Il résulte de ces normes, prises à la demande de la Commission européenne dans le cadre de la directive 97/23/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 mai 1997 relative au rapprochement des lois des Etats membres concernant les équipements sous pression et de la directive 89/106/CEE sur les produits de constructions, que la remise d’un certificat de réception soit en original, soit en copie mais sans aucune modification, constitue une obligation de résultat à la charge de l’intermédiaire.
En la cause, la société Endel a été informée par la société Framatome le 6 décembre 2021 d’un problème concernant plusieurs certificats de réception, concernant des produits acquis auprès de l’appelante par la société Endel. Elle a ainsi demandé à la société Endel de lui transmettre, pour le 31 janvier 2022, les résultats de l’analyse comparative des copies des certificats avec les originaux, et de vérifier, pour le 15 février 2022, toutes les commandes passées depuis 2018. Le 9 décembre 2021, la société Endel a répercuté cette demande d’information à la société Cita Production. Il s’est agi initialement de sept certificats. Ce problème a concerné des produits destinés à la centrale nucléaire du Bugey.
N° RG 22/03012 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LPNB
C4
Minute N°
délivrée le :
la SELARL RETEX AVOCATS
Me Pascale HAYS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 11 MAI 2023
Appel d’une ordonnance (N° RG 2022R00020)
rendue par le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE
en date du 28 juin 2022
suivant déclaration d’appel du 02 août 2022
APPELANTE :
S.A.S. CITA PRODUCTION au capital social de 125 000 euros, immatriculée au RCS de DIJON sous le numéro 477 751 531, représentée par la société NP MANAGEMENT, en qualité de Présidente, Société à responsabilité limitée, au capital social de 500 000 euros, immatriculée au RCS DIJON sous le numéro 502 742 489, elle-même représentée par Madame [G] [S], en qualité de Gérante
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Céline CASSEGRAIN de la SELARL RETEX AVOCATS, avocat au barreau de VALENCE, postulant et plaidant par Me COUNON, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉE :
S.A.S. VALFER inscrite au RCS de Romans sous le n° 400 764 098, au capital social de 300 000€, représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège de la société
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Pascale HAYS, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me LEVEQUE, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente,
Mme Marie-Pascale BLANCHARD, Conseillère,
M. Lionel BRUNO, Conseiller,
Assistés lors des débats de Alice RICHET, Greffière
DÉBATS :
A l’audience publique du 22 février 2023, M. BRUNO conseiller, a été entendu en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,
Puis l’affaire a été mise en délibéré pour que l’arrêt soit rendu ce jour,
Faits et procédure :
1. La société Valfer a pour activité le négoce de produits métallurgiques ferreux et non ferreux. Dans ce cadre elle s’approvisionne auprès de différents aciéristes. La société Cita Production a pour activité la fabrication de structures métalliques et de parties de structures pour l’industrie nucléaire. Entre 2018 et 2020, la société Cita Production s’est approvisionnée notamment auprès de la société Valfer.
2. A la fin de l’année 2021, la société Framatome a conduit un audit de sa chaîne de fournisseurs et a contrôlé certains produits en provenance de la société Valfer. L’audit a révélé des incohérences sur les certificats de réception communiqués par la société Valfer et la composition réelle des produits vendus par elle. La société Framatome a élargi ses contrôles à tous les produits qu’elle avait reçus directement ou indirectement en provenance de la société Valfer et elle s’est aperçue du caractère suspect de 7 certificats de réception ayant accompagné des produits livrés par son fournisseur Endel, lequel s’était fourni auprès de la société Cita Production, elle-même ayant été approvisionnée par la société Valfer.
3. La société Cita Production a par la suite contrôlé l’ensemble des certificats de réception dont elle n’a reçu qu’une copie de la société Valfer. Elle a également demandé à la société Valfer de lui fournir les originaux des certificats de réception. La société Valfer ne donnant pas suite, la société Cita Production a mis en demeure la société Valfer de lui fournir l’intégralité des 22 certificats de réception originaux manquants et de lui communiquer toutes explications ou informations permettant de connaître l’origine des problèmes constatés.
4. En l’absence de réponse, et en dépit de plusieurs rappels et mise en demeure, la société Cita Production a assigné la société Valfer devant le président du tribunal de commerce de Romans sur Isère le 1er mars 2022, afin notamment’:
– d’ordonner à la société Valfer de lui communiquer les 15 certificats de réception originaux correspondants aux commandes suivantes, le tout sous astreinte à hauteur de 1.500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir’;
– d’ordonner à la société Valfer de lui communiquer toutes explications ou informations permettant de connaître les raisons pour lesquelles il a été observé des différences de contenus entre les certificats de réception originaux et les copies de certificats de réception des commandes n°33208, 33867, 35112, 35115, 35119, 35996, 36199, 36200, 36203, 36204, 36205, 36209, 36267, 36268, 36271, 36272, 36273, 37003, 37005, 37008, 37012, 37570, 37573 et 3757, le tout sous astreinte à hauteur de 1.500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir’;
– de condamner la société Valfer à lui payer la somme de 1.664,40 euros à titre de provision à valoir sur le coût des contre-essais’;
– de condamner la société Valfer à lui payer la somme de 10.574,25 euros à titre de provision à valoir sur le coût des frais de personnel exposés pour tenter de résoudre la situation’;
– de condamner la société Valfer à lui payer la somme de 177.538 euros à titre de provision à valoir sur les pertes d’exploitation’;
– de condamner la société Valfer à lui payer la somme de 8.749,34 euros à titre de provision à valoir sur le préjudice résultant de la désorganisation de l’entreprise’;
– de condamner la société Valfer à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de provision à valoir sur le préjudice d’image et d’atteinte à la réputation commerciale.
5. Par ordonnance du 28 juin 2022, le président du tribunal de commerce a, au visa des articles 1134 du code civil et 873 du code de procédure civile’:
– condamné la société Valfer à communiquer à la société Cita Production les 15 certificats de réception originaux concernant les 5 commandes n°18832, 19203, 19762, 20286 et 20747 sans astreinte’;
– rejeté les demandes de la société Cita Production tendant à la communication de toutes explications ou informations permettant de connaître les raisons pour lesquelles il a été observé des différences de contenus entre les certificats de réception originaux et les copies de certificats de réception, comme non fondées’;
– rejeté les demandes de la société Cita Production en paiement d’une provision au titre des préjudices subis’;
– rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires’;
– débouté la société Cita Production de sa demande en paiement en vertu de l’article 700 du code de procédure civile’;
– liquidé les dépens, pour être mis à la charge de la société Valfer.
6. La société Cita Production a interjeté appel de cette décision le 2 août 2022 en toutes ses dispositions, reprises dans l’acte d’appel, à l’exception de celle ayant rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires. L’instruction de cette procédure a été clôturée le 9 février 2023.
Prétentions et moyens de la société Cita Production’:
7. Selon ses conclusions remises le 24 novembre 2022, elle demande à la cour, au visa des articles 455, 458, 700, 872 et 873 du code de procédure civile, des articles 1103, 1217 et 1240 du code civil, de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, des normes européennes et françaises NF EN 10204 (2005) et NF EN 10025-1 (2005)’:
– de la déclarer recevable et bien fondée en son appel’;
– de déclarer l’appel incident de la société Valfer mal fondé’;
– de débouter l’intimée de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions’;
– en conséquence, à titre principal, d’annuler l’ordonnance déférée en ce qu’elle a condamné l’intimée à communiquer à la concluante les 15 certificats de réception originaux concernant les 5 commandes n°18832, 19203, 19762, 20286 et 20747 sans astreinte’; en ce qu’elle a rejeté les demandes de la concluante tendant à la communication de toutes explications ou informations permettant de connaître les raisons pour lesquelles il a été observé des différences de contenus entre les certificats de réception originaux et les copies de certificats de réception comme non fondées’; en ce qu’elle a rejeté les demandes de la concluante en paiement d’une provision au titre des préjudices subis’; en ce qu’elle a débouté la concluante de sa demande en paiement en vertu de l’article 700 du code de procédure civile’; en ce qu’elle n’a ainsi pas fait droit aux demandes de la concluante’;
– à titre subsidiaire, d’infirmer cette ordonnance.
