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Un logiciel non stabilisé ne répond pas aux besoins du client et engage la responsabilité du prestataire. En l’espèce, au regard des échanges pré-contractuels qui se sont déroulés sur plusieurs mois avant la signature du contrat d’intégration et se sont poursuivis jusqu’à la rupture unilatérale, le prestataire devait assurer l’assistance de sa cliente pour lui permettre de parvenir à une maitrise de l’ERP d’autant que la somme que cette dernière lui restait devoir ne représentait qu’une part infime de sa facture totale.
Pour rappel, en matière de progiciel, considéré comme un produit complexe, le fournisseur a pour sa part l’obligation de s’assurer que le progiciel répond aux besoins de son client, besoins qu’il aura analysés.
Son obligation de délivrance ne pourra être considérée comme parfaitement et définitivement exécutée que si le progiciel a été installé, testé et mis en production, avec pour terme de ce processus une recette contradictoire attestant que le progiciel répond aux besoins du client.
L’expert désigné signale que malgré le recrutement d’un salarié pour cette tâche, la gestion du projet n’a pas permis un suivi strict dans la mesure où les comités de pilotage ont été remplacés par des points téléphoniques précédés quelques jours avant, d’une liste présentant l’état de la situation du reste à faire par SRA.
Il précise que des comités formels auraient permis l’appréhension de sa mission le salarié en charge du développement qui n’était guidé par personne.
Cette situation explique que le démarrage et la mise en production aient pris du retard et aient été reportés à plusieurs reprises, le salarié ayant quitté la société MOTEURS JM avant cette mise en production, ce qui n’a fait que retarder encore le démarrage.
Pour autant les retards dans les tests ne sont pas uniquement imputables à MOTEURS JM comme l’affirme la société SRA.
En s’abtenant de préparer et de tenir des comités de pilotage sur site et d’accompagner les salariés de MOTEURS JM dans les tests, elle a favorisé leur mauvaise maitirise du processus d’installation et donc les dysfonctionnements.
En effet à la suite de la mise en production du 24 avril 2017, l’expert indique que les utilisateurs vont faire de nombreuses observations. Il indique que des griefs n’ont jamais été signalés car identifiés par la société MOTEURS JM au fur et à mesure de la découverte du produit.
Sur ce point l’expert précise pourtant qu’il n’y a eu aucune recette, ni partielle, ni globale, permettant de passer de la phase développement à la phase maintenance.
Cette situation démontre suffisamment que le logiciel a été mis en production alors qu’il n’était pas stabilisé.
Début 2015 la société MOTEUR J.M a voulu mettre en oeuvre une nouvelle solution informatique de type ERP aux fins notamment de maitriser ses délais de traitement vis à vis de ses clients.
Elle s’est rapprochée de la société MICROFIRST aux droits de laquelle vient la société SRA OUEST qui exerce l’activité de conseil en système et logiciel informatique.
La société MICROFIRST a fait établir un cahier des charges par MOTEURS J.M aux fins d’intégrer la nouvelle solution ERP, avec un plan de charges prévu sur 10 mois pour parvenir à un démarrage des opérations de recettage.
Les deux sociétés ont ensuite régularisé un contrat de services le 22 septembre 2015 portant sur le déploiement de la solution SAGE ERP X3. La méthodologie du prestataire en date du 16 octobre 2015 indiquait une mise en service le 1er septembre 2016.
Ce délai n’a pas été tenu de telle sorte que les parties ont convenu de fixer le transfert effectif sur le nouvel ERP X3, le 24 octobre 2016.
Cette échéance n’a pas non plus été respectée.
La société MOTEURS J.M qui avait déjà réglé une facture de 136 548 euros HT a exigé une mise en service au 14 avril 2017.
La société SRA OUEST a donc poursuivi ses prestations qu’elle a facturées.
Elle a ensuite considéré que la mise en production s’est effectuée le 24 avril 2017 ce qu’a contesté MOTEURS J.M.
Dans le même temps courant 2017 la société MOTEURS JM a dénoncé des dysfonctionnements qui selon elle se sont poursuivis en 2018.
La société MOTEURS J.M a donc mis en demeure la société SRA OUEST de finaliser le paramètrage et de procéder au recettage avant le 20 février 2018.
Estimant que la société MOTEURS J.M ne respectait pas ses engagements notamment de règlement des factures, la société SRA OUEST a suspendu l’exécution de ses prestations le 26 février 2018.
La société MOTEURS J. M a saisi le président du tribunal de commerce de Rennes statuant en référés aux fins d’expertise judiciaire.
Par ordonnance du 28 septembre 2018, le président du tribunal de commerce de Rennes a fait droit à cette demande.
L’expert a déposé son rapport le 20 novembre 2019. Il conclut à un partage de responsabilité entre les parties à hauteur de 70 % à la charge de la société SRA OUEST.
Les relations entre les parties ont débuté par une phase précontractuelle conséquente, avec des échanges de propositions et de cahiers des charges détaillés.
Après plusieurs échanges, un contrat de services a été signé le 22 septembre 2015, portant sur l’intégration du progiciel de gestion intégré SAGE X3 Version 7.
Malgré la mise en production du logiciel le 24 avril 2017, des dysfonctionnements ont été constatés, entraînant des retards et des difficultés pour MOTEURS JM.
L’expert judiciaire a estimé que les responsabilités étaient partagées entre les deux parties, avec une plus grande part de responsabilité attribuée à SRA OUEST (70%).
Les préjudices subis par MOTEURS JM ont été évalués à 150 395 euros, couvrant des pertes d’exploitation, des frais supplémentaires et des dommages moraux.
L’assureur AXA a été sollicité pour couvrir une partie des indemnités dues par SRA OUEST, avec un montant de 148 895 euros pris en charge par l’assurance.
SRA OUEST a été condamnée à payer les indemnités à MOTEURS JM, ainsi que des frais annexes de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
En conclusion, le litige entre SRA OUEST et MOTEURS JM a mis en lumière des difficultés dans la mise en œuvre d’un projet informatique, avec des responsabilités partagées et des préjudices importants pour MOTEURS JM.
Mots clefs associés à cette affaire :
– Relations entre les parties
– Prestations proposées
– Contrat de services
– Méthodologie de déploiement
– Dysfonctionnements
– Préjudices subis par la société MOTEURS JM
– Partage de responsabilités
– Préjudices invoqués par la société MOTEURS JM
– Préjudice moral
– Préjudice amende fiscale
– Préjudice de jouissance
– Préjudice de la société AUDEO DEVELOPPEMENT
– Garantie AXA
– Demandes annexes
– Dépens d’appel
Définitions associées à cette affaire :
Avocats intervenants à cette affaire :
Bravo aux Avocats ayant plaidé cette affaire:
– Me Stéphane PIEUCHOT de l’AARPI Pieuchot & Associés, avocat au barreau de CAEN
– Me Nicolas HERZOG de la SELEURL H2O Avocats, avocat au barreau de PARIS
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°388
N° RG 21/03352 – N° Portalis DBVL-V-B7F-RV6T
M. [V] [S]
S.A.S. MOTEURS J.M.
S.A.R.L. AUDEO DEVELOPPEMENT
C/
S.A.S. SRA OUEST
S.A. AXA FRANCE IARD
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me GRENARD
Me GOSSELIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre, rapporteur,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Morgane LIZEE, lors des débats, et Madame Julie ROUET, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 06 Juin 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 19 Septembre 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur [V] [S]
né le 19 Juillet 1970 à [Localité 7] (14)
[Adresse 4]
[Localité 6]
S.A.S. MOTEURS J.M. immatriculée au RCS d’ALENCON sous le n° 478 913 460, prise en la personne de sa Présidente
[Adresse 9]
[Localité 8]
S.A.R.L. AUDEO DEVELOPPEMENT immatriculée au RCS de NANTERRE, sous le n° 753 935 436, représentée par son gérant et associé unique, Monsieur [V] [S]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentés par Me Aurélie GRENARD de la SELARL ARES, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentés par Me Stéphane PIEUCHOT de l’AARPI Pieuchot & Associés, Plaidant, avocat au barreau de CAEN
INTIMÉES :
S.A.S. SRA OUEST SRA OUEST, immatriculée au RCS de Rennes sous le numéro 821 374 964,prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
S.A. AXA FRANCE IARD, immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 722 057 460, prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentées par Me François-Xavier GOSSELIN de la SCP CABINET GOSSELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentées par Me Nicolas HERZOG de la SELEURL H2O Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
FAITS ET PROCEDURE
M. [V] [S] a pris le contrôle de la société MOTEURS J.M. en novembre 2012 grâce à une opération de LBO.
La société MOTEUR J.M construit des moteurs sur mesure qui résistent à des environnements hostiles.
