Convention collective Syntec : 1 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/01754

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Convention collective Syntec : 1 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/01754

1 mars 2023
Cour d’appel de Paris
RG
21/01754

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRET DU 01 MARS 2023

(n° 2023/ , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/01754 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDGKF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Janvier 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 19/07584

APPELANTE

Association UNEDIC Délégation AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Claude-Marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953

INTIMÉS

Monsieur [T] [E]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Véronique DE LA TAILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

S.C.P. BTSG prise en la personne de Me [F] [L] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL CEG FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 5]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 janvier 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

– réputé contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

La société CEG France a employé M. [T] [E], né en 1988, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2017 en qualité d’analyste senior.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (SYNTEC).

Sa rémunération mensuelle brute moyenne s’élevait en dernier lieu à la somme de 6 250 €.

Par lettre notifiée le 5 juin 2019, M. [E] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement économique.

La procédure de licenciement n’a pas été menée à son terme.

Réclamant diverses indemnités et la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société CEG France, M. [E] a saisi le 16 août 2019, le conseil de prud’hommes de Paris.

La société CEG France a fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire en date du 11 décembre 2019, la date de cessation des paiements étant fixée au 27 octobre 2019.

La SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] [L] a été désignée liquidateur judiciaire de la société CEG France.

La SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] [L] et l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest ont été mises en cause ou sont intervenues volontairement.

La société CEG France occupait à titre habituel moins de onze salariés.

Par jugement du 11 janvier 2021 auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes a rendu la décision suivante :

« Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [T] [E] aux torts exclusifs de l’employeur à effet du 16 août 2019 ;

Dit que la résiliation judiciaire constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Fixe la créance de Monsieur [T] [E] au passif de la société SARL CEG

FRANCE représentée par la SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] [L], ès qualité de mandataire liquidateur et en présence de l’AGS CGEA lDF OUEST aux sommes suivantes :

– 18 750 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

– 1 875 € à titre de congés payés afférents ;

– 3 125 € à titre d’indemnité légale de licenciement ;

– 6 250 € (un mois de salaire) à titre d’indemnité relative à l’irrégularité du licenciement ;

Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation soit le 03 janvier 2020 et jusqu’au jour d’ouverture de la procédure collective.

– 37 500 € à titre de dommages et intérêts pour impossibilité de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprises ;

Ordonne à la SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] [L], ès qualité de mandataire liquidateur de la société SARL CEG FRANCE la remise des documents sociaux ;

– 1 500 au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Déboute Monsieur [T] [E] du surplus de ses demandes ;

Déclare les créances opposables à I’ AGS CGEA IDF OUEST dans les limites de de sa garantie ; »

L’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest a relevé appel de ce jugement par déclaration du 9 février 2021.

La constitution d’intimée de M. [E] a été transmise par voie électronique le 26 mars 2021.

La SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] [L], liquidateur judiciaire de la société CEG France, n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue à la date du 15 novembre 2022.

L’affaire a été appelée à l’audience du 16 janvier 2023.

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 3 mai 2021, l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest demande à la cour de :

« A TITRE PRINCIPAL

Réformer le jugement entrepris,

Fixer la date de la résiliation judiciaire au 11 janvier 2021, date du jugement qui l’a constaté,

Dire ce que de droit sur le préavis et les congés payés,

Dire ce que de droit sur l’indemnité de licenciement,

Vu l’article L 1235-3 du code du travail,

Réduire l’indemnité pour licenciement injustifié à 0.5 mois de salaire,

Vu l’article L 3253-8 du code du travail,

Dire les indemnités de rupture non garanties par l’AGS,

Débouter [T] [E] de ses autres demandes,

A tous le moins,

Vu l’article L 3253-8 du code du travail,

Dire l’indemnité pour absence de bénéfice à l’ACRE non garantie par l’AGS,

Dans tous les cas,

Dire le jugement opposable à l’AGS dans les termes et conditions de l’article L 3253-19 du code du travail,

