Convention collective Syntec : 1 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01787

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Convention collective Syntec : 1 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01787

1 juin 2023
Cour d’appel de Versailles
RG
21/01787

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

15e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 01 JUIN 2023

N° RG 21/01787 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UR3O

AFFAIRE :

S.A.S. LEVEL WAN INGENIERIE (LWI)

C/

S.A.S.U. SOPRA STERIA INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Avril 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE –

BILLANCOURT

N° Section : E

N° RG : F 18/00799

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Christophe DEBRAY

Me Jérôme POUGET

Me Carole RUFFIN DESJARDINS de la SELEURL CRD AVOCATS

Me Emmanuel JOB de la SELARL Cabinet HIRSCH Avocats Associés

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE PREMIER JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.S. LEVEL WAN INGENIERIE (LWI)

N° SIRET : 403 725 393

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentant : Me Philippe CHEMOUNY de l’AARPI CHEMOUNY ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0505 – Représentant : Me Christophe DEBRAY, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627

APPELANTE

****************

S.A.S.U. SOPRA STERIA INFRASTRUCTURE & SECURITY SERVICES

N° SIRET : 805 020 740

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Jérôme POUGET, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1366

Monsieur [N] [C]

né le 09 Mai 1957 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Carole RUFFIN DESJARDINS de la SELEURL CRD AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1345

S.A. SNCF RÉSEAU

N° SIRET : 412 280 737

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentant : Me Emmanuel JOB de la SELARL Cabinet HIRSCH Avocats Associés, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1665, substitué par Me Isabelle GOESTER, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 Avril 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE,

****************

Par contrat de travail à durée indéterminée du 4 janvier 2002, M. [C] a été engagé par la société CMO en qualité d’ingénieur technico-commercial.

M. [C] a été employé successivement par la société CMO, par la société GDA informatique et par la société Level Wan Ingénierie, respectivement sous-traitantes des sociétés Transiciel, Sogeti, Sopra Steria, toutes partenaires de la SA SNCF. La société Level Wan Ingénierie a sous-traité à la société Latitude concept.

Le 1er mars 2013, M. [C] a démissionné de la société Latitude Concept, et a été embauché le 1er avril 2013 par la société Level Wan Ingénierie.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale Syntec.

Le 17 mai 2016, la SA SNCF Réseau a déposé plainte contre X auprès de la brigade des fraudes pour intrusion dans son système de traitement automatisé de données.

Le 3 novembre 2016, M. [C] a reconnu avoir utilisé le compte d’un salarié absent pour intégrer le logiciel de la SNCF sans autorisation.

Le 3 avril 2017, M. [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris en sa formation des référés pour obtenir la copie de documents, il a été débouté de sa demande.

Par courrier recommandé avec demande d’avis de réception du 20 avril 2017, M. [C] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, avec mise à pied conservatoire, s’étant déroulé le 9 mai 2017, en présence du salarié.

Par courrier recommandé avec demande d’avis de réception du 16 mai 2017, la SAS Level Wan Ingénierie a notifié à M. [C] son licenciement pour faute grave, lui reprochant notamment d’avoir outrepassé le cadre de ses fonctions en infiltrant frauduleusement un nouvel outil informatique, en perturbant ainsi le fonctionnement.

Par jugement du 11 décembre 2017 du tribunal correctionnel de Paris, M. [C] a été reconnu coupable d’accès frauduleux dans un système de traitement automatisé de données.

Par arrêt du 9 mars 2020, la cour d’appel de Paris a confirmé cette décision.

Par requête reçue au greffe le 18 juin 2018, M. [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin d’obtenir la requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse et le versement de diverses sommes, notamment des dommages et intérêts pour marchandage et prêt illicite de main d »uvre.

Par jugement du 8 avril 2021, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt :

– S’est déclaré matériellement compétent,

– A dit :

– Qu’il n’existe ni marchandage, ni prêt illicite de main d »uvre, M. [C] disposant d’un contrat de travail auprès de la seule SAS Level Wan Ingénierie, contrat établi le 1er avril 2013.

– Que le licenciement intervenu par courrier du 16 mai 2017 est sans cause réelle et sérieuse,

– Fixé le salaire de M. [C] à la somme mensuelle brute de 6 200 euros,

– Condamné la SAS Level Wan Ingénierie prise, la personne de son représentant légal à verser à M. [C] les sommes de :

*31 000 euros nets au titre de dommages et intérêts pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse

*4 864,59 euros bruts au titre du rappel de salaire de mise à pied du 20 avril 2017 au 16 mai 2017

*486,46 euros bruts au titre de congés payés sur le salaire de mise à pied

*18’600 euros bruts au titre de l’indemnité de préavis

*1’860 euros bruts au titre des congés payés sur préavis

*8’952,64 euros nets au titre de l’indemnité de licenciement

*18’332,37 euros bruts au titre de rappels de salaire pour congés acquis non pris

*1’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– Ordonné l’exécution provisoire de droit au titre de l’article R 1454-28 du code du travail, la moyenne des 3 derniers mois de salaire s’élevant à 6 200 euros bruts.

– Mis les dépens de la présente instance à la charge de la SAS Level Wan Ingénierie

– Débouté :

*M. [C] du surplus de ses demandes

*La SAS Level Wan Ingénierie de sa demande

*La SAS SNCF Réseau de sa demande

*La SA Sopra Steria Infrastructure & security services de sa demande.

Par déclaration au greffe du 9 juin 2021, la SAS Level Wan Ingénierie a interjeté appel de cette décision.

Par déclaration au greffe du 11 juin 2021, M. [C] a interjeté appel de cette décision.

Par exploit d’huissier 26 novembre 2021, M. [C] a fait délivrer une assignation portant appel provoqué contre la société Sopra Steria et la société SNCF Réseau.

Par ordonnance de jonction du 24 mai 2022, le conseiller de la mise en état a joint les deux procédures.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 17 février 2023, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens la SAS Level Wan Ingénierie (LWI) demande à la cour de :

– Déclarer irrecevable et en tout cas infondés l’appel principal et l’appel incident de Monsieur [N] [C], à l’encontre du jugement du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt, en date du 8 avril 2021,

– Débouter Monsieur [N] [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires au présent dispositif,

– Confirmer les chefs du jugement déféré en ce qu’ils ont rejeté toutes les demandes de Monsieur [N] [C] de condamnation solidaire, au titre de prétendus délits de prêt illicite de main d »uvre et/ou de marchandage,

– Déclarer recevables et bien fondés l’appel principal et l’appel incident de la société LWI,

– Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt, en date du 8 avril 2021, en ce qu’il :

a refusé de reconnaître l’existence d’une faute grave privative de préavis,

dit que le licenciement intervenu par courrier du 16 mai 2017 était sans cause réelle et sérieuse,

condamné par conséquent la société Level Wan Ingenierie à verser à son ancien salarié Monsieur [N] [C] les sommes de :

*31 000 euros nets, au titre de dommages et intérêts pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*4 864,59 euros bruts, au titre du rappel de salaire de mise à pied du 20 avril 2017 au 16 mai 2017,

*486,46 euros bruts, au titre de congés payés sur le salaire de mise à pied,

*18 600 euros bruts, au titre de l’indemnité de préavis,

*1 860 euros bruts au titre des congés payés sur préavis,

*8 952,64 euros nets, au titre de l’indemnité de licenciement,

*18 332,37 euros bruts, au titre de rappel de salaire pour congés acquis et non pris,

*1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

ordonné l’exécution provisoire de droit au titre de l’article R. 1454-28 du code du travail, la moyenne des 3 derniers mois de salaire s’élevant à 6.200 euros bruts,

mis’ les’ dépens’ de’ l’instance’ à’ la’ charge’ de’ la’ société Level Wan Ingenierie et débouté cette dernière de toutes ses autres demandes,

Et statuant à nouveau sur ces chefs présentement déférés,

– Juger que Monsieur [N] [C] a commis une faute grave légitimant sa mise à pied’ conservatoire,’ son’ licenciement’ sans’ indemnité de’ préavis’ ni’ indemnité’ de licenciement,

– Débouter Monsieur [N] [C] de toutes ses demandes indemnitaires, rappels de congés payés perdus, fins et conclusions,

Subsidiairement,

– Juger que le licenciement est fondée sur une cause réelle et sérieuse de licenciement,

En tout état de cause,

– Condamner’ Monsieur’ [N]’ [C] à’ payer’ à’ la’ société’ Level Wan Ingenierie, la somme de 10 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner’ Monsieur’ [N]’ [C] aux’ dépens,’ tout’ en’ autorisant’ Maître Christophe Debray, avocat au barreau de Versailles, à en poursuivre le recouvrement en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 8 mars 2023, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, M. [C] demande à la cour de :

– Déclarer recevable l’appel formé par Monsieur [C] et le dire bien fondé,

– Confirmer le jugement en ce que le conseil s’est déclaré matériellement compétente, qu’il a jugé le licenciement intervenu par courrier du 16 mai 2017 sans cause réelle et sérieuse, et fixé le salaire de Monsieur [C] à 6 200 euros bruts,

– Infirmer le jugement en ce qu’il a :

– dit qu’il n’existe ni marchandage, ni prêt illicite de main-d »uvre,

– Condamné la société LWI à payer à Monsieur [C] les sommes de :

*31 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*4 864,59 euros bruts au titre du rappel de salaire de mise à pied du 20 avril 2017 au 16 mai 2017,

*486,46 euros bruts au titre de congés payés sur le salaire de mise à pied,

*18 600 euros bruts au titre de l’indemnité de préavis,

*1 860 euros bruts au titre des congés payés sur préavis,

*8952,64 euros nets à titre d’indemnité de licenciement,

*18 332,37 euros bruts au titre de rappel de salaire pour congés payés acquis non pris

Statuant à nouveau,

Condamner in solidum la société LWI, la société SNCF Réseau, la société Sopra Steria I2S à payer à Monsieur [C] aux sommes suivantes :

*Indemnité de préavis : 18 600 euros bruts,

*Congés payés afférents : 1 860 euros bruts,

*Salaire pendant la mise à pied du 25 avril 2017 au 18 mai 2017 : 4 864,59 euros,

*Congés payés afférents : 486,46 euros,

*Reliquat d’indemnité compensatrice de congés payés : 18 332,37 euros,

*Indemnité de licenciement : 32 630,66 euros,

*Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (13 mois) : 80 600 euros nets,

*Dommages et intérêts pour marchandage et prêt illicite de main d »uvre (24 mois) : 148 400 euros,

– Ordonner la remise de bulletins de salaire, attestation Pôle Emploi et certificat de travail conformes au jugement,

– Condamner in solidum des parties défenderesses à lui payer, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros,

– Assortir les condamnations de l’intérêt au taux légal et d’ordonner la capitalisation sur le fondement de l’article 1154 du code civil,

– Débouter les parties intimées de leurs demandes,

– Condamner solidairement les parties défenderesses aux dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 16 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, la SASU Sopra Steria Infrastructure & Security Services (ci-après «Sopra Steria») demande à la cour de :

A titre principal :

– D’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur sa compétence matérielle,

En conséquence, de se déclarer incompétente au profit du tribunal de grande instance de Paris,

A titre subsidiaire :

– Confirmer’ le’ jugement’ du’ conseil’ de’ prud’hommes’ sur’ l’absence’ de’ marchandage’ et l’absence de prêt de main d »uvre illicite,

– Confirmer’ le’ jugement’ du’ conseil’ de’ prud’hommes’ sur’ l’absence’ de’ condamnation’ in solidum entre La société Sopra Steria I2S, société LWI et SNCF Réseau,

– Infirmer’ le’ jugement’ du’ conseil’ de’ prud’hommes’ sur’ le’ bien-fondé’ du’ licenciement’ et juger que le licenciement pour faute grave de Monsieur [C] est fondé,

En conséquence, débouter Monsieur [C] de l’ensemble de ses demandes,

En tout état de cause :

– Condamner Monsieur [C] aux dépens ainsi qu’à la somme de 3.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 22 février 2023, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, la SA SNCF Réseau demande à la cour de :

– Dire et juger l’action de M. [C] en reconnaissance d’une situation de co-emploi, de prêt illicite de main d »uvre ou de marchandage, prescrite et les demandes afférentes irrecevables,

En tout état de cause, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que :

*la S.A SNCF Réseau, venant aux droits de l’EPIC SNCF Réseau, ne peut se voir imputer un prêt illicite de main d »uvre ou un délit de marchandage,

*la S.A SNCF Réseau ne peut voir sa responsabilité recherchée dans la rupture du contrat de travail de M. [C] par son employeur, la société LWI,

En conséquence, débouter M. [C] de l’ensemble de ses demandes en ce qu’elles sont dirigées contre la S.A SNCF Réseau,

– Condamner M. [C] à payer à la S.A SNCF Réseau une somme de 5.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Le condamner également aux dépens de première instance et appel.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 15 mars 2023.

SUR CE,

Sur l’exception d’incompétence

La société Sopra Steria soulève in limine litis une exception d’incompétence au profit du tribunal de grande instance de Paris, à laquelle s’oppose M. [C] ; elle fait valoir que M. [C] n’indique pas dans ses écritures être son salarié et, subsidiairement, que M. [C] ne rapporte pas la preuve « de ce prétendu contrat de travail » ;

Selon l’article L.1411-3 du code du travail, « le conseil de prud’hommes règle les différends et litiges nés entre salariés à l’occasion du travail » ;

Si M. [C] ne sollicite pas expressément la reconnaissance d’un contrat de travail avec la société Sopra Steria, il invoque toutefois, au-delà des apparences des contrats passés entre les parties dans la cause, la réalité des rapports liés à son travail et forme des demandes au titre du marchandage et prêt illicite de main d »uvre impliquant cette dernière entreprise dont il sollicite la condamnation in solidum – avec la société LW et la société SNCF Réseau – à lui payer différentes sommes tant au titre du marchandage et prêt illicite de main d »uvre qu’en lien avec la rupture de son contrat de travail ;

Il s’ensuit que la juridiction prud’homale est matériellement compétente pour statuer sur ces demandes ;

Le jugement est confirmé sur ce point ;

Sur le marchandage et le prêt illicite de main d »uvre

M. [C] considère qu’au-delà de l’apparence des contrats entre les sociétés LWI, Sopra Steria et SNCF Réseau, les prestations qu’il exécutait s’inscrivaient dans le cadre d’un prêt illicite de main d’oeuvre et d’un marchandage ; les sociétés en question le contestent ; la société SNCF Réseau soulève tout d’abord la prescription de l’action de M. [C] « en reconnaissance d’une situation de co-emploi, de prêt illicite de main d »uvre ou de marchandage, prescrite » ;

Selon l’article L.8241-1 du code du travail,

« Toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d »uvre est interdite.

Toutefois, ces dispositions ne s’appliquent pas aux opérations réalisées dans le cadre :

1° Des dispositions du présent code relatives au travail temporaire, aux entreprises de travail à temps partagé et à l’exploitation d’une agence de mannequins lorsque celle-ci est exercée par une personne titulaire de la licence d’agence de mannequin ;

2° Des dispositions de l’article L. 222-3 du code du sport relatives aux associations ou sociétés sportives ;

3° Des dispositions des articles L. 2135-7 et L. 2135-8 du présent code relatives à la mise à disposition des salariés auprès des organisations syndicales ou des associations d’employeurs mentionnées à l’article L. 2231-1.

Une opération de prêt de main- d »uvre ne poursuit pas de but lucratif lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition. » ;

L’article L. 8231-1 du même code dispose que :

« Le marchandage, défini comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d »uvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail, est interdit. » ;

L’article L.1471-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, prévoit dans ses alinéas un et deux que :

« Toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

Toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture » ;

En l’espèce, M. [C] a initialement saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 3 avril 2017 ;

Il se réfère à des échanges de courriels dont certains remontent à 2008, 2010, 2011 et 2012, ce qui révèle qu’il avait de longue date connaissance de sa situation auprès de la SNCF, étant rappelé que ses prestations auprès de ce client avaient débuté en 2002 ;

La lettre de licenciement lui a été notifiée le 16 mai 2017 par la société LWI, traduisant le pouvoir disciplinaire de cette dernière avec laquelle il avait conclu un contrat à durée indéterminée.

L’existence d’un co-emploi, d’un prêt illicite de main d »uvre ou d’un marchandage dépendant des conditions dans lesquelles est exercée l’activité, le point de départ du délai de prescription est la date à laquelle la relation contractuelle revendiquée a cessé, date à laquelle l’intéressé connaît l’ensemble des faits lui permettant d’exercer son droit.’

Dès lors, les demandes relatives au prêt illicite de main d »uvre et au marchandage ne sont pas prescrites ;

Toutefois, si M. [C] produit quelques échanges de mails émanant de la SNCF Réseau relatif à la préparation de son plan de charge ou lui demandant de communiquer des jours pour une mission au sein du pôle RAC, lesquels font plutôt ressortir qu’il était alors interrogé sur ses possibilités d’être ou non présent, il soutient à tort que ses prestations ne relevaient d’aucun savoir-faire spécifique ; il mettait au contraire au service du client SNCF un savoir-faire véritable et reconnu comme tel et il ressort de l’audition du dirigeant de la société LWI dans le cadre de l’enquête préliminaire que M. [C] exerçait au sein de la SNCF Réseau des fonctions de développeur et administrateur en «développ[ant] des programmes informatiques, de A à Z, depuis la conception du programme jusqu’à sa mise en oeuvre» et que «SericeNow est venu remplacer [chez ce client] un outil conçu par M. [C] » ;

Il n’est pas établi que M. [C] recevait ses directives uniquement de la SNCF, étant précisé que les demandes générales ou ponctuelles émises correspondaient à des échanges normaux s’inscrivant dans l’exécution d’une sous-traitance ;

Le contrat de travail de M. [C] conclu avec la société LWI dans les fonctions de « ingénieur technico-commercial, avec une forte activité opérationnelle de développement informatique » prévoyait que « votre activité vous amène naturellement à être présent dans les locaux de nos clients et partenaire » ;

En application des contrats conclus, la SNCF Réseau sous-traitait certaines prestations à la société Sopra Stéria qui sous-traitait elle-même certaines d’entre elles à la société LWI, dans le cadre d’une relation de prestation de services ; LWI effectuait des prestations de service, notamment auprès de la SNCF, dépassant la seule intervention de M. [C] ;

Les factures produites aux débats adressées à la société Sopra Steria par LWI étaient établies sur une base forfaitaire ;

En outre, il n’est pas établi de préjudice subi par M. [C] dans le cadre de son activité professionnelle, alors que, comme l’ont souligné les premiers juges, les salaires moyens des salariés en charge des activités informatiques au sein de la SNCF demeuraient inférieurs aux salaires perçus par M. [C] et que les facturations de la société LWI concernant les prestations fournies dépassaient largement le salaire de ce dernier charges salariales et patronales comprises ;

Ni le prêt illicite de main d’oeuvre ni le marchandage ne sont ainsi caractérisés, de sorte qu’il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté les demandes formées à ce titre ;

Sur les rappels de salaire pour congés acquis non pris

A la fin du mois d’avril 2017, M. [C] avait acquis 27,5 jours de congés payés et cumulé au titre des exercices précédents 60 jours de congés payés ;

Il sollicite la somme de 18 332,37 euros correspondant à la différence entre 25 037,91 euros calculés sur la base de 87,5 jours et le montant de 6 705,54 euros reçu de l’employeur ;

Si la société LWI soutient que les congés non pris sur la période antérieure à celle de juin 2016 à mai 2017 sont perdus, elle n’établit pas avoir pris les mesures nécessaires pour que M. [C] puisse bénéficier de ses congés payés ;

Dans ces conditions, M. [C] est bien fondé à solliciter le paiement de la somme complémentaire de 18 332,37 euros ; le jugement est confirmé de ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail’:

Sur le licenciement

La société Level Wan Ingénierie soutient, en se référant aux griefs développés dans la lettre de licenciement, que M. [C] a commis une faute grave et conteste la prescription des faits fautifs invoquée en réplique par ce dernier qui, subsidiairement, estime que le licenciement est infondé ;

En application de l’article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ;

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ;

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis ; la charge de la preuve incombe à l’employeur qui l’invoque ;

L’article L.1332-4 du code du travail dispose que :

«aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales. » ;

La mise en ‘uvre de l’action publique interrompt le délai de deux mois pour engager les poursuites disciplinaires ;

L’ouverture d’une enquête préliminaire n’a pas pour effet de mettre en mouvement l’action publique, n’est pas un acte interruptif du délai prévu à l’article L. 1332-4 précité ;

La lettre de licenciement mentionne en premier lieu qu’ «au milieu de l’année 2015, le client final SNCF réseau a décidé (…) de remplacer ce logiciel par un progiciel Saas développé par la société de droit américain Service Now» et que «(…) vous avez opposé une forte résistance à ce changement sans en référer de manière explicite à votre employeur (‘)», «vous n’avez jamais cessé d’être déloyal à mon égard», avez «mis à mal sciemment et par tous moyens, y compris illégaux, ce nouveau logiciel (…)», «ainsi le 20 mars 2016, vous avez frauduleusement infiltré le système ServiceNow en utilisant l’identifiant et le mot de passe personnels et strictement confidentiels d’un agent de SNCF Réseau, depuis un ordinateur portable appartenant à la SNCF Réseau et en utilisant la connexion Wi-Fi d’un restaurant asiatique à proximité de votre domicile parisien», «vous en avez profité pour adresser à la direction SNCF Réseau (‘) un message les mettant en garde contre les failles de sécurité liées à l’utilisation de la nouvelle application. (…)» ;

Les faits principalement reprochés au salarié et auxquels se rattachent en grande partie les autres griefs développés, sont datés du 20 mars 2016 ;

M. [C] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement et mis à pied par courrier du 20 avril 2017, puis licencié pour faute grave le 16 mai 2017 ;

A compter du 16 juin 2016, M. [C] n’a été affecté qu’à la maintenance du S11 par la société SNCF Réseau, ce que ne pouvait ignorer la société LWI, son employeur, qui facturait ses prestations ;

En outre, lors de son audition par les services de police le 24 octobre 2016, dans le cadre de la plainte déposée le 17 mai 2016 par SNCF Réseau pour accès et maintien frauduleux dans un système de traitement automatisé de données et modification frauduleuse de données, se référant aux faits du 20 mars 2016, M. [V], dirigeant de la société LWI, déclarait notamment :

– que M. [C], « quasiment au début du projet, il y a un an à peu près, vers la fin de l’année 2015, a fait de la résistance, c’est-à-dire qu’il a montré qu’il n’avait pas l’intention de participer de manière positive au projet. Clairement, il faisait tout pour montrer qu’il ne voulait pas faire avancer le projet (‘)

C’était très verbal. Je pense qu’il a eu la prudence de ne pas trop écrire (‘) »,

– interrogé plus avant sur un incident avec la SNCF Réseau, il précisait que :

« Le client m’en a parlé. Il y a eu plusieurs épisodes.

Il y a eu des alertes de sécurité. M. [C] a cherché quelles failles de sécurité l’application pouvait avoir, de façon à montrer certains inconvénients liés à cette solution. Il a diffusé ces failles de sécurité à la DSI de la SNCF Réseau.

(‘)

Le client m’a également informé qu’il y a eu un envoi de mail vers le directeur avec l’identifiant de l’un des opérateurs de Service Now. Cet envoi de mail a été fait depuis l’extérieur avec une adresse IP qui venait de l’extérieur. »

– il ajoutait enfin au sujet de M. [C] : « Je lui ai fait part à une certaine période que je n’étais pas d’accord avec son attitude, le fait qu’il montre un tel comportement vis-à-vis d’un client’ J’ai très clairement perte de confiance » ;

Cette audition fait ainsi ressortir que M. [V] était informé de l’opposition au projet confié dès la fin de l’année 2015 et qu’il avait déjà été informé du fait précis de l’envoi de mail vers le directeur avec l’identifiant de l’un des opérateurs de Service Now, fait depuis l’extérieur avec une adresse IP qui venait de l’extérieur, étant rappelé que ce fait est intervenu le 20 mars 2016 et que la plainte de la SNCF a été reçue le 17 mai 2016 ;

Ces éléments contredisent l’affirmation de M. [V] selon laquelle il n’a eu connaissance des faits fautifs reprochés dans le cadre du licenciement qu’à l’occasion de sa citation à comparaître accompagnées de pièces délivrées par M. [C] le 30 et 31 mars 2017 ;

Les premiers juges ont ainsi justement relevé que la société LWI était informée du problème rencontré par la société SNCF Réseau à propos de M. [C], connaissait les agissements reprochés et partageait la défiance envers son salarié mais n’a entrepris aucune enquête interne ni pris aucune mesure à son encontre ;

En outre, la convocation de M. [C] devant la juridiction pénale, visant les faits du 20 mars 2016, qui a mis en mouvement l’action publique, est intervenue le 8 décembre 2016. L’employeur ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, qu’il a eu connaissance de ces faits moins de deux mois avant la mise en ‘uvre de l’action publique le 8 décembre 2016.

Les faits reprochés dans le premier grief du licenciement sont ainsi prescrits.

Les premiers juges ont en outre justement relevé d’une part, que le quatrième grief concerne la violation des obligations naturelles de loyauté, de discrétion et de confidentialité, que la lettre de licenciement n’évoque à ce propos que l’introduction frauduleuse du salarié dans le logiciel mis en place au sein de SNCF Réseau, fait lui-même prescrit et que s’agissant du cinquième grief, relatif à1a négligence caractérisée dans l’accomplissement de certaines tâches ou missions confiées par LWI la société LWI indique avoir demandé « à maintes reprise s» au salarié « de restituer la dernière version des sources » de l’ancien logiciel, mais que si des demandes ont été effectivement adressées au salarié en juin 2016, octobre 2016 et janvier 2017, elles n’émanent pas de 1a société LWI et font référence de toute manière à des faits prescrits.

S’agissant du second grief, il n’est pas établi de non-respect des missions confiées ; enfin, au sujet du troisième grief invoqué relativement à une absence totale d’informations en temps utiles à LWI, M. [V] a indiqué dans son audition du 24 février 2016 avoir été informé, et aucune demande particulière n’a été faite au salarié à ce propos ;

En conséquence, le jugement sera aussi confirmé en ce qu’il a dit que le licenciement de M. [C] intervenu le 16 mai 2017 est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières

A la date de son licenciement M. [C] avait une ancienneté de 4 ans au sein de l’entreprise qui employait de façon habituelle moins de 11 salariés ; s’il avait déjà par le passé, travaillé pour la société LWI, il avait ensuite été salarié d’autres entreprises, sans qu’il démontré de « transfert » illicite de son contrat de travail, et son nouveau contrat de travail daté du 1er avril 2013 au sein de la société LWI ne mentionne pas de reprise d’ancienneté ;

En application de l’article 15 de la convention collective Syntec, il est bien fondé à solliciter une indemnité compensatrice de préavis de 18 600 euros bruts, outre les congés payés afférents, soit 1 860 euros bruts ; le jugement est confirmé de ces chefs ;

Il y a lieu de confirmer également le jugement en ce qu’il a alloué, au regard de l’ancienneté retenue, la somme de 8 952,64 euros à titre de l’indemnité de licenciement, et celles de 4 864,59 euros bruts au titre du rappel de salaire de mise à pied du 20 avril 2017 au 16 mai 2017 et de 486,46 euros bruts au titre de congés payés sur le salaire de mise à pied ;

S’agissant de l’indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, M. [C] qui, à la date du licenciement, travaillait dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés a droit, en application de l’article L. 1235-5 du code du travail, dans sa version applicable au litige, à une indemnité correspondant au préjudice subi ;

Compte-tenu de son âge au moment du licenciement, de son ancienneté dans l’entreprise, du montant moyen de la rémunération qui lui était versée (6 200 euros) et de la justification de ce qu’il s’est inscrit auprès de Pôle emploi, a perçu l’allocation d’aide au retour à l’emploi, avant de liquider ses droits à la retraite, son préjudice sera réparé par l’allocation d’une somme de à ce titre ; les premiers juges ont fait une exacte appréciation de la situation en estimant que son préjudice serait réparé par l’allocation de la somme de 31 000 euros ; le jugement sera confirmé de ce chef ;

En l’absence de prêt illicite de main d’oeuvre et de marchandage, il n’y a pas lieu de prononcer de condamnation in solidum à l’encontre des sociétés Sopra Stéria et SNCF Réseau ; les sommes allouées sont prononcées à la charge exclusive de la société LWI ;

Sur les autres demandes

Il y a lieu d’enjoindre à la société LWI de remettre à M. [C], dans le mois suivant la signification du présent arrêt, l’attestation pôle emploi, des bulletins de salaire et le certificat de travail rectifiés ;

Sur les intérêts

Les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale seront dus à compter de la réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation ;

S’agissant des créances de nature indemnitaire, les intérêts au taux légal seront dus à compter de la décision les ayant prononcées ;

Il y a lieu d’ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil à compter de la date de la demande qui en été faite ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens d’appel seront mis à la charge de la société LWI ;

La demande formée par M. [C] au titre des frais irrépétibles en cause d’appel sera accueillie, à hauteur de 2 000 euros ; en équité, les demandes formées par les autres parties au litige sur ce fondement seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris,

Statuant de nouveau des dispositions infirmées et y ajoutant,

Ordonne à la SAS Level Wan Ingenierie (LWI) de remettre à M. [N] [C] dans le mois de la notification de la présente décision, les bulletins de paie, le certificat de travail et l’attestation Pôle emploi rectifiés,

Dit que les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l’employeur en conciliation et celles à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de la décision les ayant prononcées,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SAS Level Wan Ingenierie (LWI) à payer M. [N] [C] la somme de 2 000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles de procédure en cause d’appel,

Condamne la SAS Level Wan Ingenierie aux dépens d’appel.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


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