La société AUDEO DEVELOPPEMENT a été créée à cette occasion. Elle est dirigée par M [S].
Elle détient toutes les parts de la société MOTEURS J.M qu’elle préside.
Début 2015 la société MOTEUR J.M a voulu mettre en oeuvre une nouvelle solution informatique de type ERP aux fins notamment de maitriser ses délais de traitement vis à vis de ses clients.
Elle s’est rapprochée de la société MICROFIRST aux droits de laquelle vient la société SRA OUEST qui exerce l’activité de conseil en système et logiciel informatique.
La société MICROFIRST a fait établir un cahier des charges par MOTEURS J.M aux fins d’intégrer la nouvelle solution ERP, avec un plan de charges prévu sur 10 mois pour parvenir à un démarrage des opérations de recettage.
Les deux sociétés ont ensuite régularisé un contrat de services le 22 septembre 2015 portant sur le déploiement de la solution SAGE ERP X3.
La méthodologie du prestataire en date du 16 octobre 2015 indiquait une mise en service le 1er septembre 2016.
Ce délai n’a pas été tenu de telle sorte que les parties ont convenu de fixer le transfert effectif sur le nouvel ERP X3, le 24 octobre 2016.
Cette échéance n’a pas non plus été respectée.
La société MOTEURS J.M qui avait déjà réglé une facture de 136 548 euros HT a exigé une mise en service au 14 avril 2017.
La société SRA OUEST a donc poursuivi ses prestations qu’elle a facturées.
Elle a ensuite considéré que la mise en production s’est effectuée le 24 avril 2017 ce qu’a contesté MOTEURS J.M.
Dans le même temps courant 2017 la société MOTEURS JM a dénoncé des dysfonctionnements qui selon elle se sont poursuivis en 2018.
La société MOTEURS J.M a donc mis en demeure la société SRA OUEST de finaliser le paramètrage et de procéder au recettage avant le 20 février 2018.
Estimant que la société MOTEURS J.M ne respectait pas ses engagements notamment de règlement des factures, la société SRA OUEST a suspendu l’exécution de ses prestations le 26 février 2018.
La société MOTEURS J. M a saisi le président du tribunal de commerce de Rennes statuant en référés aux fins d’expertise judiciaire.
Par ordonnance du 28 septembre 2018, le président du tribunal de commerce de Rennes a fait droit à cette demande.
L’expert a déposé son rapport le 20 novembre 2019. Il conclut à un partage de responsabilité entre les parties à hauteur de 70 % à la charge de la société SRA OUEST.
La société MOTEURS J.M. a fait l’objet d’une mesure de sauvegarde devant le tribunal de commerce d’Alençon puis d’une procédure de redressement judiciaire par jugement du 5 novembre 2018.
La société AUDEO DEVELOPPEMENT qui portait une dette senior a déposé une demande d’ouverture d’une procédure de sauvegarde prononcée suivant jugement du 17 juin 2019 par le tribunal de commerce d’Alençon.
Par jugement du 3 mars 2020 il a été mis fin à la procédure sauvegarde de la société AUDEO DEVELOPPEMENT.
Par acte du 29 avril 2020 la société AUDEO DEVELOPPEMENT, la société MOTEURS J. M et M. [S] ont assigné la société SRA OUEST devant le tribunal de commerce de Rennes pour obtenir réparation de leurs préjudices.
Ils ont assigné la société AXA France IARD en intervention forcée en sa qualité d’assureur de la société SRA OUEST.
Dans le même temps le tribunal de commerce d’Alençon a arrêté un plan de redressement au profit de la société MOTEURS J.M. par jugement du 3 juin 2020. La SELARL TRAJECTOIRE a été désignée commissaire à l’exécution du plan.
Par jugement du 4 mai 2021 le tribunal de commerce a retenu le partage de responsabilité à hauteur de 70 % à la charge le SRA OUEST :
– Condamné in solidum, la société SRA OUEST et la société AXA France IARD à verser à la société MOTEURS J.M. la somme de 127 987 euros indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274.7) et augmentée des intérêts au taux légal le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
-Débouté la société Moteurs JM du surplus de sa demande ;
-Débouté la société AUDEO DEVELOPPEMENTde sa demande de condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre la société SRA OUEST et la société AXA France IARD à lui verser la somme de 67.294 euros indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274.7), et augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision a intervenir le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
– Débouté Monsieur [S] de sa demande de condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre la société SRA OUEST et la société AXA France IARD à lui verser la somme de 100.000 euros indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274.7), et augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision a intervenir le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
– Condamné la société MOTEURS JM à payer à SRA OUEST une somme de 44 164. 43 euros au titre des factures impayées ;
– Débouté les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires ;
– Condamné la société SRA OUEST à verser à la société MOTEURS J.M, à la société AUDEO DEVELOPPEMENT et à Monsieur [S] unis d’intérêts la somme globale de 15.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– Les a déboutés du surplus de leur demande ;
– A accordé à Maitre [H] [P] le bénéfice au droit au recouvrement direct instauré par l’article 699 du code de procédure civile ;
– Condamné la société SRA OUEST qui succombe aux entiers dépens y compris les frais d’expertise taxés à la somme totale de 11 999,70 euros ;
– Ordonné l’exécution provisoire ;
– Liquidé les frais de greffe à la somme de 57.70 euros tels que prévu aux articles 695 et 701 du code de procédure civile.
Par acte du 2 juin 2021 la société AUDEO DEVELOPPEMENT, la société MOTEURS J. M et M. [S] ont fait appel du jugement. Ils ont déposé une annexe à la déclaration d’appel.
L’ordonnance de clôture est en date du 25 mai 2023.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Dans leurs écritures notifiées le 21 février 2022 la société AUDEO DEVELOPPEMENT, la société MOTEURS J. M et M. [S] demandent à la cour de :
-Infirmer le jugement rendu le 4 mai 2021 par le tribunal de commerce de Rennes en ce qu’il a :
– Limité à la somme de 127 987 euros la condamnation in solidum prononcée à l’encontre de la société SRA OUEST et de la société AXA FRANCE IARD, indexée sur l’indice SYNTEC publié en novembre 2019 (274,7) et augmentée des intérêts au taux légal, le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
– Débouté la société MOTEURS JM du surplus de ses demandes ;
– Débouté la société AUDEO DEVELOPPEMENT de sa demande de condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, la société SRA OUEST et la société AXA FRANCE IARD à lui verser la somme de 67 294 euros indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274,7), et augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir le tout sous le bénéficie de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
– Débouté Monsieur [S] de sa demande de condamnation in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, la société SRA OUEST et la société AXA FRANCE IARD à lui verser la somme de 100 000 E indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274,7), et augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir, le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
– Condamné la société MOTEURS JM à payer a la société SRA OUEST une somme de 44 164,43 E au titre des factures impayées ;
– Débouté les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires, à savoir :
‘ Dire recevable et bien fondée la mise en cause de la société AXA FRANCE IARD’ .
Condamner de la société SRA OUEST à payer à la société MOTEURS J.M., à la société AUDEO DEVELOPPEMENT et à Monsieur [V] [S] unis d’intérêts, les sommes correspondant aux préjudices qu’ils ont respectivement subis résultant des manquements contractuels relevés dans le cadre de l’audit, de l’installation et du déploiement d’une nouvelle solution informatique ERP;
Condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, de la société SRA OUEST et de la société AXA FRANCE IARD à payer à la société MOTEURS JM une somme totale arrêtée à septembre 2019 à 1 153 326,66 E selon décompte suivant :
– Expertise Judiciaire Rapport Final : Evaluation partielle 171 395 E
– Salaires complémentaires charges retenue à 20% 4.940 E
– Mises à jour Patchs sécurité et fonctionnalités sur 4 ans non réalisées 75 000€
– Perte Exploitation 411 000 E
– Préjudice moral 100 000 E
– Préjudice Amende fiscale 2014 et 2016 15 000 E
– Freelance Reprise Projet 102.036.81 E
– Obsolescence d’un logiciel non réceptionné 85 275 E
– Déploiement nouvelle version V12
(V8 non maintenue par Sage Sept 2020) 103 160 E
– Frais Avocats (Cabinet DERBY’ Expertise judiciaire) 10 519, 85 E
– Pour mémoire le préjudice de jouissance continue au-delà du 09/19 75 000 E
Total Préjudice arrêté à septembre 2019 1.153.326,66 E
-Condamner la société SRA OUEST à payer à société AUDEO DEVELOPPEMENT une somme de 67.294 E correspondant à 20% du montant total des salaires versés à Monsieur [S] au titre des années 2017 à 2019, selon décompte suivant :
112 901E+133.569 E+ 90.000 E = 336.470 E
336.470 x 20% = 67.294 E
-Condamner la société SRA OUEST à payer à Monsieur [V] [S] la somme de 50 000 E évaluée forfaitairement au titre de son préjudice moral ;
-Ces sommes devront être indexées sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274, 7), date de dépôt du rapport d’expertise.