Vu l’article L 3253-8 du code du travail,

Exclure l’astreinte de la garantie de l’AGS,

Exclure de l’opposabilité à l’AGS la créance éventuellement fixée au titre de l’article 700 du CPC,

Vu les articles L.3253-6, L.3253-8 et L.3253-17 du code du travail, dire le jugement opposable dans la limite du plafond 4 toutes créances brutes confondues, sous déduction celle de 23 750,00€,

Vu l’article L 621-48 du code de commerce,

Rejeter la demande d’intérêts légaux,

Dire ce que de droit quant aux dépens sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’AGS. »

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 9 novembre 2022, M. [E] demande à la cour de :

« Débouter l’AGS CGEA de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à effet du 16 août 2019 et dit que la résiliation judiciaire constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a ordonné la fixation des créances privilégiées suivantes entre les mains de Maître [L] ès-qualités :

‘ 18.750 € au titre de l’indemnité de préavis,

‘ 1.875 € au titre des congés payés y afférents,

‘ 3.125 € au titre de la prime de licenciement légale,

‘ 6.250 € au titre de l’indemnité relative à l’irrégularité du licenciement.

Déclarer la décision prud’homale du 11 janvier 2021 irrévocable en ce qu’elle a fixé les créances suivantes et confirmer en tant que de besoin la partie de la décision relative aux créances privilégiées suivantes :

‘ 18.750 € au titre de l’indemnité de préavis,

‘ 1.875 € au titre des congés payés y afférents,

‘ 3.125 € au titre de la prime de licenciement légale,

‘ 6.250 € au titre de l’indemnité relative à l’irrégularité du licenciement.

Confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a fixé la créance de dommages et intérêts pour impossibilité de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise.

Fixer la créance de dommages et intérêts au titre de l’impossibilité définitive de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise à la somme de 38.106 €.

Confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a jugé que la totalité de la décision est opposable à l’UNEDIC délégation AGS CGEA IDF Ouest dans les conditions de plafond de garanties applicables au contrat de travail du 20 juin 2017.

Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a limité à 37.500 € le montant des dommages et intérêts alloués,

Et statuant à nouveau sur ce point :

Fixer la créance privilégiée au titre des dommages et intérêts à la somme de 50.250 € au titre de la réparation de la perte de chance de souscrire un contrat de sécurisation professionnelle lors de l’entretien préalable au licenciement économique.

Subsidiairement :

Fixer la créance privilégiée au titre de la perte de chance résultant de l’impossibilité de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise à la somme de 38.106 €.

En tout état de cause :

Déclarer la totalité de la décision à intervenir opposable à l’UNEDIC délégation AGS CGEA IDF Ouest dans les conditions de plafond de garanties applicables au contrat de travail du 20 juin 2017.

Condamner l’UNEDIC délégation AGS CGEA IDF Ouest à garantir au salarié le versement des sommes qui lui sont dues dans le cadre desdits plafonds.

Fixer à la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile la créance qui sera inscrite au passif chirographaire de la liquidation judiciaire CEG France.

Condamner l’UNEDIC délégation AGS CGEA IDF Ouest aux entiers dépens. »

Lors de l’audience présidée selon la méthode dite de la présidence interactive, le conseiller rapporteur a fait un rapport et les conseils des parties ont ensuite plaidé par observations et s’en sont rapportés pour le surplus à leurs écritures ; l’affaire a alors été mise en délibéré à la date du 1er mars 2023 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC)

MOTIFS

Vu le jugement du conseil de prud’hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur la date d’effet de résiliation judiciaire

M. [E] demande par confirmation du jugement la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société CEG France à effet à la date de la saisine du conseil de prud’hommes soit le 16 août 2019. Il fait valoir aussi par confirmation du jugement qu’il a reçu une lettre de convocation à un entretien préalable à son licenciement économique, que l’entreprise s’est arrêtée de fonctionner peu après et que l’employeur ne lui a pas remis de convention de sécurisation professionnelle ni aucun autre document de fin de contrat. Il ajoute qu’il n’était plus à la disposition de la société CEG France à la date de la saisine du conseil de prud’hommes et que son contrat de travail a pris fin au plus tard le 16 août 2019.

L’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest demande la fixation de la date de la résiliation judiciaire au 11 janvier 2021 ; elle soutient que la date d’effet de la résiliation ne peut être fixée qu’au jour de la décision qui la prononce, dès lors que le contrat n’a pas été rompu avant cette date.

La cour constate que les deux parties sont d’accord pour que la résiliation judiciaire du contrat de travail soit prononcée mais elles s’opposent sur la date, M. [E] invoquant la date de saisine du conseil de prud’hommes et le fait qu’il n’était plus à la disposition de la société CEG France à cette date et l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest invoquant la date du jugement.

En ce qui concerne la date de la résiliation judiciaire, la cour retient que l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest est bien fondée à demander à la cour de fixer la date de la résiliation judiciaire au 11 janvier 2021, qui est la date du jugement qui l’a constatée, au motif qu’en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d’effet de la résiliation ne peut être fixée qu’au jour de la décision qui la prononce dès lors que le contrat n’a pas été rompu avant cette date et que le salarié est toujours au service de l’employeur étant précisé qu’en l’espèce M. [E] n’établit pas suffisamment qu’il n’était plus au service de la société CEG France ou que son contrat de travail a été rompu alors même que l’employeur a abandonné la procédure de licenciement économique engagée le 5 juin 2019 ; en effet le certificat d’inscription au SIRENE (pièce salarié n° 8) est le seul élément de preuve qu’il produit pour prouver qu’il n’était plus au service de la société CEG France, ce qui ne suffit aucunement à prouver cette allégation ; en effet si ce certificat d’inscription au SIRENE est à son nom et date du 6 août 2019, non seulement M. [E] ne produit aucun élément de preuve, comme des factures par exemple, sur la réalité de l’activité de conseil de cette entreprise inscrite à son nom le 6 août 2019, mais en outre il ne produit aucun élément de preuve établissant qu’il n’était plus au service de la société CEG France, comme des attestations.

Le jugement n’étant pas critiqué en ce qui concerne le principe de la résiliation judiciaire, Le jugement déféré est infirmé dans les limites de l’appel en ce qu’il a fixé la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail au 16 août 2019, et statuant à nouveau de ce chef, la cour fixe la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [E] à la date du jugement qui l’a prononcée et donc à la date du 11 janvier 2021.

Sur les dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de souscrire un contrat de sécurisation professionnelle lors de l’entretien préalable au licenciement économique

M. [E] demande par infirmation du jugement la somme de 50 250 € à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de souscrire un contrat de sécurisation professionnelle lors de l’entretien préalable au licenciement économique ; l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest s’oppose à cette demande qui doit de surcroît être limitée à 0,5 mois de salaire faute de preuve des préjudices subis.

A l’examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que l’indemnité à même de réparer intégralement le préjudice subi par M. [E] du chef de la perte de chance de souscrire un contrat de sécurisation professionnelle lors de l’entretien préalable au licenciement économique doit être évaluée à la somme de 6 250 €.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu’il a débouté M. [E] de sa demande de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de souscrire un contrat de sécurisation professionnelle lors de l’entretien préalable au licenciement économique et statuant à nouveau de ce chef, la cour fixe la créance de M. [E] au passif de la société CEG France à la somme de 6 250 € à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de souscrire un contrat de sécurisation professionnelle lors de l’entretien préalable au licenciement économique.

Sur les dommages et intérêts pour procédure irrégulière

M. [E] demande par confirmation du jugement une indemnité de 6 250 € à titre de dommages et intérêts pour procédure irrégulière ; l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest s’oppose à cette demande.

La cour retient que la demande de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement est mal fondée au motif que l’indemnité prévue par l’article L. 1235-2 du code du travail ne peut être allouée que lorsque le contrat a été rompu par un licenciement ; par suite, si la résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée à l’initiative du salarié et aux torts de l’employeur produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sorte que le salarié doit être indemnisé par le versement des indemnités de rupture et de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’indemnité prévue en cas de non-respect de la procédure de licenciement n’est pas due.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu’il a fixé la créance de M. [E] au passif de la société CEG France à la somme de 6 250 € au titre des dommages et intérêts pour procédure irrégulière et statuant à nouveau de ce chef, la cour déboute M. [E] de sa demande formée au titre des dommages et intérêts pour procédure irrégulière.

Sur l’indemnité compensatrice de préavis

M. [E] demande par confirmation du jugement la somme de 18 750 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ; l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest ne conteste pas cette demande.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a fixé la créance de M. [E] au passif de la société CEG France à la somme de 18 750 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis.

Sur l’indemnité compensatrice de congés payés afférente à la période de préavis

M. [E] demande par confirmation du jugement la somme de 1 875 € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférente à la période de préavis ; l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest ne conteste pas cette demande.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a fixé la créance de M. [E] au passif de la société CEG France à la somme de 1 875 € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférente à la période de préavis.

Sur l’indemnité de licenciement

M. [E] demande par confirmation du jugement la somme de 3 125 € au titre de l’indemnité de licenciement ; l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest ne conteste pas cette demande.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a fixé la créance de M. [E] au passif de la société CEG France à la somme de 3 125 € au titre de l’indemnité de licenciement.

Sur les dommages et intérêts en réparation de l’impossibilité définitive de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise

M. [E] demande par infirmation du jugement la somme de 38 106 € à titre de dommages et intérêts en réparation de l’impossibilité définitive de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise ; l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest s’oppose à cette demande.

M. [E] fait valoir que :

– l’inscription à Pôle Emploi permet à un demandeur d’emploi de bénéficier de l’aide à la création et à la reprise d’entreprise sans conditions de ressources quand il adopte le statut d’autoentrepreneur ;

– le jugement doit être confirmé puisque son préjudice est au moins équivalent à l’aide qu’il aurait dû percevoir en 2019 ;

– il pouvait solliciter, de manière indépendante de son futur chiffre d’affaires en qualité d’indépendant, l’attribution de 45 % de ses droits sur la période indemnisée de 730 jours, soit 38 106 € soit son salaire journalier de 205 € (75 000 € de salaire annuel) x 57 % (ARE) x 45 % x 730 jours (ARCE).

L’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest s’oppose à cette demande et fait valoir que :

– M. [E] ne remplit pas les conditions de versement de l’aide à la reprise ou à la création d’entreprise (ARCE)

– dans tous les cas, si un salarié s’est inscrit comme demandeur d’emploi, même en l’absence d’ouverture de droit à ARE, ses droits vont être rétablis ; or M. [E] ne s’est même pas inscrit comme demandeur d’emploi : il n’a donc pas subi de perte de chance de percevoir l’ARCE.

Il ressort du Règlement général chômage du 14 mai 2017 (art. 35) et de l’Accord d’application n° 24, du 14 avril 2017 que :

– l’allocataire de l’assurance chômage qui crée ou reprend une entreprise peut bénéficier, sous réserve de remplir les conditions visées ci-dessous, d’une aide spécifique versée par

Pôle emploi : l’aide à la reprise ou à la création d’entreprise (Arce) ;

– l’ARCE est attribuée à l’allocataire qui justifie de l’obtention de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise (Accre) visée à l’article L. 5141-1 du code du travail (exonération de cotisations durant la première année d’activité) ou d’un projet de reprise d’entreprise validé, qui ne cumule pas l’allocation d’aide au retour à l’emploi (Are) avec la rémunération tirée d’une activité occasionnelle ou réduite et dont le projet est validé dans le cadre d’un parcours de reclassement (le porteur du projet est alors inscrit dans le parcours spécifique pour les repreneurs et créateurs d’entreprises et son accompagnement personnalisé est mis en ‘uvre par le Pôle emploi ou tout autre organisme participant au service public de l’emploi) ;

