1 février 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/00073
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 9
ARRÊT DU 1er FÉVRIER 2023
(n° , 10 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/00073 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBGH5
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Novembre 2019 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – Section Encadrement chambre 2 – RG n° F18/05388
APPELANT
Monsieur [M] [D]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représenté par Me Isabelle ROTH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0015
INTIMÉE
SELARL BDR & ASSOCIES prise en la personne de [U] [I] ès qualités de liquidateur de la SAS HADORO
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Georges-Henri LAUDRAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0174
PARTIE INTERVENANTE
ASSOCIATION UNEDIC DELEATION AGS CGEA IDF OUEST
[Adresse 1]
[Localité 5]
Sans avocat constitué, remis à personne morale le 24 Novembre 2020
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Stéphane MEYER, président, chargé du rapport et Mme Valérie BLANCHET, conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Stéphane MEYER, président de chambre
Mme Valérie BLANCHET, conseillère
M. Fabrice MORILLO, conseiller
Greffier : Mme Pauline BOULIN, lors des débats
ARRÊT :
– Réputé contradictoire
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
– signé par Monsieur Stéphane MEYER, président de chambre, et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Monsieur [M] [D] a été engagé par la société Hadoro, pour une durée indéterminée à compter du 1er octobre 2015, en qualité de « responsable production et prototypage », avec le statut de cadre. Il exerçait en dernier lieu les fonctions de directeur de production.
La relation de travail est régie par la convention collective « Syntec ».
Par lettre du 26 janvier 2018, Monsieur [D] était convoqué pour le 6 février 2018 à un entretien préalable à son licenciement, lequel lui a été notifié le 16 février suivant pour motif économique, après acceptation d’un contrat de sécurisation professionnelle.
Le 17 juillet 2018, Monsieur [D] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris et formé des demandes afférentes à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu’à l’exécution de son contrat de travail.
Par jugement du 15 novembre 2019, le conseil de prud’hommes de Paris a condamné la société Hadoro à payer à Monsieur [D] les sommes suivantes et a débouté ce dernier de ses autres demandes :
– prime de vacances 2015 : 105 € ;
– prime de vacances 2016 : 465 € ;
– prime de vacances 2017 : 599,99 € ;
– prime de vacances 2018 : 193,95 € ;
– primes impayées 2017 : 4 000 € ;
– congés payés afférents : 400 € ;
– indemnité de non concurrence : 8 666,64 € ;
– indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 16 000 € ;
– dommages et intérêts pour non-respect de la procédure : 4 694,64 € ;
– indemnité pour frais de procédure : 1 000 € ;
– les dépens;
– le conseil a également ordonné la remise des documents sociaux conformes.
– le conseil a également ordonné le remboursement à Pôle Emploi des allocations de chômage perçues par Monsieur [D], dans la limite d’un mois.
A l’encontre de ce jugement notifié le 26 novembre 2019, Monsieur [D] a interjeté appel en visant expressément les dispositions critiquées, par déclaration du 23 décembre 2019
Par jugement du 2 mars 2022, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Hadoro et désigné la société BDR et associés en qualité de liquidateur judiciaire.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 2 novembre 2022, Monsieur [D] demande la confirmation du jugement en ce qu’il a déclaré son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et en ce qui concerne les condamnations d’indemnité pour procédure irrégulière, de primes et primes de vacances, d’indemnité de non concurrence, son infirmation pour le surplus et la fixation au passif de la société Hadoro de ses créances suivantes :
– indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 28 166 € ;
– dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil : 5 000 € ;
– au titre de 5,5 jours de RTT 2015 : 888,42 € ;
– au titre de 22 jours de RTT 2016 : 2 123,02 € ;
– au titre de 22 jours de RTT 2017 : 3 899,94 € ;
– remboursement des frais : 960 € ;
– au titre de 49 heures supplémentaires 2015 à 125 % : 1 413,05 € ;
– au titre de 96 heures supplémentaires 2015 à 125 % : 3 322,08 € ;
– au titre de 49 heures supplémentaires 2016 à 125 % : 1 413,05 € ;
– au titre de 137 heures supplémentaires 2016 à 125 % : 4 516,34 € ;
– au titre de 84 heures supplémentaires 2016 à 150 % : 2 906,82 € ;
– au titre de 250 heures supplémentaires 2016 à 150 % : 9 889,75 € ;
– au titre de 179 heures supplémentaires 2017 à 125 % : 6 392,27 € ;
– au titre de 418 heures supplémentaires 2017 à 150 % : 17 913,80 € ;
– au titre de 32 heures supplémentaires 125 % 2018 : 1 142,81 € ;
– au titre de 56 heures supplémentaires 150 % 2018 : 2 399,93 € ;
– indemnité pour frais de procédure : 3 000 € ;
– Monsieur [D] demande également que l’Ags soit condamnée à le garantir.