Enfin, les appelants sollicitent le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil.
-Condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, la société SRA OUEST et la société AXA FRANCE IARD à verser à la société MOTEURS J.M., à la société AUDEO DEVELOPPEMENT et à Monsieur [S] , unis d’intérêts, la somme de 28. 000 E au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-Condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, la société SRA OUEST et la société AXA FRANCE IARD aux entiers dépens, en ce compris les dépens liés à la procédure de référé expertise (24, 34 E + 67,30 E + 35, 62 E) et les frais d’expertise taxés à la somme totale de 11.999, 70 E ;
Accorder à Maitre [H] [P] le bénéfice du droit au recouvrement direct instauré par l’article 699 du code de procédure civile,
-Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;
– Limité la condamnation in solidum prononcée à l’encontre de la société SRA OUEST à verser à la société MOTEURS JM, et le société AUDEO DEVELOPPEMENT et à Monsieur [S] unis d’intérêts, la somme globale de 15.000 E au titre de l’article 700 du CPC, les a déboutés du surplus de leurs demandes.
Statuant à nouveau,
A titre principal, au visa des articles L 124-3 alinéa 1 du code des assurances, ancien article 1147 du code civil, 1231-1 et 1231-2 du code civil, ancien article 1135 du code civil, nouvel article 1194 du code civil, articles 1219 et 1220 du code civil de :
– Recevoir l’intégralité des moyens et prétentions des appelants ;
– Déclarer recevable et bien fondée l’assignation en intervention forcée délivrée à la société AXA France IARD ;
– Condamner in solidum ou l’une à défaut de l’autre, la société SRA OUEST et la société AXA France IARD, à verser à la société MOTEURS J.M. la somme de 1.300.348,66 E indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274,7), et augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir, le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
– Condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, la société SRA OUEST et la société AXA France IARD à verser à la société AUDEO DEVELOPPEMENT la somme de 67.294 E indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274,7), et augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir, le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
– Condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, la société SRA OUEST et la société AXA France IARD à verser à Monsieur [V] [S] la somme de 100.000 E indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274,7), et augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
En tout état de cause,
– Débouter les sociétés AXA France IARD et SRA OUEST de toutes leurs demandes, fins et pretentions ;
– Condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, la société SRA OUEST et la société AXA France IARD à verser à la société MOTEURS J.M., à la société AUDEO DEVELOPPEMENT et à Monsieur [S] unis d’intérêts, la somme de 35.000 E au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, la société SRA OUEST et la société AXA France IARD aux entiers dépens, en ce compris les dépens liés à la procédure de référé expertise (24,34 E + 67,30 E + 35,62 E) et les frais d’expertise taxés à la somme totale de 11.999,70 E ;
– Accorder à Maitre [H] [P] le bénéfice du droit au recouvrement direct instauré par l’article 699 du code de procedure civile.
Dans leurs écritures notifiées le 25 novembre 2021 la société SRA OUEST et la société AXA FRANCE IARD demandent à la cour au visa des articles 1147, 1149 et suivants du code civil, L.112-6 du code des assurances de :
A titre principal,
– Infirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a jugé que SRA OUEST a partiellement engagé sa responsabilité.
Et statuant à nouveau,
– Débouter les appelants de l’intégralité de ses demandes en ce que MOTEURS JM est seule responsable des difficultés pour avoir manqué à ses obligations de collaboration et de paiement ;
– Débouter les appelants de l’intégralité de leurs demandes en ce qu’ils ne rapportent pas la preuve que SRA OUEST aurait manqué à son obligation de délivrance conforme, MOTEURS JM ayant tacitement recetté la solution en la mettant en production le 24 avril 2017;
– Débouter MOTEURS JM, la SELARL TRAJECTOIRE , es qualité, AUDEO et M. [S] de leur demande de mobilisation de la garantie d’AXA qui est sans objet dans la mesure où la responsabilité de SRA OUEST n’est pas engagée ;
A titre subsidiaire,
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 411 182 euros au titre d’une prétendue perte d’exploitation qui n’est justifiée ni dans son principe, ni dans son montant ;
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 15 000euros au titre des pénalités infligées par le SIE des entreprises de [Localité 8] ;
– Infirmer le jugement de 1 ère instance et débouter MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 171 395 euros au titre de la rémunération versée à son personnel ;
– confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 60 000 euros au titre des prétendues mise à jour non réalisées;
– Infirmer le jugement de 1 ère instance et débouter MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 68 025 euros au titre des prétendues factures de son prestataire freelance ;
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 85 275 euros au titre de la prétendue obsolescence du logiciel SAGE X3 ;
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 103 160 euros au titre du prétendu déploiement de la version 12 du SAGE X3 ;
– confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 75 000 euros au titre d’un prétendu trouble de jouissance ;
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 100 000 euros au titre d’un prétendu préjudice moral ;
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté MOTEURS JM de sa demande d’un montant de 10 519,85 euros au titre des honoraires de DERBY Avocats qui relèvent de l’application de l’article 700 du code de procédure civile;
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté AUDEO DEVELOPPEMENT de ses demandes ;
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté M. [S] de ses demandes ;
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a débouté les appelants du surplus de leurs demandes.
A titre infiniment subsidiaire,
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a entériné le rapport d’expertise qui a considéré que les difficultés résultaient d’une responsabilité partagée entre MOTEURS JM et SRA OUEST ;
– Infirmer le jugement de 1 ère instance en limitant la condamnation de SRA OUEST à la somme de 92 424,50 euros.
Reconventionnellement,
– Confirmer le jugement de 1 ère instance en ce qu’il a condamné MOTEURS JM à payer à SRA OUEST une somme de 44 164,43 euros au titre des factures impayées.
En tout état de cause ;
– Débouter MOTEURS JM, la SELARL TRAJECTOIRE, es qualité, AUDEO et M. [S] de toute demande de garantie formulée à l’encontre d’AXA supérieure à la somme de 188 144,13 euros correspondant à son plafond de garantie ;
– Débouter MOTEURS JM, la SELARL TRAJECTOIRE, es qualité, AUDEO et M. [S] de toute demande de garantie formulée à l’encontre d’AXA inférieure à la somme de 1500 euros correspondant à sa franchise contractuelle qui restera à la charge de SRA OUEST ;
– Condamner MOTEURS JM à payer à SRA OUEST et AXA une somme de 10 000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner MOTEURS JM aux entiers dépens d’instance.
Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.
DISCUSSION
Les relations entre les parties
Les relations entre les parties sont marquées par une phase précontractuelle conséquente.
Le 15 avril 2015 la société SRA OUEST a adressé à la société MOTEURS JM une 1ère approche budgétaire du projet.
Les prestations proposées étaient les suivantes pour la livraison et l’installation de solution SAGE ERP X3 Version 7 :
Analyse
Installation
paramètrage des processus
Developpement des fonctions et traitements spécifiques
Formation (en transfert de compétence) vers le référent projet sur les outils de l’ERP
Assistance au démarrage.
La société SRA OUEST se présentait comme intégrateur de cette solution Sage ERP X3 depuis plus de 22 ans, avec une expertise en milieu industriel et une équipe dédiée et certifiée de 8 collaborateurs.
Le 29 avril 2015, SRA OUEST a effectué une démonstration du progiciel SAGE X3 dans les locaux de MOTEURS JM.
Le 5 mai 2015, SRA OUEST a fourni un 1 er niveau de plan de charge en lien avec l’approche budgétaire du 15 avril 2015.
Le 22 mai 2015, MOTEURS JM a adressé un cahier des charges à SRA OUEST.
La société SRA OUEST y a répondu le 2 juillet 2015 en l’affinant le 20 juillet 2015.
Ce cahier des charges concerne tous les services de la société MOTEURS JM :
gestion de production ;
gestion des achats ;
gestion des stocks ;
gestion des ventes ;
gestion des ressources humaines;
gestion financière ;
qualité ;
technologie de la solution ;
Le 22 septembre 2015, SRA OUEST et MOTEURS JM ont signé un contrat de services portant sur l’intégration du progiciel de gestion intégré SAGE X3 Version 7 (pièce 6 SRA).
Aux termes de ce contrat la société SRA OUEST précise que son offre globale de prestations – de l’audit d’un système existant à la maintenance d’un dispositif mis en place par ses soins- permet d’offrir à ses clients une réponse pertinente et de leur préconiser des solutions adaptées à leur taille leur activité et leur organisation.
La société SRA OUEST y indique s’appuyer sur les fonctionnalités proposées en standard par l’ERP afin de les paramêtrer dans le contexte du dossier sur les domaines suivants :
La production ;
Les ventes ;
Les achats et stocks ;
La comptabilité ;
La relation clients ;
La gestion d’affaires ;
Le parc et du service après- vente ;
La qualité ;
L’ordonnancement et le planning ;
Le contrat précise aussi que l’objectif de SRA est de transférer les compétences qui permettront à MOTEURS JM de réaliser les importations de données à reprendre dans l’ERP et que son accompagnement intègre les phases suivantes :
Analyses des fichiers à reprendre ;
Transfert de compétences pour la mise au format des données à reprendre et leur intégration dans l’ERP.
Pour parvenir à ses objectifs le contrat prévoit la tenue de comités de pilotage, un planning par modules et un suivi d’avancement
Il précise aussi :
Nous travaillons en mode ‘agile’ avec des étapes de réalisation (ci-dessous).
Les développements identifiés sur le projet sont testés et recettés au fur et a mesure du projet pour éviter de devoir tester et recetter tout d’un seul bloc.
Durant la période de déploiement, nous travaillons sur un dossier de réel et un dossier de test avec synchronisation régulière du dossier réel.
Après le démarrage en exploitation, toutes les adaptations passent par un dossier de test et la recette valide la mise en place sur le dossier de production.
Analyse du besoin : Recueil et formalisation du besoin tout en regardant si une fonction standard ou une adaptation du processus de l’ERP ou une spécification déjà réalisée seul convenir.
Spécification fonctionnelle : Rédaction de la spécification.
Validation: Validation de la spécification.
Réalisation : implémentation ou programmation. Réalisé sur un environnement de test
Tests unitaires et d’intégration, Vérification que la réalisation est conforme aux spécifications et qu’elle s’intègre bien avec les autres traitements et processus. Réalisé sur un environnement de test.
Recette : Validation en environnement de tests.
Mise en production : lmplémentation sur la base de production.
Maintenance : Maintenance corrective si des problèmes surviennent après la mise en production.
Le contrat était conclu moyennant le budget suivant :
. 50 300 euros HT au titre des licences portant sur le progiciel SAGE X3 Version 7 ;
. 3 500 euros HT au titre de l’option pointage atelier début-fin ;
. 67 900 euros HT au titre des prestations de mise en ‘uvre du projet ;
. 8 700 euros HT au titre de l’option de formation configurateur ;
. 7 200euros HT au titre de l’option de paramètrage des Etats Crystal ;
. 11 890 euros HT au titre de l’assistance annuelle du progiciel SAGE X3 ;
. 720 euros HT au titre de l’assistance annuelle sur l’option configurateur.
Ces étapes démontrent l’importance du projet pour MOTEURS JM qui entendait avec le nouveau logiciel réduire ses délais et améliorer sa performance auprès de ses clients, l’ERP devenant l’architecture organisationnelle de l’entreprise .
Elles établissent aussi la technicité de cette installation confirmée par le montant de son budget et le rôle des partenaires qui devaient agir en interdépendance pour respecter une mise en production à la date prévue.
Le document de méthodologie de déploiement SAGE X3 du 16 octobre 2015 présente le rôle des partenaires :
Rôle du chef de projet MICROFIRST (devenue SRA OUEST) :
Planification : gestion des ressources MICROFIRST/ définition des plannings/ définition des tâches ;
Suivi : mise en oeuvre du logiciel. Avancement du projet/ communication externe ;
Coordination : avec MOTEUR JM/ entre les consultants/ paramètrage/ formation des utilisateurs pilotes
Rôle des utilisateurs pilotes MOTEURS JM :
Disponibilité pour le projet ;
Formation au logiciel par domaine ;
Apport de la connaissance de leur métier ;
Recensement de tous les besoins de l’entreprise ;
Paramètrage du logiciel ;
Validation fonctionnelle du paramètrage ;
Formation des utilisateurs finaux ;
Support de l’évolution du produit dans l’entreprise
Rôle des consultants fonctionnels :
Apport de la connaissance du produit ;
Apport de leur expérience ;
Orientation des pilotes sur le paramètrage ;
Analyse des spécificités MOTEURS JM : reprise des données/interfaces/adaptations spécifiques Assistance des pilotes : validation fonctionnelle/ formation des utilisateurs finaux/ demarrage opérationnel.
La réunion de lancement du projet a eu lieu dans les locaux de MOTEURS JM le 16 octobre 2015 avec une mise en production du progiciel SAGE X3 Version 7 prévue le 1er septembre 2016.
Les analyses de cadrage du besoin de MOTEURS JM ont débuté au mois de novembre 2015 pour se terminer au mois de janvier 2016 :
– L’analyse fonctionnelle de la base articles était réalisée le 22 juillet 2015 ;
– L’analyse fonctionnelle de la gestion de la production était réalisée le 10 novembre 2015 ;
– L’analyse fonctionnelle des fichiers tiers était réalisée le 17 novembre ;
– L’analyse fonctionnelle des flux ventes était réalisée entre le 18 novembre et le 1 er décembre 2015 ;
– L’analyse fonctionnelle du flux achat était réalisée entre le 24 novembre et le 2 décembre 2015;
– L’analyse fonctionnelle de la comptabilité était réalisée le 8 décembre 2015 ;
– L’analyse fonctionnelle CRM était réalisée le 7 janvier 2016 ;
SRA OUEST a initié le paramètrage du progiciel SAGE X3 à compter du mois de janvier 2016.
Les tests ont débuté en juillet 2016.
A partir de cette période le calendrier de mise en production a connu des dérives chaque partie signalant à l’autre ses retards et/ou dysfonctionnements.
A la suite de plusieurs révisions du planning, le début de mise en production a été réalisé le 24 avril 2017 selon SRA mais selon MOTEURS JM les dysfonctionnements se sont poursuivis l’obligeant à adopter des modes dégrédés du logiciel ou des contournements.
Pour autant MOTEURS JM s’est engagée à régler le solde de ses factures pour un montant de 68 167,71 euros Ttc sur 12 mois à compter du mois d’octobre 2017.
Cet engagement n’a pas été respecté, MOTEURS JM continuant à dénonçer des paramètrages erronés et une absence de recettage.
SRA a suspendu ses services à compter du 26 février 2018.
Cette chronologie et les documents contractuels confirment la nécessité d’une collaboration étroite entre tous les acteurs du projet et donc l’implication du client pour lequel le produit a été spécifiquement élaboré.
En matière de progiciel, considéré comme un produit complexe, le fournisseur a pour sa part l’obligation de s’assurer que le progiciel répond aux besoins de son client, besoins qu’il aura analysés.
Son obligation de délivrance ne pourra être considérée comme parfaitement et définitivement exécutée que si le progiciel a été installé, testé et mis en production, avec pour terme de ce processus une recette contradictoire attestant que le progiciel répond aux besoins du client.
Aux termes du rapport de l’expert judiciaire du 20 novembre 2019 les deux partenaires ont failli dans leurs obligations respectives, mais pour une plus large part s’agissant de la société SRA OUEST, à hauteur de 70 % .
Les dysfonctionnements
La société MOTEURS JM reproche à la société SRA OUEST ses multiples manquements contractuels : l’inadaptation de ses méthodes à ses particularités, un recettage et un paramètrage incomplets, l’obligeant à des contournements ou un fonctionnement dégradé.
La société SRA OUEST estime que sa responsabilité ne saurait être engagée dans la mesure où la société MOTEURS JM a manqué à son obligation de collaboration en faisant évoluer ses besoins en cours de projet, en tardant à procéder aux tests de recette et en suspendant le règlement de ses factures.
A partir des 56 griefs dénoncés par la société MOTEURS JM, l’expert a retenu 43 dysfonctionnements imputables à la société SRA OUEST.
