation de la mutuelle à compter du 16 avril 2018.
L’indemnisation allouée au titre du licenciement illicite réparant l’ensemble des préjudices d’ordre moral ou financier subi par la salariée en lien avec la perte injustifiée de son emploi, Mme [J] n’est pas fondée à solliciter une indemnisation complémentaire à ce titre.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné GIE MC2M à lui verser la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts.
X – Sur les rappels de salaire :
Mme [J] sollicite un rappel de rémunération variable au titre de la période de préavis.
Le contrat de travail stipulait que Mme [J] percevrait en sus de son salaire de base un ‘intéressement annuel variant de 0 à 24 000 euros (qui sera porté à 35 000 euros) à l’atteinte de 100% des objectifs, lesquels sont fixés selon le plan d’intéressement annexé au contrat de travail et révisé chaque année les parties ayant convenu pour l’année 2010 le versement minimum de 50% de la rémunération variable calculé prorata temporis.
Lorsque le contrat de travail du salarié prévoit une rémunération comportant une partie variable dont le montant est fixé par l’accord entre les parties, il incombe au juge, à défaut de conclusion d’un accord sur ce point, de déterminer cette rémunération en fonction des critères visés au contrat et, à défaut, des données de la cause.
Il est établi par les pièces versées aux débats que la fixation des objectifs donnait lieu à discussion entre les parties et à conclusion d’un avenant (pièce n°7 de la société appelante).
En l’absence de critères visés au contrat, le plan d’intéressement devant être révisé chaque année, et à défaut de fixation des objectifs au début de l’exercice 2017, l’employeur a satisfait à son obligation de payer la rémunération variable à laquelle pouvait prétendre la salariée basée sur le salaire de référence de l’année 2016 incluant la rémunération variable perçue par la salariée l’année précédente pour un montant supérieur à 23 000 euros. Compte tenu des modalités de détermination des objectifs de cet ‘intéressement’, la salariée n’est pas fondée à requérir le versement d’un delta basé sur le plafond de la rémunération variable cible.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné Mme [J] à verser la somme de 3 880,62 euros de ce chef.
XI – Sur le rappel de jours RTT
Le conseil de prud’hommes a justement retenu au vu des éléments communiqués et de la fiche RTT pour l’année 2017, que la ‘fiche RTT 2017, (Pièce n°52) versé au débat par la salariée prévoit un nombre de RTT de 10, dont 3 imposés du fait de la fermeture du groupement, que les
jours de RTT sont calculés sur une année civile, et qu’ils doivent être posés sur cette période et que les compteurs doivent être soldés au 31 décembre et qu’aucun report ne pourra être pris en compte et qu’aucune RTT ne sera rémunérée. Il en découle que les jours RTT 2016 ont été écrêtés et le compteur remis à 0 au 1 er janvier 2017. Les premiers juges ajoutent qu’en l’absence d’accord sur l’organisation, l’aménagement et la réduction du temps de travail valide présenté par les parties, il convient de lire le nombre de jours RTT des documents fournis comme le nombre de jours accordés pour une année entière et de pratiquer un prorata temporis en fonction notamment de la durée du préavis, le conseil ayant retenu que la salariée avait droit à 5 jours et non 4 comme payés par l’employeur pour lui accorder un rappel à ce titre de 591,49 euros.
Toutefois, le contrat de travail ayant été rompu le 17 janvier 2017, le terme du délai congé est advenu au 17 mai 2017. À cette date, la salariée pouvait prétendre à quatre jours de RTT et non 5 comme retenu par le conseil : 10/12 = 0.83 jours/mois. [4 mois + (17 jours/30 = 0,56)] = 3,78 jours RTT.
En lui versant une indemnité pour quatre jours de RTT à ce titre, la société a rempli Mme [J] en ses droits. Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné le groupement au paiement de la somme de 591,49 euros.
XII – Sur le rappel de congés payés :
Sauf à réformer le montant retenu qu’elle demande à voir porté à la somme de 3 034,15 euros, Mme [J] sollicite de ce chef la confirmation du jugement en son principe en ce qu’il a dit :
Qu’au 31 août 2016, le solde de congés est de 14 jours, comme l’atteste les pièces fournies par les parties. Et provient des congés acquis par Madame [J] sur la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2016. Et que Madame [J] a acquis des congés à concurrence de 2,5 jours par mois au cours de la période du 1er juin 2016 au 17 mai 2017, soit 26,25 jours qu’il convient d’arrondir à 27 jours. Et que l’article 23 de la convention collective dispose que le salarié ayant une ancienneté supérieure à 5 ans bénéficie d’un jour de congé supplémentaire annuel ; et que Madame [J] doit donc en bénéficier dans le cadre de la période d’acquisition du 1 er juin 2016 au 16 mai 2017.
Madame [J] n’ayant pu prendre des congés entre le 1er septembre 2016 et la fin de son préavis, Marie-Claire doit lui régler une indemnité de congé payés pour 42 jours, soit 21 226,80 €, sur la base d’une rémunération moyenne mensuelle de 10 950,40 €.
Et que le groupement a réglé à Madame [J] à titre d’indemnité de congés payés :
– 5653,72 €, portés sur le bulletin de paie d’avril 2017, pour la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2016
– 8883,25 €, portés sur le bulletin de paie d’avril 2017, pour la période du 1er juin 2016 au 16 avril 2017
– 1421,77 €, sur le bulletin de paie de septembre 2017, pour la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2016
– 2233,91 €, sur le bulletin de paie de septembre 2017, pour la période du 1er juin 2016 au 6 avril 2017 Soit au total la somme de 18 192,65 euros.