8. Elle sollicite ainsi de la cour, statuant à nouveau’:
– d’ordonner à l’intimée de lui communiquer les certificats de réception originaux correspondants aux commandes suivantes, le tout sous astreinte à hauteur de 1.500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir:
– d’ordonner à l’intimée de communiquer à la concluante toutes explications ou informations permettant de connaître les raisons pour lesquelles il a été observé des différences de contenu entre les certificats de réception originaux et les copies de certificats de réception des commandes n° 33208, 33867, 35112, 35115, 35119, 35996, 36199, 36200, 36203, 36204, 36205, 36209, 36267, 36268, 36271, 36272, 36273, 37003, 37005, 37008, 37012, 37570, 37573 et 37574, le tout sous astreinte à hauteur de 1.500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir’;
– de condamner la société Valfer à payer à la concluante la somme de 1.664,40 euros à titre de provision à valoir sur le coût des contre-essais’;
– de condamner la société Valfer à payer à la concluante la somme de 10.574,25 euros à titre de provision à valoir sur le coût des frais de personnel exposés pour tenter de résoudre la situation’;
– de condamner la société Valfer à payer à la concluante la somme de 12.630 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la 1ère instance’;
– de condamner la société Valfer à payer à la concluante la somme de 3.300 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’appel’;
– de condamner la société Valfer aux entiers dépens de première instance et d’appel.
La société Cita Production expose’:
9. – qu’en application des normes NF, afin d’assurer leur traçabilité, les plaques de tôles en acier doivent être accompagnées d’un document de contrôle, tel qu’un certificat de réception (ou CCPU), émis par le producteur de la plaque; que ce document doit être produit tout au long du circuit de commercialisation’; qu’à défaut de transmission de l’original, il est admis qu’une copie sans modification soit remise’; que ce certificat fournit les renseignements relatifs à la nuance de l’acier (ses caractéristiques mécaniques), à sa qualité (capacité en terme de résistance), aux essais réalisés afin de le contrôler, à son état de livraison (selon le procédé de fabrication par laminage ou traitement thermique)’;
10. – que l’audit opéré par la société Framatome a révélé des incohérences entre les données figurant sur les certificats de réception communiqués par l’intimée et la composition réelle des produits vendus par elle, décelant une contrefaçon, une falsification, ou suspectant des irrégularités’; que ce client a procédé ensuite à un contrôle de tous les produits reçus directement ou non en provenance de la société Valfer, et s’est aperçu du caractère extrêmement suspect de 7 certificats de réception ayant accompagné des produits livrés par son fournisseur Endel, lequel s’était fourni auprès de la concluante, elle-même ayant été approvisionnée par la société Valfer’;
11. – que lors de la livraison initiale des produits, seules des copies des certificats de réception ont été remis par l’intimée à la concluante, puis par la concluante à la société Endel, et par cette dernière à la société Framatome’; que pour la réalisation de son audit, la société Framatome a demandé directement aux producteurs aciéristes de lui transmettre les certificats de réception originaux relatifs aux commandes suspectes, et après comparaison avec les copies reçues, a relevé des différences entre les documents, les copies fournies par la société Valfer n’étant pas identiques aux versions originales émanant des aciéristes, des « modifications » y ayant été apportées’; que la société Framatome a ainsi demandé des explications à son fournisseur Endel, lequel s’est retourné contre la concluante, afin d’obtenir les 7 certificats modifiés et qu’il lui soit indiqué précisément quelles sont les références et repères des produits impactés, dans un délai de 10 jours’; que la société Endel a également demandé l’identification de toute autre commande passée par elle dont l’approvisionnement proviendrait de la société Valfer’;
12. – que la concluante a ainsi demandé à l’intimée de lui communiquer les originaux des certificats de réception de huit commandes passées entre 2018 et 2020, ce qui correspond à une quarantaine de certificats’; qu’ayant poursuivi ses recherches, la concluante a constaté que sur un total de 58 certificats, 22 certificats originaux n’avaient pas été produits, alors que 22 autres présentaient des différences de contenus entre les copies et les originaux, et que 14 ne présentaient pas de problème’; que la concluante a ainsi mis en demeure l’intimée de lui adresser, sous huitaine, les 22 certificats manquants, et de lui
fournir des explications concernant les différences entre les copies et les originaux pour les 22 autres certificats ; que la société Valfer n’a adressé que 6 certificats originaux’;
13. – concernant l’annulation de l’ordonnance déférée, que toute décision doit être motivée, au sens des articles 455 alinéa 1 et 458 du code de procédure civile et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme’; que pour écarter le prononcé de l’astreinte que la concluante sollicitait en complément de la condamnation de l’intimée à lui communiquer les 15 certificats de réception originaux des 5 commandes n°18832, 19203, 19762, 20286 et 20747, le juge des référés n’a pas motivé sa décision; qu’il en est de même pour le rejet de la demande de la concluante visant à voir l’intimée condamnée à lui communiquer toutes explications ou informations permettant de connaître les raisons pour lesquelles il a été observé des différences de contenu entre les certificats de réception originaux et les copies de certificats de réception, ainsi que concernant le rejet des demandes indemnitaires;
14. – que si l’intimée soutient qu’il ne manque plus que cinq certificats originaux sur 15, aucun élément ne l’établit’; que si elle indique qu’il est difficile de mettre en ‘uvre une astreinte sur une obligation de moyens, son obligation de remettre les certificats originaux est une obligation de résultat
selon les normes françaises et européennes’; qu’en outre, l’intimée ne démontre pas avoir tout mis en ‘uvre pour exécuter cette obligation’;
15. – subsidiairement, que le juge a mal apprécié les faits de l’espèce, en refusant d’ordonner l’astreinte sollicitée, puisque les normes françaises et européennes imposent la remise des certificats originaux, sinon d’une copie sans modification’; que la concluante doit rapidement rendre des comptes aux sociétés Endel et Framatome, alors que l’Autorité de sûreté nucléaire a été informée du problème le 11 février 2022′; que la concluante a également avisé ses autres clients de la situation, lesquels attendent la conclusion de contrôles complémentaires’; que certains lui ont adressé des mises en demeure de fournir les certificats’dans les plus brefs délais’; que l’urgence résulte également du fait que certains produits pouvant être concernés sont susceptibles d’avoir été incorporés dans la construction de centrales nucléaires et doivent être rapidement identifiés afin que les mesures appropriées soient prises’; que le juge des référés aurait ainsi dû prendre en compte ces éléments pour fixer l’astreinte’;
16. – que l’intimée n’a pas fourni d’explication concernant les discordances entre les copies de 24 certificats et les originaux, alors que la concluante doit fournir des explications à ses clients sur ces points afin que l’Autorité de sûreté nucléaire puisse faire la lumière sur la situation’; qu’une astreinte est également nécessaire’;
17. – s’agissant des demandes de provisions, que la concluante est contrainte de réaliser des contre-essais afin de s’assurer de la conformité des produits qu’elle a encore en stock’; que l’intimée doit en supporter le coût, ce qu’elle a reconnu en réglant 734,40 euros au titre des essais de la commande n°21523 du 9 mars 2022′; que la concluante est bien fondée à solliciter le paiement de 1.664,40 euros au titre des essais de la commande n°21582 du 25 avril 2022′;
18. – qu’afin de remédier aux manquements de l’intimée, et dans le cadre de la préparation du dossier, la concluante a exposé des frais de personnel à hauteur de 25.340,24 euros'(employés du service qualité, directrice générale, service administratif)’; que l’intimée a accepté de payer à ce titre 14.765,99 euros et s’est ainsi reconnue débitrice, ce que le juge des référés aurait dû prendre en compte’; que l’intimée doit ainsi être condamnée à payer le complément de 10.574,25 euros.
Prétentions et moyens de la société Valfer’:
19. Selon ses conclusions remises le 25 janvier 2023, elle demande à la cour’:
– de confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a rejeté les demandes de l’appelante tendant à la communication de toutes explications ou informations permettant de connaître les raisons pour lesquelles il a été observé des différences de contenus entre les certificats de réception originaux et les copies de certificats de réception comme non fondées’; en ce qu’elle a rejeté les demandes de l’appelante en paiement d’une provision au titre des préjudices subis’; en ce qu’elle a débouté l’appelante de sa demande en paiement en vertu de l’article 700 du code de procédure civile’; en ce qu’elle a rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires’;
– d’infirmer cette ordonnance en ce qu’elle a condamné la concluante à communiquer à l’appelante les 15 certificats de réception originaux concernant les 5 commandes n°18832, 19203, 19762, 20286 et 20747 sans astreinte’; en ce qu’elle a liquidé les dépens pour être mis à la charge de la concluante’;
– statuant à nouveau, de juger que l’ordonnance était motivée’;
– de dire que le juge des référés a parfaitement apprécié les faits de l’espèce;
– de dire que la concluante a transmis tous les certificats de réception qu’elle avait à sa disposition (à savoir 53) à l’appelante, qu’elle a essayé de fournir les manquants et est dans l’impossibilité d’en fournir d’autres ;
– de rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de l’appelante’;
– de rejeter la demande de l’appelante relative à l’article 700 du code de procédure civile et à défaut, la revoir dans de plus justes proportions’;
– de condamner l’appelante au paiement de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
– de condamner l’appelante aux dépens.
Elle soutient’:
20. – concernant la motivation de l’ordonnance déférée, que le juge des référés a retenu que la demande n’est pas fondée, que l’appelante n’apporte pas la preuve de sa demande et ni des préjudices pour lesquels elle demande une provision’; que cette ordonnance a ainsi été motivée’; que le juge a, par une appréciation souveraine, pris acte que la concluante a transmis tous les certificats se trouvant en sa possession et qu’elle s’est engagée à transmettre ceux manquants’;
21. – s’agissant du rejet de la demande d’astreinte, que la liste de 58 certificats demandés présente des doublons, de sorte que le nombre total de certificats à transmettre est moindre’; qu’ainsi, seuls les certificats suivants n’ont pu être finalement transmis’: A1/01712555, 7620799, 18D2062, 360712 et 41121′; que le juge des référés a constaté que 53 certificats sur 58 ont ainsi été remis’et qu’ainsi une astreinte n’était pas nécessaire’; qu’il est en outre difficile d’assortir l’exécution d’une obligation de moyens d’une astreinte, d’autant que la concluante ne refuse pas de transmettre les certificats manquants, mais ne peut transmettre que ce qui est en sa possession; que la concluante a communiqué à l’appelante les certificats manquants à mesure de leur réception’; qu’elle tente depuis plusieurs mois d’obtenir de ses fournisseurs ceux manquants’et ne dispose d’aucun moyen à cette fin’;
22. – concernant la demande d’explications sous astreinte, que la concluante a déjà apporté à l’appelante les informations nécessaires’; qu’elle a ainsi seulement transmis à l’appelante les certificats remis par son propre fournisseur, la société Guster’; que la société Framatome exigeant des produits irréprochables, les fournisseurs sont obligés de créer des produits répondant à son cahier des charges, et ainsi de mettre à jour les certificats de réception afin qu’ils correspondent à la qualité réelle des produits livrés’; que la concluante a ainsi vendu des produits correspondant aux normes exigés, et a transmis les certificats correspondants’; que cela limite tout risque concernant la fiabilité des produits livrés’; que dans ses lettres adressées à ses clients, l’appelante reconnaît qu’il n’y a pas de remise en cause de l’intégrité des produits livrés par la concluante, mais que le problème ne concerne en réalité qu’en grande partie la forme des certificats’;
23. – concernant les demandes de provisions, que la concluante n’est pas opposée aux demandes d’indemnisation, et a accepté de régler 15.500,39 euros au titre des contre-essais et des frais de personnel engagés’; que la demande complémentaire portant sur 1.664,40 euros est infondée, dans la mesure où la concluante a déjà réglé les frais de contre-essais, alors que la preuve d’un défaut des produits n’est pas rapportée’; que l’appelante procède en réalité à des contre-essais à répétition’;
24. – s’agissant des frais de personnel, que la concluante a déjà réglé 14.765,99 euros à l’appelante, alors que sa demande complémentaire correspond à un temps de travail identique, utilisé les mois suivants, alors qu’aucun événement supplémentaire n’est venu s’ajouter’; qu’il n’est pas établi que ces frais supplémentaires soient en lien avec le problème des certificats’;
25. – s’agissant du prétendu préjudice pour perte d’exploitation et désorganisation de l’entreprise, d’un préjudice d’image, que l’appelante a abandonné ces demandes devant la cour en ne les réitérant pas bien qu’elle en ait été déboutée par le juge des référés; qu’en outre, cette juridiction a retenu que l’appelante n’a pas apporté suffisamment de preuves, alors que la concluante a déjà versé 15.500,39 euros au titre des préjudices économiques.
*****
26. Il convient en application de l’article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION’:
1) Sur la demande d’annulation de l’ordonnance entreprise’pour défaut de motivation :
27. Concernant la production des certificats et l’astreinte, le premier juge a pris acte que la société Valfer reconnaît avoir transmis l’ensemble des certificats qu’elle avait en sa possession, à savoir 53, mais que les originaux manquants ne sont pas à sa disposition’; qu’elle s’engage à tenter de se faire remettre ces certificats manquants auprès de ses propres fournisseurs’; qu’en conséquence, il convient de condamner la société Valfer à communiquer les 15 certificats originaux concernant les 5 commandes n°18832, 19203, 19762, 20286 et 20747 sans astreinte. Concernant la demande de communication d’explications ou d’informations sous astreinte, le juge des référés a estimé cette demande non fondée, mais sans indiquer la raison de ce rejet. Les demandes d’astreinte formées par l’appelante ont été rejetées, sans explication.
28. Aux termes de l’article 455 du code de procédure civile, tout jugement doit être motivé. L’article 458 précise que cette obligation est prescrite à peine de nullité.
29. En l’espèce, si le juge a un pouvoir souverain concernant le prononcé d’une astreinte, ou le rejet de la demande d’astreinte formée par une partie, ce pouvoir n’est pas discrétionnaire et le juge doit motiver sa décision également sur ce point. Or, en la cause, les demandes d’astreinte ont été rejeté sans motivation. Il en est de même concernant la demande d’explications formée par l’appelante.
30. Cependant, il résulte des dispositions de l’article 901 du code de procédure civile que la cour est saisie par la déclaration d’appel. En l’espèce, la déclaration de la société Cita Production n’a visé qu’un appel limité de l’ordonnance déférée, et non la nullité de cette décision. Il en résulte que la cour n’a pas été saisie d’une demande d’annulation de cette ordonnance, mais que d’une demande de réformation.
2) Concernant la réformation de l’ordonnance entreprise’:
31. Il n’est pas contesté par l’intimée que les produits qu’elle a livrés devaient être accompagnés des certificats émis par leurs fabricants, afin de permettre leur traçabilité. La norme NF EN 10204 relative aux documents de contrôle des produits métalliques prévoit ainsi, concernant la transmission des certificats, qu’un intermédiaire doit uniquement transmettre soit un original, soit une copie des documents de contrôle fournis par le producteur sans aucune modification, ces document devant être accompagnés des moyens d’identification appropriés des produits de façon à assureur leur traçabilité. L’article 6 de cette norme indique que la remise d’une copie est permise pour autant que les procédures de traçabilité soient appliquées et que le document original soit disponible sur demande. La norme NF EN 10025-1 relatives aux produits laminés à chaud en aciers de construction détaille les différentes informations devant être fournies par le producteur concernant la qualité des produits. Il n’est pas contesté par l’intimée que ces normes sont obligatoires.
32. Il résulte de ces normes, prises à la demande de la Commission européenne dans le cadre de la directive 97/23/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 mai 1997 relative au rapprochement des lois des Etats membres concernant les équipements sous pression et de la directive 89/106/CEE sur les produits de constructions, que la remise d’un certificat de réception soit en original, soit en copie mais sans aucune modification, constitue une obligation de résultat à la charge de l’intermédiaire.