Griefs associés à la gestion du projet :
absence de recettage
déploiement sur plus de 30 mois
pas de mise en oeuvre de la méthodologie FIRST annoncée
sortie unilatérale du projet par SRA
déclaration unilatérale par SRA de la fin de la maintenance
annonce d’un demarrage le 1er septembre non tenu
Griefs associés aux paramètrages généraux :
problème de temps de réponse/lenteurs
absence d’enregistrement des champs spécifiques MJM dans les dictionnaires et menus X3/ menus non adaptés
Griefs associés au bureau d’étude : articles : l’unité de poids ne s’enregistrent pas ce qui engendre des problèmes dans les BDR et BDL et la déclaration BDR.
Griefs associés à la gestion commerciale :
les poids nets et brut n’apparaissent pas dans les factures de vente
gestion inopérante des acomptes HT et TTC pour les factures comprenant des produits et des services lors de la réalisation d’un devis il est impossible de sélectionner le contact pour cette affaire chez le client, difficulté qui aurait pu être résolue si la maintenance n’avait pas été interrompue
client : le contact déclaré par défaut n’est pas celui en tête de liste lorsque celui ci est appelé/ insuffisance de l’audit
Griefs liés au service après vente :
divers état non réalisé-devis , PV de contrôle, certificat CE, documentation/ insuffisance de l’audit
mode gestion des OF SAV inconnu (pas de formation)
absence de suivi d’avancement dossier SAV (pas de formation)
absence de gestion de la traçabilité des moteurs DESP
Griefs liés à la GPAO (gestion de la production assistée par ordinateur) :
impossibilité de gestion des délais sous traitants dans les lignes de gamme
les OF d’article en contre marque ne se génèrent pas par utilisation du lancement automatique
impossibilité de rattachement ou de changement de rattachement d’un OF sur un produit fini: perte de traçabilité avec le passage en stock
impossibilité de répartir/déclarer les temps réels entre réglages et opératoires dans OF
impossibilité de répartition des temps réels (fabrication en simultané)
GANTT dans X3 : absence de formation absence de visualisation, emplacement dans X3
Valorisation inventaire
une commande d’achat est calculée dès la rupture sans tenir compte des commandes en cours
pas de formation du CNB, MRP, PDP, gestion des prévisions de consommation, prévision des ventes
Griefs liés aux achats :
dans le regroupement, des articles déclarés sans prix alors qu’ils en ont un
absence d’indication sur BL des documents et pièces à fournir à la livraison
pas toujours de SUG ACH (insuffisance de l’audit/ maintenance non assurée)
impossibilité d’enlever la première page de l’état bon de commande en BONCDE2
dans la version anglaise des commandes d’achats, les textes ajoutés apparaissent en français (insuffisance de l’audit)
demande d’achat manuelle : impossibilité de l’associer à une commande client – perte de traçabilité et interférence avec le CNB
Griefs liés à la gestion des stocks : pas de simulation de planification et de lissage de charge-fonction non abordée (manquement de l’audit)
Griefs liés à la gestion de la qualité :
enregistrement des auto contrôles par l’interface scanner non fait
problèmes multiples en création de requête (arrêt de l’assistance)
problèmes pour lancement des états Crystal Report déjà existant – état vise , DESP, UE
formation/connaissance pour la création de tableaux de bord de performance opérationnelle
gestion de la traçabilité Matière, Produits, Contrôle Qualité, Documentation …Pas vue dans X3
Griefs liés à la gestion financière :
le paramètrage des tableaux de bord n’est pas bon
comptabilisation/approbation notes de frais : inopérant et non formé. MJM a créé les rubriques mais ne peut saisir du fait d’un blocage de X 3 sur l’année 2015 (pas d’assistance/ formation jamais faite)
clôture des comptes annuels et implication (coût, a nouveau, génération fichier FEC…) Formation néant (pas d’assistance).
L’expert a rejeté 12 griefs.
Sur ce point il signale que lors des réunions contradictoires de présentations de ses griefs par la société MOTEURS JM, certains ont été identifiés comme n’étant pas des griefs.
Il explique par ailleurs que certains griefs devaient être documentés par un dire avec une date limite arrêtée en contradictoire ; qu’ils ont bien donné lieu au dire n°8 de MOTEURS JM joint aux annexes, mais qu’il a été contraint de mettre ces griefs hors périmètre car le dire était tardif (2 mois de retard malgré le rappel préventif de l’expert avant l’échéance et un délai très raisonnable de 3 mois).
L’expert a également examiné les griefs soulevés par la société SRA OUEST à l’encontre de la société MOTEURS JM.
S’agissant de l’absence d’équipes stables au sein de la société MOTEURS JM, il explique que parmi les personnels formés il reste toujours des personnes pour former les autres et que l’arrêt des interventions par SRA ne permettait pas à MOTEURS JM de former les nouveaux arrivants.
Concernant les factures impayées d’un montant de 44 164,43 euros HT il explique que cette somme représente 15,18 % du total des factures qui est à comparer avec le reste à faire par la société SRA OUEST ; que la difficulté étant que pour SRA le reste à faire n’est que maintenance et assistance alors que la société MOTEURS JM ne peut utiliser les parties SAV et n’utilise que partiellement l’ensemble du produit SAGE X3. L’expert conclut que ce problème sera à trancher par le tribunal pour pouvoir valider ou non ce grief.
Il conclut :
Une première cause est la rupture par LR avec AR du Directeur de SRA, le 13/02/2018, pour non paiement d’une échéance comme prévu selon l’engagement de MJM, mais sans précisé si un accord était fait sur la stabilité de l’applicatif à fin novembre afin que MJM en ai un usage normal à fin novembre 2017 qui :
ne permettra plus de signaler les nouveaux problèmes rencontrés,
ne permettra plus d’assistance aux utilisateurs dont les erreurs d’utilisation ne seront plus ni identifiées ni corrigées,
mettra fin à toute livraison des modules en attente,
ne permettra plus à la maintenance d’apporter les correctifs de paramètrage ou autres.
Une seconde est l’absence de l’audit prévu au contrat qui fait que les fonctionnelle n’étaient pas adaptées au besoin et que donc les paramètrage réalisés répondaient de façon très incomplète
Une troisième, qui entrainera un report de 6 mois pour le démarrage est la combinaison d’une programmation trop tardive des tests d’import des données et les retards pris par MJM dans la réalisation de l’ensemble des tests à réaliser sur les parties de l’applicatif fournies par SRA.
Une quatrième cause est une conséquence directe de la deuxième, la dérive des temps humains consacrés au projet par SRA.
L’expert a ainsi en évidence plusieurs dysfonctionnements dans l’installation du logiciel.
1) Une absence d’audit alors que cette étape était prévue au contrat, interdisant une analyse pertinente par SRA des besoins de MOTEURS JM et amenant à des paramètrages incomplets.
L’expert note en effet que l’audit annoncé reste sous la forme de notes manuelles non discutées avec les utilisateurs ; que les investigations restent superficielles ; que les analyses fonctionnelles sont semi standard ; qu’elle sont des reprises des fonctions existantes du produit ; que les utilisateurs n’étant pas encore formés et c’est normal, au nouveau produit, il leur est difficile de certifier que le nouveau produit fera bien leur travail quotidien ; que les analyses ne seront pas validées, seule l’absence de réponse et l’urgence de l’installation pousse vers les étapes suivantes
Dans ses réponses aux dires récapitulatifs des parties (P 90 91 du rapport) l’expert ajoute que lorsqu’un audit est réalisé, i1 prend en compte le cahier des charges et les besoins de chaque poste de l’entreprise avec une analyse critique ; que l’expression des besoins se fait au travers du cahier des charges et des rencontres avec l’auditeur qui investigue avec l’utilisateur ; que le cartouche de chaque analyse prévu pour la validation des analyses est toujours vide ; que SRA a bien précisé que l’audit était resté en l’état de simples notes ; que donc rien n’a été validé
Une des première étapes dans l’avancée du projet (l’analyse des besoins du client) n’a donc pas été réalisée dans des conditions optimales.
La société SRA ne peut se retrancher sur l’établissement du cahier des charges et sur ses analyses fonctionnelles pour affirmer le contraire.
En présence d’un client profane, dans l’incapcité de contrôler l’adéquation des prestations à ses besoins, il appartenait à la société SRA d’aller au delà de ses analyses fonctionnelles en réalisant un véritable audit du fonctionnement de l’entreprise pour vérifier que ses prestations pouvaient répondre aux besoins de la société MOTEURS JM, voire, les adapter en concertation avec sa cliente.
L’audit complet aurait permis de s’assurer que les conditions de mise en oeuvre du projet étaient réunies.
