Votre panier est actuellement vide !
L’usage du signe El Toro del Fuego constitue une contrefaçon de la marque communautaire El Toro Loco.
Aux termes de l’article 9 du règlement (UE) n° 2017/1001 du Parlement et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne, 1. L’enregistrement d’une marque de l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif. 2.
Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d’une marque de l’Union européenne, le titulaire de cette marque de l’Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour des produits ou services lorsque: (…)
b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque; […]
L’article L.717-1 du code de la propriété intellectuelle dispose quant à lui que la violation des interdictions prévues à l’article 9 du Règlement sur la marque de l’Union européenne constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur.
La Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que constitue un risque de confusion, le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement (voir arrêt Canon, C-39/97, point 29 ; arrêt Lloyd Schuhfabrik, C-342/97).
Selon cette même jurisprudence, l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir, arrêt Sabel, C-251/95, point 22), cette appréciation globale impliquant une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte (voir arrêt Canon, point 17).
Afin d’apprécier le degré de similitude existant entre les marques concernées, la juridiction nationale doit déterminer leur degré de similitude visuelle, auditive et conceptuelle et, le cas échéant, évaluer l’importance qu’il convient d’attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés ainsi que de leurs éléments distinctifs et dominants (voir arrêt Lloyd Schuhfabrik, C-342/97 ).
Enfin, pour apprécier la similitude entre des produits ou des services, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre ces produits ou ces services.
Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (voir arrêt Canon, C-39/97, point 23). La partie initiale des marques verbales est susceptible de retenir l’attention du consommateur davantage.
Par ailleurs, l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte. Un faible degré de similitude entre les produits ou services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement. (CJCE, 29 septembre 1998, aff. C-39/97, Canon, points 15 et 17).
Le risque de confusion étant d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important (voir par exemple l’arrêt BSH Bosch und Siemens Hausgeräte GmbH, C-45/16, point 62).
En l’espèce, il ressort du procès-verbal de constat dressé par Me [B] [Y], huissier de justice à [Localité 10], le 12 juillet 2019, que sur le site internet accessible à l’adresse https://www.motorshowcascadeurs.com est présenté un camion monstre portant le signe “El TORO Del FUEGO” et que des photographies de ce même camion dans le cadre de spectacles sont publiées sur la page du réseau social Facebook de Moto Show Cascadeurs. Me [X], huissier de justice à [Localité 10], constate, quant à lui, le 8 février 2022, que la présentation du camion agrémentée de photographies est toujours présente sur le site internet à l’adresse https://www.motorshowcascadeurs.com et sur le camion litigieux figure même sur la photographie de présentation de la page associée sur le réseau social facebook.
D’un point de vue visuel, les deux premiers termes des signes en litige, à savoir le signe verbal “El TORO LOCO” déposé par la demanderesse et le signe utilisé “El TORO Del FUEGO”, sont “El TORO”; ils sont donc strictement identiques. Les signes se distinguent en revanche par leurs éléments finaux respectifs : LOCO / DEl FUEGO. Si la perception d’ensemble diffère de ce fait, il est relevé que le public pertinent attache une importance prépondérante à l’élément situé en accroche du signe et y sera plus sensible.
D’un point de vue phonétique, les signes en comparaison sont tous deux constitués d’une suite de plusieurs termes rédigés en langue espagnole. Ils partageant donc la sonorité propre à cette langue étant souligné que les deux premiers vocables sont strictement identiques. Le nombre de syllabes diffère néanmoins (5 pour 6) ce qui créé une différence de rythme qui peut être perçue à l’oreille. L’impression globale qui se dégage des signes sur le plan phonétique est donc proche sans être similaire.
Enfin, concernant la comparaison conceptuelle, les signes en litige présentent la même structure puisqu’ils sont tous les deux constitués d’une suite de termes en langue espagnole formant un ensemble doté d’une signification et que les deux premiers signes sont strictement identiques (El Toro). Le terme central est celui de “LOCO” qui signifie “taureau” et est compris de la majorité du public français en raison de sa proximité avec la traduction en langue française. Cela conduit le public pertinent à faire le lien avec ce mammifère et la tauromachie, d’ailleurs originaire d’Espagne. Les signes présentent donc une très forte similarité conceptuelle.
La comparaison des signes permet donc de relever une certaine proximité entre eux, en raison non seulement de l’importante proximité conceptuelle mais également de l’usage identique de la langue espagnole, qui renforce la proximité sonore entre les signes.
Il a été en outre précédemment souligné le fait que le signe “El TORO LOCO” est intrinsèquement distinctif pour désigner un camion monstre faisant partie d’un spectacle de cascades de voitures. En effet, l’association de cette désignation à un véhicule motorisé relève d’un choix arbitraire. La notoriété du camion, que mobilise également la société Feld Motor Sports au soutien de son argumentation, n’apparaît en revanche pas suffisamment démontrée, en dépit de la présence récurrente du camion ainsi désigné dans les compétitions et mises en scène, relayées sur internet.
Il résulte de l’ensemble de ces considérations que la combinaison entre l’identité des services concernés et la ressemblance conceptuelle entre les signes n’est pas compensée par leurs différences visuelle et auditive qui ne seront pas perçues de manière prépondérante par le public pertinent dont l’attention est moyenne. Il s’en déduit que ce public sera amené à attribuer une origine commune aux produits et services de sorte que le risque de confusion est caractérisé.
Il en résulte que les défenderesses, en faisant usage de ce signe dans le cadre de compétitions de camions monstres ont commis des actes de contrefaçon de marque au préjudice de la société Feld Motor Sports titulaire de la marque de l’Union européenne “El TORO LOCO” n° 006995898.