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En matière de brevets, recherchez bien les antériorités, ces dernières peuvent permettre d’échapper à une condamnation pour contrefaçon en établissant le défaut de nouveauté.
En l’espèce, les revendications 1 à 10 du brevet FR 063 découlent de manière évidente de l’état de la technique pour la personne du métier et doivent par conséquent être annulées pour défaut d’activité inventive. Pour être comprise dans l’état de la technique et être privée de nouveauté, l’invention doit s’y retrouver toute entière, dans une seule antériorité au caractère certain avec les éléments qui la constituent dans la même forme, le même agencement, le même fonctionnement en vue du même résultat technique. En application de ces dispositions, il est constamment jugé que l’élément de l’art antérieur n’est destructeur de nouveauté que s’il renferme tous les moyens techniques essentiels de l’invention dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique, de sorte que la nouveauté d’une invention ne peut être ruinée que par une antériorité de toutes pièces qui implique une identité d’éléments, de forme, d’agencement, de fonctionnement et de résultat technique. (Cass. Com., 27 mars 2019, pourvoi n°17-23.136 ; Cass. Com., 17 mai 2023, pourvoi n°19-25.509) Selon l’article L.611-14 du code de la propriété intellectuelle, une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique. Les éléments de l’art antérieur ne sont destructeurs d’activité inventive que si, pris isolément ou associés entre eux selon une combinaison raisonnablement accessible à la personne du métier, ils permettaient à l’évidence à cette dernière d’apporter au problème résolu par l’invention, la même solution que celle-ci. Il est en outre constamment jugé que, si une invention a été divulguée au public elle entre alors dans l’état de la technique, une seule personne pouvant constituer le public, dès lors que cette personne n’était pas tenue au secret. La personne du métier est un praticien du domaine technique où se pose le problème que l’invention, objet du brevet, se propose de résoudre (Cass. Com., 20 novembre 2012, pourvoi n°11-18.440). Autrement dit, si le problème suggère à la personne du métier de rechercher la solution dans un autre domaine technique, le spécialiste compétent pour trouver la solution est le praticien de ce domaine. |
→ Résumé de l’affaireLe litige oppose la société Morel, titulaire de brevets et modèles d’utilité sur des voiles d’ombrage, à la société Lidl, qui commercialise des produits similaires sous la marque Fleurabest. Morel a mis en demeure Lidl de cesser la commercialisation de ses produits et de lui fournir des informations sur ces derniers. Lidl a contesté la validité des droits de Morel et a demandé la nullité du brevet FR 063 de Morel. Le litige a été porté devant le Tribunal judiciaire de Paris, où Lidl demande l’annulation du brevet FR 063 de Morel. Les deux parties ont formulé des demandes de condamnation et de paiement de frais.
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→ Les points essentielsPrésentation du brevet français n°3 053 063 “Voile d’ombrage”L’invention est relative à un voile d’ombrage. La description du brevet souligne qu’il est connu de l’art antérieur de tendre une pièce de tissu au-dessus du sol pour faire de l’ombre. Le voile d’ombrage ainsi dénommé, est une toile perméable ou non, tendue entre des points fixes sur des murs, le sol ou des mâts. Il permet de créer un point d’ombre ou de protéger une surface des rayons du soleil et peut être utilisé dans des circonstances différentes, en intérieur (pour plafonner ou cloisonner), en extérieur, dans un cadre public, privé, professionnel. Il épouse des formes variées. Il permet également d’améliorer l’esthétique des lieux, en créant des jeux d’ombre ou de lumière. Sur la nouveauté des revendications 1 à 3 du brevet FR 063La société Lidl soutient que les revendications 1, 2 et 3 du brevet sont nulles pour défaut de nouveauté au regard de l’antériorité Powerplast. Elle estime que cette antériorité divulgue une feuille en tissu qui peut former un store, une paroi ou une voile de bateau, en intérieur comme en extérieur, en vertical comme à l’horizontal. La société Morel conteste cette argumentation en soulignant que l’antériorité Powerplast ne décrit pas l’invention de toutes pièces, dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique que le brevet querellé. Appréciation du tribunalLe tribunal rappelle les critères de nouveauté et d’activité inventive pour les brevets. Il analyse les antériorités invoquées par la société Lidl et la société Morel pour déterminer si l’invention du brevet FR 063 découle de manière évidente de l’état de la technique. Le tribunal conclut que l’antériorité Powerplast ne ruine pas la nouveauté des revendications 1 à 3 du brevet et écarte le moyen tiré du défaut de nouveauté. Sur le défaut d’activité inventive des revendications 1 à 10 du brevet FR 063Les parties argumentent sur l’activité inventive des revendications du brevet FR 063. La société Lidl invoque plusieurs antériorités pour démontrer le manque d’activité inventive, tandis que la société Morel conteste ces arguments en mettant en avant le caractère non évident de la combinaison des antériorités. Le tribunal analyse les revendications une par une et conclut que les revendications 1 à 10 du brevet FR 063 manquent d’activité inventive. Sur les demandes annexesLa société Morel est condamnée aux dépens de l’instance et doit payer à la société Lidl une somme sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. La décision est exécutoire de droit par provision, sauf en ce qui concerne la mesure de publication au registre national des brevets pour laquelle elle est écartée. Les montants alloués dans cette affaire: – La société Morel est condamnée à payer la somme de 20.000 euros à la société Lidl sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
– La société Morel est condamnée aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de la SELARL Duclos, Thorne, Mollet-Vieville & associés |
→ Réglementation applicable– Code de la propriété intellectuelle
Article L.611-10 alinéa 1: Sont brevetables, dans tous les domaines technologiques, les inventions nouvelles impliquant une activité inventive et susceptibles d’application industrielle. Article L.611-11: Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique. L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen. Article L.613-25: Le brevet est déclaré nul par décision de justice si son objet n’est pas brevetable aux termes des articles L. 611-10, L. 611-11 et L. 611-13 à L. 611-19. Article L.611-13: Pour l’application de l’article L. 611-11, une divulgation de l’invention n’est pas prise en considération dans certains cas, notamment si elle a lieu dans les six mois précédant la date du dépôt de la demande de brevet. – Code de procédure civile Article 700: Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais non compris dans les dépens. |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Thomas CUCHE
– Me Jean-Didier MEYNARD – Me Nicolas HOURNON |
→ Mots clefs associés & définitions– Voile d’ombrage
– Toile – Source lumineuse – Esthétique – Utilité – Luminosité – Brevet – Fixation – Antériorité – Activité inventive – Technicien – Domaine technique – Etat de la technique – Canopée – Tension – Accumulateur électrique – Cellule photovoltaïque – Capteur d’énergie – Poche de rangement – Dépôt de brevet – Dépens – Article 700 du code de procédure civile – Voile d’ombrage : toile tendue pour créer de l’ombre
– Toile : tissu en fibres textiles – Source lumineuse : élément produisant de la lumière – Esthétique : caractéristique liée à la beauté et à l’harmonie – Utilité : caractère de ce qui est utile – Luminosité : mesure de la quantité de lumière émise – Brevet : titre de propriété industrielle protégeant une invention – Fixation : action de fixer quelque chose – Antériorité : caractère de ce qui est antérieur dans le temps – Activité inventive : capacité à créer de nouvelles solutions techniques – Technicien : personne spécialisée dans un domaine technique – Domaine technique : secteur d’activité lié à des connaissances techniques – Etat de la technique : ensemble des connaissances techniques disponibles à un moment donné – Canopée : partie supérieure des arbres formant une couverture végétale – Tension : état de contrainte d’un matériau – Accumulateur électrique : dispositif stockant de l’énergie électrique – Cellule photovoltaïque : dispositif convertissant la lumière en électricité – Capteur d’énergie : dispositif permettant de récupérer de l’énergie – Poche de rangement : petite poche pour ranger des objets – Dépôt de brevet : démarche pour obtenir un brevet – Dépens : frais engagés dans une procédure judiciaire – Article 700 du code de procédure civile : article permettant de demander le remboursement des frais de justice |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
[1] Le :
Expédition exécutoire délivrée à : Me CUCHE #P75
Copie certifiée conforme délivrée à : Me MEYNARD #P240
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3ème chambre
1ère section
N° RG 22/03752
N° Portalis 352J-W-B7G-CWO7I
N° MINUTE :
Assignation du :
23 mars 2022
JUGEMENT
rendu le 14 mars 2024
DEMANDERESSE
S.N.C LIDL
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Thomas CUCHE de la SELARL DUCLOS THORNE MOLLET-VIEVILLE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0075
DÉFENDERESSE
S.A.S. MOREL
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU – CICUREL – MEYNARD – GAUTHIER – MARIE, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #P0240 & Me Nicolas HOURNON de la SELARL NH, avocat au barreau de BESANCON, avocat plaidant
Décision du 14 mars 2024
3ème chambre 1ère section
N° RG 22/03752 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWO7I
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Anne-Claire LE BRAS, 1ère Vice-Présidente Adjointe
Madame Elodie GUENNEC, Vice-présidente
Monsieur Malik CHAPUIS, Juge,
assistés de Madame Caroline REBOUL, Greffière
DEBATS
A l’audience du 27 novembre 2023 tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 14 mars 2024.
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
Le groupe Lidl propose une gamme d’articles de jardin et de mobilier d’extérieur commercialisée sous la marque Fleurabest, qui comprend des voiles d’ombrage avec éclairage LED.
La société Morel est spécialisée dans la fabrication d’objets plastiques et a diversifié son activité en proposant des produits destinés à l’aménagement des extérieurs. Elle est notamment titulaire des titres suivants portant sur des voiles d’ombrage : – Le brevet français publié sous le numéro FR 3 053 063 (ci-après « FR 063 ») et enregistré sous le numéro 16 55805, déposé le 22 juin 2016 et délivré le 13 juillet 2018 ;
– Le modèle d’utilité chinois CN 209780075 (ci-après « CN’075 ») déposé le 14 juin 2017 et revendiquant la priorité du brevet FR 063 ;
– deux dessins ou modèles communautaires (DMC) enregistrés sous les numéros 004014124-0001 et 004014124-0002.
Par lettre recommandée du 10 mai 2021, la société Morel a opposé à la société Lidl Belgium ses droits, notamment sur le brevet FR 063, et l’a mise en demeure de cesser la commercialisation de ses voiles d’ombrage avec éclairage à LED et de lui communiquer les quantités de produits vendus, leur prix, les quantités de produits importés ainsi que les coordonnées de l’importateur et du site de fabrication en Chine.
En réponse, le groupe Lidl a opposé la nullité du modèle d’utilité CN’075 et des dessins et modèles n° 004014124-0001 et n° 004014124-0002. Par une décision définitive du 30 juin 2022, l’Administration nationale de la propriété intellectuelle chinoise (CNIPA) a prononcé la nullité de l’intégralité des revendications du modèle d’utilité CN’075 au regard des antériorités DE20103701U1 et US6840657B2.
Décision du 14 mars 2024
3ème chambre 1ère section
N° RG 22/03752 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWO7I
Par acte d’huissier de justice du 23 mars 2022, la société Lidl a fait assigner la société Morel devant le Tribunal judicaire de Paris en nullité des revendications du brevet FR 063.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 février 2023, la société Lidl demande au tribunal, au visa des articles L. 611-14 et L. 613-25 du code de la propriété intellectuelle, de : Déclarer nulles les revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 et 10 du brevet FR 063; Prononcer l’annulation du brevet français FR 063 ; Dire que le jugement à intervenir, une fois devenu définitif, sera inscrit dans le registre national des brevets aux frais de la défenderesse et à l’initiative de la partie la plus diligente ; Débouter la société Morel de toutes ses demandes ; La condamner aux entiers dépens et à lui payer la somme de 30 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 13 janvier 2023, la société Morel demande au tribunal, au visa des articles L. 611-10 et L. 611-11 du code de la propriété intellectuelle, de rejeter les demandes de la demanderesse et de la condamner aux dépens et à lui payer la somme de 25 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 février 2023.
Présentation du brevet français n°3 053 063 “Voile d’ombrage”
L’invention est relative à un voile d’ombrage.
La description du brevet souligne qu’il est connu de l’art antérieur de tendre une pièce de tissu au-dessus du sol pour faire de l’ombre. Le voile d’ombrage ainsi dénommé, est une toile perméable ou non, tendue entre des points fixes sur des murs, le sol ou des mâts. Il permet de créer un point d’ombre ou de protéger une surface des rayons du soleil et peut être utilisé dans des circonstances différentes, en intérieur (pour plafonner ou cloisonner), en extérieur, dans un cadre public, privé, professionnel. Il épouse des formes variées. Il permet également d’améliorer l’esthétique des lieux, en créant des jeux d’ombre ou de lumière.
Dans l’obscurité toutefois, la fonction esthétique du voile n’est plus remplie, car il est moins visible. Dès lors, il ne présente donc pas une utilité à tout moment de la journée. Le problème technique que se propose de résoudre le brevet est donc de concevoir un voile d’ombrage qui ait une fonction esthétique à toute heure de la journée, y compris lorsque la luminosité décroit.
Afin d’apporter une solution à ce problème technique, le brevet propose d’équiper le voile d’ombrage tendu entre des points fixes d’un élément décoratif constitué d’au moins une source lumineuse. Le brevet FR 063 est ainsi composé des dix revendications suivantes:1. Voile d’ombrage (1) en toile (3) tendue, connecté à des points fixes d’attache (2) par des sommets (6), comportant un élément décoratif (10) caractérisé en ce que l’élément décoratif (10) comprend au moins une source lumineuse (11);
2. Voile d’ombrage selon la revendication 1, caractérisé en ce que l’élément décoratif comprend une succession de sources lumineuses;
3.Voile d’ombrage selon la revendication 1 ou 2, caractérisé en ce que l’élément décoratif est sur une surface du voile d’ombrage;
4.Voile d’ombrage selon la revendication 1 ou 2 caractérisé en ce que l’élément décoratif est sur une tranche (31) du voile d’ombrage;
5. Voile d’ombrage selon la revendication 3 ou 4, caractérisé en ce que la source lumineuse est sur au moins une portion de la périphérie du voile d’ombrage;
6. Voile d’ombrage selon l’une des revendications 1 à 5 caractérisé en ce qu’il comporte un moyen de stockage d’énergie (4,40) pour alimenter la source lumineuse;
7.Voile d’ombrage selon la revendication 6 en ce que le moyen de stockage de l’énergie comporte un accumulateur électrique rechargeable (4);
8. Voile d’ombrage selon la revendication 6 ou 7, caractérisé en ce qu’il comporte un capteur d’énergie (40) pour alimenter le moyen de stockage d’énergie;
9. Voile d’ombrage selon la revendication 8, caractérisé en ce que le capteur d’énergie comprend une cellule photovoltaïque;
10. Voile d’ombrage selon la revendication 8 ou 9 caractérisé en ce qu’il comporte une poche de rangement (5) du capteur d’énergie et/ou du moyen de stockage d’énergie.
Figure 1 du brevet
Sur la nouveauté des revendications 1 à 3 du brevet FR 063
Moyens des parties
La société Lidl soutient tout d’abord que les revendications 1, 2 et 3 du brevet sont nulles pour défaut de nouveauté au regard de la demande de brevet internationale WO2012/062701 ayant pour titre “feuille ou bande laminée flexible incorporant de petites sources lumineuses”, l’antériorité dite Powerplast, déposée le 7 novembre 2011 et publiée le 18 mai 2012.
Elle soutient en effet que cette antériorité divulgue une feuille en tissu, autrement dit une toile, qui peut former un store, une paroi ou une voile de bateau, en intérieur comme en extérieur, en vertical comme à l’horizontal. Dans la mesure où elle peut être utilisée comme parasol, elle peut avoir pour fonction de faire de l’ombre. De même, puisqu’elle peut être utilisée comme une paroi, une tonnelle ou une voile, elle est nécessairement tendue et connectée à des points de fixation. La connexion aux points fixes est, selon elle, indissociable des usages divulgués dans l’antériorité Powerplast. Elle divulge également un élément décoratif comprenant au moins une source lumineuse.
S’agissant de la traduction du terme “voile d’ombrage” en anglais, la société Lidl rappelle que le terme peut être traduit par “sheet”. En tout état de cause, une feuille en tissu est bien une toile et le terme “brise-soleil” signifie que la toile peut faire de l’ombre.
La société Morel estime que l’antériorité Powerplast, qui décrit et représente plusieurs variantes de réalisation d’une feuille laminée comportant une série de diodes électroluminescentes, ne décrit pas l’invention de toutes pièces, dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique que le brevet querellé.
Elle souligne, s’agissant la revendication n°1, que les deux premiers modes de réalisation proposés ne comprennent ni voile d’ombrage en toile tendue, ni points fixes d’attache pour la mise en tension dudit voile, et qu’à aucun moment il n’est question d’un “ voile d’ombrage” qui se traduit en anglais par le terme “shade sail”. Elle conclut que la société Lidl cherche à élargir l’objet des revendications du brevet produit. S’agissant des revendications 2 et 3, dépendantes, elles ajoutent des caractéristiques techniques si bien qu’elles sont nouvelles.
Appréciation du tribunal
Selon l’article L.611-10 alinéa 1 du code de la propriété intellectuelle, sont brevetables, dans tous les domaines technologiques, les inventions nouvelles impliquant une activité inventive et susceptibles d’application industrielle.
Aux termes de l’article L.611-11 de ce même code, une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique. L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen. Est également considéré comme compris dans l’état de la technique le contenu de demandes de brevet français et de demandes de brevet européen ou international désignant la France, telles qu’elles ont été déposées, qui ont une date de dépôt antérieure à celle mentionnée au second alinéa du présent article et qui n’ont été publiées qu’à cette date ou qu’à une date postérieure.
L’article L. 613-25 du code de la propriété intellectuelle dispose que le brevet est déclaré nul par décision de justice : a) Si son objet n’est pas brevetable aux termes des articles L. 611-10, L. 611-11 et L. 611-13 à L. 611-19 ; […]
Décision du 14 mars 2024
3ème chambre 1ère section
N° RG 22/03752 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWO7I
Enfin, aux termes des dispositions de l’article L. 611-13 du code de la propriété intellectuelle, pour l’application de l’article L. 611-11, une divulgation de l’invention n’est pas prise en considération dans les deux cas suivants :-si elle a lieu dans les six mois précédant la date du dépôt de la demande de brevet ;
-si elle résulte de la publication, après la date de ce dépôt, d’une demande de brevet antérieure et si, dans l’un ou l’autre cas, elle résulte directement ou indirectement :
a) D’un abus évident à l’égard de l’inventeur ou de son prédécesseur en droit ;
b) Du fait que l’invention ait été présentée par eux dans une exposition officielle ou officiellement reconnue au sens de la convention révisée concernant les expositions internationales signée à [Localité 5] le 22 novembre 1928.
Toutefois, dans ce dernier cas, l’exposition de l’invention doit avoir été déclarée lors du dépôt et une justification produite dans les délais et conditions fixés par voie réglementaire.
Il résulte de ces textes que pour être comprise dans l’état de la technique et être privée de nouveauté, l’invention doit s’y retrouver toute entière, dans une seule antériorité au caractère certain avec les éléments qui la constituent dans la même forme, le même agencement, le même fonctionnement en vue du même résultat technique.
En application de ces dispositions, il est constamment jugé que l’élément de l’art antérieur n’est destructeur de nouveauté que s’il renferme tous les moyens techniques essentiels de l’invention dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique, de sorte que la nouveauté d’une invention ne peut être ruinée que par une antériorité de toutes pièces qui implique une identité d’éléments, de forme, d’agencement, de fonctionnement et de résultat technique. (Cass. Com., 27 mars 2019, pourvoi n°17-23.136 ; Cass. Com., 17 mai 2023, pourvoi n°19-25.509)
En l’espèce, l’invention divulguée par le brevet Powerplast (antérieure au brevet litigieux, ce qui n’est pas discuté) concerne des feuilles ou bandes flexibles laminées comportant des sources lumineuses de type LED. Les deux modes de réalisation de l’invention comportent une feuille laminée comportant plusieurs couches (de support, adhésive, de couverture) qui peuvent être utilisées en intérieur comme en extérieur, comme “brise-soleil” pour des magasins ou des maisons, toits et murs pour des tonnelles ou encore des voiles de bateau. L’objectif de l’invention est de protéger les lumières LED contre l’humidité et les chocs tout en trouvant solution aux inconvénients de l’art antérieur en permettant que la bande LED ne soit pas trop rigide pour pouvoir être pliée.
Figure 1 de l’antériorité Powerplast
1- sources lumineuses
2- couche de support
Dès lors, la caractéristique tenant à ce qu’il s’agit, dans le brevet FR 087, d’un voile tendu connecté à des points fixes d’attache par des sommets, n’est pas divulguée par l’antériorité Powerplast, qui concerne des feuilles laminées. Contrairement à ce qu’affirme la société Lidl, il ne s’agit pas d’une caractéristique indissociable des usages divulgués (à titre de store, de toits ou parois de pré-fabriqués, de voile par exemple), qui ne concernent pas une toile tendue connectée seulement à des points de fixation reliés aux extrémités de ladite toile.
Dès lors, il ne s’agit pas d’une antériorité de toute pièce et le moyen tiré de l’absence de nouveauté des revendications 1 à 3 doit être écarté.
L’invention ne se retrouvant pas telle quelle dans l’état de la technique, il échet d’apprécier si elle en découle d’une manière évidente.
Sur le défaut d’activité inventive des revendications 1 à 10 du brevet FR 063
Moyens des parties
La société Lidl définit la personne du métier comme étant un technicien du domaine des toiles tendues pour former des voiles d’ombrage, tant en extérieur qu’en intérieur, et tant horizontalement pour former des toitures, que verticalement pour former des parois.
La société Lidl oppose plusieurs antériorités préalables à la date du dépôt du brevet qu’elle combine en fonction des revendications:
– l’antériorité Valaire US5622197A, qui divulgue un voile d’ombrage en toile tendue fixé par ses coins ou sommets à des points fixes; cette pièce est nécessairement consultée par la personne du métier, selon elle, car elle concerne le même domaine technique;
– l’antériorité Rodle qui divulgue plusieurs types d’objets lumineux agencés dans ou sur une surface à éclairer. L’objet peut être un tissu et une source d’alimentation est prévue. Elle estime donc que cette antériorité divulgue dans plusieurs applications des objets lumineux formés d’une toile incorporant des sources lumineuses alimentées en courant par une batterie ou un accumulateur mettant en oeuvre un panneau solaire.
– l’antériorité Powerplast précitée.
Elle ajoute par ailleurs que le brevet FR 063 indique lui-même qu’il est connu de tendre une toile entre des points fixes sur les murs, ce qui, pour la société Lidl, implique nécessairement des fixations.
Elle estime ainsi que les revendications 1 à 3 sont dépourvues d’activité inventive au regard des antériorités Valaire et Rodle combinées. Elle soutient que la personne du métier connaissant le voile d’ombrage divulgué par l’antériorité Valaire, l’aurait équipé de manière évidente d’une source lumineuse enseignée par l’antériorité Rodle. Elle estime que la personne du métier, cherchant à résoudre le problème technique, aurait consulté cette antériorité pertinente qui poursuit un but esthétique et propose une solution technique qui met en valeur le voile à toute heure de la journée. Le brevet FR 063 prévoit tout autant que les sources lumineuses puissent servir à reproduire des lettres pour former un message et ajoute que l’antériorité incite à positionner la source de lumière sur le voile. Quant aux revendications 2 et 3, elles sont également dépourvues d’activité inventive car l’antériorité Rodle divulgue une succession de sources lumineuses et enseigne qu’elle sont placées dans le plan de la surface à éclairer.
La société Lidl avance, subsidiairement, que les revendications 1 à 3 sont dépourvues d’activité inventive au regard des antériorités Valaire et Powerplast. Elle soutient que la personne du métier aurait été incitée à consulter l’antériorité et à les combiner. Le problème technique de Powerplast (l’amélioration d’un voile) comme la solution technique apportée (prévoir un élément décoratif qui comprend au moins une source lumineuse) sont identiques.
La société Lidl conclut également au défaut d’activité inventive des revendications 4 à 10 qui sont dépendantes et ne diffèrent de l’art antérieur que par des modifications minimes. Elle retient une combinaison des antériorités Valaire et Rolde ou Valaire et Powerplast avec les connaissances générales de la personne du métier en fonction des revendications.
La société Morel définit la personne du métier comme disposant de connaissances normales, de qualités moyennes, apte à améliorer le voile d’ombrage pour le mettre en valeur à toute heure de la journée.
S’agissant de la renvendication 1, la société Morel estime que le document Valaire est bien l’état de la technique le plus proche de l’invention, mais elle considère que son brevet s’en distingue en ce qu’il comporte un élément décoratif (au moins une source lumineuse) dont l’effet technique est de mettre en valeur le voile à toute heure de la journée y compris la nuit. Elle estime que la personne du métier n’aurait pas été incitée à consulter le document Rodle qui ne vise pas à améliorer l’apparence d’un voile d’ombrage et concerne un objet porteur d’un message ou d’un symbole. Dès lors, elle considère que la société Lidl, qui utilise un raisonnement a posteriori, ne démontre pas en quoi la personne du métier aurait été incitée à chercher une solution au problème technique objectif dans le document Rodle.
Il en est de même, selon elle, s’agissant de l’antériorité Powerplast. Elle estime que la personne du métier ne serait pas incitée à consulter ce document pour résoudre son problème technique dans la mesure où l’objectif de ce document est d’optimiser la fabrication d’une feuille afin de protéger efficacement les sources lumineuses contre l’humidité et les chocs, sans utiliser de couche de silicone semi-rigide et n’apporte aucun enseignement en matière de voile d’ombrage.
S’agissant des revendications 2 à 4, la société Morel estime que les observations précédemment développées s’appliquent. S’agissant tout particulièrement de la revendication 4, elle considère que la société Lidl procède par voie d’affirmation et qu’elle a déformé l’enseignement du document Rodle car il ne divulgue pas le positionnement des sources lumineuses sur une tranche du voile sur la figure 1a. Elle ajoute que la combinaison d’un énième document au titre des connaissances générales de la personne du métier est l’aveu judiciaire d’une activité inventive. Elle critique la contestation d’un seul tenant des revendications 4 et 5 alors qu’elles sont très différentes et estime que les revendications 6 à 9, qui ne comportent que des caractéristiques additionnelles, impliquent, étant dépendantes des 5 premières revendications, une activité inventive. S’agissant, enfin, de la revendication 10, elle note que la personne du métier ne serait pas allée consulter le document GB2419816 qui concerne des parapluies et qu’aucun des documents cités ne divulgue un voile comportant une poche de rangement.
Appréciation du tribunal
Selon l’article L.611-14 du code de la propriété intellectuelle, une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique.
Les éléments de l’art antérieur ne sont destructeurs d’activité inventive que si, pris isolément ou associés entre eux selon une combinaison raisonnablement accessible à la personne du métier, ils permettaient à l’évidence à cette dernière d’apporter au problème résolu par l’invention, la même solution que celle-ci.
Il est en outre constamment jugé que, si une invention a été divulguée au public elle entre alors dans l’état de la technique, une seule personne pouvant constituer le public, dès lors que cette personne n’était pas tenue au secret.
La personne du métier est un praticien du domaine technique où se pose le problème que l’invention, objet du brevet, se propose de résoudre (Cass. Com., 20 novembre 2012, pourvoi n°11-18.440). Autrement dit, si le problème suggère à la personne du métier de rechercher la solution dans un autre domaine technique, le spécialiste compétent pour trouver la solution est le praticien de ce domaine.
En l’espèce, au regard du problème technique que propose de résoudre l’invention, la personne du métier est ici un technicien spécialiste de la conception et de la fabrication des voiles d’ombrage dont la tâche consiste à lui améliorer leur esthétique à toute heure de la journée.
La personne du métier est supposée avoir eu accès à tous les éléments de l’état de la technique, notamment les documents cités dans le rapport de recherche et avoir eu à sa disposition les moyens et la capacité dont on dispose normalement dans le domaine technique considéré pour procéder à des travaux et expériences courants, la personne du métier étant impliquée dans le développement constant de son domaine technique. On attend par ailleurs de la personne de métier qu’elle ait une ouverture sur les domaines techniques voisins, pour ne pas cantonner ses connaissances à un domaine trop étroit.
En l’espèce, la demande de brevet FR 063 ayant été déposée le 22 juin 2016, les antériorités invoquées par la société Lidl, publiées avant cette date, font donc bien partie de l’art antérieur.
La société Lidl invoque en premier lieu un brevet US 5 622 197 déposé le 9 mars 1995 enregistré le 22 avril 1997 (dit antériorité Valaire), publié avant le brevet FR 063. Cette invention concerne des canopées, ajustables ou démontables.
Figure 1. Antériorité Valaire
Les parties s’accordent pour la considérer comme l’état de la technique pertinent la plus proche pour l’invention litigieuse dans la mesure où elle est située dans le même domaine technique que l’invention litigieuse, prévoit une utilisation semblable et appelle le moins de modifications structurelles pour parvenir à l’invention revendiquée.
Ce brevet divulgue en effet une canopée formée d’un tissu ou d’une toile de canopée avec des points d’ancrage sur sa périphérie et des supports adaptés pour suspendre le tissus au-dessus du sol (description 1 lignes 51 à 59). Cette canopée est apte à protéger une zone du soleil ou des précipitations (description 1 lignes 17 à 20). Un des modes de réalisation de l’invention décrit un tissu de canopée de forme carrée ou rectangulaire avec des côtés incurvés pour corriger la tension de la structure. Ces tissus ou toiles ont alors quatre coins, les coins diagonalement opposés étant raccordés à des supports verticaux (description 3 lignes 1 à 14).
De ce fait, cette antériorité divulgue bien un voile d’ombrage en toile tendue, connecté à des points fixes d’attache par ses sommets. La société Lidl souligne d’ailleurs à raison que le brevet FR 063 indique qu’il est connu de tendre une pièce de tissu au dessus du sol pour faire de l’ombre (description du brevet FR 063 en page 1 lignes 11 et 12).
La différence entre cette invention et celle divulguée par le brevet FR 063 réside dans la présence de l’élément décoratif comprenant au moins une source lumineuse. Le problème technique objectif à résoudre est donc bien d’améliorer le voile d’ombrage pour lui donner une utilité, un rôle esthétique, à toute heure de la journée.
Dès lors, partant des enseignements de l’antériorité Valaire, la personne du métier, cherchant à rendre un voile d’ombrage utile, de nuit, pour lui donner un rôle esthétique, et donc à le rendre visible dans le noir, est incitée à consulter les documents de l’état de la technique qui concernent les objets équipés de sources lumineuses, en particulier en toile. Or, la demande de brevet international WO 2008/101721, déposé le 22 février 2008 et publiée le 28 août 2008, concerne un objet illuminé qui peut être en toile ou en tissu (tissage ou tricot en matériau naturel ou synthétique), tel qu’un drapeau, un étendard, une bannière, une armoirie, et aborde une problématique similaire, puisqu’il est question de rendre visible les objets également le soir et de créer des effets de lumière la nuit.
Or, ce brevet enseigne de disposer au moins un élément d’éclairage dans ou sur la surface à éclairer (et non plus à l’extérieur) (description page 2 §3). Le brevet prévoit par ailleurs qu’un perfectionnement avantageux permet de disposer le moyen d’éclairage de manière invisible à l’intérieur de l’objet pour le rendre invisible de jour et par conséquent, de le mettre en valeur la nuit (description p3 dernier §).
La mise en évidence, en application de l’antériorité désignée, d’un message, qu’il soit publicitaire ou simplement décoratif n’en reste pas moins la conception d’un élément décoratif comportant une source lumineuse, étant en outre souligné que le brevet FR 063 prévoit aussi que les sources lumineuses puissent former une lettre, un message, représenter une constellation ou un logotype.
Par conséquent, la personne du métier est naturellement incitée à combiner les deux documents Valaire et Rodle pour améliorer l’apparence d’un voile d’ombrage lorsque la lumière décroit.
Cette antériorité divulgue bien un élément décoratif comportant au moins une source lumineuse sur la toile (description page 12 §2), correspondant, en association avec l’antériorité Valaire, à la revendication 1 du brevet FR 063. L’antériorité divulgue également, tant dans la description que sur la figure 1a, une succession de sources lumineuses dans l’objet, ce qui prive également d’activité inventive la revendication n°2. Le fait que l’antériorité Rodle prévoie que l’élément d’éclairage est disposé dans ou sur la surface éclairée prive encore d’activité inventive la revendication n°3 du brevet FR 063. De fait, l’invention découle logiquement de l’état de la technique et s’impose d’elle-même à la personne du métier, en dehors de tout effort inventif. Il n’est d’ailleurs mis en exergue aucune rupture avec l’art antérieur ou préjugé que la personne du métier devrait surmonter.
Les revendications 4 et 10 sont des revendications dépendantes du brevet FR 063. Cependant, l’annulation d’une revendication principale pour défaut d’activité inventive ou défaut de nouveauté n’entraîne pas automatiquement celle des revendications dépendantes (Com, 27 janvier 2021, n° 18-17063)
Il sera observé, s’agissant des revendications 4 et 5, qui concernent l’emplacement des sources lumineuses, que l’antériorité Rodle divulge déjà un emplacement des moyens d’éclairage “dans ou sur” la surface à éclairer, sans limitation particulière, étant précisé que la personne du métier pourra être mise sur la voie d’un positionnement des sources lumineuses sur la tranche ou une portion de la périphérie par la figure 3 qui prévoit la possibilité d’envisager une barre de lumières en limite de l’invention. En tout état de cause, les précisions de ces revendications apparaissent mineures et relèvent des connaissances générales de la personne du métier. Les revendications 4 et 5 n’ont pas d’activité inventive.
L’antériorité Rodle prévoit également une source de tension pour alimenter les moyens d’éclairage, qui peut être prévue soit en tant qu’accumulateur, en tant que batterie, soit en tant que branchement enfichable à une source de réseau fixe ou à une source de tension d’un réseau. Dès lors, les revendications 6 et 7 du brevet FR 063 sont dépourvues d’activité inventive.
Il en est de même des revendications 8 et 9 dudit brevet qui prévoient que le voile comporte un capteur d’énergie pour alimenter le moyen de stockage qui comprend une cellule photovoltaïque, dans la mesure où l’antériorité Rodle prévoit qu’un perfectionnement de l’invention est caractérisé en ce qu’est prévu en tant que source de tension un panneau solaire formé de préférence à partir d’éléments photovoltaïques. L’antériorité précise, en page 7 de la description §2, que selon l’invention, il est prévu d’utiliser en tant que source de tension un voile solaire constitué d’éléments photovoltaïques.
Enfin, l’antériorité Rodle prévoit que l’alimentation électronique ou la source de tension est envisageable dans un mode de réalisation selon l’invention, comme faisant partie intégrante de l’objet éclairé, ce qui implique un rangement du capteur d’énergie ou du moyen de stockage, que la personne de métier pourra déduire de ses connaissances générales dans le domaine, la société Lidl justifiant que l’état de la technique comporte déjà des solutions à ce problème, que ce soit dans un but esthétique ou de sécurité.
Au regard de l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de considérer que les revendications 1 à 10 du brevet FR 063 découlent de manière évidente de l’état de la technique pour la personne du métier et doivent par conséquent être annulées pour défaut d’activité inventive.
Sur les demandes annexes
Succombant, la société Morel sera condamnée aux dépens de l’instance.
Supportant les dépens, elle sera condamnée à payer à la société Lidl la somme de 20.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La présente décision est exécutoire de droit par provision, sauf en ce qui concerne la mesure de publication au registre national des brevets pour laquelle elle est écartée.
LE TRIBUNAL,
ANNULE les revendications 1 à 10 du brevet français FR 3 053 063 pour défaut d’activité inventive:
ORDONNE la transmission du jugement, une fois passé en force de chose jugée, par la partie la plus diligente à l’INPI aux fins d’inscription au registre national des brevets et aux frais de la société Morel;
CONDAMNE la société Morel aux entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de la SELARL Duclos, Thorne, Mollet-Vieville & associés;
CONDAMNE la société Morel à payer à la société Lidl la somme de 20.000 euros (vingt mille euros) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
DIT que la présente décision est exécutoire par provision sauf en ce qui concerne la publication sur le registre national des brevets.
Fait et jugé à Paris le 14 mars 2024
LA GREFFIÈRELA PRESIDENTE
Caroline REBOULAnne-Claire LE BRAS