Au soutien de ses demandes et en réplique à l’argumentation adverse, Monsieur [D] expose que :
– la preuve de la réalité des difficultés économiques de l’entreprise au jour du licenciement n’est pas établie ; en réalité, ces difficultés économiques ont été fabriquées artificiellement par la Direction du groupe auquel elle appartient, pour des raisons de politiques de gestion interne ou d’agissements pouvant s’apparenter à des abus de biens sociaux ;
– l’impact des prétendues difficultés sur son poste n’est pas davantage établi ;
– l’entreprise n’a procédé à aucune recherche de reclassement ;
– la procédure de licenciement est irrégulière ;
– il rapporte la preuve de son préjudice causé par le licenciement ;
– il a été victime de traitements dégradants et discriminatoires à compter de l’entretien préalable à licenciement et jusqu’à son départ effectif ;
– l’entreprise ne lui a pas versé la prime contractuelle, contrairement à son engagement ;
– les primes de vacances lui étaient dues en application de la convention collective applicable ;
– il est fondé à percevoir ses RTT ;
– il a exposé des frais téléphoniques pour les besoins de l’entreprise ;
– il a effectué, à la demande de l’employeur, des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées ;
– il n’a pas été délié de son obligation de non-concurrence et il n’est pas établi qu’il n’a pas respecté cette obligation.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 octobre 2022, la société BDR, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Hadoro, demande l’infirmation du jugement en ce qui concerne les condamnations prononcées, sa confirmation en ce qu’il a débouté Monsieur [D] de ses autres demandes, et la condamnation de ce dernier à lui verser une indemnité pour frais de procédure de 3 000 €. Elle fait valoir que :
– le licenciement de Monsieur [D] était justifié par les difficultés économiques de l’entreprise, qui sont établies, de même que les conséquences de ces difficultés sur le poste de Monsieur [D] ; ses accusations ne sont pas fondées ;
– l’entreprise a respecté ses obligations relatives au reclassement ;
– la procédure de licenciement est régulière ;
– la demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n’est pas justifiée en son montant ;
– les griefs de Monsieur [D] relatifs aux conditions de la rupture du contrat de travail ne sont pas fondées ;
– Monsieur [D] ne démontre pas avoir travaillé, avec l’autorisation de l’employeur, au-delà du forfait en heures dont il bénéficiait ;
– Monsieur [D] ne démontre pas avoir respecté l’obligation de non-concurrence et fait preuve de mauvaise foi à cet égard ;
– en ce qui concerne les primes de vacances, une erreur a été commise et la société s’engage à les régler ;
– la prime contractuelle, qui dépend des résultats économiques de la société, n’est pas due ;
– les demandes relatives aux RTT ne sont pas fondées ;
– la demande relative aux frais n’est pas fondée.
Bien que régulièrement assignée par acte d’huissier de justice délivré le 24 novembre 2020, l’Ags ne s’est pas constituée ; l’arrêt sera donc réputé contradictoire.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 8 novembre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions.
* * *
MOTIFS
Sur les primes de vacances
Les parties s’accordent tant sur le principe que sur le montant des primes de vacances dues à Monsieur [D].
Il convient donc de confirmer le jugement sur ce point, sauf à dire que ces sommes font l’objet d’une fixation de créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Hadoro.
Sur les primes de 2017
Il résulte des dispositions de l’article 1353 du code civil que, lorsqu’un contrat de travail prévoit une rémunération variable en fonction de la réalisation d’objectifs de l’entreprise il appartient à l’employeur d’établir que ces objectifs ont été définis et s’il prétend qu’ils n’ont pas été atteints, d’en rapporter la preuve.
En l’espèce, l’avenant du 1er avril 2016 au contrat de travail de Monsieur [D] prévoyait, outre la rémunération brute de base, « un variable de 8 000 euros brut par an défini comme suit : – 4 000 euros brut sur les objectifs personnels relatif au poste – 4 000 euros brut relatif à des objectifs liés à la société ».
