En mai 2024, la S.A.R.L. CAPEC AFTEC a présenté à sa banque quatre chèques émis par Mme [S] [L] pour le paiement de formations de coiffure. Le 28 mai 2024, la banque a informé la S.A.R.L. que ces chèques avaient été rejetés en raison d’une opposition pour perte formulée par Mme [L]. La S.A.R.L. CAPEC AFTEC a contesté cette opposition, affirmant que les chèques avaient été remis en paiement et que l’opposition était fallacieuse. Elle a donc assigné Mme [L] et la banque en justice, demandant la mainlevée de l’opposition et des dommages-intérêts. La banque a soutenu qu’elle devait simplement respecter l’opposition sans vérifier sa validité. Le tribunal a constaté que Mme [L] n’avait pas justifié son opposition et a ordonné la mainlevée, condamnant Mme [L] à verser des indemnités à la S.A.R.L. CAPEC AFTEC tout en déboutant cette dernière de certaines de ses demandes.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DU 16 SEPTEMBRE 2024
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N° du dossier : N° RG 24/00340 – N° Portalis DB3F-W-B7I-JY2O
Minute : n° 24/389
PRÉSIDENT : Hervé LEMOINE
GREFFIER : Béatrice OGIER
DEMANDEUR
S.A.R.L. CAPEC-AFTEC prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Sophia ALBERT-SALMERON, avocat au barreau d’AVIGNON
DÉFENDEURS
Madame [S] [L]
[Adresse 3]
[Localité 5]
non comparante, non représentée
S.A. LE CREDIT LYONNAIS (LCL) prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Raphaelle CHABAUD DJACTA, avocat au barreau de NIMES
DÉBATS :
Après avoir entendu à l’audience du 15 Juillet 2024 les parties comparantes ou leurs conseils, le président les a informés que l’affaire était mise en délibéré au 9 septembre 2024 prorogé au 16 septembre 2024 et que l’ordonnance serait rendue ce jour, par mise à disposition au greffe.
Le :16/09/2024
exécutoire & expédition
à :Me ALBERT SALMERON
expédition à :Me CHABAUD
Courant mai 2024, la S.A.R.L. CAPEC AFTEC a remis à sa banque quatre chèques n°7113167, 7113168, 7113169 et 7113170 , d’un montant respectif de 480,00 euros, 480,00 euros, 480,00 euros et 1 050,00 euros, qui auraient été émis le 10 mai 2024 par Mme [S] [L] sur son compte bancaire personnel ouvert au Crédit Lyonnais en paiement de plusieurs formations de “perfectionnement coiffure” suivies auprès de cet organisme en 2023.
Le 28 mai 2024, la S.A.R.L. CAPEC AFTEC a été informée que ces chèques avaient tous été rejetés, Mme [L] ayant formé opposition pour “perte”.
Soutenant que ces chèques n’ont jamais été perdus puisqu’ils lui ont été remis par Mme [L] en paiement des formations suivies, de sorte que l’opposition formée par cette dernière est “fallacieuse”, la S.A.R.L. CAPEC AFTEC a assigné, par actes extra judiciaires du 20 juin 2024, Mme [S] [L] et la S.A. Crédit Lyonnais devant la présente juridiction, à laquelle elle demande de :
– condamner Mme [S] [L] à payer le montant de la créance pour un montant total de 2490,00 euros et ordonner en conséquence à Mme [S] [L] et à la banque le Crédit Lyonnais de procéder à la mainlevée de l’opposition des chèques numérotés 7113167, 7113168, 7113169 et 7113170 émis par Mme [S] [L] et tirés de son compte bancaire ouvert dans les livres de la Banque Le Crédit Lyonnais en son agence de [Localité 5] située [Adresse 1], et ce, sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,
– condamner Mme [L], à titre provisionnel, à payer à la société CAPEC la somme de 600,00 euros de dommages-intérêts pour son préjudice moral et toutes les démarches entreprises
préalablement à la présente assignation par application de l’article 1240 du code civil,
– condamner Mme [S] [L] à payer à la société CAPEC-AFTEC la somme de 2000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
A l’audience, la S.A.R.L. CAPEC AFTEC, qui est représentée, maintient ses demandes telles que formées dans ses actes introductifs d’instance.
Dans ses conclusions en réponse, la S.A. Crédit Lyonnais, qui est représentée, s’en remet à l’appréciation de la juridiction des référés sur le bien-fondé de l’opposition formée par Mme [L] et conclut au rejet des demandes formées à son encontre par la S.A.R.L. CAPEC AFTEC, expliquant :
– que lorsqu’un chèque est frappé d’opposition par son tireur, il n’appartient pas au banquier de s’assurer de la véracité et de la réalité du motif invoqué mais seulement de vérifier que celui-ci fait bien parti des motifs limitativement autorisés par la loi,
– que si tel est le cas, le banquier doit exécuter l’ordre de son client et ne pas payer la provision lorsque ledit chèque est présenté à l’encaissement,
– que la banque n’a pas à procéder à la main-levée de l’opposition formée par le tireur mais de se conformer à la décision judiciaire qui sera rendue.
Elle sollicite, reconventionnellement, la somme de 1 500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Quoique régulièrement citée, Mme [L] n’a pas constitué avocat.
Conformément à l’article 474 du code de procédure civile, la présente décision, rendue en premier ressort, sera réputée contradictoire.
Il résulte des dispositions de l’article 472 de ce même code qu’au cas où le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la demande de main-levée d’opposition formée par la S.A.R.L. CAPEC AFTEC:
Selon les 2ème et 4ème alinéas de l’article L.131-35 du code monétaire et financier,“ il n’est admis d’opposition au paiement par chèque qu’en cas de perte, de vol ou d’utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur. Le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit […] Si […] le tireur fait une opposition pour d’autres causes, le juge des référés, même dans le cas où une instance au principal est engagée, doit, sur la demande du porteur, ordonner la mainlevée de l’opposition”.
En application de cette disposition, le juge des référés, appelé à contrôler la régularité formelle et la licéité de l’opposition à un chèque, afin de vérifier qu’elle n’a pas été faite “pour d’autres causes” que celles prévues par la loi, doit s’assurer de la véracité du motif allégué par l’opposant, sur qui pèse la charge de la preuve du cas motivant son opposition, et apprécier si les faits que cet opposant invoque peuvent recevoir la qualification de perte, de vol ou d’utilisation frauduleuse.
En l’espèce, Mme [L], qui n’a pas constitué avocat, ne rapporte pas la preuve de la véracité et de la réalité du motif d’opposition allégué aux chèques détenus et remis à l’encaissement par la S.A.R.L. CAPEC AFTEC, de sorte que la demande de mainlevée de cette opposition formée par la société demanderesse doit être accueillie.
Il y a lieu dès lors d’ordonner la mainlevée de l’opposition formée par Mme [L] sur les quatre chèques litigieux, afin que la S.A.R.L. CAPEC AFTEC puisse en obtenir le paiement par la S.A. Crédit Lyonnais, qui devra payer à cet organisme de formation le montant des 4 chèques qui ont été bloqués, sous réserve que les titres puissent lui être remis en contrepartie et qu’il y ait sur le compte de Mme [L] une provision suffisante. Il n’est pas justifié d’assortir cette obligation de paiement d’une astreinte.
Sur la demande de paiement de la créance formée par la S.A.R.L. CAPEC AFTEC:
A défaut de démonstration par la S.A.R.L. CAPEC AFTEC que le compte bancaire de Mme [S] [L] n’est pas suffisamment provisionné pour assurer le paiement de ces 4 chèques, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande en paiement de la somme de 2 490,00 euros formée par la société demanderesse à titre provisionnel.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par la S.A.R.L. CAPEC AFTEC:
L’opposition formée de manière infondée par Mme [L] aux chèques qu’elle a émis le 10 mai 2024 a occasionné à la S.A.R.L. CAPEC AFTEC un préjudice consistant en la nécessité d’entreprendre diverses démarches pour tenter d’obtenir le paiement de ces titres, qu’il y a lieu d’indemniser par l’allocation d’une provision de 500,00 euros à valoir sur l’indemnisation de ce préjudice.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Mme [L], qui succombe, supportera les dépens de la présente instance et versera à la S.A.R.L. CAPEC AFTEC, qui a été contrainte d’engager des frais pour faire valoir ses droits dans le cadre de la présente procédure, la somme de 1 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il n’y a pas lieu de faire droit à la demande formée par la S.A. Crédit Lyonnais sur ce même fondement.
Nous, Juge des référés, statuant publiquement, par décision réputée contradictoire, mise à disposition au greffe, exécutoire à titre provisoire et en premier ressort,
VU l’article L.131-35 du code monétaire et financier,
CONSTATONS que Mme [S] [L] ne justifie pas avoir valablement formé opposition aux chèques n° 7113167, 7113168, 7113169 et 7113170 présentés à l’encaissement par la S.A.R.L. CAPEC AFTEC pour un des motifs prévus par l’article L.131-35 du code monétaire et financier,
En conséquence, ORDONNONS la mainlevée de l’opposition formée par Mme [S] [L] aux quatre chèques suivants, émis par cette dernière sur son compte N°01644 090035U M1642 ouvert au Crédit Lyonnais :
chèque n° 7113167 du 10 mai 2024 d’un montant de 480,00 euros,
chèque n° 7113168 du 10 mai 2024 d’un montant de 480,00 euros,
chèque n° 7113169 du 10 mai 2024 d’un montant de 480,00 euros,
chèque n° 7113170 du 10 mai 2024 d’un montant de 1 050,00 euros,
DISONS que la S.A. Crédit Lyonnais devra payer à la S.A.R.L. CAPEC AFTEC le montant des provisions des chèques qui ont été bloqués, sous réserve que les titres puissent lui être remis en contrepartie et qu’il y ait sur le compte bancaire de Mme [S] [L] la provision suffisante,
DISONS n’y avoir à prononcer une astreinte,
CONDAMNONS Mme [S] [L] à payer à la S.A.R.L. CAPEC AFTEC la somme de CINQ CENTS EUROS (500,00 EUR) à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice consécutif aux démarches accomplies pour tenter d’obtenir le paiement des chèques en cause,
DÉBOUTONS la S.A.R.L. CAPEC AFTEC de ses plus amples demandes,
VU les articles 696 et 700 du code de procédure civile,
CONDAMNONS Mme [S] [L] à payer à la S.A.R.L. CAPEC AFTEC la somme de MILLE EUROS (1 000,00 EUR) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTONS la S.A. Crédit Lyonnais de sa demande formée sur ce même fondement,
CONDAMNONS Mme [S] [L] aux entiers dépens,
REJETONS toutes autres demandes.
La présente décision a été signée par le Président et le Greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT