Convention collective SYNTEC : 10 janvier 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 20/08382

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Convention collective SYNTEC : 10 janvier 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 20/08382

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 4

ARRET DU 10 JANVIER 2024

(n° /2024, 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/08382 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCZNM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Novembre 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F 19/04059

APPELANTE

S.A.S. EVA GROUP

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Anne MURGIER, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [D] [I]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Simon CLEMENCEAU, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme. Florence MARQUES, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

M. DE CHANVILLE Jean-François, président de chambre

Mme. BLANC Anne-Gaël, conseillère

Mme. MARQUES Florence, conseillère rédactrice

Greffier, lors des débats : Madame Clara MICHEL

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Clara MICHEL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Rappel des faits, procédure et prétentions des parties

La société Eva group exerce une activité de conseil, d’audit et d’assistance en matière de cybersécurité et d’infrastructures réseaux et télécommunications.

Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 23 septembre 2016 à effet du 2 janvier 2017, M. [D] [I] a été engagé par la société Eva group, en qualité de consultant réseau / Sécurité senior, statut Cadre, position 2.3, coefficient 150, moyennant une rémunération mensuelle de 5333,33 euros. Le salarié a été soumis a un forfait hebdomadaire en heures (38,5 heures).

Une rémunération variable a été prévue par avenant au contrat de travail en date du 23 septembre 2016.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective SYNTEC. La société Eva group occupait à titre habituel plus de onze salariés.

M. [D] [I] a été en arrêt de travail pour cause de maladie d’origine non professionnelle du 16 janvier au 30 janvier 2019, prolongé du 30 janvier au vendredi 8 février 2019, puis du 21 février au vendredi 8 mars 2019.

M. [D] [I] a fait l’objet, après convocation et mise à pied conservatoire du 14 mars 2019, et entretien préalable fixé au 26 mars 2019, d’un licenciement pour faute grave le 3 avril 2019.

M. [D] [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris, le 14 mai 2019, aux fins de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et voir condamner son employeur à lui verser diverses sommes dont un rappel de rémunération variable.

Par jugement en date du 3 novembre 2020, le conseil de prud’hommes de Paris a :

– fixé la moyenne des salaires à 5.504,14 euros (3 derniers mois),

– dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– condamné la société Eva group à verser à M. [I] les sommes suivantes :

* 3.302,48 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

* 16.512,42 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 1.651,24 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

* 3.940,11 euros au titre du paiement de la mise à pied conservatoire,

avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation, le 21 mai 2019,

rappelé qu’en vertu de l’article R.1454-28 du code du travail, ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire,

* 16.512,42 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement,

* 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté M. [I] du surplus de ses demandes,

– débouté la société Eva group de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamné aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 7 décembre 2020, la société Eva group a régulièrement interjeté appel de cette décision.

La Société SOPRA STERIA INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES est venue aux droits de la société Eva Group.

Par ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 31 octobre 2013, la société SOPRA STERIA INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES demande à la Cour de :

– INFIRMER le jugement du Conseil de prud’hommes de Paris du 3 novembre 2020 en ce qu’il a :

– Jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– Condamné la Société EVA GROUP, aux droits de laquelle vient la Société SOPRA STERIA INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES, à verser à Monsieur [I] :

o 3.302,48 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ;

o 16.512,42 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

o 1651,24 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

o 3.940,11 € au titre du paiement de la mise à pied conservatoire ;

Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation le 21 mai 2019.

o 16.512,42 € indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement ;

o 1.500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

– Débouté la Société EVA GROUP, aux droits de laquelle vient la Société SOPRA STERIA INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES, de sa demande au titre de l’article 700 du Code

de procédure civile et condamné aux dépens.

– CONFIRMER, sur appel incident de Monsieur [I], le jugement du Conseil de prud’hommes de Paris du 3 novembre 2020 dans toutes ses autres dispositions,

– DECLARER irrecevables les nouvelles prétentions formulées par Monsieur [I] en cause d’appel au titre d’un prétendu manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur.

STATUANT A NOUVEAU :

A TITRE PRINCIPAL :

-JUGER que le licenciement de Monsieur [I] repose sur une faute grave,

-CONDAMNER Monsieur [I] à restituer à la Société SOPRA STERIA

INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES, venant aux droits de la Société EVA GROUP,

l’ensemble des sommes perçues en exécution du jugement du 3 novembre 2020.

En conséquence :

-DEBOUTER Monsieur [I] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A TITRE SUBSIDIAIRE :

– JUGER que le licenciement de Monsieur [I] repose sur une cause réelle et sérieuse,

– FIXER le salaire de référence de Monsieur [I] à 5.711,76 € bruts (à savoir la moyenne des 12 derniers mois de salaire tels que figurant sur les 12 derniers bulletins de salaire)

En conséquence :

-DEBOUTER Monsieur [I] de ses plus amples demandes, fins et conclusions.

DANS TOUS LES CAS :

– CONDAMNER Monsieur [I] au paiement de la somme de 1.500 € à la Société SOPRA STERIA INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES, venant aux droits de la Société EVA GROUP, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

-CONDAMNER Monsieur [I] aux entiers dépens.

Aux termes de ses uniques conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 28 mai 2021, M. [D] [I] demande à la Cour de :

– confirmer le jugement rendu le 3 novembre 2020 par le conseil de prud’hommes de Paris en ce qu’il a jugé que M. [I] n’avait commis aucune faute grave et que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– réformer le jugement de première instance en ce qu’il a débouté M. [I] du surplus de ses demandes,

En conséquence,

– dire que la moyenne des salaires bruts de M. [I] s’élève à 6.487 euros par mois,

– condamner la société Eva Group à verser à M. [I] les sommes suivantes :

* 4.865,25 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

* 19.461 euros au titre du préavis (3 mois),

* 1.946,10 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférents,

* 22.704,50 euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 3.940,11 euros au titre de la mise à pied conservatoire,

* 4.500 euros au titre de la rémunération variable non versée,

* 1.388,61 euros au titre de la suspension du complément de salaire pour arrêt maladie,

* 525,35 euros au titre de divers rappels de salaires,

– ordonner la remise de l’attestation Pôle Emploi rectifiée conformément à la décision dans le mois suivant sa notification sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

– condamner la société Eva group à verser à M. [I] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 27 juin 2023 laquelle a été révoquée à l’audience du 25 septembre 2023 afin que la société Société SOPRA STERIA INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES, venant aux droits de la Société EVA GROUP régularise des conclusions à son nom.

La clôture est intervenue à l’audience du 6 novembre 2023.

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

MOTIFS

1-Sur la rupture du contrat de travail pour faute grave

L’article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l’initiative de l’employeur ou du salarié. Aux termes de l’article L.1232-1 du même code, le licenciement par l’employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d’un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d’une part d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise.

En l’espèce, aux termes de la lettre de rupture du 3 avril 2019, il est reproché au salarié :

1-de n’avoir pas, alors qu’il était affecté chez le client XPO Logistics depuis le lundi 11 février 2019, mission en lien avec ses compétences Routing et Switching, répondu aux appels de son manager qui souhaitait savoir comment avait débuté la mission et ne pas être retourné chez ce client après son arrêt maladie du 22 février au 11 mars 2019, au motif que son profil ne correspondait pas au besoin du client,

2-d’avoir refusé, le 12 mars 2019 à 9h49, une mission correspondant à son profil auprès du client Zodiac Aerospace au motif que cette société se trouvait trop loin de son domicile,

3-d’avoir répondu par une demande de rupture conventionnelle à la proposition d’une mission correspondant à son profil auprès de la Société Générale, à choisir parmi six missions, le 12 mars 2019 en début d’après-midi,

4-d’avoir refusé le 13mars 2019 à 14h18 de se rendre sur une mission auprès du client Véolia Water au motif qu’il n’avait pas le niveau d’anglais requis pour la mission, alors que la certification technique CCIE R§S est en anglais et qu’il a déja été positionné sur une mission supposant un anglais courant,

5-d’avoir forcé le passage face à M. [V] lorsqu’il a lui été demandé de restituer son ordinateur professionnel,

6-d’avoir refusé de restituer son ordinateur professionnel après sa mise à pied, finalement rendu avec le reste de son matériel professionnel, le 20 mars 2019,

En ce qui concerne le grief n°1, la société verse aux débats le bon de commande de la société XPO Logistics pour une mission du 11 février au 31 mars 2019. Le salarié a travaillé du 11 février au 20 février 2019 chez ce client, avant d’être en arrêt maladie, sans faire remonter la moindre difficulté à propos de l’adéquation de ses compétences avec la mission confiée. Il n’a pas répondu aux deux mails que lui a envoyé M. [L] pour savoir comment se passait le démarrage de la mission. A son retour de congé maladie le 11 mars 2019, M. [D] [I] ne s’est pas rendu chez le client chez qui il était toujours positionné, indiquant par mail du 11 mars 2019 à 10h02 que son profil ne répondait pas aux besoins du client. Il a en réalité abandonné sa mission, mettant sa société en difficulté à l’égard du client qui s’est plaint de la situation (mail de [N] [H] en date du 11 mars 2019)

Ce grief est établi.