33. En la cause, la société Endel a été informée par la société Framatome le 6 décembre 2021 d’un problème concernant plusieurs certificats de réception, concernant des produits acquis auprès de l’appelante par la société Endel. Elle a ainsi demandé à la société Endel de lui transmettre, pour le 31 janvier 2022, les résultats de l’analyse comparative des copies des certificats avec les originaux, et de vérifier, pour le 15 février 2022, toutes les commandes passées depuis 2018. Le 9 décembre 2021, la société Endel a répercuté cette demande d’information à la société Cita Production. Il s’est agi initialement de sept certificats. Ce problème a concerné des produits destinés à la centrale nucléaire du Bugey.
34. La demande de la société Endel a été relayée à l’intimée, et celle-ci, par courriel du 16 décembre 2021, a informé l’appelante qu’elle ne peut lui produire certains certificats, car ne travaillant pas directement avec les producteurs. L’appelante lui a demandé de transmettre divers certificats précisément détaillés (mentions des fabricants, des numéros de lots, de coulée, numéros précis des certificats). Le 28 décembre 2021, l’appelante a mis en demeure l’intimée de lui adresser l’intégralité des certificats originaux figurant dans une liste détaillée, afférents à 22 commandes. Le 20 janvier 2022, elle a alerté ses clients sur les problèmes affectant certains certificats, en leur précisant que les modifications constatées portent en grande partie sur leur forme et qu’à ce stade, il n’y a pas de remise en cause de l’intégrité des produits. Certains clients lui ont demandé de leur fournir les analyses à venir, et ont demandé à l’appelante de leur communiquer ses conclusions pour définir les actions à mener. Des mises en demeure ont été adressées à l’appelante.
35. Il n’est pas contesté par la société Valfer qu’initialement, elle n’a pu transmettre les certificats originaux afin de permettre la vérification des copies adressées à l’appelante. S’agissant de l’exécution d’une obligation de résultat lui incombant, il lui appartient de prouver qu’elle a fourni soit des originaux, soit des copies de certificats sans modification, concernant les 15 certificats désormais en litige, détaillés précisément par la société Cita Production. Sur ce point, ainsi que relevé par le juge des référés, les certificats originaux n’étaient pas à disposition de la société Valfer. Elle ne justifie pas plus devant la cour de la production des certificats en cause. Ces certificats concernent les cinq commandes détaillées dans le dispositif de l’ordonnance déférée, conformément au tableau produit par l’appelante détaillant ces commandes et les certificats concernés. En conséquence, l’ordonnance déférée ne peut qu’être confirmée en ce qu’elle a condamné la société Valfer à communiquer à la société Cita Production les 15 certificats afférents aux cinq commandes détaillées dans le dispositif de cette décision.
36. S’agissant de l’astreinte sollicitée par l’appelante, l’obligation de résultat reposant sur la société Valfer est une obligation de faire. Elle ne peut être exécutée par une voie d’exécution prévue par le code des procédures civiles d’exécution. Afin de permettre l’exécution de cette obligation, l’astreinte sollicitée est nécessaire, ainsi que soutenu par l’appelante. En conséquence, le juge des référés n’a pu, sans s’expliquer sur ce point, rejeter cette demande et l’ordonnance entreprise ne peut qu’être infirmée sur ce point. Statuant à nouveau, la cour condamnera la société Valfer à produire les originaux des certificats manquants sous astreinte comminatoire de 1.000 euros par jour de retard passé le délai d’un mois suivant la signification du présent arrêt.
37. S’agissant de la demande d’explication sous astreinte formulée par l’appelante, la cour constate également que l’ordonnance entreprise n’a pas indiqué le motif du rejet de cette prétention. Elle relève que les clients de la société Cita Production ont formé des demandes afin de pouvoir définir les actions à mener, parfois avec mise en demeure. Cette demande d’explication ou d’information permettant de comprendre les écarts observés sur les certificats détaillés par l’appelante est nécessaire afin qu’elle puisse répercuter les informations en sa possession à ses clients, sachant que plusieurs d’entre eux oeuvrent dans le domaine nucléaire, et qu’il peut en résulter des atteintes à la sûreté nucléaire. La cour, infirmant également l’ordonnance déférée sur ce point, fera ainsi droit à la demande de l’appelante, avec la même astreinte que celle définie plus haut concernant la remise des originaux des certificats.
38. Concernant les demandes d’indemnisation de l’appelante, le premier juge a retenu que la société Cita Production n’apporte pas la preuve de sa demande concernant les frais d’essais et de personnel engagés pour tenter de résoudre la situation, et pour les autres préjudices, il a constaté que la société Valfer a payé 15.500,39 euros au titre des frais d’essais et de personnel’et que la société Cita Production n’apporte pas la preuve des différents préjudices qu’elle invoque.
39. La cour constate que l’intimée ne conteste pas devoir régler une partie des frais exposés par l’appelante au titre de la gestion du dossier et des analyses effectuées, dont elle a déjà réglé une partie. La cour observe que l’appelante justifie de la réalisation de contre-essais, justifiés par la nature des produits destinés à l’industrie nucléaire, des frais de personnels engagés. Elle justifie d’une créance non sérieusement contestable concernant les frais supplémentaires qui n’ont pas été réglés par la société Valfer. Infirmant l’ordonnance déférée sur ces points, la cour fera ainsi droit à la demande de provision de l’appelante, sachant que celle-ci ne sollicite plus de provision au titre des pertes d’exploitation, de la désorganisation de l’entreprise, du préjudice d’image et d’atteinte à sa réputation commerciale.
40. Concernant enfin les sommes engagées par l’appelante sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, il est équitable d’allouer à l’appelante la somme de 1.000 euros au titre des frais engagés en première instance, et celle de 3.000 euros au titre des frais engagés en cause d’appel. L’ordonnance entreprise sera également infirmée en ce qu’elle a rejeté cette demande au titre des frais engagés en première instance. Succombant devant cet appel, la société’Valfer sera également condamnée aux dépens exposés devant la cour.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu les articles 455, 458, 700, 872 et 873 du code de procédure civile, les articles 1103, 1217 et 1240 du code civil, l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, les normes européennes et françaises NF EN 10204 (2005) et NF EN 10025-1 (2005)’:
Dit que la cour n’est pas saisie de la demande de la société Cita Production tendant à l’annulation de l’ordonnance entreprise’;
Infirme l’ordonnance déférée en ce qu’elle a’:
– rejeté les demandes de la société Cita production tendant à la communication de toutes explications ou informations permettant de connaître les raisons pour lesquelles il a été observé des différences de contenus entre les certificats de réception originaux et les copies de certificats de réception, comme non fondées’;
– rejeté les demandes de la société Cita Production en paiement d’une provision au titre des préjudices subis’;
– rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires’;
– débouté la société Cita Production de sa demande en paiement en vertu de l’article 700 du code de procédure civile ;
Confirme l’ordonnance déférée en ses autres dispositions soumises à la cour;
statuant à nouveau’;
Ordonne à la société Valfer de communiquer à la société Cita Production les certificats de réception originaux correspondants aux commandes suivantes, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai d’un mois suivant la signification du présent arrêt :
Condamne la société Valfer à communiquer à la société Cita Production toutes explications ou informations permettant de connaître les raisons pour lesquelles il a été observé des différences de contenu entre les certificats de réception originaux et les copies de certificats de réception des commandes n° 33208, 33867, 35112, 35115, 35119, 35996, 36199, 36200, 36203, 36204, 36205, 36209, 36267, 36268, 36271, 36272, 36273, 37003, 37005, 37008, 37012, 37570, 37573 et 37574, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai d’un mois suivant la signification du présent arrêt’;
Condamne la société Valfer à payer à la société Cita Production la somme de 1.664,40 euros à titre de provision à valoir sur le coût des contre-essais’;
Condamne la société Valfer à payer à la société Cita Production la somme de 10.574,25 euros à titre de provision à valoir sur le coût des frais de personnel exposés ;
Condamne la société Valfer à payer à la société Cita Production la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance’;
Condamne la société Valfer à payer à la société Cita Production la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’appel ;
Condamne la société Valfer aux dépens exposés en cause d’appel’;
Signé par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente