Contrefaçon : la suspension de l’exécution provisoire

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Contrefaçon : la suspension de l’exécution provisoire
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Selon l’article 514-3 du code de procédure civile en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

Le risque de conséquences manifestement excessives doit être apprécié au regard des facultés de paiement du débiteur ou des facultés de remboursement du créancier, ces deux critères étant alternatifs et il suppose la perspective d’un préjudice irréparable et d’une situation irréversible en cas d’infirmation.

En l’espèce, pour justifier de sa situation économique la SARL Optima Brand Design produit des documents comptables afférents aux exercice 2018, 2019, 2020 et 2021 et notamment les comptes annuels de l’exercice 2020 et ceux de l’exercice 2021. Si le premier fait état d’un résultat net comptable de 216 € pour un chiffre d’affaires de 253 333 €, il révèle également l’existence de disponibilités à hauteur de 171 615€. Quant au second il relève un résultat net comptable déficitaire à hauteur de 88 278€ pour un chiffre d’affaires quasiment équivalent de 169 093€, et l’existence de disponibilités à hauteur de 81 420€.

Elle ne produit aucun bilan comptable relatif à l’exercice 2022, si ce n’est une attestation de son expert-comptable mentionnant un chiffre d’affaires en fin d’exercice au 31 décembre 2022 s’élevant à 136 625€, sans autre information relative aux résultats d’exploitation et à la trésorerie. Elle ne produit aucun élément comptable ou bancaire pour le premier trimestre 2023.

La demande de suspension de l’exécution provisoire a donc été rejetée.


 

RÉFÉRÉ N° RG 23/00048 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NGM4

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S.A.R.L. OPTIMA BRAND DESIGN

c/

S.A.S. CASTEL FRERES

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DU 11 MAI 2023

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Grosse délivrée

le :

ORDONNANCE

Rendue par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Le 11 MAI 2023

Véronique LEBRETON, Première Présidente de Chambre à la Cour d’Appel de BORDEAUX, désignée en l’empêchement légitime de la Première Présidente par ordonnance en date du 16 décembre 2022, assistée de Séverine ROMA, Greffière,

dans l’affaire opposant :

S.A.R.L. OPTIMA BRAND DESIGN agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité [Adresse 2]

absente

représentée par Me Annie TAILLARD membre de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et par Me Nathalie CASTAGNON, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX, substituée par Me Diane TRICOIRE, avocat au barreau de BORDEAUX

Demanderesse en référé suivant assignation en date du

03 avril 2023,

à :

S.A.S. CASTEL FRERES prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité [Adresse 1]

absente

représentée par Me Charlotte DE REYNAL membre de la SELARL CABINET REYNAL – PERRET, avocat au barreau de BORDEAUX et Me Cécile BAHANS, avocat au barreau de BORDEAUX

Défenderesse,

A rendu l’ordonnance contradictoire suivante après que la cause a été débattue en audience publique devant nous, assistée de Séverine Roma, Greffière, le 27 avril 2023 :

EXPOSE DU LITIGE

Selon un jugement en date du 8 décembre 2022 le tribunal de judiciaire de Bordeaux, saisi par acte du huissier délivré postérieurement au 1er janvier 2020 a notamment :

‘ condamné la SARL Optima Brand Design à garantir la SAS Castel Frères de l’éviction qu’elle subit,

‘ condamné la SARL Optima Brand Design en conséquence au remboursement de la somme de 7800 € TTC au titre du prix versé et de la somme de 24 000 € au titre du complément du prix dont elle a dû s’acquitter,

‘ rejeté la demande de publication,

‘ condamné la SARL Optima Brand Design aux dépens et à payer à la SAS Castel Frères la somme de 7000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Cette décision ordonne l’exécution provisoire.

La SARL Optima Brand Design a interjeté appel de cette décision selon une déclaration en date du 6 février 2023.

Par acte de commissaire de justice en date du 3 avril 2023 elle a fait assigner la SAS Castel Frères en référé aux fins de voir ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire assortissant en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Bordeaux, de voir condamner la SAS Castel Frères aux dépens et à lui payer la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 26 avril 2023 et soutenues à l’audience la SARL Optima Brand Design maintient ses demandes, portant celle fondée sur l’article 700 du code de procédure civile à la somme de 3500 €.

Elle fait valoir que l’exécution de la décision aura pour elle des conséquences manifestement excessives révélées postérieurement au jugement compte tenu de la perte de son plus gros client et du rejet de sa demande d’indemnité liée à la rupture brutale des relations commerciales dirigées contre lui, alors que son chiffre d’affaires a chuté consécutivement et que sa trésorerie est limitée.

Elle soutient également qu’il existe des moyens sérieux de réformation en ce que la garantie d’éviction du fait des tiers n’a pas lieu à s’appliquer en l’absence de trouble de droit actuel et certain, en considération du comportement de la SAS Castel Frères qui a conclu un protocole transactionnel avec le titulaire des droits relatifs aux images contrefaites, alors qu’elle disposait de moyens suffisants pour faire rejeter les droits que celui-ci revendiquait. Elle ajoute qu’il existe des moyens sérieux de réformation quant au quantum du préjudice allégué comme sur la restitution du prix global qui n’a pas lieu d’être prononcée.

Par conclusions du 18 avril 2023 soutenues à l’audience, la SAS Castel Frères sollicite que la SARL Optima Brand Design soit condamnée aux dépens, dont distraction au profit de Maître [K] [O], et à lui payer la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que l’existence de conséquences manifestement excessives entraînées par l’exécution du jugement n’est pas démontrée, s’agissant d’une somme limitée dont le règlement n’est pas de nature à entraîner un état de cessation de paiement, d’autant que la SARL Optima Brand Design ne s’est pas employée à sauvegarder ses relations commerciales avec son principal client et qu’elle jouit d’une capacité financière correcte, les pièces produites n’étant pas actualisées et insuffisantes en ce qui concerne la réalité de sa trésorerie.

Elle ajoute qu’il n’existe pas de moyens sérieux d’annulation de réformation du jugement puisqu’elle est tenue à une garantie d’éviction sur le logo commercial litigieux objet de la prestation qu’elle lui a vendue comme une création originale alors qu’elle n’est qu’une copie d’un logo créé par un autre exploitant, que son trouble est réel et qu’elle ne pouvait continuer d’exploiter la marque et de commercialiser ses produits en prenant le risque d’être assignée, de sorte qu’elle a été contrainte de régulariser un protocole transactionnel avec le titulaire du logo copié. Elle soutient que la déchéance de garantie invoquée est infondée, car elle est dans l’impossibilité de remettre en cause la titularité des droits d’un tiers, dans l’impossibilité de contester l’originalité de l”uvre litigieuse et de rapporter la preuve de différences pertinentes susceptibles de remettre en cause la matérialité de la contrefaçon. Elle ajoute que le montant transactionnel qu’elle a versé n’est pas contestable pas plus que ne l’est son propre préjudice.

L’affaire a été mise en délibéré au 11 mai 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon l’article 514-3 du code de procédure civile en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

Le risque de conséquences manifestement excessives doit être apprécié au regard des facultés de paiement du débiteur ou des facultés de remboursement du créancier, ces deux critères étant alternatifs et il suppose la perspective d’un préjudice irréparable et d’une situation irréversible en cas d’infirmation.

En l’espèce, pour justifier de sa situation économique la SARL Optima Brand Design produit des documents comptables afférents aux exercice 2018, 2019, 2020 et 2021 et notamment les comptes annuels de l’exercice 2020 et ceux de l’exercice 2021. Si le premier fait état d’un résultat net comptable de 216 € pour un chiffre d’affaires de 253 333 €, il révèle également l’existence de disponibilités à hauteur de 171 615€. Quant au second il relève un résultat net comptable déficitaire à hauteur de 88 278€ pour un chiffre d’affaires quasiment équivalent de 169 093€, et l’existence de disponibilités à hauteur de 81 420€.

Elle ne produit aucun bilan comptable relatif à l’exercice 2022, si ce n’est une attestation de son expert-comptable mentionnant un chiffre d’affaires en fin d’exercice au 31 décembre 2022 s’élevant à 136 625€, sans autre information relative aux résultats d’exploitation et à la trésorerie. Elle ne produit aucun élément comptable ou bancaire pour le premier trimestre 2023.

Ainsi même si sont versées aux débats cinq attestations comptables établissant la baisse du chiffre d’affaires rapporté par son client Maison Villevert entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2021 pour passer de 49 % à 13 % du chiffre d’affaires total de l’année, la SARL Optima Brand Design ne justifie pas de son exacte situation économique actuelle et notamment elle ne démontre pas que sa trésorerie ou sa capacité d’emprunt auprès de ses partenaires bancaires ne lui permettrait pas de s’acquitter du montant des condamnations mises à sa charge à hauteur d’une somme totale de 38 800€ sans compromettre la pérennité de l’entreprise.

Par conséquent à défaut pour elle de démontrer l’existence de conséquences manifestement excessives générées par l’exécution des condamnations pécuniaires dont elle a fait l’objet, elle doit être déboutée de sa demande sans qu’il soit nécessaire d’analyser l’existence d’un moyen sérieux de réformation de la décision dont appel puisque, dès lors que l’une des deux conditions prévues pour prétendre à l’arrêt de l’exécution provisoire n’est pas remplie, il n’y a pas lieu d’examiner la seconde compte tenu de leur caractère cumulatif.

La SARL Optima Brand Design, partie succombante dans la présente instance, au sens des dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, sera condamnée aux entiers dépens.

Il apparaît conforme à l’équité de condamner la SARL Optima Brand Design à payer à la SAS Castel Frères la somme de 2000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Elle sera déboutée de sa demande du même chef

PAR CES MOTIFS

Déboute la SARL Optima Brand Design de sa demande tendant à l’arrêt de l’exécution provisoire résultant du jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 8 décembre 2022,

Condamne la SARL Optima Brand Design à payer à la SAS Castel Frères la somme de 2000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Optima Brand Design aux entiers dépens de la présente instance.

La présente ordonnance est signée par Véronique LEBRETON, Première Présidente de Chambre et par Séverine ROMA, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière La présidente

 


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