La société établi que M. [D] [I] a refusé une mission au sein de la société Zodiac Aerospace. Le salarié a jutifié son refus en soulignant que le lieu d’exercice de sa mission, à [Localité 3] (78) était très éloigné de son domicile et que ses contraintes familiales lui interdisaient de l’accepter.

Il est établi que la durée de déplacement pour se rendre sur le site de la société Zodiac Aerospace à partir du domicile du salarié est de 1h15/30 aller et 1h15/30 retour en transport en commun et de 32/36 minutes en voiture. Pour autant son contrat de travail prévoit une clause selon laquelle le salarié exercera principalement ses fonctions chez les clients pour lesquels il sera amené à travailler et selon laquelle le salarié s’engage à effectuer des déplacements temporaires n’entraînant pas de changement de résidence.

M. [D] [I] ne justifie pas de contrainte familiale particulière et procéde par simple affirmation lorsqu’il soutient qu’il aurait été dans l’obligation de déménager.

Ce grief est retenu.

Le grief n°3 n’est pas retenu, le salarié ayant parfaitement le droit de solliciter une rupture conventionnelle. Il n’est pas rapporté la preuve que le salarié n’a pas voulu donner suite à l’une des 6 propositions au sein de la société générale, une autre mission lui ayant d’ailleurs été proposée avant même qu’il n’apporte une réponse claire. Ce grief n’est pas retenu.

En ce qui concerne le grief n°4, la société établi que M. [D] [I] a refusé la proposition de poste. Le salarié explique qu’il a refusé le poste parce que celui-ci nécessitait un niveau d’anglais courant qu’il n’avait pas, comme il en a averti son employeur par mail en réponse du 13 mars 2019 à 14h18.

L’employeur échoue à rapporter la preuve que l’intéressé possédait le niveau B2 en anglais requis par la fiche de poste. Ce grief n’est pas retenu.

Le grief n° 5 , nié par le salarié, ne peut être établi par l’attestation de la victime supposée.

Le grief n°6 est établi, M. [D] [I] n’ayant rendu son matériel professionnel, dont son ordinateur que le 20 mars 2019.

L’ensemble des griefs retenus caractérisent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rendait impossible le maintien de M. [D] [I] dans l’entreprise pendant la durée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l’employeur.

La faute grave étant établie par l’employeur, le jugement entrepris qui a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse est infirmé de ce chef et en ce qu’il a alloué au salarié des sommes au titre du rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire et des congés payés afférents, de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l’indemnité de licenciement et de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2-Sur la demande de rappel de rémunération variable

Le salarié demande une somme de 4500 euros de ce chef. Il expose qu’alors que son contrat de travail prévoit une rémunération variable de 3000 euros par an, il n’a reçu qu’une somme de 1500 euros sur deux ans. Il souligne que le variable pour ‘objectifs qualitatifs opérationnels’ est flou et que le client Engie ayant été satisfait de lui, la somme de ce chef aurait dû lui être versée.

L’employeur soutient que M. [D] [I] n’a pas rempli les objectifs qualitatifs fixés au titre de l’année 2017 et n’a satisfait aucun des objectifs qui lui ont été fixés, tant en termes qualitatifs que quantitatifs, au titre de l’année 2018.

Aux termes de l’avenant signé par le salarié, il est prévu le versement d’une rémunération variable, au bout d’un an, sur atteinte d’objectifs annuels et décomposée de la manière suivante :

‘ une rémunération variable de 1.500 € qui se déclenche sur atteinte des objectifs qualitatifs opérationnels lesquels se composent comme suit:

‘ o satisfaction client sur les projets et livrables fournis

o participation le cas échéant aux réponses aux référencements, réponses aux appels d’offre

o véhiculer une bonne image d’EVA GROUP au sein des comptes clients

o participer à la vie interne : participation régulière sur le réseau social d’entreprise yammer, partage d’expériences au sein de la communauté technique, publication d’articles en interne ou à l’extérieur

Ainsi qu’une une rémunération variable de 1.500 € qui se déclenche sur atteinte des objectifs quantitatifs opérationnels se caractérisant par le fait de remonter à la direction commerciale au moins 4 besoins client correspondant à nos domaines d’activité avec un donneur d’ordre identifié.’

Il ressort de l’évaluation pour 2017 que M. [D] [I] n’a pas satisfait complètement le client Engie en ce qui concerne la communication et le leadership au sein des équipes. Il est noté que les mêmes reproches peuvent lui être fait en interne. Pour 2018, il est noté que M. [D] [I] a été absent de la vie de l’entreprise et n’a rien apporté à la communauté technique. Pour contrer ces élements, le salarié ne produit aucune pièce.

Il ne sera pas fait droit à sa demande au titre de la rémunération variable.

Le jugement est confirmé de ce chef.

3-Sur la demande de rappel de salaire

En application des articles L.3121-27 et L.3121-28 du code du travail, la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine et toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent. L’article L.3121-36 du même code prévoit que, à défaut d’accord, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée à l’article L. 3121-27 ou de la durée considérée comme équivalente donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires et 50% pour les suivantes.

Aux termes de l’article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte du temps de travail accompli par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures de travail il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Il a été jugé que constituent des éléments suffisamment précis des tableaux mentionnant le décompte journalier des heures travaillées, peu important qu’ils aient été établis par le salarié lui-même pour les besoins de la procédure.

En l’espèce, au soutien de sa prétention, le salarié affirme qu’il a travaillé 220 jours par an alors que son forfait prévoit 219 jours par an.

Il ne présente cependant aucun élément quant à la journée qu’il prétend avoir effectuée en sus de son forfait en jours, ne permettant ainsi pas à son employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le salarié est débouté de sa demande de ce chef et le jugement confirmé.

4-Sur la demande de rappel de salaire au titre de la suspension du complément de salaire pendant l’arrêt maladie

Le salarié explique que durant son arrêt maladie du 22 février au 8 mars 2019 pendant lequel les sorties étaient autorisées sans restrictions, la société a mandaté un médecin pour procéder à une contre visite, le 26 février 1019 à 15h05 et que, étant absent lors du passage de ce médecin, la société a cru pouvoir suspendre le complément de salaire. Il réclame la somme non versée.

La société répond que l’intéressé était absent de son domicile lors de la contre-visite, que lorsque les sorties sont libres, le salarié doit faire connaître l’adresse et les horaires auxquels le salarié en arrêt de travail peut être visité, ce que n’a pas fait M. [D] [I], si bien que le versement du complément de salaire a été suspendu.

En contrepartie du maintien total ou partiel du salaire pendant l’arrêt maladie, l’employeur peut faire effectuer par le médecin de son choix une contre-visite médicale, afin de vérifier si l’arrêt de travail est justifié (C. trav. art. L. 1226-1).

La contre-visite s’effectue en principe au domicile du salarié. Lorsque le certificat médical d’arrêt de travail porte la mention « sorties libres », l’employeur doit être informé par le salarié des horaires et du lieu où la contre-visite peut se dérouler (Cass. soc., 16 mars 2016, nº 14-16.588 ; Cass. soc., 4 févr. 2009, nº 07-43.430).

Lorsque le médecin mandaté par l’employeur n’a pu effectuer la contre-visite en raison de l’absence du salarié, l’employeur peut cesser de verser les indemnités complémentaires pour la période postérieure au contrôle (Cass. soc., 10 oct. 1995, nº 91-45.242).

Dès lors, le salarié est débouté de sa demande de ce chef et le jugement confirmé.

5-Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité

La cour rappelle qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

Au cas d’espèce, cette demande de dommages et intérêts, formulée dans le corps des conclusions de l’intimé, n’est pas reprise au dispositif des conclusions. La cour n’en est ainsi pas saisie.

Sur les demandes accessoires

Le jugement est infirmé sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile sauf en ce qu’il a débouté la Société EVA GROUP aux droits de laquelle vient la société SOPRA STERIA INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES, de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Partie perdante, M. [D] [I] est condamné aux dépens d’appel.

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel au profit de l’une ou l’autre des parties.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de sa saisine,

INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. [D] [I] et lui a alloué une somme au titre du rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire et des congés payés afférents, de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l’indemnité de licenciement et de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile sauf en ce qu’il a débouté la société Eva Group de sa demande au titre de ses frais irrépétibles,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et Y ajoutant,

DIT le licenciement pour faute grave de M. [D] [I] en date du 3 avril 2019 justifié,

DÉBOUTE M. [D] [I] de sa demande d’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents , d’indemnité de licenciement, d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande de rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire et des congés payés afférents,

DÉBOUTE M. [D] [I] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile, en première instance,

DÉBOUTE les parties de leur demande respective au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel,

CONDAMNE M. [D] [I] aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier Le président de chambre

 


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