Elle ne peut donc reprocher à la société MOTEURS JM d’avoir fait évoluer ses besoins en cours de projet et ce en contradiction avec la reconnaissance par cette dernière dès le mois de juin 2016, que ses besoins étaient circonscris et donc non suceptibles d’évoluer.
La société SRA s’appuie sur un courriel émanant de M. [F], salarié dédié au projet au sein de MOTEURS JM, en date du 6 juin 2016 :
Comme je l’ai évoqué lors du récent point d’étape sur l’état d’avancement de notre projet ERP, à l’issue de la phase d’analyse et de paramètrage, devait commencer la formation qui débouche ensuite sur une période de tests -> améliorations/déverminaqe -> validation de chacun des modules puis de flux complet.
A ce jour, La formation suit son cours à un rythme aussi soutenu que possible en fonction des impératifs de l’entreprise et c’est ainsi que j’ai le plaisir de vous annoncer que les phases de tests ont été initiés pour les achats et devraient débuter dans les prochains jours pour les ventes.
Ainsi, comme en atteste le bon de commande ci-dessus, deux ou trois de nos fournisseurs ont eu ou vont avoir le privilège de recevoir les premières commandes issues de notre nouveau système (bien sur, pour le moment ces commandes sont également enregistrées sous IFS pour garantir l’intégrité des données).
Je gage pouvoir a nouveau le plaisir de revenir vers vous avec nos premiers devis X3 et ce rapidement.
D’une part ce courriel ne concerne que certains postes d’intervention (achats et ventes) alors que les services concernés par l’installation du logiciel étaient bien plus étendus. D’autre part il ne fait que confirmer que la bonne marche du projet doit suivre des étapes et que la mise en production est précédée de tests par grands blocs.
Cet absence d’analyse profonde des besoins de la société MOTEURS JM amène d’autres dysfonctionnements en chaine.
2) Une combinaison trop tardive des tests d’import des données et les retards pris par la société MOTEURS JM dans la réalisation de l’ensemble des tests à réaliser sur les parties de l’applicatif fournies par SRA.
L’expert signale que malgré le recrutement d’un salarié pour cette tâche ( M. [F]) la gestion du projet n’a pas permis un suivi strict dans la mesure où les comités de pilotage ont été remplacés par des points téléphoniques précédés quelques jours avant, d’une liste présentant l’état de la situation du reste à faire par SRA.
Il précise que des comités formels auraient permis l’appréhension de sa mission par M. [F] qui n’était guidé par personne.
Cette situation explique que le démarrage et la mise en production aient pris du retard et aient été reportés à plusieurs reprises, M [F] ayant quitté la société MOTEURS JM avant cette mise en production, ce qui n’a fait que retarder encore le démarrage.
Pour autant les retards dans les tests ne sont pas uniquement imputables à MOTEURS JM comme l’affirme la société SRA.
En s’abtenant de préparer et de tenir des comités de pilotage sur site et d’accompagner les salariés de MOTEURS JM dans les tests, elle a favorisé leur mauvaise maitirise du processus d’installation et donc les dysfonctionnements.
En effet à la suite de la mise en production du 24 avril 2017, l’expert indique que les utilisateurs vont faire de nombreuses observations. Il indique que des griefs n’ont jamais été signalés car identifiés par la société MOTEURS JM au fur et à mesure de la découverte du produit.
Il ajoute que la succession de ‘restes à faire’ donnera à SRA l’impression que l’installation ne se terninera jamais alors qu’elle se considère en maintenance à compter de cette date.
Les pièces au dossier illustrent ainsi le décalage qui s’installe entre les parties dans la mise en oeuvre du projet, MOTEURS JM considérant que le logiciel n’est pas stabilisé dans tous ses secteurs d’activité et RSA estimant qu’à partir du 24 avril 2017 elle n’est plus qu’en maintenance.
Sur ce point l’expert précise pourtant qu’il n’y a eu aucune recette, ni partielle, ni globale, permettant de passer de la phase développement à la phase maintenance.
Cette situation démontre suffisamment que le logiciel a été mis en production alors qu’il n’était pas stabilisé.
Pour établir le contraire la société SRA s’appuie sur un mail de M. [S] du 24 avril 2017 aux termes duquel il aurait pris la décision de mettre la solution en production ce qui confirmerait que le logiciel installé était bien fonctionnel y compris pour MOTEURS JM :
Bonjour Monsieur [M]
Voici mes réponses ci-dessous
Merci d’importer le fichier Xlci-joint des stocks au 21 avril 2017 (le go live d’X3 est aujourd’hui).
Toutefois la société SRA ne peut confondre mise en production rendue nécessaire pas les retards dans le respect du calendrier et validation de l’installation par sa cliente.
Sur ce point l’expert détaille son analyse dans ses réponses aux dires récapitulatifs des parties (p 90 et 91 du rapport).
Il considère que dans le cas d’espèce le progiciel X3 est en maintenance, car dans ce cas la livraison vaut recette, mais pour les paramètrage, l’applicatif est toujours en phase de développement et non de maintenance.
Il poursuit en expliquant qu’en temps normal, lorsque les recettes sont faites, il y a mise en production de l’application ; que c’est la conformité qui lance la mise en production ; que nous sommes ici dans un cas très particulier d’un client contraint de mettre en production avant recettes pour des raisons d’absence de maintenance de son système en place, d’absence de mises à jour légales et en raison des demandes des services fiscaux.
Cette mise en production ne saurait décharger SRA de son obligation de délivrance conforme alors qu’elle ne s’est pas assurée que le logiciel était en état de fonctionner normalement dans tous les secteurs concernés par ses prestations.
– la rupture unilatérale par SRA en février 2018 de ses services qui a interdit toute amélioration du fonctionnement du logiciel.
Plusieurs mois après la mise en production, l’installation du logiciel présente de nombreux dysfonctionnements résultant de son incompatibilité avec le réseau informatique de la société MOTEURS JM.
Cette rupture intervient alors que le logiciel n’était pas stabilisé et donc ne répondait pas aux besoins de sa cliente.
Comme elle le revendique dans ses documents commerciaux, la société SRA OUEST est intégrateur de solutions de gestion et possède une expertise dans ce domaine depuis plus de 20 ans notamment s’agissant du logiciel SAGE X 3.
Au regard des échanges pré-contractuels qui se sont déroulés sur plusieurs mois avant la signature du contrat le 22 septembre 2015 et se sont poursuivis jusqu’à la rupture unilatérale, elle devait assurer l’assistance de sa cliente pour lui permettre de parvenir à une maitrise de l’ERP d’autant que la somme que cette dernière lui restait devoir ne représentait qu’une part infime de sa facture totale.
L’expert propose un partage de responsabilités entre les parties à hauteur de 30 % dans la gestion du projet par MOTEURS JM.
Il explique en effet que si les tests avaient été faits dans les temps un forcing aurait pu limiter le retard lié aux difficultés rencontrées pour la reprise des données (p 70 du rapport) .
Il retient donc la responsabilité de SRA à hauteur de 70 %.
La cour estime que ce partage est justifié.
L’expert a rejeté peu de griefs au regard du nombre de dysfonctionnements dénoncés par MOTEURS JM ( 12 sur 56 ). Ce défaut d’analyse, à supposer que les griefs soient réels, ne saurait augmenter significativement la part de
responsabilité de SRA laquelle ressort plus fondamentalement de la nature des dysfonctionnements que leur nombre.
Les préjudices invoqués par la société MOTEURS JM, M [S] et la société AUDEO DEVELOPPEMENT
Les appelants font valoir que le préjudice de la société MOTEURS JM se décompose ainsi :
Expertise judiciaire rapport final : évaluation partielle 171 395 euros ;
Salaires complémentaires charges retenue à 20% 4.940 euros ;
Mises à jour Patchs sécurité et fonctionnalités sur 4 ans non réalisées 75 000 euros ;
Perte Exploitation 411 182 euros ;
Préjudice moral 100 000 euros ;
Préjudice amende fiscale 2014 à 2016 15 000 euros ;
Freelance reprise projet 102.036.81 euros ;
Obsolescence d’un logiciel non réceptionné 85 275 euros ;
Déploiement nouvelle version V12 250.000 euros
Frais avocats (Cabinet DERBY-Expertise judiciaire) 10 519,85 euros ;
Préjudice de jouissance continue au-dela du 09/19 75 000 euros
Total 1.300.348,66 euros
Concernant le préjudice subi par la société MOTEURS JM l’expert conclut :
Au moment de la rupture, l’applicatif n’était toujours pas recettable par rapport au véritable besoin de MJM, besoin qui n ‘avait pas été suffisamment identifié lors de l’audit de l’existant, livrable prévu à la commande et non fourni.
Les préjudices retenus dans le cadre de cette expertise sont :
Lesfactures du prestataire freelance chargé de finir et corriger les paramètrages selon les besoins de MJM, soit un préjudice à ce jour de 13 454 euros.
Les salaires des personnels ralentis dans leur travail par un système ne répondant pas correctement à leurs besoins, soit un préjudice retenu à ce titre est bien 171 395 euros (sur la base de 20% du temps consacré par les équipes de MOTEURS JM p 70 du rapport).
Le préjudice sur les résultats de l’entreprise impactés par un système mal adapté est laissé à l’estimation du tribunal car il ne peut être défini de faon objective avec les éléments fournis par MJM, sachant que ceux-ci commence en 2018 (date à laquelle l’entreprise pouvait attendre une amélioration due à son investissement, et baisser progressivement sur 2019 suite à l’intervention du prestataire externe).
1) Salaires complémentaires
L’étude par un cabinet privé versée par SRA pour s’opposer à la demande à ce titre ne suffit pas à contredire l’analyse d’un expert judiciaire étant noté qu’il s’évince des pièces aux dossiers des parties que la mise en oeuvre du nouveau logiciel a été chronophage pour les équipes de MOTEURS JM démunies face à un logiciel inconnu non fiabilisé.
L’expert fixe le préjudice lié à la charge de travail de salariés de MOTEURS JM à la somme de 171 395 euros sur la base de 20 % de leur temps de travail consacré à la mise en oeuvre du projet.
Les appelants renvoient à leur pièce 45 pour justifier une somme supplémentaire de 4 940 euros.
La pièce 45 est constituée par un tableau dont le lien avec la demande n’est pas expliqué ni justifié.
Ce tableau montre un écart de 72 234 euros par raport au rapport d’expertise qui ne correspond pas à la somme de 4 940 euros.
Il est acquis que lorsqu’une entreprise modifie son architecture informatique ses salariés consacrent du temps à l’appréhension des nouveaux systèmes.
Mais les observations de l’expert (p 69 et 70 du rapport) montrent que le personnel impliqué plus particulièrement dans la mise en oeuvre des nouveaux logiciels est constitué de directeurs de services et de responsables, fonctions techniques qui permetttent à une société qui construit des moteurs destinés à résister aux environnements hostiles d’engranger de la valeur ajoutée.
Ces salariés qui ont été employés à d’autres tâches liées aux dysfontionnements du système informatique n’a pas permis que leur force de travail soit utilement utilisée pour augmenter les performances de l’entreprise.
Ces charges ont été indues.
Il convient donc de retenir l’estimation de l’expert à hauteur de 171 395 euros au titre de l’indemnisation de la société MOTEURS JM
Le jugement est confirmé de ce chef.
2) Mises à jour Patchs sécurité et fonctionnalités sur 4 ans
Les patchs n’ont pas été installés puisque la solution n’a pas été recettée (cf rapport d’expertise P 88).
Le contrat régularisé entre les parties fixe les coûts de l’assistance annuelle SAGE ERP X3 à la somme totale de 11 890 euros HT + 720 euros HT soit 12 610 euros HT (arrondi 15 000 euros TTC).
Cependant le contrat au titre de l’assistance ne vise pas l’installation de patchs.
Il est prévu :
– des conseils d’utilisation demandés sur la solution ;
– des interventions qualifiées de mineures par MICROSOFT et réalisées à partir de ses locaux sur les logiciels des clients ;
– les nouvelles versions prologicielles sur demande du client hors frais de support d’installation et de formation.
L’installation des patchs et mises à jour n’était pas prévue au contrat, d’autant que par définition, il est impossible de savoir à l’avance combien de mises à jour interviendront sur un logiciel, un grand nombre d’entre elles étant révélées par la survenance d’une difficulté imprévue de l’éditeur du logiciel.
L’arrêt des relations contractuelles n’interdisait pas à MOTEURS JM d’acheter directement les patchs et mises à jour directement auprès de l’éditeur et de les faire installer par son nouveau prestataire.
Le préjudice n’est donc pas établi.
Le jugement est confirmé de ce chef.
3) Les pertes d’exploitation
Les appelants versent une attestation du cabinet FITECO, expert-comptable de la société MOTEURS JM qui évalue les pertes d’exploitation arrêtées au 31 décembre 2019 à la somme de 411.182 euros
Sur la base d’une note du cabinet FITECO ils expliquent que FITECO a évalué le préjudice en se fondant sur l’expert judiciaire qui constate un préjudice imputable à SRA de 171 K€ sur la base du temps passé par les salariés productifs à résoudre les dysfonctionnements de l’ERP.
Ils ajoutent que le temps passé à régler ces problèmes n’a pas pu être mis à profit pour réaliser de la production ; qu’à partir de ce postulat le cabinet FITECO a calculé une perte d’exploitation sur la base d’un ratio de production moyen historique observé sur la période de 2009 à 2016. (pièces n°77 et 78) ; que ce ratio s’élève à 41 ,68% ; que le cabinet comptable a estimé que si les salariés avaient travaillé au lieu de résoudre les dysfonctionnements, la société aurait pu réaliser une production supplémentaire de 411 182 euros sur la période du 1er avril 2017 au 30 septembre 2019.
Dans sa note le cabinet FITECO précise cependant que son rapport ne vaut pas comme expertise conforme aux normes de l’expertise comptable.
Les appelants ne versent aucune pièce d’un professionnel du chiffre assermenté pour confirmer son analyse.
Ils ne démontrent donc pas le montant d’un préjudice au titre de la perte d’exploitation.
La demande est rejetée.
Le jugement est confirmé de ce chef
4) Le préjudice moral
Les appelants font valoir que le préjudice moral de la société MOTEURS JM résulte de l’atteinte portée à son image et à sa réputation, à la surcharge de travail générée pour les employés, à sa perte de chance de pouvoir utiliser un outil efficient, à la perte de contrats, à la perte de clients, à la perte de l’image de marque et à la dévalorisation de la marque MOTEURS JM.
Les dysfonctionnements engendrés par les manquemens de la société SRA OUEST n’ont pas permis à la société MOTEURS JM de mettre en place des outils améliorant sa performance dans les temps souhaités.
Cette situation justifie une indemnisation à hauteur de la somme de 30 000 euros
Le jugement est infirmé de ce chef.
5) Le préjudice amende fiscale 2014 à 2016
Concernant les pénalisations fiscales l’expert estime que seule l’amende liée à l’exercice 2016 pourrait être prise en compte.
Finalement il ne retient pas ce préjudice.
Les appelants versent une mise en demeure du 16 août 2018 pour un montant de 5 000 euros sans indiquer à quel titre cette imposition et ces pénalités se rapportent.
Ils se contentent d’ affirmer que la société MOTEURS JM n’a pu rendre disponibles les comptes sous le format FEC exigé par l’administration fiscale.
La demande n’est donc pas justifiée
Elle est rejetée .
Le jugement est confirmé de ce chef.
6) Les factures Freelance pour la reprise projet
L’expert arrête ce poste de préjudice à la somme de 13.454 euros.
Les appelants font valoir que le coût actualisé de l’intervention du freelance s’élève à la somme de 72.712,21 euros ; qu’il n’a pas finalisé sa mission de telle sorte que le montant total du préjudice doit être pris en compte à hauteur de 102.036,81 euros.
Ils versent divers documents pour justifier ce montant :
– des devis et factures d’assistance informatique pour 2019 2020 et 2021 ;
La cour ignore si ces prestations sont en lien avec les dysfonctionnements de l’installation effectuée par la société SRA ou s’il s’agit d’une maintenance régulière du logiciel.
Certaines de ces factures (celle de décembre 2020 et de 2021) sont éloignées de la rupture des relations entre la société SRA et MOTEURS JM de février 2018, ce qui laisse un doute sur des interventions du freelance en lien avec les désordres incombant à SRA.
– des échanges de mail de décembre 2020 entre MOTEURS JM et une société prestataire concernant l’amélioration de devis pour l’exploitation via le Work Flow ;
Ces échanges ne visent aucun montant pour ces prestations.
– des échanges entre internautes en 2011 sur un forum de discussion ;
Ces discussions sont sans lien direct avec le litige.
Ces pièces ne suffisent donc pas pour rapporter le montant sollicité au titre du préjudice, à défaut d’une attestation du freelance par exemple établissant que ses interventions sont en lien avec la stabilisation du logiciel.
Le demande est rejetée
Le jugement est confirmé de ce chef.
7) L’obsolescence d’un logiciel non réceptionné
Pour évaluer ce poste de préjudice les appelants se réfèrent au coût du logiciel SAGE X3 en 2014 qu’elle actualise à 7% par an à compter de 2016.
Pour justifier la réalité du préjudice et son montant ils se contentent de verser le contrat de services du 22 septembre 2015.
Ce document ne permet pas de démontrer le préjudice.
Au surplus la société MOTEURS JM affirme que le module de requête graphique n’est plus utilisable depuis décembre 2020 mais ne le démontre pas.
La pièce 63 qui vise à établir l’ obsolescence ne concerne que la politique de maintenance de l’Editeur SAGE. Il y est indiqué que la période Lifeline des versions 7 et 8 de sage X3 arrive à échéance le 30 septembre 2020 mais que l’éditeur prévoit de prolonger cette période sans préciser de date mais en garantissant l’absence d’augmentation tarifaire jusqu’à fin 2020.
La date d’échéance reste inconnue.
La demande est rejetée.
Le jugement est confirmé de ce chef
8 ) le déploiement de la nouvelle version V12
Les appelants considèrent que dans la mesure où plus aucune maintenance n’est assurée à compter de septembre 2020 sur la version SAGE X3 V8 elle va être contrainte de solliciter le déploiement de la version V12 du logiciel.
Au visa de propositions contractuelles ils évaluent le coût de ce déploiement à une somme comprise entre 250.000 euros et 300.000 euros comprenant la mobilisation du personnel.
Comme précisé supra il n’est pas démontré que la version V7 voire V8 est arrivée à échéance à compter de septembre 2020 et qu’il n’existe pas de maintenance alors que des factures sont établies à ce titre et sont communiquées au dossier de MOTEURS JM.
En tout état de cause contrairement à ce qui est indiqué cette situation n’est pas ‘anormale’ car tout logiciel informatique est amené à évoluer et il ne peut être reproché au prestataire de services une politique entrepreneuriale de l’Editeur consistant à inciter les clients à acheter les versions supérieures.
La demande est rejetée.
Le jugement est confirmé de ce chef.
9) Les frais d’avocat
Ces frais sont compris dans l’attribution d’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La demande est rejetée.
Le jugement est confirmé de ce chef.
10) Le préjudice de jouissance
Les appelants expliquent que le préjudice de jouissance de la société MOTEURS JM se poursuit.
Sur la base de l’utilisation du logiciel par 15 utilisateurs ils fixent le préjudice de jouissance pour chacun d’eux à la somme de 5 000 euros soit au total la somme de 75 000 euros.
Ils ne versent aucune pièce de nature à démontrer que les utilisateurs visés seraient encore incommodés par l’utilisation du logiciel alors que les factures versées établies par le nouveau prestataire concernent pour certaines, des prestations de formation.
Cette demande est rejetée.
Le jugement est confirmé de ce chef.
11) La prise en charge de la rémunération de M. [S]
Les appelants sollicitent la prise en charge de la rémunération de M. [S] au regard de sa mobilisation depuis le début des relations contractuelles avec la société SRA.
M. [S] est le gérant de la société MOTEURS JM président de la société AUDEO DEVELOPPEMENT.
En sa qualité de dirigeant il lui appartient d’assumer les aléas de son entreprise.
Au surplus aucun document ne vient établir la rémunération versée à M [S] au titre de sa mobilisation laquelle est de l’essence de sa qualité de dirigeant.
La pièce 45 est peu éclairante à ce sujet pour justifier la somme de 171.395 + 72.234 euros soit 243 629 euros.
La demande est rejetée.
Le jugement est confirmé de ce chef.
Au total l’indemnisation des préjudices subis par la société MOTEURS JM est fixée à la somme de 171 395 +13 454+ 30 000 : 214 849 euros
Sur la base d’un partage de responsabilité à hauteur de 70 % à la charge de la société SRA il convient d’accorder à la société MOTEURS JM la somme de 150 395 euros au titre de son préjudice.
Le jugement est infirmé de ce chef
Le préjudice moral de M. [S]
M. [S] ne justifie pas d’un préjudice moral personnel étant précisé que la société MOTEURS JM est indemnisée à ce titre.
La demande est rejetée.
Le jugement est confirmé de ce chef.
Le préjudice de la société AUDEO DEVELOPPEMENT
Les appelants font valoir que le préjudice de la société AUDEO DEVELOPPEMENT s’élève à la somme de 67.294 correspondant à 20% du montant total des salaires versés à M. [S] au titre des années 2017 à 2019 (112 901 + 133.569 + 90.000 = 336.470) soit 67.294 euros.
La société AUDEO DEVELOPPEMENT n’avait pas de lien commercial direct avec la société SRA.
Sa qualité de présidente de la société MOTEURS JM ne justifie pas sa demande à ce titre.
La demande est rejetée.
Le jugement est confirmé de ce chef.
La demande de la société SRA
La société sollicite la condamnation de la société MOTEURS JM aux motifs qu’elle reste devoir la somme de 44 164,43 euros comme le note l’expert.
La société MOTEURS JM lui oppose une exception d’inexécution dans la mesure où elle a rompu unilatéralement les relations commerciales.
La mise en ‘uvre de l’exception d’inexécution prévue aux articles 1271 et 1220 du code civil suspend l’exécution des obligations de celui qui l’oppose, dans l’attente que son cocontractant défaillant exécute sa propre obligation.
La réparation du préjudice de la société MOTEUR JM rétablie son obligation à régler le solde de ses factures à hauteur de la somme de 44 164,43 euros.
La société MOTEURS JM est donc condamnée à régler à la société SRA OUEST la somme de 44 164,43 euros HT.
Le jugement est confirmé de ce chef.
La garantie AXA
La société AXA France IARD entend opposer aux condamnations mises à la charge de la société SRA OUEST les conditions et limites de sa police d’assurance.
Les conditions particulières du contrat prévoient un plafond de garantie de 300 000 euros par année d’assurance pour les dommages immatériels non consécutifs avec une franchise de 1 500 euros.
Les conditions générales de la police stipulent que l’assureur prend en charge les frais de défense dans la limite du plafond figurant aux conditions particulières.
La société AXA indique que les frais de défense s’élèvent à la somme de 111 855,87 euros.
Elle explique que le solde disponible avant épuisement de la garantie d’AXA s’élève à la somme de 188 144,13 euros.
Ce solde est supérieur au montant de l’indemnisation accordé à la société MOTEURS JM qui s’élève à la somme de 150 395 euros.
Son contrat prévoit une franchise de 1.500 euros, opposable à la société MOTEUR JM puisqu’il ne s’agit pas d’une assurance obligatoire.
Il est par conséquent fait droit à l’action directe de la société MOTEUR JM contre elle et elle est condamnée solidairement avec la société SRA OUEST à lui payer la somme de 148.895 euros.
La société AXA garantira son assurée à hauteur de la somme de 148.895 euros.
Les demandes annexes
Il n’est pas inéquitable de condamner la société SRA OUEST à régler à la société MOTEURS JM la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Les demandes à ce titre de M. [S] et de la société AUDEO DEVELOPPEMENT sont rejetées.
La société SRA OUEST est condamnée aux dépens d’appel en ce compris les frais d’expertise.
PAR CES MOTIFS
La cour
Confirme le jugement sauf en ce qu’il a :
– Condamné in solidum, la société SRA OUEST et la société AXA France IARD à verser à la société MOTEURS J.M. la somme de 127 987 euros indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274.7) et augmentée des intérêts au taux légal le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
24
-Débouté la société Moteurs JM du surplus de sa demande
Statuant à nouveau
– Condamne in solidum, la société SRA OUEST et la société AXA France IARD, cette dernière dans la limite de 148.895 euros, à verser à la société MOTEURS J.M. la somme de 150 395 euros indexée sur l’indice SYNTEC publié au mois de novembre 2019 (274.7) et augmentée des intérêts au taux légal à compter de l’arrêt le tout sous le bénéfice de l’anatocisme prévu à l’article 1343-2 du code civil ;
– Condamne la société AXA France IARD à garantir la société SRA OUEST de cette condamnation à hauteur de la somme de 148.895 euros ;
– Condamne la société SRA OUEST à régler à la société MOTEURS JM la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamne la société SRA OUEST aux dépens d’appel en ce compris les frais d’expertise ;
-Rejette les autres demandes des parties.
LE GREFFIER LE PRESIDENT