Convention collective de la production audiovisuelle : 4 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/03002
Convention collective de la production audiovisuelle : 4 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/03002

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 11

ARRET DU 04 AVRIL 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/03002 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDNRO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Décembre 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F19/05791

APPELANT

Monsieur [W] [P]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Christophe BÉHEULIÈRE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1511

INTIMEE

S.N.C. EUROPE NEWS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Franck BLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : K0168

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Daniel FONTANAUD, Magistrat honoraire, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,

Monsieur Daniel FONTANAUD, Magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [W] [P] a été engagé par la société EUROPE NEWS à compter du 12 décembre 2013 en qualité de journaliste stagiaire sous contrat de piges. Il a ensuite été engagé dans le cadre de différents contrats de travail à durée déterminée. La chronique sur laquelle M. [P] travaillait en dernier lieu étant supprimée pour la session suivante, la société EUROPE NEWS lui proposait en juillet 2018 de conclure un nouveau contrat à durée déterminée à compter du 28 août 2018 afin de travailler sur l’émission Europe Soir Week-End. M. [P] refusait cette proposition et la relation de travail a cessé le 30 juin 2018 au terme du dernier contrat.

Par jugement du 17 décembre 2020, le Conseil de prud’hommes de PARIS saisi le 27 juin 2019, a déclaré irrecevables en raison de la prescription les demandes de M. [P]aux fins notamment de requalification de la relation de travail, de rappels de salaires et d’indemnités liées à la rupture du contrat de travail.

M. [P] a relevé appel le 24 mars 2021 de cette décision qui lui a été notifiée par envoi du greffe le 1er mars 2021.

Par conclusions récapitulatives du 29 décembre 2022, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, M. [P]demande à la cour d’infirmer le jugement et,

– In limine litis, de juger que ses demandes ne sont pas prescrites,

– A titre principal, sur le fond, de prononcer la requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 décembre 2013, et de condamner la société EUROPE NEWS à lui payer les sommes suivantes :

‘ 15.554,48 euros au titre de l’indemnité de requalification ;

‘ 91.333,65 euros à titre de rappel de salaires pour la période du 1er juillet 2015 au 30 juin 2018

‘ 9.133,37 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire ;

‘ 38.886,20 euros à titre d’indemnité de licenciement ;

‘ 15.554,48 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

‘ 1.555,45 euros à titre de congés payés sur préavis ;

‘ 27.554,46 euros à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

‘ 6.221,36 euros à titre de rappel de salaire et congés payés sur congés divers,

M. [P]demande demande la remise de documents sociaux rectifiés (certificat de travail portant ancienneté au 12 décembre 2013, attestation PÔLE EMPLOI), ainsi que la condamnation d’EUROPE NEWS à lui verser 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant le conseil de prud’hommes et 3.500 euros pour la procédure devant la cour d’appel. Il sollicite les intérêts légaux à compter de la saisine de la juridiction, la capitalisation des intérêts, et la condamnation de la société EUROPE NEWS aux dépens.

Par conclusions récapitulatives du 4 janvier 2023, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société EUROPE NEWS demande, in limine litis, de confirmer le jugement en ce qu’il a jugé irrecevables les demandes antérieures au mois de juin 2016 en raison de la prescription.

A titre principal, sur le fond, la société demande de confirmer le jugement, de débouter M. [P] de ses demandes, et de le condamner à verser 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

A titre subsidiaire, si la Cour entre en voie de condamnation, s’agissant des demandes postérieures au mois de mai 2016, la société EUROPE NEWS demande de fixer le salaire de référence à la somme de 3.051,46 euros bruts, de juger que que M. [P] ne justifie pas d’un préjudice lui permettant d’obtenir une indemnité de requalification en contrat de travail à durée indéterminée supérieure à 1 mois de salaire, soit 3.051,06 euros bruts, de limiter le montant des dommages et intérêts à la somme de 9.153,18 euros bruts, de limiter le montant des rappels de salaire au titre des périodes interstitielles à la somme de 26 345,31 euros bruts et 2634,53 euros à titre de congés payés afférents, et de débouter M. [P]de ses demandes de rappel de salaires de jours divers.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

****

MOTIFS

Sur la prescription

Principe de droit applicable :

Aux termes de l’article L.147l-1 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige, la durée de la prescription pour toute action portant sur1’exécution du contrat de travail se prescrit par 2 ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu, ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l’exercer.