Selon la salariée il en ressort un écart de 3 034,15 euros, au titre de solde de congés payés, que le conseil a limité à tort à 2 295,13 euros.
L’employeur objecte avoir réglé les 36 jours de congés acquis par la salariée en faisant valoir que la salariée opère une confusion, les 26 jours de congés revendiqués sur l’exercice 2016/2017 correspondant à ceux acquis au titre de l’exercice précédant, desquels seulement 14 jours restaient dus, que les jours acquis de juin 2016 au 16 avril 2017 étaient de 22, et que le jour de congé supplémentaire au delà de cinq ans d’ancienneté s’accorde à la date d’ouverture des droits soit au 1er juin.
La convention collective applicable énonce que :
‘tout salarié ETAM et I.C. ayant au moins 1 an de présence continue dans l’entreprise à la fin de la période ouvrant droit aux congés payés aura droit à 25 jours ouvrés de congés (correspondant à 30 jours ouvrables). Il est en outre accordé en fonction de l’ancienneté acquise à la date d’ouverture des droits :
– après une période de 5 années d’ancienneté : 1 jour ouvré supplémentaire […]’.
Par suite, le calcul des premiers juges, basé sur 30 jours de congés payés, est erroné, la salariée acquérant 2,08 jours par mois et non 2.5 ; celui proposé par l’employeur est erroné, dans la mesure où il retient une date arrêtée au 17 avril et non au 17 mai 2017 tenant compte d’un préavis de 4 mois.
Au terme du délai congé, la salariée pouvait prétendre à 23.92 jours (arrondis à 24) de congés payés outre 14 au titre de l’exercice précédant, soit 38 jours, auquel s’ajoute le jour de congé supplémentaire au titre de l’ancienneté acquise au 1er juin 2016. L’employeur concédant ne s’en être libéré que de 36 jours, la salariée est bien fondée à requérir le paiement de 3 jours de congés supplémentaires soit la somme de 1 516,17 euros. Le jugement sera réformé en ce sens.
XIII – Sur les frais de véhicule :
Mme [J] expose au soutien de la confirmation du jugement justifier avoir pris en charge des options sur le véhicule de fonction qu’elle a dû restituer pour un montant de 1 248 euros.
L’employeur objecte que la salariée ne rapporte pas la preuve de ses allégations.
Le seul document communiqué par la salariée consistant à questionner M. [R] le 23 juin 2010 sur le point de savoir si ‘on peut lancer la commande de son véhicule de fonction, auquel est annexé deux devis, sur lequel elle a porté la mention ‘sachant que la version boîte automatique (qui entraîne un différentiel de 1248 euros) serait à ma charge’, est insuffisant à caractériser l’obligation de l’employeur à rembourser sept ans plus tard la somme de 1248 euros dont il n’est pas justifié qu’elle ait été exposée par l’intéressée.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné le groupement de ce chef.
XIV – Sur les demandes accessoires :
Il n’y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil prévoyant que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal, à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues postérieurement au 17 mars 2017 et jusqu’à la notification de cette convocation et à compter de chaque échéance devenue exigible, s’agissant des échéances postérieures à cette dernière date, les créances à caractère indemnitaire produisant intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.
Il sera ordonné à l’employeur de remettre au salarié les documents de fin de contrat régularisés, et un bulletin de paye de régularisation de l’année 2017, mais sans astreinte laquelle n’est pas nécessaire à assurer l’exécution de cette injonction.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud’homale, par mise à disposition au greffe,
Infirme partiellement le jugement déféré,
Statuant de nouveau sur le tout,
Dit que Mme [J] a subi un harcèlement moral,
Prononce la nullité du licenciement,
Condamner le GIE MC2M à payer à Mme [J] les sommes suivantes :
– 4 500 euros pour manquement à son obligation de prévention du harcèlement moral,
– 140 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul,
– 3 000 euros à titre d’indemnité pour manquement à l’obligation de formation,
– 1 516,17 euros à titre de rappel d’indemnité compensatrice de congés payés,
– les intérêts au taux légal sur les créances salariales échues à la date de la vaine mise en demeure du 17 mars 2017 jusqu’à leur paiement effectif,
Dit que les créances de nature contractuelle sont productives d’intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues postérieurement au 17 mars 2017 et jusqu’à la notification de cette convocation, et à compter de chaque échéance devenue exigible, s’agissant des échéances postérieures à cette dernière date, et que les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant,
Ordonne, conformément aux dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail, le remboursement par l’employeur aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du prononcé de la présente décision, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage, et dit qu’une copie certifiée conforme de la présente sera adressée à ces organismes,
Déboute Mme [J] du surplus de ses demandes et notamment de celles présentées au titre d’un sous-positionnement conventionnel, de celles en paiement de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire, pour préjudice moral, pour préjudice économique, pour atteinte portée aux droits de la défense, ainsi que de ses demandes de rappel de salaire au titre de l’incidence de la rémunération variable sur la période de préavis et d’indemnité compensatrice de jours de RTT, et enfin de sa demande en remboursement au titre de frais engagés sur le véhicule de fonction,
Ordonne au GIE MC2M de remettre à Mme [J] dans les deux mois à compter de la signification de la présente décision, un bulletin de paye de régularisation pour l’année 2017, une attestation Pôle-emploi, le solde de tout compte rectifié et le certificat de travail conformes à la présente décision,
Rejette la demande d’astreinte.
Condamne le GIE MC2M à verser à Mme [J] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Monsieur Mohamed EL GOUZI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,