Convention collective Syntec : 1 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/06537

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Convention collective Syntec : 1 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/06537

1 février 2023
Cour d’appel de Paris
RG
20/06537

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRET DU 01 FÉVRIER 2023

(n° 2023/ , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/06537 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCOZK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Septembre 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MEAUX – RG n° 18/01052

APPELANTE

S.A.S. SUNGARD AVAILABILITY SERVICES

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Thierry CHEYMOL, avocat au barreau de PARIS, toque : R0169

INTIMÉ

Monsieur [H] [T]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Thileli ADLI-MILOUDI, avocat au barreau de PARIS, toque : C2513

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 décembre 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Nadège BOSSARD, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

M. [H] [T] a été engagé par la société Sungard Availability Services selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 7 août 1989.

En dernier lieu, M. [T] exerçait les fonctions de service delivery manager, statut cadre, position 2-3. Sa rémunération mensuelle moyenne sur les douze derniers mois s’élève à 7.326,39 euros bruts, dont un avantage en nature de 110,79 euros bruts.

M. [T] était salarié protégé en tant que membre du comité d’entreprise et de délégué du personnel.

La société Sungard Availability Services est spécialisée dans le secteur d’activité du traitement de données, hébergement et activités connexes.

Elle applique la convention collective des bureaux d’étude techniques, cabinets d’ingénieurs conseils, sociétés de conseil dite ‘ Syntec ».

La société emploie plus de 10 salariés, répartis sur deux sites : [Localité 4] et [Localité 5].

A compter du 17 janvier 2017, la société a initié une procédure d’information-consultation de son comité d’entreprise sur un projet de réorganisation de ses activités, lequel était susceptible d’entraîner initialement la suppression directe de 17 postes.

Le document unilatéral valant plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) présenté dans ce cadre envisageait un dispositif de volontariat et, le cas échéant, des départs contraints.

A l’issue de la procédure d’information-consultation, le comité d’entreprise a émis un avis défavorable tant sur le volet économique que sur le volet social du projet qui lui était soumis le 18 avril 2017, et qui portait finalement sur 14 suppressions de postes.

Par décision en date du 9 mai 2017, la DIRECCTE (Unité départementale de Seine et Marne) a homologué le document unilatéral présenté par la société SUNGARD AS. Les départs volontaires ayant été insuffisants à éviter les licenciements, la société a procédé au licenciement de certains salariés dont M. [T].

Par courrier du 9 juin 2017, M. [T] a été convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement pour motif économique.

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 19 juin 2017, l’employeur a remis à M. [T] une proposition de contrat de sécurisation professionnelle accompagnée de la motivation économique du licenciement envisagé.

Le 11 juillet 2017, le comité d’entreprise de la société a formé un recours en annulation pour excès de pouvoir de la décision d’homologation du document unilatéral valant plan de sauvegarde de l’emploi du 9 mai 2017.

Par lettre recommandée avec AR en date du 12 juillet 2017, la société a proposé à M. [T] un reclassement sur un poste de responsable d’exploitation, qu’il a refusé.

La société a sollicité l’autorisation de procéder au licenciement de M. [T] auprès de l’inspection du travail laquelle a refusé, par décision du 11 août 2017, de faire droit à cette demande.

Le 6 septembre suivant, la société a adressé une nouvelle proposition de reclassement à M. [T] sur un poste de ‘ business resilience consultant », proposition qu’il a refusée.

Par un jugement en date du 6 octobre 2017, le tribunal administratif de Melun a fait droit à la demande d’annulation sollicitée par le comité d’entreprise. La société a interjeté appel de ce jugement. Par décision en date du 1er mars 2018, la cour administrative d’appel de Paris a infirmé le jugement, a confirmé la décision d’homologation du document unilatéral et a posé pour principe que la détermination des catégories professionnelles arrêtées par la société était licite et opportune et que les critères d’ordre déterminés l’étaient également.

Le 13 octobre 2017, la société a formé un recours hiérarchique contre la décision de refus d’autorisation de licencier M. [T].

Par décision du 14 juin 2018, le ministre du travail a annulé la décision de l’inspection du travail du 11 août 2017 et a autorisé le licenciement du salarié protégé, considérant que la réalité de la cause économique était démontrée et que la société avait satisfait à son obligation de recherche de reclassement.

Le 19 juin 2018, M. [T] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle ce qui a entraîné la rupture de son contrat de travail.

M. [T] a saisi le conseil de prud’hommes aux fins de contestation de son licenciement pour non respect des critères d’ordre.

Par jugement en date du 24 septembre 2020, le conseil de prud’hommes de Meaux a :

– jugé que la société Sungard Availability Services n’avait pas respecté l’ordre des licenciements,

– condamné la société Sungard Availability Services à payer à M. [T] les sommes de:

– 137 618 € à titre de dommages et intérêts

– 1 200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

– débouté M. [T] de ses autres demandes,

– débouté la société Sungard Availability Services de ses autres demandes,

– condamné la société Sungard Availability Services aux dépens.

La société Sungard Availability Services (France) a interjeté appel le 9 octobre 2020.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe, notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 3 décembre 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Sungard Availability Services (France) demande de :

Recevoir Sungard Availability Services (France) S.A.S en son appel;

L’y déclarer bien fondée

Infirmer le jugement prononcé par la section encadrement du conseil de prud’hommes de Meaux le 24 septembre 2020

Statuant à nouveau

Dire et juger que la mesure de licenciement économique est pleinement justifiée

Dire et juger que la Société a rigoureusement respecté ses obligations

Débouter M. [T] de l’ensemble de ses demandes

Le condamner à verser à la Société la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe, notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 12 mars 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, M. [T] demande de ;

Le confirmer en toutes ses dispositions

Et y ajoutant, statuant à nouveau,

Préciser que l’indemnité de 137.618 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse s’entend nette de toutes cotisations sociales et CSG/CRSD.

Condamner SAS Sungard Availability Services au paiement d’une indemnité de 3.000 € au titre de l’article 700 code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 4 octobre 2022.

MOTIFS :

Sur le respect des critères d’ordre :

Le respect des critères d’ordre s’apprécie au sein de chaque catégorie professionnelle.

Les catégories professionnelles sont définies par le plan de sauvegarde de l’emploi et soumises au contrôle de l’autorité administrative.

Selon les dispositions de l’article L. 1233-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.

Ces critères prennent notamment en compte :

1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;

2° L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;

3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés

4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.

L’employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l’ensemble des autres critères prévus au présent article.

Pour les entreprises soumises à l’obligation d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63, le périmètre d’application des critères d’ordre des licenciements peut être fixé par l’accord collectif mentionné à l’article L. 1233-24-1 ou par le document unilatéral mentionné à l’article L. 1233-24-4.

Dans le cas d’un document unilatéral, ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d’emploi dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l’entreprise concernés par les suppressions d’emploi.

Les conditions d’application de l’avant-dernier alinéa du présent article sont définies par décret.

– sur les catégories dans lesquelles les suppressions de postes ont été effectuées :

M. [T] relève que la société a décidé de ne procéder à aucun licenciement parmi certaines catégories professionnelles visées par le licenciement économique et ce alors que le PSE ne contenait aucune règle de départage des catégories professionnelles et/ou poste dans le cadre de l’application des critères d’ordre du licenciement. Il en déduit que son licenciement résulte d’une décision arbitraire de l’employeur qui, après avoir validé le départ volontaire de quelques salariés, a déterminé, parmi les salariés susceptibles d’être licenciés pour motif économique, ceux qu’il allait conserver dans ses effectifs, et ceux qu’il allait licencier.

Le PSE comprenait 14 catégories professionnelles à savoir ‘ Support aux Opérations-non cadre ‘, ‘Maintenance et logistique infrastructures ‘, ‘ ingénieurs Système et Réseau RS/MS ‘, ‘ Ingénieurs Analyste d’exploitation/ Workplace/Stockage ‘, ‘ Ingénieurs d’affaire ‘, ‘ Ingénieurs Avant-Vente’, ‘SDM’, ‘Global Channel et Marketing’, ‘Administratif et Gestion-Comptabilité’, ‘Direction’, ‘Consultants, Coordinateurs et Chefs de Projet ‘, ‘Assistanat’, ‘Agent logistique sans qualification ‘, ‘ Team leaders ‘.

Selon l’article 2.1 du plan de sauvegarde de l’emploi, les suppressions de postes étaient prévues dans neuf d’entre elles.

Huit salariés ont quitté l’entreprise dans le cadre du volontariat, dont quatre dans les catégories ‘Ingénieurs Analyste d’exploitation / Workplace / Stockage’, ‘Support aux

Opérations ‘ et ‘Consultants, Coordinateurs & Chefs de Projet’ pour lesquelles le plan de sauvegarde ne prévoyait pas de suppression de poste.

Après 8 départs volontaires, il restait 5 licenciements à opérer parmi les 14 catégories professionnelles identifiées. Le PSE ne contenait aucune règle de départage des catégories professionnelles et/ou poste dans le cadre de l’application des critères d’ordre du licenciement. L’employeur a décidé de procéder aux licenciements dans deux catégories dont la catégorie SDM à laquelle M. [T] appartenait et d’appliquer les critères d’ordre au sein de chacune de ces deux catégories.

En procédant de la sorte, l’employeur a certes procédé à un choix entre les catégories concernées pour supprimer des postes dans certaines d’entre elles et non dans d’autres. La société a retenu les catégories ‘ SDM ‘ et ‘ Global Channel et Marketing ‘. L’article L1233-24-2 du code du travail n’exigeait pas que le comité d’entreprise soit consulté sur la détermination des catégories retenues in fine. Ce choix est présumé avoir été opéré dans l’intérêt économique de la société et de sa pérennité dans la mesure où il concerne des catégories identifiées par le plan de sauvegarde comme concernées par les suppressions de postes. Contrairement à ce qu’il soutient, M. [T] ne démontre pas que le choix des catégories retenues était motivé par la volonté de supprimer spécifiquement le poste qu’il occupait.

– sur le respect des critères d’ordre de licenciement au sein de chaque catégorie :

Si le juge ne peut, pour la mise en ‘uvre de l’ordre des licenciements, substituer son appréciation des qualités professionnelles du salarié à celle de l’employeur, il lui appartient, en cas de contestation, de vérifier que l’appréciation portée par l’employeur sur les aptitudes professionnelles du salarié, pour la mise en ‘uvre de l’ordre des licenciements, ne procède pas d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir.

Le PSE précisait qu’en cas de licenciement, les critères d’ordre du licenciement suivants s’appliqueraient au niveau de la société entière :

– Charges de famille,

– Ancienneté dans le Groupe,

– Age,

– Handicap,

– Qualités professionnelles.

M. [T] soutient que le critère de qualités professionnelles ne repose sur aucune appréciation objective.

Le plan de sauvegarde de l’emploi prévoit en son article 8.1 que ‘ le critère de qualité professionnelle sera calculé sur la base de la moyenne arithmétique des notes finales obtenues et consignées dans les entretiens annuels de performance en 2014, 2015 et 2016 ‘.

L’article ajoute que ‘ concernant la performance 2016; les notes suivantes seront retenues :

– low performer : note équivalente à 1

– developing performer : note équivalente à 2

– successful performer : note équivalente à 3.’

Le critère des notes obtenues lors des entretiens annuels est un critère objectif susceptible d’être vérifié de sorte que le moyen de contestation de M. [T] contestant ce caractère objectif n’est pas opérant.

M. [T] soutient, d’autre part, que le critère de notation professionnelle ne repose pas sur des éléments objectifs et vérifiables. Il expose n’avoir jamais reçu de notation de la part de sa hiérarchie et n’avoir été rendu destinataire que de vagues appréciations au titre des années 2014 et 2015, et à l’issue d’un courrier annuel généralisé de la présidence américaine et soutient que ce n’est que dans le cadre de la procédure d’information-consultation que la direction a décidé de lui faire correspondre une note.

L’employeur produit les évaluations écrites de M. [T] lesquelles comprennent des appréciations littérales et non une note chiffrée.

L’employeur a opéré lui-même la transcription des appréciations littérales en une note chiffrée pour chacune des années concernées. Il produit un tableau des notes attribuées à chacun des trois salariés de la catégorie SDM dont relevait M. [T].

La société produit les évaluations des années 2014, 2015 et 2016 de M. [T] lesquelles mentionne que M. [T] maîtrise les sujets, est soucieux de la satisfaction des clients mais doit prendre du recul et moins travailler à l’instinct.

Il a obtenu une note de 3/4 pour chacune des années, tandis que le troisième salarié de la catégorie a obtenu 3/4 en 2015 et 2015 mais 4/4 en 2016 de sorte que sa note finale était plus élevée que celle de M. [T].

Il résulte des évaluations des années 2014, 2015 et 2016 de M. [T] que celui-ci n’avait pas atteint tous ses objectifs qualitatifs, l’évaluateur mentionnant notamment que M. [T] maîtrise les sujets, est soucieux de la satisfaction des clients mais doit prendre du recul, rédiger des synthèses à communiquer à son équipe et moins travailler à l’instinct.

Au regard de ces éléments, l’appréciation portée par l’employeur sur les aptitudes professionnelles du salarié, pour la mise en ‘uvre de l’ordre des licenciements, ne procède pas d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir.

Au sein de la catégorie SDM, les licenciements ont été prononcés à l’égard des deux salariés (MM. [T] et [Z]) qui ont obtenu les 2 notes les plus faibles (13,66 pour M. [Z] et 18 pour M. [T] contre 18,33 pour M. [G]).

C’est dès lors à tort que les premiers juges ont retenu que les critère d’ordre n’avaient pas été respectés et ont alloué une indemnité à M. [T] à ce titre. Le jugement sera donc infirmé de ce chef et la demande d’indemnité formée par M. [T] rejetée.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Succombant en ses demandes, M. [T] est condamné à payer à la société Sungard Availability Services France la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

INFIRME le jugement entrepris en ses dispositions contestées,

Statuant à nouveau,

DÉBOUTE M. [T] de sa demande de dommages-intérêts pour non respect des critères d’ordre,

CONDAMNE M. [H] [T] à payer à la société Sungard Availability Services France la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [H] [T] aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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