Convention collective SYNTEC : 12 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/07945

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Convention collective SYNTEC : 12 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/07945

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 5

ARRET DU 12 JANVIER 2023

(n° 2023/ , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/07945 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCWQW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Octobre 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de PARIS – RG n° F 18/00453

APPELANTE

Association L’UNÉDIC DÉLÉGATION AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Sabine SAINT SANS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0426

INTIMES

Monsieur [E] [X]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Kevin MENTION, avocat au barreau de PARIS

S.E.L.A.F.A. MJA ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL TAKE EAT EASY

[Adresse 6]

[Localité 4]

Non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 octobre 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre, Présidente de formation,

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre

Madame Séverine MOUSSY, Conseillère

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

– réputé contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Marie-Christine HERVIER, présidente et par Madame Cécile IMBAR, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. [E] [X] a postulé auprès de la société Takeeateasy.fr, exerçant une activité de livraison à domicile sous l’enseigne ‘take eat easy’ pour effectuer des livraisons à vélo à compter du mois de mars 2016. Par mail du 26 juillet 2016, la société lui a adressé un mail collectif intitulé ‘ fermeture des opérations de Take eat easy’annonçant ‘ nous sommes dans l’obligation de suspendre les opérations de take eat easy pour une durée indéterminée…Nous avons malheureusement dû prendre la difficile décision de déclarer la société take eat easy en cessation de paiement et suspendre les opérations. La fin des opérations est effective depuis le 26 juillet 2016 à 00h00…’

Par jugement du 30 août 2016, le tribunal de commerce de Paris a ouvert la liquidation judiciaire de la société Takeeateasy.fr et désigné la selafa MJA prise en la personne de Me [F] [T] [O] en qualité de liquidateur.

Revendiquant l’existence d’un contrat de travail et soutenant avoir été licencié abusivement le 26 juillet 2016, M. [X] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris, le 22 janvier 2018 afin d’obtenir des rappels de salaire, une indemnité pour travail dissimulé et des indemnités au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 30 octobre 2020 auquel la cour renvoie pour l’exposé des demandes initiales et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Paris, statuant en formation de départage, a :

– rejeté l’exception d’incompétence soulevée par l’AGS,

– retenu l’existence d’un contrat de travail,

– fixé la créance de M. [X] au passif de la liquidation de la société Takeeateasy.fr aux sommes suivantes :

* 5 258 euros à titre de rappel de salaire,

* 709 euros au titre des congés payés,

* 1 466 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 147 euros au titre des congés payés afférents,

* 5 000 euros de dommages-intérêts pour rupture abusive,

* 8 796 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

– rappelé que les intérêts au taux légal sont arrêtés au jour de l’ouverture de la procédure collective,

– ordonné la remise par le mandataire liquidateur des documents sociaux conformes à sa décision,

– débouté M. [X] du surplus de ses demandes,

– dit le jugement opposable à l’AGS dans les limites du plafond légal et de sa garantie légale,

– dit que les dépens sont inscrits au passif de la société défenderesse.

L’AGS a régulièrement relevé appel du jugement le 23 novembre 2020.

La selarl MJA ès qualités à qui la déclaration d’appel a été signifiée à personne morale par exploit du 31 décembre 2020 n’a pas constitué avocat. Les conclusions n° 1 et 2 de l’AGS lui ont été régulièrement signifiées par exploits des 15 janvier 2021 et 30 septembre 2022. Les conclusions n° 1 de l’intimé, M. [X] lui ont été régulièrement signifiées par exploit du 3 mars 2021. Les conclusions n°2 ne lui ont en revanche pas été signifiées de sorte qu’à l’audience de plaidoirie; M. [X] par l’intermédiaire de son conseil a indiqué qu’il abandonnait son second jeu de conclusions et s’en tenait à ses premières conclusions au fond.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 28 septembre 2022.

Aux termes de ses dernières conclusions d’appelant n° 2 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, l’UNEDIC délégation AGS CGEA IDF Ouest prie la cour de :

– infirmer le jugement en ce qu’il a :

– dit que la rupture du contrat de travail devait être considérée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse et fixé au passif de la liquidation de la société Takeeateasy.fr les sommes suivantes :

* 5 258 euros à titre de rappel de salaire,

* 709 euros au titre des congés payés,

* 8 796 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

* 1 466 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 147 euros au titre des congés payés afférents,

* 5 000 euros de dommages-intérêts pour rupture abusive,

– déclaré que le jugement lui était opposable dans la limite de sa garantie,

– débouter M. [X] de l’ensemble de ses demandes afférentes à la rupture du contrat de travail;

– dire que sa garantie ne s’applique pas aux indemnités de rupture, ni au travail dissimulé ni à l’article 700 du code de procédure civile ni aux dépens,

– dire qu’en tout état de cause, sa garantie est limitée au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d’assurance chômage, en application de l’article D. 3253-5 du code du travail,

– débouter M. [X] de ses demandes de rappel de salaire, indemnité pour travail dissimulé,

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [X] de sa demande de dommages-intérêts au titre de divers manquements.