Lorsque la prescription biennale de l’action en requalification en contrat de travail à durée indéterminée est fondée sur le motif du recours à des contrats précaires, elle a pour point de départ le terme du dernier contrat,

Application du droit à l’espèce

En l’espèce, l’action de M. [P]en requalification de contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée obéit à la prescription de 2 ans prévue pour l’action portant sur l’exécution du contrat de travail. Cependant, cette action, en l’espèce, est fondée sur le motif de recours, et, dès lors, son point de départ est constitué par le terme du dernier contrat, s’agissant de contrats successifs invoqués par le salarié, soit le 30 juin 2018.

Or, la saisine du conseil de prud’hommes date du 27 juin 2019. Ainsi, il s’est écoulé un peu moins d’un an entre le départ du délai de prescription et celui de l’action de l’intéressé devant la juridiction prudhomale.

Il s’ensuit que l’action de M. [P]n’est pas prescrite et qu’il convient d’examiner le fond du litige.

Dès lors, le jugement du conseil de prud’hommes qui a jugé irrecevable la demande de M. [P]doit être infirmé.

Sur la requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée et les demandes qui lui sont liées

Principe de droit applicable :

Aux termes de l’article L.1242-2 3e du code du travail : ‘ Sous réserve des dispositions de l’article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants :

[‘]

3° Emplois à caractère saisonnier, dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ou emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ; »

Il ressort de l’article D.1242-1 6e du code du travail que les spectacles, l’action culturelle, l’audiovisuel, la production cinématographique, l’édition phonographique peuvent recourir aux contrats à durée déterminée d’usage.

L’accord collectif du 29 novembre 2007 de la convention collective nationale de la radiodiffusion confirme en son article 1.2.1 l’usage constant de recourir au CDD d’usage dans ce secteur d’activité :

«… Il est précisé que l’usage constant s’analyse en un usage régulier et bien établi mais non obligatoirement permanent ou exclusif de tout autre. En conséquence, il est admis qu’un emploi pourvu en contrat de travail à durée déterminée d’usage puisse également l’être en contrat à durée indéterminée (ci-après CDI) ou en CDD de droit commun.

Le recours au CDD d’usage est justifié par la nature temporaire de l’activité et le caractère par nature temporaire des emplois. C’est le cas des programmes de radio, en raison de leur caractère évolutif et de la nécessité de les renouveler…’.

L’accord relatif à la classification et aux salaires minima de branche des journalistes d’agences de presse en date du 3 juillet 2019 précise que :

‘ En vertu de l’article L.7112-1 du code du travail, toute convention par laquelle une agence de presse s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un journaliste professionnel est présumée être un contrat de travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties.

Les signataires du présent accord reconnaissent l’usage constant dans la branche des agences de presse de recourir au journaliste pigiste pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, en raison de la nature de l’activité d’agence de presse conditionnée au caractère imprévisible de l’information, et en raison du caractère par nature temporaire de l’emploi de journaliste pigiste travaillant simultanément pour plusieurs entreprises de presse et agences de presse. »

La convention d’entreprise conclue le 29 septembre 2005 entre les sociétés Europe News, Europe 1 Télécompagnie et Lagardère Management, d’une part, et les organisations syndicales d’autre part indique :

‘ En outre, il peut être fait appel au sein de l’antenne à des salariés engagés par contrat à durée déterminée, dans les emplois pour lesquels il est d’usage de recourir à des collaborations temporaires, en raison de la nature de l’activité exercée, la nécessité de renouveler les programmes et de leur caractère évolutif, conformément aux articles L. 122-1-1 et D. 121-2 du code du travail.

Ces collaborateurs n’ont pas vocation à répondre à un besoin permanent de l’antenne, même si leur collaboration s’effectue au titre de plusieurs contrats à durée déterminée, correspondant à tout ou partie de saison radiophonique et/ou de saison d’été.

