Convention collective SYNTEC : 1 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00835

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Convention collective SYNTEC : 1 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00835

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 10

ARRET DU 01 JUIN 2023

(n° , 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00835 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDAUM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Décembre 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 19/01677

APPELANT

Monsieur [I] [K]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334

INTIMEE

S.A.S. FINHARMONY

immatriculée au Registre du Commerce de Paris sous le numéro 439 066 598 00038

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Grégoire BRAVAIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P43

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre

Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre

Madame Carine SONNOIS, Présidente de la chambre

Greffier : lors des débats : Mme Sonia BERKANE

ARRET :

– contradictoire

– mis à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente et par Sonia BERKANE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

M. [I] [K] a été engagé par la société par actions simplifiée (SAS) Finharmony, le 11 octobre 2011 mais le 9 février 2012, il a été mis fin à sa période d’essai.

Par la suite, M. [I] [K] a créé une société FEP, en octobre 2012, qui lui a permis de travailler pour le compte de la SAS Finharmony en qualité de consultant free-lance durant les années 2013 et 2014.

Le 1er mars 2015, M. [I] [K] s’est vu proposer, par la SAS Finharmony, un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel avec un 2/3 temps annualisé, en qualité de Consultant senior, statut cadre, niveau 3.2, coefficient 170 de la convention collective nationale des bureaux d’étude technique, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (dite Syntec).

Sa rémunération annuelle a été fixée à 97 500 euros bruts pour un temps plein, soit 65 000 euros pour un 2/3 temps, outre un « bonus » sur objectifs, révisable chaque année.

La SAS Finharmony est spécialisée dans le conseil et la formation en matière de comptabilité et de finance d’entreprise.

A partir du 1er juillet 2017, le salarié est passé à un temps complet.

Du 18 au 23 septembre 2017, puis les 19 et 20 octobre 2017, M. [I] [K] a été placé en arrêt de travail.

Le 24 octobre 2017, le salarié a été victime d’un malaise sur son lieu de travail, qui a été considéré comme un accident du travail, le 16 janvier 2018. Son arrêt de travail a été prolongé jusqu’au 12 mars 2018.

Lors de la visite de reprise, qui s’est déroulée le 19 février 2018, le médecin du travail a déclaré M. [I] [K] « inapte définitivement au poste de consultant senior en une seule visite, conformément à l’article R. 4624-31 du code du travail ». Le médecin du travail a, également, dispensé la SAS Finhamony de toute recherche de poste de reclassement.

Le 12 mars 2018, le salarié s’est vu notifier son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 27 février 2019, M. [I] [K] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris pour voir prononcer la nullité de son licenciement et solliciter la requalification du contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps complet. Le salarié demandait, également, un rappel de salaire sur temps complet ainsi qu’au titre des heures supplémentaires, une indemnité pour travail dissimulé et des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, violation des dispositions de l’article L. 4121-1 du code du travail, préjudice financier en raison de l’incidence des heures supplémentaires sur les indemnités Pôle l’emploi et perte de chance au titre de la retraite.

Le 22 octobre 2020, le conseil de prud’hommes de Paris, dans sa section Encadrement, a statué comme suit :

– déboute M. [I] [K] de l’ensemble de ses demandes

– déboute la SAS Finharmony de sa demande reconventionnelle

– condamne M. [I] [K] au paiement des entiers dépens.

Par déclaration du 6 janvier 2021, M. [I] [K] a relevé appel du jugement de première instance dont il a reçu notification le 24 décembre 2020.

Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 22 janvier 2023, aux termes desquelles

M. [I] [K] demande à la cour d’appel de :

– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Paris en date du 14 décembre 2020 l’ayant débouté de l’ensemble de ses demandes et l’ayant condamné aux entiers dépens

Statuant à nouveau,

1-Sur l’exécution du contrat de travail :

– requalifier le contrat de travail à temps partiel sur la période du 1er mars 2015 au 30 juin 2017 en contrat de travail à temps complet et par voie de conséquence :

– condamner la société Finharmony à la somme de 22 399 euros à titre de rappel de salaire, ainsi qu’à la somme de 2 239,90 euros à titre de congés payés afférents, avec intérêts de droit à compter du 26 février 2019

– condamner la société Finharmony au titre des heures supplémentaires sur la période du 1er juillet 2017 au 24 octobre 2017 à la somme de 21 362 euros et à la somme de 2 136,20 euros à titre de congés payés afférents

