Contrôle des Mesures de Soins Psychiatriques : Évaluation de la Régularité des Procédures d’Hospitalisation sous Contrainte

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Contrôle des Mesures de Soins Psychiatriques : Évaluation de la Régularité des Procédures d’Hospitalisation sous Contrainte

Contexte de l’hospitalisation

Mme [V] [L] [B], née le 06 octobre 1986, a été admise en soins psychiatriques sans consentement à l’établissement [7] de [Localité 6] le 28 octobre 2024, sur décision de la directrice de l’établissement, en raison d’un péril imminent pour sa santé. Un certificat médical a signalé des hallucinations, des idées suicidaires et la nécessité d’une hospitalisation en chambre d’isolement.

Maintien de l’hospitalisation

Le 31 octobre 2024, la directrice a décidé de maintenir l’hospitalisation complète de Mme [L], en se basant sur des certificats médicaux établis durant une période d’observation de 72 heures. Lors de l’audience, Mme [L] a exprimé son accord pour la poursuite des soins, tandis que son avocat a demandé la levée de l’hospitalisation sous contrainte.

Arguments de la défense

L’avocat de Mme [L] a soutenu que l’établissement avait abusé du cadre dérogatoire du péril imminent, arguant que la patiente n’était pas isolée de sa famille, qui lui rendait visite. Il a également souligné l’absence de documentation prouvant que des proches avaient été informés de la mesure dans les 24 heures suivant l’admission.

Régularité de la procédure

Le juge a examiné la régularité de la procédure d’hospitalisation. Selon le Code de la santé publique, une admission sous contrainte doit être accompagnée de la demande d’un proche, sauf en cas de péril imminent dûment constaté. L’établissement n’a pas fourni le formulaire de recherche d’un proche, ce qui a soulevé des questions sur le respect des droits de la patiente.

Décision du tribunal

Le tribunal a déclaré la procédure irrégulière, ordonnant la mainlevée de l’hospitalisation complète de Mme [L]. Toutefois, les effets de cette décision seront différés de 24 heures pour permettre aux médecins de déterminer les modalités de poursuite des soins. La décision est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Strasbourg
RG
24/01571
Tribunal judiciaire
de Strasbourg
————–
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
————–
Tél . [XXXXXXXX01]
PROCÉDURE DE CONTRÔLE SYSTÉMATIQUE
DES MESURES DE SOINS
PSYCHIATRIQUES

Juge des Libertés et de la Détention

ORDONNANCE

N° RG 24/01571 – N° Portalis DB2E-W-B7I-NED7

Le 06 Novembre 2024

Nous, Judith HAZIZA, vice-présidente chargée des fonctions de juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de STRASBOURG, assistée de Zénaïde WAECKERLE, Greffier,

Statuant en premier ressort en qualité de magistrat du siège, après débats en audience publique ;

Vu les dispositions des articles L.3211-12, L.3211-12-1, L.3211-12-2, R.3211-12, R.3211-29 et R.3211-32 du Code de la Santé Publique et le dossier de la procédure ;

Vu la requête en date du 31 Octobre 2024 de MME LA DIRECTRICE DE L’[7] DE [Localité 6] concernant Mme [V] [L] [B] née le 06 Octobre 1986 à [Localité 8] demeurant [Adresse 3] actuellement en hospitalisation complète à l’[7] de [Localité 6] ;

Vu la décision d’admission en soins psychiatriques en cas d’hospitalisation à la demande d’un tiers prise par MME LA DIRECTRICE DE L’[7] DE [Localité 6] en date du 28 octobre 2024 ;

Vu les certificats médicaux de 24 heures et de 72 heures ;

Vu la décision maintenant les soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète prise par MME LA DIRECTRICE DE L’[7] DE [Localité 6] en date du 31 octobre 2024 ;

Vu l’avis motivé à l’appui de la requête ;

Vu l’avis de Madame le procureur de la République aux termes duquel le ministère public s’en rapporte à l’appréciation du tribunal ;

Mme [V] [L] [B] régulièrement convoquée, présente, assistée de Me Jérôme AZZI, avocat de permanence ;

MOTIFS

Mme [V] [L] a été admise en soins sans consentement à l’[7] de [Localité 6] le 28 octobre 2024, sur décision de la directrice de l’établissement intervenue dans le cadre d’un péril imminent. Le certificat médical d’admission établi par le Dr [G], médecin généraliste extérieur à l’établissement, faisait état des éléments suivants: patiente hospitalisée à l’[7] ayant nécessité un placement en chambre d’isolement avec sédation importante, hallucinations accoustioc-verbales, idées suicidaires avec scénaristations.

Par décision en date du 31 octobre 2024, la directrice de l’[7] a maintenu l’hospitalisation complète de Mme [L], conformément aux certificats médicaux établis durant la période d’observation de 72 heures.

A l’audience, Mme [L] rappelle qu’elle était hospitalisée en soins libres à sa demande et qu’elle a été placée en chambre d’isolement après une “crise”. Elle se dit favorable à la poursuite de la mesure. Son Conseil sollicite quant à lui la mainlevée de l’hospitalisation sous contrainte de sa cliente au motif que l’établissement a eu recours au cadre dérogatoire du péril imminent alors que Mme [L] n’est pas isolée, sa famille demeurant en Alsace et lui rendant visite à l’hôpital. En outre, aucun formulaire de recherche d’un proche n’est versé au dossier, de sorte qu’il n’est pas possible de s’assurer que l’entourage de Mme [L] avait bien été informé de la mesure dans les 24 premières heures. Le Conseil de Mme [L] conclut en indiquant que si la mesure était levée, Mme [L] pourrait demeurer hospitalisée en soins libres, tel que c’était le cas avant son passage en chambre d’isolement, cette dernière adhérant pleinement à la prise en charge proposée par l’établissement.

Sur la régularité de la procédure

Aux termes de l’article L. 3216-1 du code de la santé publique, le juge des libertés et de la détention connaît des contestations relatives à la régularité des décisions administratives prises en matière de soins psychiatriques sans consentement dans le cadre des instances introduites en application des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1. Dans ce cas, l’irrégularité affectant une décision administrative n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l’objet.

En vertu de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, le directeur de l’établissement prononce, par principe, l’admission de la personne malade lorsqu’il a été saisi d’une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l’existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci. Dans cette hypothèse, la décision d’admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I du même article sont réunies.

Par dérogation aux dispositions précitées, lorsqu’il s’avère impossible d’obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du II de l’article L. 3212-1 précité, et qu’il existe, à la date d’admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°, le directeur de l’établissement peut également admettre la personne en hospitalisation sous contrainte.

Dans ce cas, le directeur de l’établissement d’accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l’objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l’intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l’existence de relations avec la personne malade antérieures à l’admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celle-ci.

En l’espèce, Mme [L] a été hospitalisée sous contrainte dans le cadre d’un péril imminent après avoir été hospitalisée en soins libres, en raison de la nécessité, pour l’établissement, de la placer en chambre d’isolement, mesure qui n’a duré que 24 heures selon les déclarations de la patiente à l’audience. Or, le dossier ne contient pas le formulaire de recherche et d’information d’un proche du patient, habituellement établi dans le cadre des hospitalisations en péril imminent. Malgré nos sollicitations avant l’audience, l’établissement ne nous a jamais adressé le document en question. De ce fait, il n’est pas possible de comprendre pour quelle raison aucun proche n’a été sollicitée pour établir une demande de tiers, et si un proche de Mme [L] a bien été informé de la mesure dans les 24 premières heures de son admission.

Or, à l’audience, Mme [L] indique vivre en colocation avec sa “soeur de coeur”, à l’origine de l’appel passé au SAMU, et être mère d’une fille de 9 ans. Elle précise que ses parents résident à proximité de [Localité 9] et que son ancien compagnon et père de sa fille, réside, tout comme elle, sur la commune de [Localité 5]. Mme [L] a également eu l’occasion d’indiquer, lors des débats, qu’elle entretenait de bonnes relations avec l’ensemble de sa famille et qu’elle recevait la visite régulière de ses parents et du père de sa fille depuis le début de son hospitalisation.

En l’état de ces éléments, il appartenait à l’établissement de solliciter un membre de l’entourage de Mme [L] susceptible d’agir dans son intérêt, afin de rédiger la demande de tiers, cadre juridique de droit commun, en matière d’hospitalisation sous contrainte, et plus protecteur des droits du patient. En recourant au cadre dérogatoire du péril imminent hors de toute justification, l’[7] a nécessairement porté atteinte aux droits de la patiente en ce qu’il a privé celle-ci de toute possibilité d’être assistée juridiquement d’un proche de confiance tout au long de la procédure (possibilité pour le tiers de saisir directement le juge, d’être informé des audiences et d’y prendre part, d’être destinataire des décisions judiciaires …).

En conséquence, il convient de déclarer la procédure irrégulière et d’ordonner la mainlevée de la mesure d’hospitalisation sous contrainte. Cependant, au regard du positionnement de Mme [L] et des certificats médicaux versés au dossier, les effets de la présente décision seront différés de 24 heures, le temps, pour les médecins, de déterminer les modalités de poursuite des soins (programme de soins ou hospitalisation libre).

PAR CES MOTIFS

Statuant en audience publique, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort,

DECLARONS la procédure irrégulière;

ORDONNONS la mainlevée de l’hospitalisation complète de Mme [V] [L] [B] née le 06 Octobre 1986 à [Localité 8] ;

DISONS que la présente décision ne prendra effet qu’à l’expiration d’un délai maximal de 24 heures à compter de sa notification, conformément aux dispositions de l’article L. 3211-12 III du code de la santé publique;

DISONS que les dépens seront laissés à la charge du Trésor Public.

RAPPELONS que cette décision est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel dans un délai de 10 jours à compter de la présente notification, par déclaration d’appel motivée transmise par tout moyen au Greffe de la cour d’Appel de Colmar (article R.3211-18 et suivants du code de la santé publique).

Le délai d’appel et l’appel ne sont pas suspensifs, à l’exception de l’appel formé par le ministère public qui peut être déclaré suspensif par le premier président de la cour d’appel ou son délégué conformément aux dispositions de l’article R.3211-20 du Code de la santé publique.

Le Greffier
La Présidente

copie transmise par mail le 06 Novembre 2024 à :
– Mme [V] [B] [L], par remise de copie contre récépissé par l’intermédiaire de l’établissement hospitalier,
– Ministère public,
– Directrice/Directeur de l’[7] de [Localité 6]
– Me Jérôme AZZI, Conseil de [V] [B] [L]
Le Greffier

La présente ordonnance a été portée à la connaissance du procureur de la République, le à heures .
Le Greffier

Nous ………………………………………………………………, procureur de la République près le tribunal judiciaire de Strasbourg, déclarons ne pas Nous opposer à la mise à exécution de la présente ordonnance.
le ……………………………………… à ……………………………………… heures.
Le procureur de la République,

Nous ………………………………………………………………, procureur de la République près le tribunal judiciaire de Strasbourg, déclarons Nous opposer à la mise à exécution de la présente ordonnance.
le ……………………………………… à ……………………………………… heures.
Le procureur de la République,


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