– l’aide à la reprise ou à la création d’entreprise (ARCE) est une aide financière attribuée aux allocataires dont le projet de création ou de reprise d’entreprise a été validé. Cette validation résulte de l’obtention de l’aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprise (ACCRE) ; a contrario, lorsque le repreneur ou créateur d’entreprise n’a pas obtenu l’ACCRE, il ne peut pas bénéficier de l’ARCE.

– le montant de l’ARCE correspond à 45 % du montant brut du reliquat des droits restant, déduction faite de la participation de 3 % au titre du financement des retraites complémentaires, à la date de la création ou de la reprise d’entreprise ou, si cette date est postérieure, à la date d’obtention de l’Accre.

– l’aide est versée en 2 fois : 50 % à la date de début d’activité, après épuisement des différés et du délai d’attente, soit, si cette date est postérieure, lorsque l’intéressé justifie de son admission à l’ACCRE et 50 % après 6 mois sur justification de la poursuite de l’activité par une attestation sur l’honneur, ou par tous documents ou éléments de fait permettant de prouver la poursuite de l’activité professionnelle.

– la demande en paiement de l’ARCE est prescrite par 2 ans à compter du début d’activité de repreneur ou de créateur d’entreprise.

Le dispositif dénommé Accre consiste en une exonération plafonnée et limitée dans le temps de charges sociales réservée aux chômeurs créateurs d’entreprise (C. trav., art. L. 5141-1) ; pour prétendre à l’exonération de cotisations sociales prévue par l’article L. 131-6-4 du code de la sécurité sociale, les chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprise, doivent faire la demande d’attribution d’exonération de cotisations sociales au centre de formalités des entreprises (CFE) dans un délai de 45 jours à compter du dépôt de la déclaration de création ou de reprise (C. trav., art. R. 5141-8) ; s’il est établi que l’aide à la création d’entreprise a été obtenue à la suite de fausses déclarations ou si la condition de contrôle effectif de la société créée ou reprise cesse d’être remplie dans les 2 ans suivant la création ou la reprise, le bénéfice des exonérations de cotisations sociales est retiré par décision de l’Urssaf ; en cas de cessation de l’activité créée ou reprise, ou de cession de l’entreprise dans le cadre d’une procédure judiciaire, le remboursement de l’aide financière ainsi que le versement des cotisations sociales dont le bénéficiaire a été exonéré peuvent ne pas être exigés, sur décision motivée du préfet (C. trav., art. R. 5141-6).

A l’examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que M. [E] est mal fondé dans sa demande de dommages et intérêts en réparation de l’impossibilité définitive de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise au motif qu’il ne prouve pas que s’il avait pu être allocataire de l’assurance chômage, les autres conditions pour bénéficier de l’ARCE auraient été remplies ; il ne justifie notamment pas par la production de son avis d’imposition pour les périodes utiles de ses revenus alors que des conditions existent à ce sujet (exclusion du cumul entre l’allocation d’aide au retour à l’emploi (Are) et une rémunération tirée d’une activité occasionnelle ou réduite) ; il ne produit aucun élément de preuve ni même ne soutient que son projet aurait été validé dans le cadre du parcours de reclassement organisé ou mis en ‘uvre par Pôle emploi, et qu’il aurait bénéficié de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise (Accre) visée à l’article L. 5141-1 du code du travail (exonération de cotisations durant la première année d’activité) ; en outre si M. [E] produit un certificat d’inscription au SIRENE à son nom et au 6 août 2019, il ne produit aucun élément de preuve sur la réalité de l’activité de conseil de cette entreprise inscrite à son nom le 6 août 2019, comme des factures par exemple.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu’il a fixé la créance de M. [E] à la somme de 37 500 € au titre des dommages et intérêts en réparation de l’impossibilité définitive de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise et statuant à nouveau de ce chef, la cour déboute M. [E] de sa demande de dommages et intérêts en réparation de l’impossibilité définitive de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise.

Sur la garantie de l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest

L’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest conteste sa garantie et fait valoir que :

– les indemnités de rupture ne sont pas garanties par l’AGS par application de l’article L. 3253-8 du code du travail ; en effet la rupture qui doit être fixée à la date du jugement est intervenue plus de 15 jours après la liquidation judiciaire ;

– les dommages et intérêts en réparation de l’impossibilité définitive de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise ne sont pas garantis par l’AGS.

M. [E] demande la garantie de l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest.

Il ressort de l’article L.3253-8 du code du travail que les créances nées de la rupture du contrat de travail sont couvertes dès lors que la rupture intervient dans les 15 jours du jugement prononçant la liquidation judiciaire et que la prise en charge de l’AGS doit être écartée quand la rupture n’est pas intervenue dans ces délais et ce quelles que soient le mode de rupture.

A l’examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest est bien fondée à contester sa garantie au motif que la date de rupture du contrat de travail de M. [E] retenue par la cour est celle du 11 janvier 2021 alors que la liquidation judiciaire de la société CEG France a été prononcée par jugement du 11 décembre 2019 en sorte que la rupture n’est pas intervenue dans les 15 jours du jugement prononçant la liquidation judiciaire.

C’est donc en vain que M. [E] revendique la garantie de l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest pour les créances nées de la rupture de son contrat de travail dès lors qu’à défaut d’être licencié par la société CEG France, il n’a pas pris l’initiative de la rupture de son contrat de travail comme il en avait tout à fait la possibilité, par une prise d’acte par exemple.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu’il a déclaré les créances opposables à l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest dans les limites de sa garantie, et statuant à nouveau de ce chef, la cour dit que les indemnités de rupture ne sont pas garanties par l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest.

Sur les autres demandes

La cour condamne la SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] [L], liquidateur judiciaire de la société CEG France aux dépens de la procédure de première instance et de la procédure d’appel en application de l’article 696 du Code de procédure civile.

Le jugement déféré est confirmé en ce qui concerne l’application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il n’apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de M. [E] les frais irrépétibles de la procédure d’appel.

L’ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant nécessairement des motifs amplement développés dans tout l’arrêt.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement mais seulement en ce qu’il a :

– fixé la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail au 16 août 2019 ;

– débouté M. [E] de sa demande de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de souscrire un contrat de sécurisation professionnelle lors de l’entretien préalable au licenciement économique ;

– fixé la créance de M. [E] au passif de la société CEG France à la somme de 6 250 € au titre des dommages et intérêts pour procédure irrégulière ;

– fixé la créance de M. [E] à la somme de 37 500 € au titre des dommages et intérêts en réparation de l’impossibilité définitive de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise ;

– déclaré les créances opposables à l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest dans les limites de sa garantie ;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

FIXE la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [E] à la date du 11 janvier 2021 ;

FIXE la créance de M. [E] au passif de la société CEG France représentée par la SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] [L], liquidateur judiciaire à la somme de 6 250 € à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de souscrire un contrat de sécurisation professionnelle lors de l’entretien préalable au licenciement économique ;

DÉBOUTE M. [E] de sa demande formée au titre des dommages et intérêts pour procédure irrégulière ;

DÉBOUTE M. [E] de sa demande de dommages et intérêts en réparation de l’impossibilité définitive de bénéficier de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise ;

DIT que les indemnités de rupture et les dommages et intérêts alloués à M. [E] ne sont pas garantis par l’Unedic délégation AGS, CGEA d’Île-de-France Ouest ;

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE M. [E] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

CONDAMNE la SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] [L] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société CEG France aux dépens de la procédure de première instance et de la procédure d’appel

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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