– subsidiairement, au cas où la cour ne requalifierait pas le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, condamner Finharmony à un rappel de salaire de

43 761 euros tant au titre de la valorisation des heures entre 22 heures 33 et 35 heures, qu’au titre des heures supplémentaires sur cette période, et au paiement de la somme de

4 376,10 euros au titre des congés payés afférents

– condamner la société Finharmony au paiement de la somme de 48 750 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de travail dissimulé, sur le fondement de l’article L. 8223-1 du code du travail

– condamner la société Finharmony au paiement de la somme de 10 000 euros nets de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, sur le fondement de l’article L. 1222-1 du code du travail,

– condamner la société Finharmony au paiement de la somme de 20 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions de l’article L. 4121-1 du code du travail,

2 ‘ Sur la rupture du contrat de travail :

– juger que le licenciement pour inaptitude professionnelle est nul ou, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse, l’inaptitude ayant pour origine les conditions de travail

– condamner la société Finharmony au paiement de la somme de 53 094 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou, subsidiairement à la somme de

35 396,50 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

– condamner la société Finharmony au paiement de la somme de 48 701 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice financier résultant du non-paiement des heures supplémentaires sur les indemnités Pôle-emploi

– condamner la société Finharmony au paiement de la somme de 64 560 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance au titre de la retraite

– ordonner la remise des documents de fin de contrat conformes à l’arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document

– condamner la société Finharmony aux intérêts de droit

– dire que les condamnations porteront intérêts de droit et capitalisation en vertu des articles 1153 et suivants du code civil

– condamner la société Finharmony au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– condamner la société Finharmony en tous les dépens dont le montant pourra être recouvré par Maître Jacques Bellichach, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 7 février 2023, aux termes desquelles la SAS Finharmony demande à la cour d’appel de :

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Paris (RG 19/01677) le 14 décembre 2020 en ce qu’il a débouté Monsieur [K] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions

En conséquence :

– débouter Monsieur [K] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions

– condamner Monsieur [K] à verser à la Société Finharmony la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– condamner Monsieur [K] aux entiers dépens de la procédure.

Conclusions auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé des faits de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 8 mars 2023

MOTIFS DE LA DECISION :

1/ Sur la demande de requalifiation du contrat à temps partiel en un contrat à temps plein

Le salarié appelant sollicite la requalification du contrat de travail à temps partiel signé le 1er mars 2015 en un contrat à temps complet, en faisant valoir que si la durée du travail était fixée à un 2/3 de temps annualisé, soit 101,11 heures mensuelles, il n’a jamais été précisé dans ledit document, ou dans une annexe, les horaires qu’il devait effectuer, de sorte qu’il se trouvait constamment à la disposition de l’employeur. Il ajoute qu’il s’est rapidement avéré que sa charge de travail, liée au vaste domaine d’intervention que comprenaient ses fonctions, l’amenait à effectuer un nombre d’heures de travail sans commune mesure avec la durée contractuelle initialement prévue. C’est d’ailleurs, selon lui, en raison de l’existence de cette amplitude de travail importante qu’il a été convenu, en juin 2016, de modifier la durée de son temps de travail. M. [I] [K] précise, ainsi, qu’il a été décidé de son passage d’un 2/3 de temps, à une durée de travail de 80% pour la période du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017, sans qu’aucun avenant au contrat de travail ne soit signé pour fixer sa durée hebdomadaire de travail, ni son rythme de travail. Par ailleurs, les heures effectuées au-delà du 2/3 temps ne lui ont pas été payées, ainsi qu’en attestent ses bulletins de salaire.

Surabondamment, le salarié relève aussi que « l’annualisation » stipulée dans son contrat d’embauche ne lui est pas opposable à défaut d’un accord d’entreprise conforme à l’article 34 de la convention collective Syntec et d’explications sur le lissage des heures sur 12 mois, que ce soit lors de l’embauche ou lors de la modification de la durée du travail en juin 2016.

En conséquence, M. [I] [K] sollicite la requalification du contrat de travail à temps partiel sur la période du 1er mars 2015 au 30 juin 2017 en un contrat de travail à temps plein et la condamnation de la société Finharmony à lui payer une somme de 22 399 euros à titre de rappel de salaire, outre 2 239,90 euros au titre des congés payés afférents.

L’employeur objecte que l’absence de précision sur le rythme de travail, dans un contrat de travail à temps partiel, n’entraîne pas de facto la requalification du contrat de travail en un contrat à temps complet mais uniquement une présomption de temps complet qui peut-être combattue par l’employeur. En l’espèce, la société intimée prétend que M. [I] [K] jouissait d’une autonomie totale dans l’organisation de son temps de travail et qu’il ne peut être valablement soutenu qu’il se tenait à la disposition de l’employeur. Au contraire, la société intimée affirme qu’il était convenu que le salarié indique à la responsable du planning les jours où il s’était engagé à dispenser des formations avec sa société FEP de manière à ce qu’elle puisse fixer des jours d’intervention en fonction de ses disponibilités, comme en témoigne le Responsable commercial (pièces 25). A la fin du mois, M. [I] [K] remplissait a posteriori le récapitulatif du mois en faisant apparaître les journées et demi-journées travaillées pour le compte de Finharmony (pièce 8). La société intimée rappelle que, M. [I] [K] ayant développé une clientèle personnelle au sein de sa société FEP, avant son embauche le 1er mars 2015, il a poursuivi cette activité après son embauche et elle ajoute que le salarié a, aussi, travaillé, en dehors de ses missions pour Finharmony à la rédaction d’un ouvrage qu’il a publié en avril 2018.

Mais, si en l’absence de précision sur le rythme de travail dans un contrat de travail à temps partiel, l’employeur peut renverser la présomption simple de contrat à temps complet encore faut-il qu’il démontre, d’une part, la durée exacte de travail convenue et, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il pourrait travailler. Or, l’employeur ne produit aux débats aucune pièce permettant de contredire les éléments transmis par le salarié, qui témoignent qu’il accomplissait chaque mois, et ce depuis son embauche le 1er mars 2015 un horaire supérieur aux 101,11 heures mensuelles, correspondant au 2/3 temps annualisé. L’employeur ne justifie pas autrement que par la communication d’une attestation d’un de ses salariés du fait que c’est M. [I] [K] qui aurait décidé de son planning de travail en fonction de ses convenances et il ne produit pas les courriels que l’appelant lui aurait adressés pour lui donner connaissance de ses disponibilités.

La cour relève, encore, que le contrat de travail signé par le salarié prévoyait une modulation annuelle de la durée du travail non prévue par un accord d’entreprise et, donc, inopposable à M. [I] [K]. Enfin, il n’est pas contesté qu’alors que l’horaire de travail a été porté à 80 % entre le 1er juillet 2016 et le 30 juin 2017, aucun avenant au contrat de travail, signé par le salarié, n’est venu modifier et fixer la durée mensuelle de son temps de travail.

Il sera, donc, jugé que le contrat à temps partiel conclu pour la période du 1er mars 2015 au 30 juin 2017 doit être requalifié en un contrat à temps complet et il sera fait droit aux demandes de rappel de salaire et congés payés afférents formées par le salarié. Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef.

2/ Sur les heures supplémentaires

Selon l’article L. 3174- 1 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci.

M. [I] [K] réclame un rappel de salaire de 21 362 euros, outre 2 136,20 euros pour les heures supplémentaires qu’il prétend avoir accomplies entre le 1er juillet 2017, date de son passage à temps complet et le 24 octobre 2017. Au soutien de ses revendications, le salarié verse aux débats :

– un tableau récapitulatif des heures supplémentaires accomplies et une analyse d’un cabinet d’expertise comptable (pièces 82, 83)

– un suivi Excel de son temps de travail effectif par exploitation de son agenda Outlook (pièces 46, 88)

– des pièces justificatives (pièce 46, 56 à 79, 80, 81, 82)

Il souligne, également, que les feuilles de suivi de son temps de travail, dites « time sheets », qu’il établissait pour chaque formation, sur une base forfaitaire de 8 heures, ne correspondaient pas au temps réellement passé sur ses missions, qui comprenait, en sus, un temps de préparation et de rangement des salles de formation et les déjeuners pris avec les participants. Il précise que ces documents étaient destinés à la facturation pour les clients de la société et qu’aucun relevé de son temps de travail n’était effectué par l’employeur. D’ailleurs, entre le mois de juillet 2016 et octobre 2016, il a fait figurer sur les « time sheets » les heures qu’il a accomplies chaque jour pour toutes ses formations et il apparaît que ces horaires étaient supérieurs au forfait de 8 heures (pièce 81 annexe 3).

L’employeur explique qu’il demandait au salarié de renseigner des relevés de temps « time sheets » sur la base desquels étaient établis les bulletins de paie. Il était convenu qu’une journée complète de formation correspondait à une durée forfaitaire de 8 heures et une demi-journée à un forfait de 4 heures.

La société intimée prétend que les chiffres avancés par le salarié sont artificiellement gonflés.

Elle relève ainsi, à titre d’exemple, que pour le mois d’août 2017, M. [I] [K] revendique une durée de travail de 176 heures alors qu’il se trouvait en congé et que pour le mois d’octobre 2017, le salarié, parvient à une durée de travail de 176 heures en décomptant systématiquement huit heures de travail les samedis et dimanches alors qu’aucune formation n’était assurée durant les week-ends

En cet état, la cour constate que le temps de travail du salarié faisait l’objet d’une évaluation forfaitaire de la part de l’employeur, qui n’avait pas mis en place un dispositif de contrôle du temps de travail journalier et qu’il n’est pas en mesure de produire des éléments objectifs et fiables sur les horaires du salarié. La SAS Finharmony ne remplit, donc, pas la charge de la preuve qui lui revient, le salarié ayant de son côtés suffisamment précisé sa demande. Le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a débouté M. [I] [K] de ses demandes et il lui sera alloué une somme arbitrée à 4 272 euros à titre de rappel de salaire, outre 427,24 au titre des congés payés afférents, pour tenir compte des observations de l’employeur sur les calculs du salarié.

3/ Sur les indemnités Pôle emploi

Le salarié fait valoir que la minoration de sa rémunération en raison de l’absence de prise en compte d’un temps complet et des heures supplémentaires accomplies a eu pour conséquence de diminuer les indemnités Pôle emploi auxquelles il pouvait prétendre et qui ont été calculées sur la base de son salaire. Il sollicite, donc, des dommages-intérêts à hauteur de 48 701 euros.

L’employeur objecte, qu’à défaut pour le salarié de justifier de sa situation professionnelle et du fait qu’il a perçu des allocations chômage, il ne démontre en aucune manière avoir subi un préjudice dont il pourrait demander réparation.

La cour relève que le salarié ne justifie avoir perçu qu’une somme de 5 174,07 au titre des allocations Pôle emploi, pour la période du 5 novembre au 26 décembre 2018, et qu’eu égard aux sommes allouées à titre de rappel d’heures supplémentaires, l’impact de la minoration de la rémunération du salarié ne peut excéder un préjudice qui sera fixé à 100 euros.

4/ Sur la perte de chance au titre de la retraite

M. [I] [K] soutient, également, que l’absence de prise en compte par l’employeur des heures supplémentaires aura une incidence sur le montant de ces pensions de retraite et il réclame des dommages-intérêts à hauteur de 64 560 euros au titre de la perte de chance d’obtenir le versement de meilleures pensions.

La société intimée réplique que le raisonnement du salarié purement hypothétique et aléatoire excède le domaine de la perte de chance.

Eu égard aux sommes allouées à l’appelant à titre de rappel de salaire sur la base d’un temps complet ainsi qu’au titre de heures supplémentaires accomplies, qui n’ont pas été prises en compte pour la détermination des pensions de retraite de M. [I] [K] qui a fait valoir ses droits à la suite de son licenciement, il lui sera accordé une somme de

1 674,95 euros correspondant à 10 % du préjudice éventuel, sur la base du montant du rappel d’heures supplémentaires et congés payés afférents retenu par la cour. Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef.

5/ Sur l’indemnité pour travail dissimulé

M. [I] [K] avance que puisque la SAS Finharmony avait parfaitement conscience, à compter du mois de juillet 2016, qu’il dépassait l’horaire contractuel et qu’elle a néanmoins continué à le rémunérer sur cette base et ce jusqu’ à 30 juin 2017, avant d’omettre, ensuite, de lui payer les heures supplémentaires accomplies au-là de son temps plein, elle est débitrice à son égard d’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé de 48 750 euros.

La SAS Finharmony ne conteste pas que, si le temps de travail accompli par le salarié appelant a été augmenté de manière progressive entre juillet 2016 et juin 2017, son salaire fixe a continué à être calculé sur la base d’un 2/3 temps durant cette période. Cependant, elle précise que les heures effectuées au-delà des 2/3 ont donné lieu à une contrepartie en repos compensateurs sur un compte dédié. Ainsi, au 30 juin 2017, le salarié avait acquis 46,5 jours de repos qu’il a pris, pour partie, à l’été 2017 et dont le solde lui a été réglé à hauteur de 10 310,91 euros bruts. L’employeur se défend donc de toute volonté de dissimulation et il ajoute qu’il a, en toute transparence, présenté ce dispositif, appliqué à d’autres salariés (pièce 15) à la DIRECTE, dans un courrier du 29 juin 2018 (pièce 36 salarié), qui n’a suscité aucune observation.

Même si la SAS Finharmony ne pouvait, légalement, proposer au salarié des repos compensateurs en contrepartie des heures complémentaires accomplies au-delà de son 2/3 temps, les éléments versés aux débats permettent de considérer que l’employeur n’a pas délibérément cherché à dissimuler les heures complémentaires accomplies par le salarié jusqu’au 30 juin 2017. S’agissant des heures supplémentaires revendiquées postérieurement à cette date, il n’est pas démontré que l’employeur aurait, de façon intentionnelle, mentionné sur les bulletins de salaire un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué, cette intention ne pouvant résulter de la seule existence d’heures supplémentaires non rémunérées. C’est donc à juste titre que les premiers juges ont débouté M. [I] [K] de sa demande de chef.

6/ Sur le manquement à l’obligation de sécurité

En vertu de l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. L’article L. 4121-2 précise les principes généraux de prévention.

M. [I] [K] affirme avoir été victime de pressions et d’un management anxiogène du dirigeant de la SAS Finharmony, qui ajoutés aux manquements de l’employeur en termes de rémunération de son temps de travail ont entraîné une dégradation de son état de santé et son placement en arrêt de travail du 18 au 23 septembre 2017, puis du 19 au 20 octobre 2017 (pièces 19, 47). Quatre jours après sa reprise, le salarié a été victime d’un malaise sur son lieu de travail (pièce 80), immédiatement reconnu par la CPAM comme un accident du travail et qui a abouti à une déclaration d’inaptitude presque quatre mois plus tard. Il en donne pour preuve :

– les échanges de courriels « culpabilisant » durant ses arrêts maladie et les comptes-rendus d’entretien d’évaluation de septembre et octobre 2018, qui attestent du management particulièrement déstabilisant et sans considération pour le salarié adopté par l’employeur (pièces 6, 7, 8 et 9)

– les circonstances de son accident du travail du 24 octobre 2017 qui est survenu le lendemain d’une réunion au terme de laquelle il avait éclaté en sanglot (pièce 35 et 36)

– le retard délibéré de la société dans la transmission de documents relatifs à son état de santé à la CPAM

En réparation du préjudice moral subi du fait des agissements de l’employeur, M. [I] [K] revendique une somme de 20 000 euros.

L’employeur se défend d’avoir exercé une quelconque pression sur le salarié par rapport à ses résultats ou avoir mis en place un management agressif. Il répète que l’appelant n’a jamais été soumis à des horaires supérieurs à ceux contractuellement prévus et il rappelle que lorsque l’appelant est passé, progressivement, d’un 2/3 temps à un temps complet, les heures complémentaires qu’il a été amené à accomplir ont donné lieu à l’attribution de repos compensateurs. La société intimée souligne que la surcharge de travail de M. [I] [K] est d’autant moins avérée que, parallèlement, à son emploi, celui-ci a trouvé le temps de poursuivre des missions pour le compte de sa société FEP et même d’écrire un livre.

Par ailleurs, l’employeur conteste avoir adressé au salarié des messages intrusifs et « culpabilisant » durant son premier arrêt maladie et relève que la chronologie des échanges, produite aux débats, par le salarié, met en évidence le fait que le dirigeant de la société s’est immédiatement enquis de son état de santé après avoir appris son arrêt et qu’il l’a, ensuite, contacté pour prendre de ses nouvelles et déterminer s’il convenait d’annuler les formations programmées.

Enfin, la société justifie que le retard qui est survenu dans la prise en charge du salarié par la Sécurité Sociale est imputable à une erreur de transmission du médecin traitant de

M. [I] [K] et qu’elle est au contraire intervenue pour que cette situation soit régularisée dans les meilleurs délais (pièces 19, 20).

La cour retient qu’il ne ressort pas des éléments versés aux débats par le salarié qu’il aurait été victime d’une surcharge de travail et elle note que son passage à un horaire à temps complet s’est déroulé de manière progressive, afin de lui permettre de s’organiser par rapport à ses activités annexes. Les pièces médicales versées au dossier ne mettent pas en évidence un lien quelconque entre la dégradation de l’état de santé du salarié et ses conditions de travail puisque ses deux premiers arrêts de travail ont été prononcés pour des motifs d’origine non-professionnelle. L’agenda du salarié fait, d’ailleurs, état de visites régulières chez son cardiologue à compter du printemps 2017. Enfin, la survenance d’un malaise sur le lieu de travail et sa déclaration en accident du travail n’implique pas de facto que l’indisposition du salarié est imputable aux agissements de l’employeur. Il n’est, d’ailleurs, produit aucun élément attestant d’une crise de larmes de l’appelant sur son lieu de travail quelques jours avant son malaise.

L’examen des échanges de sms produits par l’appelant démontre, qu’alors que l’employeur lui demandait des nouvelles de son état de santé et l’interrogeait sur l’annulation éventuelle d’une session de formation à venir, M. [I] [K] l’a interprété comme une intrusion dans sa vie privée et l’a perçu sur un mode persécutoire « je te demande impérativement de ne pas culpabiliser les gens malades [I] ».

Ainsi, il est justifié par l’employeur du respect de ses obligations légales et réglementaires en matière de respect de la santé et de sécurité du salarié et c’est à juste titre que les premiers juges ont débouté M. [I] [K] de sa demande indemnitaire de ce chef.

7/ Sur l’exécution déloyale du contrat de travail

M. [I] [K] considère que le refus de l’employeur de lui verser une rémunération complémentaire, lorsqu’il est passé d’un 2/3 temps à 80% en juillet 2016 puis l’absence de délivrance d’un avenant à son contrat de travail pour formaliser la modification de son horaire de travail pour un temps complet en juillet 2017, constituent des manquements de l’employeur à l’exécution loyale du contrat de travail dont il demande réparation à hauteur de 10 000 euros.

Toutefois, la cour observe que s’agissant du premier grief le salarié ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui dont il a demandé réparation au point 1. Concernant l’absence de signature d’un avenant entérinant son passage à temps complet, le salarié ne s’explique pas sur la nature et l’étendue du préjudice dont il demande réparation de ce chef. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de ce chef.

8/ Sur le licenciement pour inaptitude

Le salarié appelant demande à ce que son licenciement soit jugé nul, ou à tout le moins dépourvu de cause réelle et sérieuse puisqu’il estime que l’inaptitude constatée par le médecin du travail est imputable au manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

Mais, outre, que le non-respect par l’employeur de son obligation de sécurité, s’il a été à l’origine de l’inaptitude du salarié ne peut entraîner la nullité du licenciement mais tout au plus son absence de cause réelle et sérieuse, il n’a pas été considéré au point 6 que l’employeur avait failli dans son obligation. Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail.

9/ Sur les autres demandes

Les sommes allouées à titre salarial porteront intérêts au taux légal à compter du 7 mars 2019, date à laquelle l’employeur a réceptionné sa convocation à l’audience du bureau de conciliation et d’orientation. Les sommes allouées à titre indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Il sera ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière.

Condamne la SAS Finharmony à payer à M. [I] [K] une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SAS Finharmony aux dépens de première instance et d’appel avec distraction au profit de Maître Jacques Bellichach, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a :

– débouté M. [I] [K] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé, de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité, de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, de sa demande de requalification du licenciement pour inaptitude en un licenciement nul ou dépourvu de cause réelle et sérieuse et de sa demande indemnitaire subséquente ainsi que de sa demande de délivrance de documents de fin de contrat rectifiés

– débouté la SAS Finharmony de sa demande reconventionnelle,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Requalifie le contrat de travail à temps partiel conclu pour la période du 1er mars 2015 au 30 juin 2017 en un contrat à temps complet,

Condamne la SAS Finharmony à payer à M. [I] [K] les sommes suivantes :

– 22 399 euros à titre de rappel de salaire sur temps complet

– 2 239,90 euros au titre des congés payés afférents

– 4 272 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires

– 427,24 au titre des congés payés afférents

– 100 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice financier résultant du non-paiement des heures supplémentaires sur le calcul des indemnités Pôle emploi

– 1 674,95 euros à titre de dommages-intérêts pour perte de chance au titre de la retraite

– 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,

Dit que les sommes allouées à titre salarial porteront intérêts au taux légal à compter du 7 mars 2019 et que les sommes allouées à titre indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Ordonne la capitalisation des intérêts pourvu qu’ils soient dus pour une année entière,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SAS Finharmony aux dépens de première instance et d’appel avec distraction au profit de Maître Jacques Bellichach, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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