L’entreprise peut conclure ce type de contrat à durée déterminée que pour les emplois pour lesquels cet usage est licite, conformément aux listes des emplois Radio annexées à l’accord interbranche d’octobre 1998 (dit « accord [E] »), et par l’UNEDIC, au titre des modalités d’application du régime général et du régime spécifique d’assurance-chômage des intermittents du spectacle.’

Le protocole d’accord du 6 avril 2011 concernant les salariés employés sous contrat à durée déterminée d’usage au sein de l’UES EUROPE 1 précise en son article 1er :

« Il est d’usage constant dans le secteur de la radiodiffusion de recourir au contrat à durée déterminée dans le cadre des dispositions de l’article L.1242-2 3ème alinéa (ancien L.122-1-1-3 du code du travail) »

Ce protocole précise que cet usage constant ne prive pas l’employeur de la possibilité de conclure un contrat à durée indéterminée :

‘ Il est précisé que l’usage constant s’analyse en un usage régulier et bien établi mais non obligatoirement permanent ou exclusif de tout autre. En conséquence, il est admis qu’un emploi pourvu en CDD d’usage puisse également l’être en contrat à durée indéterminée (CDI) ou en CDD de droit commun’.

Ce même protocole d’accord inque que le « recours au contrat de travail à durée déterminée d’usage est justifié par la nature temporaire de l’activité et le caractère par nature temporaire des emplois. C’est le cas des programmes radio en raison de leur caractère évolutif et de la nécessité de les renouveler ».

Application du droit à l’espèce

M. [P]soutient qu’au sein d’EUROPE NEWS, il a été soumis à un statut précaire par la succession de contrats d’usage et de piges. Après son départ définitif de la société, il a décidé de contester le recours au contrat de travail à durée déterminée d’usage. Il fait valoir qu’il a été embauché à compter du 12 décembre 2013 et travaille pour la société EUROPE NEWS de manière permanente par l’intermédiaire de contrats de pige et de contrats à durée déterminée dits d’usage. Il invoque depuis décembre 2013 une succession ininterrompue de contrats et soutient que, depuis 4 ans, il se tenait à disposition de la société en occupant un emploi durable et permanent. Il estime être victime d’une différence de traitement injustifiée dans ses prises de congés.

La société EUROPE NEWS rappelle qu’elle a pour objet de collecter, mettre en forme, et fournir à Europe 1 des contenus et programmes d’information à diffuser sur ses différents supports et que les informations fournies en sa qualité d’agence de presse sont collectées et mises en forme par des journalistes professionnels. Elle fait valoir que le contenu est lié au diffuseur qui peut décider à tout moment, en fonction, notamment des résultats d’audience, de modifier sa grille des programmes. Elle ajoute que c’est ce caractère imprévisible et temporaire qui entraîne la possibilité pour les agences de presse telle que la société Europe News de recourir aux contrats de travail à durée déterminée d’usage.

La société EUROPE NEWS fait valoir que situation de M. [P] n’est en rien comparable à celle de ceux qui consacrent ou ont consacré l’exclusivité de leur activité à EUROPE NEWS depuis plusieurs décennies. Elle rappelle le caractère temporaire et ponctuel de l’emploi occupé par M. [P] et souligne le fait que la société a souhaité poursuivre sa collaboration avec l’intéressé, mais celui-ci a refusé la proposition d’un nouveau contrat de travail à durée déterminée d’usage pour la saison 2018/2019.

Sur ce

S’agissant de la relation de travail, M. [P]produit quatre contrats à durée déterminée d’usage :

Un contrat « saison été 2014 » engageant M. [P]en qualité de rédacteur reporter au statut journaliste afin d’assurer la préparation et l’assistanat :

‘ d’une émission intitulée « Europe matin » présentée par [U] [Y] du 14 juillet au 1er août 2014, puis par [M] [X] du 4 au 22 août 2014, et diffusée sur l’antenne d’Europe 1, du lundi au vendredi entre six heures et neuf heures ;

‘ d’une émission intitulée « Europe Midi : votre journal » présenté par [B] [C] du 7 au 11 juillet 2014 puis par [S] [J] du 14 juillet au 1er août 2014, puis par [F] [L] du 4 au 22 août 2014, et diffusée sur l’antenne d’Europe un, du lundi au vendredi entre 12h30 et 14 heures.

Ce contrat est conclu pour une période allant du 7 juillet au 24 août 2014 pour la préparation et l’enregistrement des émissions pendant la saison radiophonique d’été 2014.

Un contrat « saison 2015’2016 » engageant M. [P]en qualité de rédacteur reporter au statut journaliste :

‘ afin d’assurer la préparation et l’assistanat d’une émission intitulée « carnets du monde» présentée par [I] [T] et diffusée sur l’antenne d’Europe 1 le dimanche entre 11 heures et 12h30 ;

‘ de préparer de présenter une chronique intitulée provisoirement ou définitivement « le Petit journal insolite » dans l’émission intitulée « carnets du monde » présentée par [I] [T] et diffusée sur l’antenne d’Europe un le dimanche entre 11 heures et 12h30 ;

‘ de préparer et de participer à une chronique intitulée provisoirement ou définitivement « sous l’arbre à palabres » dans l’émission intitulée « carnets du monde » présentée par [I] [T] et diffusée sur l’antenne d’Europe un le dimanche entre 11 et 12 heures 30.

Ce contrat est conclu pour la saison radiophonique 2015 2016 soit du 20 août 2015 au 10 juillet 2016.

Un contrat engageant M. [P]en qualité de rédacteur reporter afin d’assurer la préparation et l’assistanat :

‘ d’une émission intitulée « carnets du monde » présentée par [I] [T] et diffusée sur l’antenne d’Europe 1 le vendredi entre 19 heures et 20 heures.

‘ d’une émission intitulée « médiapolis » présentée par [A] [O] et diffusé sur l’antenne d’Europe 1 le samedi.

Ce contrat est conclu pour une période allant du 20 mai au 9 juillet 2017 inclus, pour la préparation des émissions diffusées pendant une partie de la saison radiophonique 2016 2017 et pendant la saison radiophonique d’été 2017.

Un contrat « saison 2017 2018 » engageant M. [P]en qualité de rédacteur reporter au statut journaliste afin d’assurer la préparation et l’assistanat :

‘ d’une émission intitulée « carnets du monde » présentée par [I] [T] et diffusée sur l’antenne d’Europe 1 le vendredi entre 18 heures et 20 heures.

Ce contrat est conclu pour la saison radiophonique 2017 2018 soit du 22 août 2017 au 1er juillet 2018.

Ce contrat a été exécuté normalement jusqu’à son terme. Un nouveau contrat a été proposé à M. [P]pour une participation à d’autres émissions pour la saison 2018-2019. M. [P] a décliné cette proposition. Il est allé travailler à compter d’août 2018 pour Radio France.

M. [P]ne produit pas d’autre contrat. Il n’est pas contesté qu’il a aussi effectué des piges, mais ne produit aucun contrat de ce type, ni d’élément précis et circonstancié sur ce point.

Au vu de l’ensemble des éléments versés au débat :

Il est constant que les activités de la société EUROPE NEWS, en qualité d’agence de presse dans la radiodiffusion, font partie d’un secteur d’activité dans lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois au sens des articles L.1242-2 3e et D.1242-1 6e du code du travail. Cet usage par ailleurs reconnu et confirmé par les accords collectifs relatifs aux professions du secteur. Cet usage s’applique en particulier aux journalistes.

Il ressort cependant de l’article L.1242-3 qu’un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire. Or, au vu des contrats de travail versés au débat et de l’ensemble des pièces, M. [P], en sa qualité de journaliste, était effectivement toujours engagé pour occuper de manière temporaire une fonction précise ayant trait à une émission spécifique sur des plages horaires indiquées dans les contrats.