L’AGS soutient qu’il n’y a pas eu de rupture du contrat de travail; que celui-ci est toujours en cours de sorte que sa garantie n’est pas due.

Aux termes de ses conclusions n° 1, transmises par voie électronique le 9 février 2021 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, M. [X] prie la cour de :

– confirmer le jugement sauf en ce qu’il a rejeté sa demande de dommages-intérêts,

– fixer au passif de la société Takeeateasy.fr sa créance à la somme de 1 500 euros de dommages-intérêts en réparation de ses divers préjudices,

– condamner l’AGS à lui verser les sommes de :

* 2 000 euros de dommages-intérêts pour appel abusif,

* 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION :

A titre liminaire, la cour relève que l’AGS ne sollicite pas l’infirmation du jugement en ce qu’il a retenu sa compétence et l’existence d’un contrat de travail entre M. [X] et la société Takeeateasy.fr, que M. [X] en sollicite la confirmation de sorte que le jugement est confirmé de ces chefs.

Sur l’exécution du contrat de travail :

Sur le rappel de salaire et l’indemnité de congés payés afférente :

L’AGS sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a fait droit à la demande de rappel de salaire présentée par M. [X] sur la base d’un temps complet pendant la durée du contrat de travail en faisant valoir que celui-ci ne justifie pas sa demande et qu’il lui appartient d’établir qu’il se tenait à la disposition permanente de l’employeur.

M. [X] sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a fixé sa créance au titre du rappel de salaire à la somme de 5 258 euros brut sur la base du SMIC soit 1 466,62 euros pour une durée de travail à temps complet de 4,84 mois entre mars 2016 et le 26 juillet 2016.

Aux termes de l’article L. 3123-14 du code du travail dans sa version applicable au litige, ‘Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne :

1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations ou entreprise d’aide à domicile et les salariés relevant d’un accord collectif de travail conclu en application de l’article L. 3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois[…]’.

La cour rappelle qu’en l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition, celui-ci est présumé être à temps plein. Il appartient donc à l’employeur, pour combattre cette présomption, de rapporter la preuve d’une part de la durée exacte convenue et d’autre part que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’ employeur.

Cette preuve n’étant pas rapportée en l’espèce par l’employeur défaillant et l’AGS ne produisant aucun élément à ce titre, c’est vainement que l’AGS reproche à M. [X] de ne pas établir qu’il se tenait constamment à la disposition de l’employeur pendant la durée de la relation contractuelle.

La cour confirme donc le jugement en ce qu’il a fait droit à la demande de rappel de salaire présentée sur la base d’un contrat de travail à temps plein et fixé la créance de M. [X] à la somme de 5 258 euros pour les 4,84 mois travaillés, déduction étant faite des sommes facturées par M. [X] et payées par l’employeur durant cette même période.

La cour fixe la créance de M. [X] au titre de l’indemnité de congés payés afférente correspondant au dixième de la rémunération qui aurait dû être perçue pendant la durée du contrat de travail – soit 7 090 euros- à la somme de 709 euros. Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail :

M. [X] soutient que le mail du 26 juillet 2016 par lequel la société Takeeateasy.fr annonçait sa cessation de paiement et une ‘fin des opérations’ effective à partir de minuit, constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse dès lors qu’elle cessait de fournir du travail et de rémunérer les salariés.

L’AGS le conteste en faisant valoir que la rupture du contrat de travail ne se présume pas et ne se déduit pas de la cessation d’activité et que la volonté de l’employeur de rompre le contrat de travail doit être patente et qu’en cas de liquidation judiciaire, il appartient au liquidateur de le faire dans les 15 jours de la liquidation de sorte qu’à défaut, la garantie de l’AGS n’est pas due.

La cour considère qu’il ressort du mail du 26 juillet 2016, que la société Takeeateasy a notifié clairement aux coursiers dont M. [X] faisait partie, sa volonté de rompre leurs relations contractuelles en annonçant la suspension de son activité, une fin des opérations effective le 26 juillet à minuit, et en les invitant à contacter rapidement les autres plateformes de livraisons pour continuer leurs activités.

La cour considère en conséquence que le contrat de travail de M. [X] a été rompu le 26 juillet 2016 par l’employeur et à son initiative sans notification des motifs de sorte que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières du licenciement :

Sur les dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail :

Employé depuis moins de deux ans, M. [X] est fondé à percevoir des dommages-intérêts au titre de la rupture abusive correspondant au préjudice subi en application de l’article L. 1235-5 du code du travail dans sa version en vigueur au moment du licenciement. Eu égard à son ancienneté dans l’entreprise (4 mois), au montant de sa rémunération, aux circonstances de la rupture, à ce qu’il justifie de sa situation postérieure au licenciement, c’est par une juste appréciation du préjudice subi que le conseil de prud’hommes a fixé la créance de M. [X] à la somme de 5 000 euros. Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur l’indemnité compensatrice de préavis et l’indemnité de congés payés sur préavis :

L’AGS sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a fixé la créance de M. [X] à ce titre à la somme de 1 466 euros en faisant valoir que dès lors qu’il a travaillé moins de six mois, il ne peut prétendre en application des dispositions de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport dont il revendique l’application qu’une somme correspondant à une semaine de préavis.

M. [X] sollicite de son côté la confirmation du jugement en faisant valoir que la société Takeeateasy appliquait spontanément la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs- conseils et des sociétés de conseil prévoyant dans son article 15 un délai congé d’un mois et que si on devait considérer applicable la convention collective nationale des transports routiers et activité annexes du transport en raison de l’activité de livraison de l’employeur, celle-ci prévoit également un délai-congé d’un mois pour les employés, catégorie dont relève l’emploi de coursier.

Eu égard à l’activité principale de livraison de la société Takeeateasy.fr, et la preuve n’étant pas rapportée de ce que la société Takeeateasy appliquait la convention collective syntec, la cour considère que la convention collective applicable à la relation de travail est celle du transport et des activités annexes du transport.

En tant que coursier à vélo, M. [X] relève de la classification d’employé de sorte qu’en application de l’article 13 de l’accord du 27 février 1951 le délai-congé est d’un mois. La cour confirme le jugement en ce qu’il a fixé l’indemnité compensatrice de préavis à la somme de 1 466 euros outre 147 euros au titre des congés payés afférents.

Sur les dommages-intérêts en réparation des préjudices subis :

M. [X] reproche à la société Takeeateasy.fr de ne pas l’avoir fait bénéficier de visites médicales, de ne pas l’avoir fait bénéficier des avantages conventionnels, d’avoir contrevenu aux dispositions sur le temps du travail et sur la mise en place d’instances représentatives du personnel et sollicite l’infirmation du jugement qui l’a débouté de sa demande.

L’AGS conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il débouté M. [X] de ce chef de demande.

La cour relevant que la faute de la société est établie tant sur le défaut de visite médicale que sur l’absence d’application des dispositions de la convention collective, étant observé qu’il n’est pas justifié du nombre exact de salariés de la société Takeeateasy.fr, considère qu’il en est résulté un préjudice pour M. [X] qui sera suffisamment réparé par l’allocation d’une somme de 1 000 euros. Le jugement est infirmé en ce qu’il l’a débouté de ce chef de demande.

Sur l’indemnité pour travail dissimulé :

Eu égard à la solution du litige, et la volonté de dissimulation étant établie par le refus de l’employeur d’établir un contrat de travail et de procéder aux déclarations obligatoires en la matière alors qu’il exerçait un pouvoir de contrôle et de direction à l’égard du salarié et le maintenait sous sa subordination comme il a été jugé en première instance sans que l’AGS ne le conteste désormais, la cour confirme le jugement en ce qu’il a fixé la créance de M. [X] à ce titre à la somme de 8 796 euros en application de l’article L. 8223-1 du code du travail.

Sur la garantie de l’AGS :

La rupture du contrat de travail étant antérieure à l’ouverture de la procédure collective, l’AGS doit sa garantie dans les limites et conditions légales en ce compris l’indemnité pour travail dissimulé, la créance étant née antérieurement à l’ouverture de la liquidation judiciaire.

Sur les autres demandes :

Le caractère abusif de la procédure allégué n’étant pas établi, la demande de dommages-intérêts présentée par M. [X] à l’encontre de l’AGS est rejetée.

La selafa MJA ès qualités, partie perdante est condamnée aux dépens et doit indemniser M. [X] des frais exposés par lui et non compris dans les dépens à hauteur de la somme de 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu’il a débouté M. [E] [X] de sa demande de dommages-intérêts en réparation de ses divers préjudices.

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

FIXE le montant de la créance de M. [E] [X] au passif de la liquidation de la société Takeeateasy.fr à la somme de 1 000 euros de dommages-intérêts en réparation de ses divers préjudices,

DÉBOUTE M. [E] [X] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

DÉCLARE la présente décision opposable à L’AGS dans les limites et conditions de sa garantie légale,

CONDAMNE la selarl MJA prise en la personne de Me [F] [T] [O] ès qualités de liquidateur de la société Takeeasy.fr aux dépens et à verser à M. [E] [X] une somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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