Pour s’opposer au paiement la prime relative aux objectifs réalisés par l’entreprise, La société BDR et Associés fait valoir que Monsieur [D] ne démontre pas que les objectifs ont été effectivement réalisés par la société, laquelle n’a pu réaliser la moindre performance économique.
Cependant, la société Hadoro ne prouve, ni même n’allègue, avoir défini quels étaient les « objectifs liés à la société ».
Au surplus, par courriel du 9 février 2018, le dirigeant de la société Hadoro a confirmé à Monsieur [D] que ses primes lui seraient réglées.
Monsieur [D] est donc fondé à obtenir paiement de la totalité de la prime et le jugement doit être confirmé sur ce point, sauf à dire que les condamnations font l’objet d’une fixation de créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Hadoro.
Sur les RTT
A défaut d’accord collectif prévoyant une indemnisation, l’absence de prise de jours de RTT n’ouvre droit au salarié à une indemnité que si cette situation est imputable à l’employeur.
En l’espèce, il n’apparaît pas qu’un accord collectif contienne des dispositions à cet égard.
Au soutien de sa demande, Monsieur [D] expose et établit que, par courriels des 11 et 28 décembre 2012, il s’est plaint auprès de son employeur du fait que ses RTT n’apparaissaient pas sur ses bulletins de paie.
Cependant, ces éléments sont insuffisants pour établir que l’absence de prise de jours de RTT serait imputable à l’employeur.
Monsieur [D] fait également valoir que, par courriel du 9 février 2018, la société Hadoro lui a confirmé que ses RTT seraient réglés.
Cependant, il n’établit pas à quelle période s’applique cette reconnaissance, alors que ses RTT relatifs à 2018 lui ont été réglés et qu’il ne formule d’ailleurs pas de demande relative à cette période.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes relatives aux RTT.
Sur la demande de rappel de salaires pour heures supplémentaires
Aux termes de l’article L. 3243-3 du code du travail, l’acceptation sans protestation ni réserve d’un bulletin de paie par le travailleur ne peut valoir de sa part renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en application de la loi, du règlement, d’une convention ou d’un accord collectif de travail ou d’un contrat.
Aux termes de l’article L. 3171-4 du même code, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Il appartient donc au salarié de présenter, au préalable, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies, afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement, en produisant ses propres éléments.
Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l’accord de l’employeur, soit s’il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.
Il résulte des dispositions des articles 3, 5 et 6 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, lus à la lumière de l’article 31, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ainsi que de l’article 4, paragraphe 1, de l’article 11, paragraphe 3, et de l’article 16, paragraphe 3, de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, qu’il incombe à l’employeur, l’obligation de mettre en place un système objectif, fiable et accessible permettant de mesurer la durée du temps de travail journalier effectué par chaque travailleur.
En l’espèce, le contrat de travail prévoyait un salaire mensuel correspondant à une durée de travail mensuelle de 169 heures, incluant la réalisation de 17,33 heures supplémentaires.
Monsieur [D] soutient qu’il effectuait des heures supplémentaires au-delà de cette durée.
Il produit un décompte journalier, mentionnant des horaires de travail quotidien de 9heures à 20 heures et retient pour chaque jour 10 heures de travail, après avoir retranché une heure par jour, correspondant manifestement à la pause méridienne, sauf certains jours où il mentionne des horaires tardifs de nuit. Il produit également des copies de courriels envoyés lors de ces tranches horaires.
Contrairement à ce que prétend la société BDR et Associés, ces décomptes n’apparaissent pas, en soit, incohérents et sont suffisamment précis pour lui permettre de les contester utilement.
A cet égard, elle fait valoir que le contrat de travail prévoyait que « le Salarié s’engage[ait] à ne pas effectuer d’heures supplémentaires au-delà de [169 heures par mois] sans autorisation préalable de la Société et à se soumettre aux systèmes de contrôle actuels et futurs des temps de travail qui pourraient lui être communiqués ».
Elle ajoute que les pièces produites par Monsieur [D] versé au débat ne démontrent pas qu’il a travaillé au-delà du forfait en heures dont il bénéficiait, puisqu’il était tout à fait en mesure de décaler son temps de travail et utiliser les outils technologiques permettant de programmer à l’avance l’envoi tardif d’emails.
Cependant, alors qu’il résulte des courriel produits par Monsieur [D] que l’employeur ne pouvait ignorer la réalisation d’heures supplémentaires, la société BDR et Associés ne fournit pas d’éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Le jugement doit donc être infirmé en ce qu’il a rejeté la demande de rappel de salaires pour heures supplémentaires.
Néanmoins, au vu des pièces produites par Monsieur [D], la cour estime qu’au titre de la période de référence, Monsieur [D] n’a accompli des heures supplémentaires au-delà des 169 heures mensuelles contractuelles que pour un nombre inférieur à celui qu’il allègue, correspondant à un rappel de salaire de 20 000 euros.
Sur la demande de remboursement de frais
Les frais engagés par le salarié pour les besoins de l’exécution de son contrat de travail doivent être prise en charge par l’employeur, sauf stipulation contraire du contrat de travail prévoyant une prise en charge forfaitaire
En l’espèce, Monsieur [D] produit un échange de courriels d’octobre et novembre 2015 avec son responsable hiérarchique, aux termes duquel ce dernier c’est engagé à lui ouvrir une ligne professionnelle.
Cependant, le seul justificatif de frais qu’il produit est une facture de juin 2015, antérieure à la conclusion de son contrat de travail.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.
Sur la demande de dommages et intérêts
Au soutien de cette demande, Monsieur [D] expose qu’il a été victime de traitements dégradants et discriminatoires à compter de l’entretien préalable à licenciement et jusqu’au départ effectif, constitués par une « absence de transparence », une mise à l’écart dans un autre bureau avec une absence de contact avec les autres salariés, des insultes et injures, des prises à partie lors de pauses-repas, dans la rue ou au bureau par Monsieur [L], qui n’avait aucun lien hiérarchique avec lui.
Cependant, d’une part, il n’explique pas en raison de quelle particularité il aurait été discriminé et d’autre part, il ne produit aucun élément au soutien ce ces allégations.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.
Sur le licenciement et ses conséquences
L’article L.1233-4 du code du travail dispose que le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation asssurent la permutation de tout ou partie du personnel.
La notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L.233-1, aux I et II de l’article L.233-3 et à l’article L.233-16 du code de commerce.
Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure.
L’employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l’ensemble des salariés.
Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.
L’absence de toute recherche de reclassement interne par l’employeur constitue une violation de l’article L. 1233-4 du code du travail, qui a pour conséquence l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.
En l’espèce, la société BDR et Associés prétend que la petite taille de l’entreprise n’a pas permis de reclasser Monsieur [D] à un autre poste correspondant à sa formation et son expérience professionnelle, que la société Hadoro est une structure jeune et de petite taille ne comptant que 14 salariés à l’époque, où il n’a pas été possible de lui attribuer de nouvelles fonctions, d’autant qu’elle supprimait quatre autres postes.
Elle ajoute que le groupe auquel appartient la société ne compte qu’une seule autre société sur le territoire national, la société Nous Cambon, qui employait 15 salariés à l’époque et venait juste d’être créée, que les recherches visant à trouver à un poste disponible correspondant au profil de Monsieur [D] ont donc été difficiles et n’ont pas pu aboutir en raison du peu de postes de façon générale.
Cependant, la société BDR et Associés, qui ne produit, au soutien de ses allégations qu’un extrait du registre du personnel de la société Hadoro du 1er au 31 janvier 2019, ne rapporte la preuve, ni de recherches actives et sérieuses de reclassement avant le licenciement de Monsieur [D], ni de l’absence de postes disponibles.
Pour ce seul motif, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, ainsi que l’a estimé à juste titre le conseil de prud’hommes, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les motifs de ce licenciement.
Monsieur [D] justifie de plus de deux années d’ancienneté et l’entreprise emploie habituellement plus de 10 salariés.
En dernier lieu, il percevait un salaire mensuel brut de 4 694,44 euros.
En application des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail, il est fondé à obtenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse égale à une somme comprise entre 3 et 4 mois de salaire, soit entre 14 083,32 euros et 18 777,76 euros.
Monsieur [D] fait valoir que l’application stricte de ce barème retiendrait à violer les dispositions de la convention n°158 de l’organisation internationale du travail et de l’article 24 de la Charte sociale européenne du 3 mai 1996 car elle n’aboutirait pas à une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.
Cependant, d’une part, les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail sont de nature à permettre le versement d’une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT et d’autre part, la Charte sociale européenne n’a pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers.