M. [P] a ainsi exercé les fonctions de rédacteur reporter durant quatre saisons radiophoniques. Il n’établit pas avoir été lié par une succession ininterrompue de contrats, ni avoir occupé un emploi permanent au sein de la société EUROPE NEWS. En effet, selon les contrats, il effectuait une tâche de préparation et d’assistance pour des émissions (carnets du monde, médiapolis) ou de préparation et de présentation d’une chronique (le Petit journal insolite), ou de préparation et participation à une chronique (sous l’arbre à palabres).

En l’espèce, aucun élément n’établit que M. [P]se tenait en permanence à la disposition de la société et occupait un emploi durable et permanent.

Notamment, l’intéressé n’établit pas qu’il s’est tenu à la disposition de l’employeur pour effectuer un travail pendant les périodes non travaillées. Il ressort d’ailleurs de ses propres écritures qu’il travaillait aussi pour d’autres employeurs du même secteur pendant la période litigieuse (notamment la chaîne Yvelines Premières). A cet égard, la société EUROPE NEWS rappelle qu’en réalité, de 2013 à 2018, M. [P] a consacré moins de la moitié de son temps de travail disponible à la société (dont 33 jours pour la saison 2013-2014 uniquement le samedi). Il n’intervenait que les dimanches lors de la saison 2015/2016 et n’était amené à intervenir que les samedis et vendredis pour les saisons 2016 à 2018.

Enfin, s’agissant de la fin de la relation de travail, il ressort des éléments versés au débat que l’émission des Carnets du Monde était transférée au dimanche de 13h à 14h à compter de la saison 2018/2019. La chronique de la bande des carnets sur laquelle M. [P] travaillait en dernier lieu et prévue jusqu’alors au sein de cette émission, était supprimée.

C’est dans ce contexte qu’en juillet 2018, la société EUROPE NEWS proposait à M. [P] de conclure un nouveau contrat à durée déterminée d’usage à compter du 28 août 2018, afin de travailler sur l’émission ‘Europe Soir Week-End’. M. [P] refusait cette proposition et la collaboration du salarié a pris fin le 30 juin 2018, au terme de son contrat de travail à durée déterminée.

Ainsi, ni la durée de la collaboration de M. [P], ni son activité effective, ni les stipulations contractuelles ne permettent de remettre en cause le caractère par essence temporaire de l’emploi, les chroniques dont le salarié avait la charge ayant varié et ayant été modifiées au fil des saisons radiophoniques, ou ont disparu en fonction des nécessités de la programmation.

Enfin, au vu des éléments versés au débat, aucun jour de congé ne reste dû à M. [P] dans le cadre de la relation de travail. L’intéressé a notamment bénéficié d’une majoration de son salaire de base de 10 % dans le cadre des contrats de travail à durée déterminée au titre des congés payés et n’a pas fait l’objet d’une inégalité de traitement avec d’autres salariés placés dans une situation comparable.

Il s’ensuit que la demande de requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée n’est pas justifiée en l’espèce et que M. [P]sera débouté de ses demandes ses demandes liées à une telle requalification (indemnité de requalification, indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de préavis, indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse). Il sera également débouté de ses demandes de rappel de salaire au titre de périodes non travaillées et de congés, lesquelles ne sont pas justifiées.

Au vu des développements qui précèdent, il n’y a pas lieu d’ordonner la remise de documents sociaux rectifiés.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes de M. [W] [P] en raison de la prescription.

DIT que l’action de M. [W] [P]n’est pas prescrite.

Et statuant sur le fond du litige,

REJETTE la demande de requalification de la relation de travail entre M.[W] [P]et la SNC EUROPE NEWS en contrat à durée indéterminée ;

DEBOUTE M. [W] [P]de ses demandes à titre d’indemnité de requalification, de rappel de salaires pour la période du 1er juillet 2015 au 30 juin 2018, d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire, d’indemnité de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis, d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de rappel de salaire et congés payés sur congés divers ;

DIT que la demande de remise de documents sociaux rectifiés n’a pas d’objet ;

Y ajoutant,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [W] [P] à payer à la SNC EUROPE NEWS en cause d’appel la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties du surplus des demandes,

CONDAMNE M. [W] [P] aux dépens d’appel.

La greffière, La présidente.

 


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