Au moment de la rupture, Monsieur [D] était âgé de 33 ans et il justifie de sa situation de demandeur d’emploi jusqu’en mars 2020.
Au vu de cette situation, et de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle il convient d’évaluer son préjudice à 18 700 euros, infirmant le jugement quant au montant accordé.
Par ailleurs, les dispositions de l’article L.1235-2 dernier alinéa du code du travail, qui prévoient une indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement qui ne peut être supérieure à un mois de salaire, ne s’appliquent que lorsque le licenciement comporte une cause réelle et sérieuse, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Le jugement doit donc être infirmé en ce qu’il a fait droit à cette demande.
Sur la demande d’indemnité de non-concurrence
Le contrat de travail de Monsieur [D] stipulait une clause de non-concurrence applicable pendant 6 mois à compter de la cessation effective du contrat de travail et sa contrepartie financière égale à 33 % de la rémunération mensuelle de référence, calculée sur la moyenne des 3 derniers mois, que l’entreprise devait verser pendant 6 mois et prévoyait la possibilité, pour l’entreprise, de renoncer au bénéfice de cette clause par écrit, dans les 15 jours suivant la date d’envoi de la lettre de licenciement.
En l’espèce, il est constant que la société Hadoro n’a pas renoncé au bénéfice de cette clause.
La société BDR et Associés fait valoir que Monsieur [D] ne démontre pas avoir respecté l’obligation de non-concurrence qui lui incombe et qu’il a, au contraire, exercé une activité concurrente à celle de la société Hadoro après la rupture de son contrat de travail.
Cependant, les documents produits par la société BDR et Associés à l’appui de ces allégations sont tous postérieurs à la période d’application de la clause de non-concurrence à laquelle Monsieur [D] était soumis et aucun élément ne permet d’établir qu’il n’aurait pas respecté son obligation de non-concurrence
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a fait droit à la demande de Monsieur [D] en paiement de l’indemnité de non-concurrence, pour un montant non contesté.
Sur les autres demandes
Il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné la remise de documents sociaux conformes.
Sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a fait droit à la demande de Monsieur [D] à hauteur de 1 000 euros destinée à couvrir les frais non compris dans les dépens qu’il a dû engager pour assurer la défense de ses intérêts et y ajoutant, de lui octroyer 1 000 euros en cause d’appel, sommes mises à la charge de la société BDR et Associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Hadoro
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a fait droit aux demandes suivantes de Monsieur [M] [D] :
– prime de vacances 2015 : 105 € ;
– prime de vacances 2016 : 465 € ;
– prime de vacances 2017 : 599,99 € ;
– prime de vacances 2018 : 193,95 € ;
– primes impayées 2017 : 4 000 € ;
– congés payés afférents : 400 € ;
– indemnité de non concurrence : 8 666,64 € ;
Fixe ces sommes à titre de créances de Monsieur [M] [D] au passif de la procédure collective de la société Hadoro ;
Confirme également le jugement déféré en ce qu’il a ordonné la remise de documents sociaux conformes à la décision ;
Confirme également le jugement déféré en ce qu’il a débouté Monsieur [M] [D] de ses demandes de dommages et intérêts, au titre de RTT et de remboursement de frais ;
Infirme le jugement pour le surplus ;
Statuant à nouveau sur les points infirmés ;
Fixe la créance de Monsieur [M] [D] au passif de la procédure collective de la société Hadoro aux sommes suivantes :
– indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 18 700 € ;
– rappel de salaires pour heures supplémentaires : 20 000 € ;
Rappelle que les intérêts au taux légal cessent de produire effet au jour de l’ouverture de la procédure collective ;
Dit que le Centre de Gestion et d’Etude, AGS-CGEA Ile-de-France-Ouest – Unité Déconcentrée de l’UNEDIC devra garantir ces créances dans la limite du plafond légal ;
Y ajoutant,
Condamne La société BDR et Associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Hadoro, à payer à Monsieur [M] [D] des indemnités pour frais de procédure de 1 000 € au titre de la procédure de première instance et de 1 000 € au titre de l’instance d’appel ;
Déboute Monsieur [M] [D] du surplus de ses demandes ;
Déboute la société BDR et Associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Hadoro, de sa demande d’indemnité pour frais de procédure formée en cause d’appel ;
Condamne La société BDR et Associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Hadoro, aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT