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Pour éviter d’acheter un logiciel qui peut être instable en raison de dysfonctionnement ou qui ne connaîtrait pas le succès commercial escompté, il est vivement conseillé de stipuler au contrat, soit une clause suspensive de parfait fonctionnement, soit une clause permettant l’abandon de la commercialisation du logiciel, tout en conservant les droits d’auteur acquis auprès du développeur.
Estimant le logiciel acquis par elle était insatisfaisant et instable, la société Fiducial informatique a décidé d’interrompre sa commercialisation et a notifié au cédant, par lettre recommandée avec accusé de réception, la non-prorogation du terme du contrat d’assistance. En l’absence de commercialisation, la rémunération de l’auteur cédant a également été interrompue.
Le contrat précisait expressément que la réalisation des obligations de la société Fiducial (cessionnaire des droits) était soumise à la commercialisation du logiciel. Or, la commercialisation massive n’ayant pas eu lieu en raison des anomalies présentées par logiciel.
La société Fiducial n’était donc tenue d’honorer la rémunération proportionnelle de l’auteur que dans la limite du chiffre d’affaires issu de la phase de tests du logiciel dans certaines études de notaires.
S’agissant de l’achat d’un logiciel destiné au notariat, le contrat de vente de logiciel a été jugé parfaitement formé entre les Parties.
En premier lieu, la cause de la cession était réelle et identifiable.
L’article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que l’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.
La cause de l’obligation et la cause du contrat sont à distinguer ; la première s’attache à vérifier l’existence de la cause entendue comme le but immédiat qui a déterminé le contractant à s’obliger ; la seconde constitue le mobile déterminant.
L’absence de cause résulte de l’absence de la contrepartie attendue du contrat sans qu’il soit fait référence aux motifs pour lesquels une partie s’est engagée. L’absence de cause peut également résulter d’une obligation souscrite en échange d’une contrepartie dérisoire ou illusoire (3e Civ., 14 février 2019, pourvoi n° 17-30.942).
Dans les contrats synallagmatiques, la cause de l’obligation d’une partie réside dans l’obligation contractée par l’autre (1re Civ., 25 mai 1988, pourvoi n° 86-15.683, Bulletin 1988 I N° 149 ; Com., 9 juin 2009, pourvoi n° 08-11.420). Il en résulte que l’obligation perd sa cause lorsque la contrepartie fait défaut de sorte qu’un tel contrat encourt l’annulation.
Un contrat est encore dépourvu de cause lorsque le mobile pour lequel une partie a contracté s’avère impossible dès l’origine, à condition qu’il soit entré dans le champ contractuel (1re Civ., 3 juillet 1996, pourvoi n° 94-14.800, Bulletin 1996, I, n° 286 ; 3e Civ., 15 décembre 1999, pourvoi n° 96-19.203 ; Com., 27 mars 2007, pourvoi n° 06-10.452).
La nullité du contrat est également encourue pour absence de cause lorsque le contrat ne prévoit aucune contrepartie à l’engagement d’une partie (Civ. 3ème 3 mars 1993, Bull 28, pourvoi 91-15.613 ; Civ. 1ère 4 juillet 1995, Bull 303, pourvoi 93-16.198) ou une contrepartie dérisoire.
Cependant, lorsque le contrat de cession s’inscrit dans le cadre d’une opération économique constituant un ensemble contractuel indivisible propre à lui conférer une contrepartie réelle et sérieuse, une telle cession de droits d’auteur, serait-elle intervenue pour un franc symbolique, ne caractériserait par l’absence de contrepartie de nature à retenir l’absence de cause du contrat de cession (1re Civ., 13 juin 2006, pourvoi n° 04-15.456, Bull. 2006, I, n° 306 Publication : Bull. 2006, I, n° 306).
L’existence de la cause de l’obligation s’apprécie au moment de la conclusion du contrat, à la date où elle est souscrite ( 3e Civ., 8 mai 1974, pourvoi n° 73-10.820, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 3 N 188 P141 ; 3e Civ., 17 juillet 1996, pourvoi n° 93-19.432, Bulletin 1996, III, n° 193 ; 1re Civ., 13 juin 2006, pourvoi n° 04-15.456, Bull. 2006, I, n° 306 ; 1re Civ., 3 avril 2007, pourvoi n° 05-11.405, Bull. 2007, I, n° 139).
En second lieu, la cession des droits sur le logiciel était écrite et intervenue à titre onéreux.
Conformément aux dispositions de l’article L.122-7 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une oeuvre de l’esprit peut librement céder ses droits patrimoniaux à titre onéreux ou à titre gratuit ; cependant, l’exploitation d’une telle oeuvre suppose obligatoirement la conclusion d’un acte de cession de droits d’exploitation conforme aux dispositions du code de la propriété intellectuelle entre le cessionnaire et l’auteur.
L’article L.112-2, 13°, du code de la propriété intellectuelle dispose que les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire, sont considérés comme des oeuvres de l’esprit.
L’auteur d’un logiciel ne peut pas être une personne morale (1re Civ., 15 janvier 2015, pourvoi n° 13-23.566, Bull. 2015, I, n° 11).
L’article 2.1 de la directive 2009/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur (JOUE du 5 mai 2009 L.111/16) prévoit expressément que ‘ l’auteur d’un programme d’ordinateur est la personne physique ou le groupe de personnes physiques ayant créé le programme, ou, lorsque la législation de l’État membre concerné l’autorise, la personne morale considérée par cette législation comme étant le titulaire du droit’.
Selon l’article L.131-3, alinéa 1er, du même code, la transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.
L’article L.131-4, alinéas 1er et 5, du même code précise ce qui suit :
‘La cession par l’auteur de ses droits sur son oeuvre peut être totale ou partielle. Elle doit comporter au profit de l’auteur la participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l’exploitation.
Toutefois, la rémunération de l’auteur peut être évaluée forfaitairement dans les cas suivants …5° En cas de cession des droits portant sur un logiciel’.
Selon l’article L.113-2, alinéa 2, du code de la propriété intellectuelle, ‘Est dite composite l’oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière.’
L’article 2.3 de la Convention de Berne du 9 septembre 1886 modifiée le 28 septembre 1979 stipule que ‘sont protégés comme des oeuvres originales, sans préjudice des droits de l’auteur de l’oeuvre originale, les traductions, adaptations, arrangements de musique et autres transformations d’une oeuvre littéraire ou artistique.’
L’article L.113-4 du code de la propriété intellectuelle dispose que ‘L’oeuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’oeuvre préexistante.’
Les versions successives d’un logiciel ne constituent pas une oeuvre composite.
En troisième lieu, les droits cédés avaient été parfaitement identifiés.
L’article 2 du contrat de cession conclu, consacré à la description des droits de propriété intellectuelle cédés, stipule ce qui suit :
‘Les titres et droits de propriété intellectuelle (à savoir les droits patrimoniaux d’auteur)
afférents au Logiciel et cédés en vertu du présent Accord comprennent de façon non limitative les droits suivants :
— Le droit de reproduction :
à savoir, notamment, le droit de précéder à toute reproduction nécessaire aux actes de chargement, affichage sur écran, exécution, transmission, stockage, le droit de reproduire ou de faire reproduire le Logiciel par tous moyens, sous toutes formes et sur tous supports, notamment informatiques (disquettes, CD-Rom. DVD Rom, disques durs), papier (documentation technique) ou sur tout autre support. en un nombre d’exemplaires illimité, par tout moyen présent et à venir, ou sur tous réseaux analogiques ou numériques, privatifs ou ouverts au public (Internet, Intranet), nationaux et/ou internationaux ;
— Le droit d’adaptation :
à savoir (i) le droit de modifier, d’améliorer, de traduire et de réécrire dans un autre langage ou d’une autre façon le Logiciel. (ii) le droit d’intégrer et d’incorporer dans toute oeuvre actuelle ou future le Logiciel ;
— Le droit de représentation :
à savoir, notamment, le droit de représenter ou faire représenter publiquement le Logiciel ou toute oeuvre dérivée de celui-ci ou ses exploitations secondaires, par tous procédés connus ou inconnus à ce jour, soit la diffusion, la communication par voie analogique et/ou papier et/ou numérique, sur tous réseaux informatiques de télécommunication ouverts et/ou privatifs, nationaux ou internationaux, dans les circuits de diffusion spécialisés ou grand public ;
— Le droit d’exploiter le Logiciel dans sa forme actuelle et/ou sous toute forme modifiée et/ou adaptée, sur tous supports connus ou inconnus à ce jour, notamment par voie de licences ou sous-licences consenties à des tiers ;
— Le droit de vendre, donner, céder ou transférer tout ou partie du Logiciel ou des droits de propriété intellectuelle y afférent.
L’ensemble des droits de propriété intellectuelle ci-dessus à savoir les droits patrimoniaux d’auteur est cédé pour le monde entier et pour toute la durée de protection de ces droits accordée par la loi.’
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
1ère chambre 1ère section
ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2022
N° RG 20/00365
N° Portalis DBV3-V-B7E-TWQY
AFFAIRE :
[O], [X] [D]
S.A.S. iO CONCEPT
C/
Société FIDUCIAL INFORMATIQUE
Société [F]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Décembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
N° Chambre : 0
N° Section : 0
N° RG : 16/09193
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
— l’ASSOCIATION AVOCALYS,
— Me Anne-laure DUMEAU
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [O], [X] [D]
né le 18 Octobre 1961 à [Localité 1] ([Localité 1])
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 9]
S.A.S. IO CONCEPT
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié es qualité au siège social
N° SIRET : 798 455 010
[Adresse 2]
[Localité 7]
représentés par Me Monique TARDY de l’ASSOCIATION AVOCALYS, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620
Me Alice ROBERT substituant Me Alexandre FIEVÉE, avocat – barreau de PARIS, vestiaire : P426
APPELANTS
****************
Société FIDUCIAL INFORMATIQUE
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège
N° SIRET : 317 288 389
[Adresse 3]
[Adresse 10]
[Localité 6]
Société [F]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège
N° SIRET : 481 067 437
[Adresse 4]
[Localité 8]
représentées par Me Anne-laure DUMEAU, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 – N° du dossier 42731
Me Luc-marie AUGAGNEUR de la SELARL CVS, avocat – barreau de LYON, vestiaire : 656
INTIMÉES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 03 Octobre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anna MANES, Présidente, chargée du rapport, et Madame Nathalie LAUER, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anna MANES, Présidente,
Madame Nathalie LAUER, Conseiller,
Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,
***************************
FAITS ET PROCÉDURE
M. [D], concepteur de logiciels à destination du notariat, a créé le logiciel de rédaction et de signature en ligne ainsi que de télétransmission d’actes juridiques et authentiques en mode SaaS (‘software as a service’) dénommé « d.poq », et a confié à la société [F], dont il était le président, la charge de procéder à son développement, tâche pour partie accomplie en collaboration avec la société Zenika au profit de laquelle la société [F] a été condamnée par arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 février 2013 à payer diverses factures.
Entre 2011 et 2015, le logiciel « d.poq » recevait diverses homologations, labellisations et agrément [en particulier, les homologations et labellisations « télé@ctes » par Real.Not de l’Association pour le Développement du Service Notarial, elle-même placée sous l’autorité du Conseil Supérieur du Notariat qui bénéficie d’une délégation de la direction générale des finances Publiques pour auditer et homologuer les logiciels devant être déployés dans le notariat, ainsi que l’homologation « planète » ; l’homologation puis l’agrément MICEN (Minutier Central Électronique des Notaires de France) qui garantit la conservation et la consultation des actes authentiques électroniques].
La société Fiducial informatique, qui est une filiale du groupe Fiducial éditeur de logiciels et de solutions informatiques complètes spécialisées à destination notamment du notariat, intéressée par le logiciel « d.poq » présenté par M. [D] au congrès des notaires de septembre 2012, s’est rapprochée de ce dernier avec lequel elle avait fructueusement collaboré pour l’exploitation d’un logiciel « Solon » devenu « FNA » qu’il avait précédemment conçu.
C’est dans ces circonstances qu’ont été conclus le 3 octobre 2013 trois contrats, à savoir :
* un contrat de cession de droits d’auteur par lequel M. [D] a cédé à titre exclusif à la société [F] l’intégralité de ses droits patrimoniaux sur le logiciel « d.poq » dans sa version du 29 juillet 2013, les codes sources étant remis fin octobre 2013 ; la convention stipulant au bénéfice de M. [D] un complément de prix assis sur le chiffre d’affaires généré par la commercialisation du logiciel jusqu’au 31 décembre 2019 ;
* un contrat de cession et d’achat d’actions par lequel la société Fiducial informatique a acquis au prix de 1 500 000 euros l’intégralité des actions de la société [F], stipulant au bénéfice de M. [D] un complément de prix assis sur le chiffre d’affaires réalisé lors de la commercialisation du logiciel jusqu’au 31 décembre 2019 ;
* un contrat d’assistance par lequel M. [D] s’engageait, jusqu’au terme fixé au 30 septembre 2016, à accompagner la société Fiducial informatique dans le développement du logiciel et à collaborer avec la direction commerciale dans le cadre du business développement. Cet accompagnement était assuré par la société IO Concept, antérieurement créée par M. [D] pour effectuer les prestations de services stipulées, la rémunération étant fixée à 600 euros par jour, sans que le total du nombre de jours de prestation dépasse 720, outre une commission de 10 % sur les nouveaux clients apportés.
Estimant le logiciel « d.poq », renommé « [F] ‘ Fiducial » ou «[F] », insatisfaisant et instable, la société Fiducial informatique a décidé, en novembre 2015, d’interrompre sa commercialisation et a notifié à M. [D], par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 mai 2016, la non-prorogation du terme du contrat d’assistance du 3 octobre 2013.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 mai 2016, M. [D], qui alléguait le non-paiement d’une créance totale de 95 040 euros TTC, contestait la rupture de leurs relations contractuelles.
La société Fiducial informatique a réglé en avril 2018 la somme de 16 174 euros de complément de prix au titre du contrat de cession d’actions et la même somme au titre du contrat de cession de droits d’auteur pour la période 2014 à 2017. Elle reprenait ensuite la commercialisation du logiciel modifié alors dénommé « Signature ».
Par jugement rendu le 19 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Nanterre a :
— Rejeté l’action en nullité pour dol et absence de cause de M. [D],
— Déclaré irrecevables les demandes indemnitaires et en résolution du contrat de cession de droits d’auteur présentées par M. [D] contre la société Fiducial Informatique,
— Rejeté l’intégralité des demandes de M. [D] au titre de la résolution du contrat de cession de droits d’auteur, ses prétentions au titre du contrat d’assistance et de prestations de services ainsi que ses demandes fondées sur le contrat de cession d’actions et ses prétentions relatives à son préjudice moral et d’image,
— Rejeté l’intégralité des demandes de la société IO Concept,
— Déclaré irrecevable l’intégralité des demandes de M. [D] au titre de la contrefaçon de ses droitsd’auteur, qu’ils soient ceux concernés par la cession ou ceux qualifiés de « nouveaux »,
— Déclaré irrecevable la demande en paiement présentée par M. [D] « pour le compte » de ses enfants,
— Rejeté la demande reconventionnelle de la société Fiducial informatique et de la société [F],
— Rejeté les demandes des parties en application de l’article 700 du code de procédure civile,
— Condamné in solidum M. [D] et la société IO Concept à supporter les entiers dépens de l’instance,
— Dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire du jugement.
M. [D] et la société IO Concept ont interjeté appel de ce jugement le 20 janvier 2020 à l’encontre de la société Fiducial informatique et de la société [F].
Par ses dernières conclusions notifiées le 11 mars 2022, M. [D] et la société IO Concept demandent à la cour de :
Vu le code de la propriété intellectuelle et notamment ses articles L.111-1, L.112-2, L.112-3, L.113-1, L.113-2, L.113-4, L.122-6, L.122-7, L.131-1, L.131-1-3, L.131-3, L.131-4, L.335-3,
Vu le code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-231 du 10 février 2016 et notamment ses articles 1108, 1131, 1134, 1147, 1153, 1382, 1147,
Vu le code de commerce et notamment son article L.110-3,
Vu le code de procédure civile et notamment ses articles 231, 232, 699 et 700,
Vu la jurisprudence citée et les pièces produites,
— Dire et juger les appelants recevables et bien fondés en leurs demandes,
— Réformer le jugement dont appel en ce qu’il a :
* Rejeté l’action en nullité pour absence de cause de M. [D],
* Rejeté l’intégralité des demandes de M. [D] au titre de la résolution du contrat de cession de droits d’auteur, ses prétentions au titre du contrat d’assistance et de prestations de services ainsi que ses demandes fondées sur le contrat de cession d’actions,
* Rejeté l’intégralité des demandes de la société IO Concept,
* Déclaré irrecevables l’intégralité des demandes de M. [D] au titre de la contrefaçon de ses droitsd’auteur, qu’ils soient ceux concernés par la cession ou ceux qualifiés de « nouveaux »,
* Rejeté la demande de M. [D] et de la société IO Concept au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
* Condamné in solidum M. [D] et la société IO Concept à supporter les entiers dépens de l’instance,
En conséquence et statuant à nouveau :
Sur la cession des droits d’auteur de M. [D] sur le logiciel « d.poq » :
— Déclarer irrecevable la nouvelle prétention des intimées tendant à déclarer irrecevables les demandes de nullité du contrat de cession des droits d’auteur formulées par M. [D] et, en tout état de cause, la Rejeter,
— Dire et juger que la cession des droits patrimoniaux de M. [D] sur le logiciel « d.poq » pour la période postérieure au 31 décembre 2019 au profit de la société [F] est dépourvue de cause,
— Dire et juger que la cession des droits d’adaptation du logiciel « d.poq » devenu « Fiducial [F] » par M. [D] au profit de la société [F] est dépourvue de cause,
En conséquence,
A titre principal :
— Prononcer la nullité du contrat de cession de droits d’auteur conclu entre M. [D] et la société [F],
— Dire et juger que M. [D] retrouve l’entière jouissance et disposition de ses droits d’auteurpatrimoniaux,
et ainsi :
— Ordonner aux intimées de cesser toute utilisation/vente/licence du logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] » et du logiciel « Signature » en ce qu’il incorpore et/ou est une adaptation du logiciel « d.poq »,
— Ordonner aux intimées de supprimer de l’ensemble de leurs solutions, serveurs locaux et/ou distants, ainsi que de leurs postes informatiques ou tout autre support de stockage, le logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] », et toute adaptation du logiciel, y compris du logiciel « Signature » en ce qu’il incorpore et/ou est une adaptation du logiciel « d.poq » ,
— Ordonner aux intimées d’informer M. [D] sur les contrats de services SAAS/de licence, conclus avec des clients finaux et toujours en cours, sur le logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] », et le logiciel « Signature » afin qu’il soit informé des concessions intervenues et pouvoir, le cas échéant, déterminer le sort de ses droits d’auteur, à charge pour les intimées d’en justifier, par écrit, à première demande de M. [D], et le tout à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,
— Condamner la société [F], in solidum avec la société Fiducial Informatique, à payer à M. [D] la somme de 1.700.000 euros, déduction faite, le cas échéant de la somme déjà perçue de 49.453 euros, sauf à parfaire, au titre de l’exploitation des droits patrimoniaux du logiciel entre la conclusion de l’accord de cession de tels droits, c’est-à-dire le 3 octobre 2013, et sa nullité prononcée au jour de l’arrêt à intervenir,
Ou, à défaut :
1. Désigner tel expert qui lui plaira avec pour mission de :
— se faire remettre toutes pièces comptables utiles relatives aux ventes par les Intimées du logiciel « d.poq » et de toute adaptation de celui-ci (dont le logiciel « Signature ») et des services autour dudit logiciel depuis le 3 octobre 2013 [date à laquelle était intervenue la cession des droitsd’auteur de M. [D] au bénéfice de la société [F], ainsi annulée et donc d’exploitation, a minima, du logiciel « d.poq » par les Intimées], tant sur le marché des notaires que sur les autres marchés,
— déterminer en conséquence le préjudice financier subi par M. [D],
— pouvoir, si nécessaire, faire intervenir tout sapiteur de son choix,
Et
2. Condamner la société [F], in solidum avec la société Fiducial Informatique, à verser à M. [D] la somme de 500.000 euros, déduction faite, le cas échéant de la somme déjà perçue de 49.453 euros, sauf à parfaire, à titre de provision, au titre de l’exploitation des droits patrimoniaux du logiciel « d.poq » entre la conclusion de l’accord de cession, le 3 octobre 2013, et sa nullité prononcée au jour de l’arrêt à intervenir.
A titre subsidiaire :
— Prononcer la nullité de la cession par M. [D] au profit de la société [F] de ses droits d’auteurd’exploitation du logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] » suivants :
* tous les droits patrimoniaux cédés pour la période postérieure au 31 décembre 2019,
* le droit d’adaptation : à savoir (i) le droit de modifier, d’améliorer, de traduire et de réécrire dans un autre langage ou d’une autre façon le logiciel, (ii) le droit d’intégrer et d’incorporer dans toute oeuvre actuelle ou future le logiciel,
— Dire et juger que M. [D] retrouve l’entière jouissance et disposition de ses droits patrimoniaux sur le logiciel à compter du 31 décembre 2019,
— Dire et juger que M. [D] retrouve l’entière jouissance et disposition de ses droits d’auteurpatrimoniaux d’adaptation sur le logiciel à compter du 3 octobre 2013,
Et ainsi :
— Ordonner aux Intimées de cesser toute utilisation/vente/licence du logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] » et du logiciel « Signature » en ce qu’il incorpore et/ou est une adaptation du logiciel « d.poq »,
— Ordonner aux Intimées de supprimer de l’ensemble de leurs solutions, serveurs locaux et/ou distants, ainsi que de ses postes informatiques ou tout autre support de stockage, toute adaptation du logiciel, y compris du logiciel « Signature » en ce qu’il incorpore et est une adaptation du logiciel « d.poq »,
— Ordonner aux Intimées d’informer M. [D] sur les contrats de services SAAS/de licence, conclus avec des clients finaux et toujours en cours, sur le logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] » et le logiciel « Signature » afin d’être informé des concessions intervenues et pouvoir, le cas échéant, déterminer le sort de ses droits d’auteur,
à charge pour les Intimées d’en justifier, par écrit, à première demande de M. [D], le tout à compter de la signification de l’arrêt à intervenir.
— Condamner la société [F], in solidum avec la société Fiducial [F], à payer à M. [D] la somme de 700.000 euros, sauf à parfaire, au titre de l’exploitation (i) des droits patrimoniaux sur le logiciel « d.poq », devenue « Fiducial [F]» après le 31 décembre 2019 et jusqu’à la signification de l’arrêt à intervenir (ii) des droits d’adaptation du Logiciel entre la conclusion de l’accord de cession de tels droits, c’est-à-dire le 3 octobre 2013, et à tout le moins le 13 juin 2017, et la signification de l’arrêt à intervenir,
Ou à défaut :
— Désigner tel expert qui lui plaira avec pour mission de :
* Se faire remettre toutes pièces comptables utiles relatives aux ventes par les Intimées du logiciel « d.poq » et de toute adaptation de celui-ci (dont le logiciel « Signature ») et des services autour dudit logiciel depuis le 3 octobre 2013 [date à laquelle était intervenue la cession des droitsd’auteur de M. [D] au bénéfice d'[F], ainsi annulée et donc d’exploitation, a minima, du logiciel « d.poq » par les Intimées], tant sur le marché des notaires que sur les autres marchés,
* Déterminer en conséquence le préjudice financier subi par M. [D],
* Pouvoir, si nécessaire, faire intervenir tout sapiteur de son choix,
Et,
— Condamner la société [F], in solidum avec la société Fiducial Informatique, à verser la somme de 500.000 euros, sauf à parfaire, à titre de provision, à M. [D] au titre de l’exploitation des droits patrimoniaux du logiciel entre le 31 décembre 2019 et le jour de la signification de l’arrêt à intervenir.
— Dire et juger que la société [F] a manqué à ses obligations contractuelles au titre du contrat de cession de droits d’auteur de M. [D] relativement au paiement de ses droits patrimoniaux sur le logiciel « d.poq » entre le 31 décembre 2017 et le 31 décembre 2019 ,
— Condamner la société [F] à payer à M. [D] la somme de 500.000 euros déduction faite, le cas échéant de la somme déjà perçue de 33.009 euros, au titre de l’exploitation du logiciel « d.poq » depuis le 31 décembre 2017 jusqu’au 31 décembre 2019,
Ou à défaut :
— Désigner tel expert qu’il plaira à la cour avec pour mission de :
* Se faire remettre :
° la liste de l’ensemble de des clients des Intimées, sur le marché des notaires et sur les autres marchés, du logiciel « d.poq » en tant que tel et/ou toute adaptation de celui-ci (dont le logiciel « Signature ») logiciel à compter du 31 décembre 2017 jusqu’au 31 décembre 2019 , avec précision (i) de la date d’entrée en relation contractuelle avec chacun d’entre eux (ii) du nombre d’utilisateurs par client et (iii) des redevances facturées d’une part, et encaissées d’autre part, mois par mois pour chaque poste utilisateur, client par client ,
° l’ensemble des éléments permettant de justifier le chiffre d’affaires dégagé par Fiducial informatique et/ou [F] à ce titre en ce compris, l’ensemble des contrats relatifs aux droits d’utilisation du logiciel « d.poq » en tant que tel et/ou toute adaptation de celui-ci (dont le logiciel « Signature ») (contrats de licence applicative, contrats de maintenance, contrats SAAS, d’abonnements avec redevances annuelles correspondant aux droits d’utilisation, d’hébergement des serveurs, d’application smartphone et tablettes), bons de commande associés et factures émises ; communication des grands livres clients de Fiducial informatique et/ou [F], en soulignant la facturation afférente aux contrats/factures établis par Fiducial informatique et/ou [F] pour la fourniture de tels services/licence,
* Déterminer en conséquence le préjudice financier subi par M. [D],
* Pouvoir, si nécessaire, faire intervenir tout sapiteur de son choix,
— Condamner la société [F] à verser à M. [D] la somme de 300.000 euros, sauf à parfaire, déduction faite, le cas échéant de la somme déjà perçue de 33.009 euros, à titre de provision, au titre d’une telle exploitation.
A titre infiniment subsidiaire
— Dire et juger que la société [F] a manqué à ses obligations contractuelles au titre du contrat de cession de droits d’auteur de M. [D] ,
— Condamner la société [F] à payer à M. [D] la somme de 1.000.000 euros déduction faite, le cas échéant de la somme déjà perçue de 33.009 euros, au titre (i) de l’exploitation du logiciel « d.poq » depuis le 31 décembre 2017 jusqu’au 31 décembre 2019 et (ii) au titre de l’exploitation des droits d’adaptation du Logiciel entre la conclusion de l’accord de cession de tels droits, c’est-à-dire le 3 octobre 2013, et à tout le moins le 13 juin 2017, et le 31 décembre 2019,
Ou à défaut :
— Désigner tel expert qui lui plaira avec pour mission de :
* Se faire remettre toutes pièces comptables utiles relatives aux ventes par les Intimées du logiciel « d.poq » et de toute adaptation de celui-ci (dont le logiciel « Signature ») et des services autour dudit logiciel depuis le 3 octobre 2013 date de signature du contrat cession des droits d’auteurjusqu’au 31 décembre 2019, tant sur le marché des notaires que sur les autres marchés et ,
* Déterminer en conséquence le préjudice financier subi par M. [D],
* Pouvoir, si nécessaire, faire intervenir tout sapiteur de son choix,
Et,
— Condamner la société [F] à verser à M. [D] la somme de 500.000 euros, sauf à parfaire, déduction faite, le cas échéant de la somme déjà perçue de 33.009 euros, à titre de provision, au titre de telles exploitations.
Sur les droits d’auteur de M. [D] relativement aux nouveaux développements :
Si la Cour l’estime nécessaire et/ou utile compte tenu de la technicité du débat,
— Ordonner une enquête sur le champ en entendant à la barre M. [K] relativement à son analyse des éléments du matériel de conception préparatoire de M. [D] portant sur les nouveaux développements,
— Rejeter la demande des intimées visant à prononcer la nullité du procès-verbal de constat du 18 mars 2020 et le rejet des débats de la pièce n° 108,
— Dire et juger que M. [D] est titulaire des droits d’auteur sur le matériel de conception préparatoire relativement aux nouveaux développements du logiciel « d.poq » devenu « Fiducial [F] » puis « Signature »,
— Dire et juger qu’aucune cession des droits d’auteur de M. [D] sur ce matériel de conception préparatoire n’est intervenue au profit de la société Fiducial Informatique,
— Dire et juger que M. [D] n’a perçu aucune rémunération en contrepartie de la détention et l’utilisation de ce matériel de conception préparatoire par la société Fiducial Informatique,
En conséquence,
— Dire et juger que la société Fiducial informatique a commis des actes de contrefaçon en détenant et utilisant ce matériel de conception préparatoire, notamment dans le cadre du logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] », le logiciel « Signature », sans droit ni titre, ni bourse délier,
— Condamner la société Fiducial informatique à cesser toute utilisation du matériel de conception préparatoire des nouveaux développements mis au point par M. [D], y compris, du logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] », et du logiciel « Signature » en ce qu’ils incorporent/implémentent ces travaux de conception, et ce, sous astreinte de 20.000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,
— Condamner la société Fiducial informatique à payer à M. [D] la somme de 800.000 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts pour contrefaçon de ses droits d’auteur sur les nouveaux développements du logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] », puis « Signature»,
Sur le paiement des prestations de services de la société IO Concept :
— Dire et juger que la société IO Concept est bien fondée à demander la condamnation de la société Fiducial informatique au paiement de la somme de 95.040 euros ,
— Condamner la société Fiducial informatique à payer à la société IO Concept la somme de 95.040 euros, augmentée des intérêts de retard égaux à trois fois le taux d’intérêt légal en vigueur :
* pour les factures de mars 2016 et d’avril 2016, à compter du 20 avril 2016, date du premier courrier de mise en demeure relativement au paiement de ces factures ,
* pour la facture de mai 2016, à compter du 27 juin 2016, date du premier courrier de mise en demeure relativement au paiement de cette facture ;
* pour les factures de juin 2016 à septembre 2016, à compter du 17 janvier 2017, date à laquelle la société IO Concept est intervenue à l’action en paiement des factures initiée par l’assignation du 21 juillet 2016.
— Confirmer le jugement en ce qu’il a :
* Rejeté la demande reconventionnelle des sociétés Fiducial informatique et [F],
En tout état de cause,
— Rejeter toutes les demandes de la société Fiducial informatique et de la société [F],
— Condamner in solidum la société Fiducial informatique et la société [F] au paiement de la somme de 30.000 euros à chacun des appelants au titre de l’article 700 du code de procédure civile distraction au profit de Mme [R], ès qualités, avocat conformément à l’article 699 du code de procédure civile,
— Rejeter toute demande contraire,
Par dernières conclusions notifiées le 3 juin 2022, la société Fiducial informatique et la société [F] demandent à la cour de :
Vu les articles L.131-3, L.131-4 et L.132-5 du Code de la Propriété Intellectuelle,
Vu les articles 1116, 1131 et 1315 du code civil,
— Confirmer le jugement en ce qu’il a :
* Rejeté l’action en nullité du contrat de cession de droits d’auteur pour absence de cause de M. [D],
* Rejeté les demandes indemnitaires de M. [D] au titre de la résolution du contrat de cession de droits d’auteur, ainsi que ses prétentions au titre du contrat d’assistance et de prestations de service,
* Déclaré irrecevables l’intégralité des demandes de M. [D] au titre de la contrefaçon de droitsd’auteur, qu’ils soient ceux concernés par la cession ou ceux qualifiés de « nouveaux »,
* Rejeté l’intégralité des demandes de la société IO Concept,
* Rejeté la demande de M. [D] et de la société IO Concept au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
* Condamné in solidum M. [D] et la société IO Concept à supporter les entiers dépens de l’instance,
— Infirmer le jugement en ce qu’il a :
* Rejeté la demande reconventionnelle de la société Fiducial informatique et la société [F],
En conséquence, et statuant à nouveau :
A titre principal,
— Dire et juger que l’article 3 « Rémunération de la cession des droits patrimoniaux d’auteur» du contrat de cession de droits d’auteur du 3 octobre 2013 est conforme aux prescriptions des articles L.131-4 et L.132-5 du code de la propriété intellectuelle,
— Dire et juger que le contrat de cession de droits d’auteur du 3 octobre 2013 a été valablement formé et n’encourt pas la nullité pour défaut de cause,
— Rejeter les demandes indemnitaires et d’interdiction de M. [D] au titre de la contrefaçon,
— Dire que la société [F] a respecté ses obligations contractuelles en versant les compléments de prix relatifs à la phase de tests du logiciel dans certaines études de notaires,
— Prononcer la nullité du procès-verbal de constat du 18 mars 2020 à raison du défaut d’intégrité des éléments constatés par l’huissier instrumentaire,
— Dire et juger que M. [D] ne rapporte pas la preuve de droits d’auteurs ouvrant droit à rémunération puisqu’il ne rapporte la preuve ni de l’existence, ni de l’originalité, ni de la titularité, ni que le matériel de conception préparatoire dont il se prétend l’auteur soit de nature à permettre la réalisation d’un programme d’ordinateur à un stade ultérieur,
— Rejeter les demandes de M. [D] de condamnation de la société Fiducial informatique au paiement de la somme 800.000 euros à titre de dommages et intérêts du fait de la prétendue contrefaçon de ses droits d’auteur sur les nouveaux développements allégués,
— Rejeter les demandes d’interdiction formulées par M. [D] au titre de la contrefaçon, – Dire que M. [D] ne rapporte pas la preuve de l’exécution des prestations de services afférentes au contrat passé le 3 octobre 2013,
— Rejeter la demande de M. [D] de condamnation de la société Fiducial informatique au paiement de la somme de 95.040 euros augmentée des intérêts de retard égaux à trois fois le taux d’intérêt légal en vigueur, au titre des prétendues prestations de service,
Subsidiairement,
— Dire et juger que la cession des droits patrimoniaux de M. [D] sur le logiciel « d.poq » pour la période postérieure au 31 décembre 2019 au profit de la société [F] n’était pas dépourvue de cause,
— Dire et juger que la cession des droits d’adaptation du logiciel « d.poq » par M. [D] au profit de la société [F] n’était pas dépourvue de cause,
— Rejeter les demandes indemnitaires et d’interdiction de M. [D] au titre de la contrefaçon,
Très subsidiairement,
— Rejeter les demandes de M. [D] de condamnation de la société [F] au paiement de compléments de prix au titre de l’exploitation du logiciel « d.poq » entre le 31 décembre 2017 et le 31 décembre 2019 et au titre de l’exploitation des droits d’adaptation du logiciel entre le 3 octobre 2013, date de la conclusion du contrat de cession de droits d’auteur, et le 31 décembre 2019,
— Rejeter les demandes indemnitaires et d’interdiction de M. [D] au titre de la contrefaçon,
En tout état de cause,
— Condamner M. [D] et la société IO Concept au paiement de la somme de 30.000 euros à chacune des intimées au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 30 juin 2022.
SUR CE LA COUR,
A titre liminaire,
La cour rappelle que l’article 954 du code de procédure civile oblige les parties à énoncer leurs prétentions dans le dispositif de leurs conclusions et que la cour ne statue que sur celles-ci. Par prétention, il faut entendre une demande en justice tendant à ce qu’il soit tranché un point litigieux. Par voie de conséquence, les ‘dire et juger’ et les ‘constater’ ne constituent pas des prétentions, mais en réalité des moyens. La cour ne répondra de ce fait à de tels ‘dire et juger’ et ‘constater’ qu’à condition qu’ils viennent au soutien de la prétention formulée en appel et énoncée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans le dispositif de son arrêt, mais dans ses motifs.
En outre, ce même article 954 du code de procédure civile précise que la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées de sorte que c’est de manière inopérante que les appelants font état des conclusions précédant celles numéro 4 des intimées.
Sur les limites de l’appel,
M. [D] et la société IO Concept poursuivent l’infirmation du jugement en toutes ses dispositions qui leur sont défavorables.
La société Fiducial informatique et la société [F] poursuivent l’infirmation du jugement en ses dispositions qui rejettent leur demande reconventionnelle.
En définitive, il résulte des écritures ci-dessus visées que le débat en cause d’appel se présente dans les mêmes termes qu’en première instance, chacune des parties maintenant ses prétentions telles que soutenues devant les premiers juges.
Il sera cependant observé que les parties invoquent des moyens nouveaux et/ou renoncent à certaines des moyens développés en première instance. Ainsi, M. [D] ne soutient plus avoir été victime d’un dol au titre du contrat de cession de droits d’auteur et les intimées soulèvent l’irrecevabilité des demandes de M. [D] à ce titre (absence de preuve de sa titularité sur le logiciel) et leur débouté (absence d’originalité de ce logiciel).
Sur le contrat de cession de droits d’auteur
— Irrecevabilité ou caractère infondé des demandes de M. [D]
‘ Moyens des parties
Se fondant sur les dispositions des articles L.112-1 du code de la propriété intellectuelle, 6 du code de procédure civile, 1315 du code civil, la jurisprudence de la Cour de cassation (Ass. plén., 7 mars 1986, pourvoi n° 83-10.477, Bull. 1986 AP n° 3 P 5 ; 1re Civ., 17 octobre 2012, pourvoi n° 11-21.641), l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) du 2 mai 2012, C-406/10, SAS Institute Inc. contre World Programming Ltd, la directive 91/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991, concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur (JO L 122, p. 42), les intimées soutiennent que M. [D] est irrecevable et, en tout état de cause, mal fondé en ses demandes portant sur les droits d’auteur faute pour lui de rapporter la preuve de l’existence de tels droits ouvrant droit à rémunération puisqu’il ne démontre pas l’originalité et la titularité, ni même que le matériel de conception préparatoire dont il se prétend l’auteur soit de nature à permettre la réalisation d’un programme d’ordinateur à un stade ultérieur.
Ainsi, selon les intimées, M. [D] ne saurait être accueilli en sa demande de nullité d’un contrat de cession de droits d’auteur sur une oeuvre non caractérisée et dont l’éligibilité à la protection par le droit d’auteur n’a pas été démontrée.
En réplique à la défense de leur adversaire, elles ajoutent qu’il ne s’agit pas là d’une demande nouvelle, mais d’un moyen de défense nouveau, recevable en tout état de cause ; qu’il n’est pas plus contrevenu au principe de concentration des moyens puisque ce nouveau moyen a été invoqué au cours de cette même instance (Ass. plén., 7 juillet 2006, pourvoi n° 04-10.672, Ass. Plén. 7 juillet 2006, Bull. 2006, Ass. Plén., n° 8). Enfin, les intimées rappellent que le principe de l’estoppel n’est pas plus violé dès lors que leur adversaire peine à démontrer l’existence de leur part d’un comportement procédural constitutif d’un changement de position de nature à induire l’adversaire en erreur sur ses intentions (1re Civ., 3 février 2010, pourvoi n° 08-21.288, Bull. 2010, I, n° 25) ou encore qu’il ait été porté atteinte au principe d’interdiction de se contredire au détriment d’autrui au regard d’une obligation de loyauté processuelle (Com., 20 septembre 2011, pourvoi n° 10-22.888, Bull. 2011, IV, n° 132).
Elles soulignent que ces moyens nouveaux développés à hauteur d’appel concourent aux mêmes objectifs qu’elles ont énoncés dès la première instance, à savoir obtenir que les demandes adverses soient écartées.
M. [D] rétorque que la prétention nouvelle en appel des intimées tendant à voir déclarer irrecevables ses demandes de nullité de la cession de ses droits d’auteur sur le logiciel ‘d.poq’ pour ‘absence de démonstration de droits d’auteur sur le logiciel objet du contrat de cession’ est irrecevable en cause d’appel au regard des dispositions des articles 564 et suivants du code de procédure civile, en particulier parce qu’elle ne ferait pas suite à des questions nées de l’intervention d’un tiers ou à la survenance ou la révélation d’un fait postérieurement aux premières conclusions des intimées.
Il ajoute que remettre en cause le fait que ce logiciel ‘d.poq’ soit protégeable au titre du droit de la propriété intellectuelle entre en contradiction avec la position jusqu’alors soutenu par les intimées. Il fait ainsi valoir que cette nouvelle question soulevée par les intimées se heurte en réalité à l’interdiction de l’estoppel en ce qu’il ne peut sérieusement être soutenu, dans le même temps, que l’appelant ne démontrerait pas que ce logiciel serait éligible à la protection conférée aux auteurs par le code de la propriété intellectuelle, tout en prétendant qu’il convient de confirmer le jugement en ce qu’il retient que le contrat de cession de droit d’auteur portant sur le logiciel litigieux a été valablement formé.
Plus encore, M. [D] souligne que ses adversaires ont admis à plusieurs reprises l’existence de droits d’auteur sur le logiciel, reconnaissance qui s’est notamment matérialisée par la conclusion de cet accord portant précisément sur la cession de ces droits. Il rappelle que dans pareille hypothèse, la jurisprudence considère que l’oeuvre bénéficie d’une présomption d’originalité.
‘ Appréciation de la cour
Contrairement à ce que soutient M. [D], les intimées ne forment pas des demandes nouvelles, mais des moyens nouveaux qui, en principe, sont recevables à hauteur d’appel.
En revanche, c’est à bon droit que l’appelant rappelle que les contrats doivent être exécutés de bonne foi et que ses adversaires ne peuvent, sans se contredire à son détriment et ainsi rompre le principe de loyauté des débats et de bonne foi, solliciter en même temps la confirmation du jugement en ce qu’il rejette sa prétention tendant à obtenir l’annulation du contrat de cession de droits d’auteur litigieux, reconnaissant ainsi l’originalité de l’oeuvre ainsi que sa titularité sur celle-ci, et exiger de lui qu’il démontre l’existence de droits qu’elles ont admis et qu’elles continuent d’admettre.
En outre, c’est tout aussi exactement que M. [D] soutient qu’en raison de la reconnaissance de l’existence de droits de propriété intellectuelle sur le logiciel ‘d.poq’ par la société [F] dans l’acte de cession d’actions intervenu entre la société [F] et la société Fiducial informatique, les intimées, l’oeuvre bénéficie dès lors d’une présomption d’originalité qu’il reviendra à ses adversaires de combattre. En l’espèce, force est de constater que non seulement ce n’est pas le cas, mais encore les intimées ne sollicitent pas l’annulation du contrat de cession de droits d’auteur, au contraire elles en revendiquent l’application.
Il s’ensuit que les moyens soulevés par les intimées tirés de l’absence de démonstration préalable par M. [D] de l’existence de l’originalité du logiciel ‘d.poq’ et de son statut d’auteur de cette oeuvre de l’esprit sont dès lors irrecevables.
— Nullité du contrat pour absence de cause
‘ Moyens des parties
Selon M. [D], la cession des droits patrimoniaux sur le logiciel ‘d.poq’ pour la période postérieure au 31 décembre 2019 serait dépourvue de cause. Il invoque différentes jurisprudences de la Cour de cassation qui rappellent systématiquement que lorsqu’une obligation est dépourvue d’objet, ou bien lorsqu’elle est souscrite en échange d’une contrepartie dérisoire ou illusoire, l’obligation du contractant est nulle car dépourvue de cause.
Il fait valoir que s’agissant des cessions de droits incorporels, la Cour de cassation juge que le contrat est nul car dépourvu de cause en l’absence de toute contrepartie réelle, en l’occurrence si les droits cédés sont dénués de toute valeur sérieuse (1re Civ., 15 juin 1994, pourvoi n° 92-15.174, Bulletin 1994 I N° 215).
Selon lui, si l’auteur d’une oeuvre de l’esprit peut céder librement ses droits patrimoniaux à des tiers, à titre gratuit ou onéreux, conformément aux dispositions de l’article L.122-7 du code de la propriété intellectuelle, l’exploitation d’une telle oeuvre suppose obligatoirement la conclusion d’un acte de cession de droits d’exploitation conforme aux dispositions des articles L.131-3 et L.131-4, alinéa 1er, du code de procédure civile. Il soutient que les juridictions prononcent systématiquement la nullité de la clause de rémunération proportionnelle d’un contrat de cession de droits d’auteur lorsqu’elle n’est pas basée sur le prix de vente/d’exploitation de l’oeuvre, mais également lorsqu’elle aménage cette assiette de rémunération au-delà de la simple fixation du taux de participation proportionnelle lequel taux ne peut être ‘nul’ (1re Civ., 26 janvier 1994, pourvoi n° 92-11.691, Bulletin 1994 I N° 34).
Il ajoute que ce n’est que dans certaines hypothèses limitativement énumérées par l’alinéa 2 de l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle que, par exception, une rémunération forfaitaire est possible, en particulier en cas de cession des droits portant sur un logiciel (5° de cet article).
Reprenant les dispositions des articles L.113-2 du code de la propriété intellectuelle, 2.3 ‘Oeuvres dérivées’ de la convention de Berne du 9 septembre 1886, modifiée le 28 septembre 1979, L.113-4, L.112-3 du code de la propriété intellectuelle, M. [D] prétend que l’oeuvre première ne peut être incorporée sans l’accord préalable de son auteur, qu’il revient à cet auteur de déterminer contractuellement le cadre de l’autorisation donnée quant à son étendue, au lieu, à la durée et à la destination ; que l’auteur de l’oeuvre composite ne peut pas exploiter celle-ci au-delà du terme consenti par l’auteur de l’oeuvre première lors de la cession des droits d’adaptation ; que l’auteur de l’oeuvre première a droit à une rémunération proportionnelle sur les recettes de l’oeuvre composite ; que les adaptations d’une oeuvre se font sans préjudice des droits de l’auteur de l’oeuvre première, en ce compris son droit à rémunération pour l’exploitation de son oeuvre adaptée.
En l’espèce, selon lui, il résulte des articles 2, 3.1, 3.2 du contrat de cession de droits d’auteurconclu entre lui et la société [F] (pièces 4.1 à 4.3) que la clause de rémunération ainsi stipulée, basée sur un chiffre d’affaires et assortie d’un seuil maximal de rémunération, n’est pas conforme aux dispositions de l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle, et, en tout état de cause, revient à exclure de la rémunération proportionnelle les exploitations du logiciel ‘d.poq’ postérieures au 31 décembre 2019. Il en conclut que ces stipulations, illicites, caractérisent une absence de cause de la cession de ses droits patrimoniaux sur ce logiciel pour la période postérieure au 31 décembre 2019. De plus, en ne prévoyant pas une rémunération proportionnelle des droits d’auteur sur le logiciel litigieux cédés par lui pendant toute la durée de la cession, celle-ci l’a été en échange d’une contrepartie dérisoire. Il ajoute que le caractère dérisoire de cette rémunération est d’autant plus manifeste qu’aucune obligation d’exploitation de l’oeuvre de la part de la société [F] n’est prévue au contrat de cession de droits d’auteur de sorte que cette dernière avait toute latitude pour ne pas favoriser les ventes avant l’année 2020 rendant ainsi le paiement de redevances de ses droits d’auteur conditionnel et ce sans précision claire que toutes les exploitations postérieures au 31 décembre 2019 seraient gratuites.
Il réplique aux conclusions des intimées sur ce point que :
* même si les droits portent sur un logiciel, l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle n’impose pas le régime de la rémunération forfaitaire ; or, en l’espèce, selon lui, les contractants ont opté pour la rémunération proportionnelle comme les termes du contrat le prévoient expressément (articles 3.1 et 3.2 du contrat de cession des droits d’auteur, pièces 4.1 à 4.3) et comme le reconnaît la société [F] dans ses écritures ;
* aucun système de complément de prix n’a été prévu, aucun paiement d’un prix principal de sorte que l’argument selon lequel il s’agirait ‘très classiquement d’une clause de complément de prix, la cession des droits sur le logiciel s’inscrivant dans le cadre d’un ensemble contractuel lié à la cession des titres de la société [F] par M. [D] et ses associés est dénué de toute pertinence. Il ajoute que le contrat de cession d’actions concerne les rapports entre la société [F] d’une part et la société Fiducial informatique d’autre part et que ce contrat ne prévoit aucune rémunération des droits d’auteur à son profit ;
* la clause de rémunération revient sans conteste à une partie gratuite du paiement des droitsd’auteur sans qu’il y ait expressément consenti ;
* le fait qu’il ait été actionnaire et président de la société [F] à l’époque de la cession de ses droits n’est pas opérant pour l’appréciation de ses droits en tant qu’auteur du logiciel ‘d.poq’ dans la mesure où il se borne à dénoncer une situation qui lui cause, en tant qu’auteur et à titre personnel, un préjudice.
Il déduit de l’ensemble de ces développements que la cour ne pourra que constater l’absence de cause de la cession de ses droits patrimoniaux sur le logiciel ‘d.poq’ pour la période postérieure au 31 décembre 2019 en ce que cette cession de droits patrimoniaux sur ce logiciel a été consentie sans contrepartie ou, à tout le moins avec une contrepartie dérisoire.
M. [D] fait en outre valoir que le contrat de cession de droits d’adaptation sur le logiciel ‘d.poq’ est également dépourvu de cause. Il soutient que le logiciel ‘signature’ est bien une oeuvre composite, dérivée du logiciel ‘d.poq’ et, contrairement à ce qu’affirment ses adversaires, qu’il ne s’agit pas de mises à jour et autres modifications d’un logiciel préexistant de sorte que ‘signature’ ne serait pas une oeuvre composite.
Il insiste sur le fait que le logiciel ‘signature’ ne saurait être considéré comme le logiciel ‘d.poq’ comportant de simples corrections ou adaptations pour en faciliter l’utilisation au logiciel ‘d.poq’ cédé par lui. A cet égard, il rappelle que le logiciel ‘d.poq’, objet du contrat de cession des droitsd’auteur, était ‘en cours de développement’ (pièce 5.2) comme le confirment les écritures de la société [F] (pages 7 à 10 des écritures n° 3 des intimées) ; que le logiciel ‘signature’ intègre des travaux de développements mis au point sur la base de ses travaux de conception, développements consistant notamment en de nouvelles fonctionnalités, des adaptations à un nouvel environnement (web) et ainsi à la réécritures, incorporées ici par référence ; qu’ainsi la mise au point d’une nouvelle version dénommée dans un premier temps ‘Fiducial [F]’ et d’une autre devenue ‘Signature’, ce qui justifie du reste, selon lui, le changement de nom qui caractérise l’existence d’une oeuvre composite et pas seulement la simple correction d’anomalies. Il ajoute que la vidéo de lancement du logiciel ‘signature’ diffusée sur le site Fiducial, enseigne que ce logiciel est intégré à un nouvel environnement baptisé ‘écosystème’ permettant d’intégrer d’autres logiciels à la rédaction d’actes ; qu’une poursuite des connexions avec d’autres partenaires est possible.
Selon M. [D], il ressort de ces éléments que le logiciel ‘d.poq’ a nécessairement été adapté à un nouvel environnement conduisant ainsi à sa réécriture, même partielle, de sorte que l’absence de clause de rémunération au titre de l’exploitation d’une oeuvre composite, dérivée intégrant le logiciel ‘d.poq’ ou, à tout le moins, de l’exploitation du logiciel ‘d.poq’ sous une forme adaptée encourt l’annulation.
Il s’ensuit, selon lui, qu’en l’absence d’une clause de rémunération relative à un tel mode d’exploitation de l’oeuvre en tant qu’oeuvre première intégrée (en tout ou en partie) dans l’oeuvre composite ou dérivée, pas plus que des exploitations secondaires après adaptations ou modifications du logiciel (voir les articles 2 et 3.1 du contrat de cession de droits d’auteur), sans que le contrat mentionne de façon claire et non ambiguë, la gratuité en pareille hypothèse, la cession des droits d’adaptation du logiciel n’est dès lors pas conforme aux prescriptions légales et d’ordre public de l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle et la jurisprudence associée. En outre, selon lui, en ne prévoyant pas une rémunération au titre de la cession des droits d’adaptation sur le logiciel ‘d.poq’ dans le cas d’une exploitation d’une adaptation de ce logiciel et/ou d’une oeuvre composite ou dérivée, la cession ainsi consentie par l’auteur l’a été en l’absence de toute contrepartie, à tout le moins, en échange d’une contrepartie illusoire puisque seule la rémunération proportionnelle résultant de l’exploitation du logiciel en tant que tel était prévue.
Pour toutes ces raisons, M. [D] invite la cour à constater que la cession de ses droits d’adaptation du logiciel ‘d.poq’ a été souscrite de façon non conforme aux dispositions de l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle et en échange d’une contrepartie non réelle, dénuée de toute valeur, et, à tout le moins, illusoire. Par voie de conséquence, il demande à la cour de juger que la cession des droits d’adaptation sur le logiciel est dépourvue de cause.
S’agissant des conséquences de l’absence de cause, M. [D] fait valoir qu’il n’aurait jamais conclu le contrat de cession de ses droits d’auteur sans une clause de rémunération de ses droits patrimoniaux proportionnée à la durée de la cession, ni une clause de rémunération sur les droits d’adaptation constituant, à l’évidence, la cause impulsive et déterminante de son engagement, un logiciel ayant vocation à évoluer, à être adapté, en particulier le logiciel ‘d.poq’ en cours de développement au moment de la cession et être exploité au fil du temps.
Il demande donc à la cour de :
* prononcer la nullité du contrat de cession de droits d’auteur conclu entre lui et la société [F] en raison de l’absence de cause de la cession de ses droits patrimoniaux pour la période postérieure au 31 décembre 2019 et celle, en particulier, de ses droits d’adaptation sur le logiciel parce que, sans une clause de rémunération associée, les parties n’auraient pas contracté ;
* dire que cette nullité emporte l’anéantissement rétroactif de ce contrat et pour l’avenir, de sorte qu’il retrouvera l’entière maîtrise de ses droits d’auteur sur le logiciel «d.poq », objets du contrat de cession de droits d’auteur ;
* dire qu’il retrouve l’entière jouissance et disposition de ses droits d’auteur patrimoniaux sur le logiciel ce qui implique de :
— ordonner à la société [F] et à la société Fiducial informatique qui commercialise également le logiciel et ses adaptations dont « Signature », de cesser toute utilisation/vente/licence du logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] », et du logiciel « Signature » en ce qu’il incorpore et/ou est une adaptation du logiciel «d.poq» ;
— ordonner aux intimées de supprimer de l’ensemble de leurs solutions, serveurs locaux et/ou distants, ainsi que de leurs postes informatiques ou tout autre support de stockage, le logiciel « d.poq » devenu « Fiducial [F] » et toute adaptation du logiciel, y compris du logiciel « Signature » en ce qu’il incorpore et/ou est une adaptation du logiciel « d.poq »;
— ordonner aux intimées de l’informer sur les contrats de services SAAS/de licence, conclus avec des clients finaux et toujours en cours, sur le logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] » et le logiciel « Signature » afin d’être informé des concessions intervenues et pouvoir, le cas échéant, déterminer le sort de ses droits d’auteur ;
— en justifier, par écrit, à première demande de sa part, le tout à compter de la signification de l’arrêt à intervenir.
La société [F] et la société Fiducial informatique sollicitent la confirmation du jugement qui rejette les demandes de leurs adversaires et observent que nouvellement en appel, M. [D] fait valoir que la clause de rémunération de la cession des droits d’auteurs serait dénuée de cause ce qui entraînerait la nullité du contrat de cession des droits d’auteur qu’il a pourtant librement consenti à la société [F] dont il était le président, tout en se gardant de solliciter la nullité par voie de conséquence du contrat de cession et d’achat d’actions par lequel la société Fiducial informatique a acquis au prix de 1 500 000 euros l’intégralité des actions de la société [F], stipulant au bénéfice de M. [D] un complément de prix assis sur le chiffre d’affaires réalisé lors de la commercialisation du logiciel jusqu’au 31 décembre 2019.
Elles ajoutent que, en tout état de cause, la clause de prix du contrat de cession de droits d’auteurest licite et répond aux exigences de l’article L.131-4 du code de procédure civile puisqu’elle prévoit une rémunération proportionnelle assise sur un chiffre d’affaires réalisé sur une période de référence dans la limite d’un plafond forfaitaire. Selon elles, une telle stipulation d’une rémunération d’une somme forfaitaire maximale de 1 200 000 euros hors taxes satisfait aux exigences de l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle.
Elles rappellent qu’aucune disposition légale n’interdit la combinaison d’une rémunération des droits assise sur une part proportionnelle et une part forfaitaire comme c’est bien le cas dans le contrat en cause qui prévoit une rémunération proportionnelle assise sur un chiffre d’affaires réalisé sur une période de référence, dans la limite d’un plafond forfaitaire. Elles soutiennent que M. [D] ne peut sérieusement prétendre qu’aucune rémunération n’aurait été prévue pour l’exploitation du logiciel pour la période postérieure au 31 décembre 2019 alors même que le contrat prévoit explicitement une rémunération forfaitaire.
S’agissant des griefs de M. [D] au titre de la cession des droits d’adaptation, les intimées prétendent d’abord que leur adversaire soutient, sans le démontrer, que le logiciel ‘signature’ constitue une oeuvre composite, au sens de l’article L.113-2 du code de la propriété intellectuelle. Selon elles, ‘Signature’ n’est qu’une évolution, au gré des versions successives, de la première solution ‘d.poq’ pour laquelle le contrat prévoit une rémunération proportionnelle de M. [D] au titre de l’exploitation du logiciel.
En tout état de cause, elles rappellent que M. [D] a également cédé le droit d’adaptation du logiciel ‘d.poq’ (article 2) en contrepartie de la rémunération proportionnelle prévue à l’article 3 du contrat de cession assise sur les recettes d’exploitation tirées de la vente du logiciel.
‘ Appréciation de la cour
L’article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que l’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.
La cause de l’obligation et la cause du contrat sont à distinguer ; la première s’attache à vérifier l’existence de la cause entendue comme le but immédiat qui a déterminé le contractant à s’obliger ; la seconde constitue le mobile déterminant.
L’absence de cause résulte de l’absence de la contrepartie attendue du contrat sans qu’il soit fait référence aux motifs pour lesquels une partie s’est engagée. L’absence de cause peut également résulter d’une obligation souscrite en échange d’une contrepartie dérisoire ou illusoire (3e Civ., 14 février 2019, pourvoi n° 17-30.942).
Dans les contrats synallagmatiques, la cause de l’obligation d’une partie réside dans l’obligation contractée par l’autre (1re Civ., 25 mai 1988, pourvoi n° 86-15.683, Bulletin 1988 I N° 149 ; Com., 9 juin 2009, pourvoi n° 08-11.420). Il en résulte que l’obligation perd sa cause lorsque la contrepartie fait défaut de sorte qu’un tel contrat encourt l’annulation.
Un contrat est encore dépourvu de cause lorsque le mobile pour lequel une partie a contracté s’avère impossible dès l’origine, à condition qu’il soit entré dans le champ contractuel (1re Civ., 3 juillet 1996, pourvoi n° 94-14.800, Bulletin 1996, I, n° 286 ; 3e Civ., 15 décembre 1999, pourvoi n° 96-19.203 ; Com., 27 mars 2007, pourvoi n° 06-10.452).
La nullité du contrat est également encourue pour absence de cause lorsque le contrat ne prévoit aucune contrepartie à l’engagement d’une partie (Civ. 3ème 3 mars 1993, Bull 28, pourvoi 91-15.613 ; Civ. 1ère 4 juillet 1995, Bull 303, pourvoi 93-16.198) ou une contrepartie dérisoire.
Cependant, lorsque le contrat de cession s’inscrit dans le cadre d’une opération économique constituant un ensemble contractuel indivisible propre à lui conférer une contrepartie réelle et sérieuse, une telle cession de droits d’auteur, serait-elle intervenue pour un franc symbolique, ne caractériserait par l’absence de contrepartie de nature à retenir l’absence de cause du contrat de cession (1re Civ., 13 juin 2006, pourvoi n° 04-15.456, Bull. 2006, I, n° 306 Publication : Bull. 2006, I, n° 306).
L’existence de la cause de l’obligation s’apprécie au moment de la conclusion du contrat, à la date où elle est souscrite ( 3e Civ., 8 mai 1974, pourvoi n° 73-10.820, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 3 N 188 P141 ; 3e Civ., 17 juillet 1996, pourvoi n° 93-19.432, Bulletin 1996, III, n° 193 ; 1re Civ., 13 juin 2006, pourvoi n° 04-15.456, Bull. 2006, I, n° 306 ; 1re Civ., 3 avril 2007, pourvoi n° 05-11.405, Bull. 2007, I, n° 139).
Conformément aux dispositions de l’article L.122-7 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une oeuvre de l’esprit peut librement céder ses droits patrimoniaux à titre onéreux ou à titre gratuit ; cependant, l’exploitation d’une telle oeuvre suppose obligatoirement la conclusion d’un acte de cession de droits d’exploitation conforme aux dispositions du code de la propriété intellectuelle entre le cessionnaire et l’auteur.
L’article L.112-2, 13°, du code de la propriété intellectuelle dispose que les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire, sont considérés comme des oeuvres de l’esprit.
L’auteur d’un logiciel ne peut pas être une personne morale (1re Civ., 15 janvier 2015, pourvoi n° 13-23.566, Bull. 2015, I, n° 11).
L’article 2.1 de la directive 2009/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur (JOUE du 5 mai 2009 L.111/16) prévoit expressément que ‘ l’auteur d’un programme d’ordinateur est la personne physique ou le groupe de personnes physiques ayant créé le programme, ou, lorsque la législation de l’État membre concerné l’autorise, la personne morale considérée par cette législation comme étant le titulaire du droit’.
Selon l’article L.131-3, alinéa 1er, du même code, la transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.
L’article L.131-4, alinéas 1er et 5, du même code précise ce qui suit :
‘La cession par l’auteur de ses droits sur son oeuvre peut être totale ou partielle. Elle doit comporter au profit de l’auteur la participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l’exploitation.
Toutefois, la rémunération de l’auteur peut être évaluée forfaitairement dans les cas suivants :
…
5° En cas de cession des droits portant sur un logiciel’.
Selon l’article L.113-2, alinéa 2, du code de la propriété intellectuelle, ‘Est dite composite l’oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière.’
L’article 2.3 de la Convention de Berne du 9 septembre 1886 modifiée le 28 septembre 1979 stipule que ‘sont protégés comme des ‘uvres originales, sans préjudice des droits de l’auteur de l”uvre originale, les traductions, adaptations, arrangements de musique et autres transformations d’une ‘uvre littéraire ou artistique.’
L’article L.113-4 du code de la propriété intellectuelle dispose que ‘L’oeuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’oeuvre préexistante.’
Les versions successives d’un logiciel ne constituent pas une oeuvre composite.
L’article 2 du contrat de cession conclu entre M. [D] et la société [F], consacré à la description des droits de propriété intellectuelle cédés, stipule ce qui suit :
‘Les titres et droits de propriété intellectuelle (à savoir les droits patrimoniaux d’auteur)
afférents au Logiciel et cédés en vertu du présent Accord par M. [D] à la société [F], comprennent de façon non limitative les droits suivants :
— Le droit de reproduction :
à savoir, notamment, le droit de précéder à toute reproduction nécessaire aux actes de chargement, affichage sur écran, exécution, transmission, stockage, le droit de reproduire ou de faire reproduire le Logiciel par tous moyens, sous toutes formes et sur tous supports, notamment informatiques (disquettes, CD-Rom. DVD Rom, disques durs), papier (documentation technique) ou sur tout autre support. en un nombre d’exemplaires illimité, par tout moyen présent et à venir, ou sur tous réseaux analogiques ou numériques, privatifs ou ouverts au public (Internet, Intranet), nationaux et/ou internationaux ;
— Le droit d’adaptation :
à savoir (i) le droit de modifier, d’améliorer, de traduire et de réécrire dans un autre langage ou d’une autre façon le Logiciel. (ii) le droit d’intégrer et d’incorporer dans toute oeuvre actuelle ou future le Logiciel ;
— Le droit de représentation :
à savoir, notamment, le droit de représenter ou faire représenter publiquement le Logiciel ou toute oeuvre dérivée de celui-ci ou ses exploitations secondaires, par tous procédés connus ou inconnus à ce jour, soit la diffusion, la communication par voie analogique et/ou papier et/ou numérique, sur tous réseaux informatiques de télécommunication ouverts et/ou privatifs, nationaux ou internationaux, dans les circuits de diffusion spécialisés ou grand public ;
— Le droit d’exploiter le Logiciel dans sa forme actuelle et/ou sous toute forme modifiée et/ou adaptée, sur tous supports connus ou inconnus à ce jour, notamment par voie de licences ou sous-licences consenties à des tiers ;
— Le droit de vendre, donner, céder ou transférer tout ou partie du Logiciel ou des droits de propriété intellectuelle y afférent.
L’ensemble des droits de propriété intellectuelle ci-dessus à savoir les droits patrimoniaux d’auteur est cédé pour le monde entier et pour toute la durée de protection de ces droits accordée par la loi.’
Il résulte ainsi expressément de cette disposition que M. [D] a cédé l’intégralité de ses droits patrimoniaux d’auteur à la société [F] dont il était le président, y compris donc les droits d’adaptation du logiciel ‘d.poq’ et ce, conformément aux dispositions de l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle.
L’examen de cet article 2 du contrat de cession litigieux enseigne en outre que chacun des droits cédés a fait l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés a été délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée de sorte que cette stipulation est conforme aux exigences de l’article L.131-3, alinéa 1er, du code de la propriété intellectuelle.
L’article 3 du contrat de cession litigieux, consacré à la rémunération de la cession de droits patrimoniaux d’auteur, précise ce qui suit (souligné par la cour) :
‘Pour les besoins du présent article, [F] désigne la société [F] et/ou toute
personne physique et/ou morale qui viendrait à acquérir les droits patrimoniaux d’auteur du Logiciel.
3.1 Au titre de la présente cession de [O] [D] à [F] des droits patrimoniaux d’auteurs relatifs au Logiciel, concernant le marché ‘notaires’, [F] s’engage à verser pour chaque année calendaire, de la Date de Cession jusqu’au 31 décembre 2019 (la ‘Période De Référence’), un prix de cession proportionnel (le ‘Prix de Cession 1″) égal :
(i) d’une part, à 2,08% (TVA en sus) du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé durant la Période de Référence par [F] au titre des droits d’utilisation de la suite du Logiciel (telle que décrite en Annexe 1, à l’exception du logiciel comptable] accessible par les utilisateurs en mode SAAS. ce qui recouvre :
— les abonnements et redevances annuelles correspondant au droit d’utilisation,
— l’hébergement des serveurs clients utilisateurs du logiciel [si le serveur est hébergé),
— les applications Smartphone et tablettes.
Cette quote-part du Prix de Cession l sera affectée :
a) d’un plancher annuel correspondant au cumul annuel des postes facturés mensuellement multiplie par 2 € euros ;
b) d’un plafond annuel correspondant au cumul annuel des postes facturés mensuellement multiplie par 3 € euros ;
(ii) et d’autre part, à 2,08% (TVA en sus) du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé par [F] au titre des licences applicatives donnant accès au Logiciel sur support matériel et des contrats de maintenance relatifs à ces licences applicatives, pendant la Période de Référence.
En tout état de cause. le montant total du Prix de Cession l ne pourra excéder un million deux cent mille euros hors taxes (1 200 000 € H.T.) au total pour l’ensemble de la Période De Référence.
3.2 Pour la cession des droits patrimoniaux d’auteur de M. [O] [D] relatifs au
Logiciel et aux marchés autres que celui des notaires, [F] s’engage à payer à [O] [D], pour chaque année calendaire sur la Période de Référence un prix de cession proportionnel (le ‘Prix de Cession 2″) de 0.5% H.T. (TVA en sus) limité à cinq cent mille euros hors taxes 500 000 €.H.T.,
3.3 [F] s’engage à adresser à M. [D] dans les 60 jours suivant la fin de chaque année calendaire de la Période de Référence :
— un rapport (« Rapport ») comportant :
(i) le montant total hors taxes des ventes effectuées par [F] sur les droits d’utilisation de la suite du Logiciel (telle que décrite en Annexe l, à l’exception du logiciel comptable), accessible (a) en mode SAAS (ce qui recouvre les abonnements et redevances annuelles correspondant au droit d’utilisation, l’hébergement (s’il y a lieu) des serveurs clients utilisateur du Logiciel et les applications Smartphones et tablettes, (b) sur un support matériel via les licences applicatives (y compris les contrats de maintenance relatifs à ces licences applicatives) ;
(ii) le nombre de postes utilisateurs de chaque mois de l’année calendaire en question;
— et les Prix de Cession 1 et 2, déterminés sur la base de ce Rapport, par chèque.
M. [D] disposera d’une période de 30 (trente) jours à compter de la réception du Rapport pour notifier le cas échéant à [F] qu’il est en désaccord avec tout ou partie des éléments composant ce Rapport. Au cas où M. [D] notifierait un avis d’objection à [F], cette dernière et M. [D] essaieront de s’accorder sur les points de divergence notifiés. A défaut d’accord entre les Parties à l’issue d’une période de 30 (trente) jours suivant la date de réception par [F] de l’avis d’objection, les points de divergence seront soumis à un expert désigné par les Parties et, à défaut d’accord entre elles, par le Président du Tribunal de commerce territorialement compétent saisi à la requête de la Partie la plus diligente. Le coût de l’intervention de l’Expert sera supporté par moitié entre [F] et M. [D].
Dans l’éventualité ou les nouveaux Prix de Cession l et Prix de Cession 2, déterminés
aimablement par les Parties ou par l’Expert désigné, dans les conditions qui précédent, se révéleraient supérieurs aux Prix de Cession 1 et Prix de Cession 2 notifiés avec le Rapport, il appartiendra à [F] de verser l’excédent constaté, dans un délai de l5 jours à compter de la détermination définitive de cet excédent par les Parties ou par voie d’expertise ou dans un délai de l5 jours d’une décision judiciaire définitive.’
Contrairement à ce que soutient M. [D], la rémunération de la cession de ses droits patrimoniaux relatifs au droit d’adaptation du logiciel ‘d.poq’ est prévue puisque le contrat précise expressément que (souligné par la cour) ‘au titre de la présente cession de M. [D] à [F] des droits patrimoniaux d’auteurs relatifs au Logiciel, concernant le marché ‘notaires’, [F] s’engage à verser pour chaque année calendaire, de la Date de Cession jusqu’au 31 décembre 2019 (la ‘Période De Référence’), un prix de cession’ (article 3.1, premier paragraphe).
Ainsi, l’ensemble des droits patrimoniaux cédés par M. [D] à la société [F], y compris le droit d’adaptation du logiciel ‘d.poq’, sont rémunérés conformément aux formules figurant à l’article 3 de ce contrat.
A cet égard, l’analyse de l’article 3 du contrat de cession des droits d’auteur de M. [D] sur le logiciel ‘d.poq’ , sur le marché des notaires, enseigne qu’en réalité il y est prévu une rémunération forfaitaire dont le montant s’apprécie à la fin de la période de référence fixée au 31 décembre 2019 et que ce montant correspond à la plus faible de deux valeurs :
— la première valeur est la somme des montants versés annuellement durant la période de référence suivant le calcul précisé à l’article 3.1 (i) et 3.1 (ii),
— la seconde valeur est égale à la somme maximale de 1 200 000 euros hors taxes (3.1 in fine).
Il s’ensuit que cet article 3.1 du contrat de cession litigieux est conforme aux exigences de l’article L.131-4, alinéas 1er et 5, du code de la propriété intellectuelle et c’est à tort que M. [D] prétend que ce contrat est dénué de cause pour ne pas avoir prévu sa rémunération au-delà d’une certaine période et/ou pour la cession de certains de ses droits patrimoniaux.
En outre, faute pour lui de démontrer en quoi une telle rémunération est dérisoire, la cour ne pourra pas le suivre dans son argumentation et prononcer la nullité de ce contrat pour absence de cause.
Au surplus, il apparaît pour le moins surprenant que cela ne soit qu’au stade de l’appel que M. [D] invoque de tels moyens alors qu’il était une partie largement prenante au titre de cette opération économique, dans le cadre de laquelle un ensemble contractuel indivisible a été négocié, stipulé et signé le même jour. Rappelons en effet qu’ont été conclus le même jour, soit le 3 octobre 2013, trois contrats et que M. [D] était non seulement l’auteur du logiciel, mais aussi le président de la société [F] de sorte qu’il apparaît qu’au titre du premier contrat querellé, il a conclu en sa qualité d’auteur avec la personne morale dont il est le président et c’est à travers cette personne morale qu’il a procédé au développement du logiciel litigieux. Il est en outre paradoxal que M. [D] demande la nullité du contrat de cession, mais n’évoque pas celle du contrat de cession et d’achats des actions de la société [F] par la société Fiducial informatique, alors que la nullité du premier aurait nécessairement entraîné par voie de conséquence celle du second. Rappelons que même si la société [F] et M. [D] sont deux personnes distinctes, il n’en demeure pas moins qu’en exécution du deuxième contrat signé par la société [F] et la société Fiducial Informatique, M. [D] se voyait octroyer un complément de prix assis sur le chiffre d’affaires réalisé lors de la commercialisation du logiciel jusqu’au 31 décembre 2019.
Il découle de l’ensemble des développements qui précèdent que la demande en nullité du contrat de cession ne pourra qu’être rejetée. Par voie de conséquence, les demandes subséquentes de M. [D] au titre de l’annulation du contrat de cession pour absence de cause ne sauraient prospérer.
Le jugement sera confirmé de ces chefs.
Sur les demandes de M. [D] au titre des manquements contractuels de la société [F] relativement à l’exploitation des droits patrimoniaux du logiciel ‘d.poq’ formées à titre infiniment subsidiaire (pages 68 à 72 et page 135 in fine)
‘ Moyens des parties
M. [D] poursuit l’infirmation du jugement qui rejette ses demandes fondées sur la responsabilité contractuelle de la société [F] alors que, selon lui, cette dernière a manqué à ses obligations contractuelles au titre du contrat de cession de droits d’auteur. En réparation M. [D] demande sa condamnation à lui verser la somme de 1 000 000 euros déduction faite, le cas échéant de la somme déjà perçue de 33 009 euros au titre de (i) l’exploitation du logiciel ‘d.poq’ depuis le 31 décembre 2017 jusqu’au 31 décembre 2019 et (ii) au titre de l’exploitation des droits d’adaptation du logiciel entre la conclusion de l’accord de cession de tels droits, soit le 3 octobre 2013 et à tout le moins le 13 juin 2017, et le 31 décembre 2019. Il sollicite la désignation d’un expert dans l’éventualité où la cour s’estimerait insuffisamment éclairée par ses productions et l’allocation de la somme de 500 000 euros à titre de provision, déduction faite, le cas échéant de la somme déjà perçue de 33 009 euros, au titre de telles exploitations.
Au soutien de ses demandes, M. [D] affirme que le logiciel ‘Signature’ est une adaptation du logiciel ‘d.poq’ et qu’il :
— a perçu une rémunération complète au titre de ses droits d’auteur sur le logiciel ‘d.poq’ devenu ‘Fiducial [F]’ à compter de la fin de l’année 2017 ;
— n’a perçu aucune rémunération au titre de ses droits d’auteur sur le logiciel ‘d.poq’ incorporé dans l’oeuvre dérivée que constitue le logiciel ‘Signature’ ;
— n’a reçu aucun rapport complet, précis, conforme sur de telles exploitations comme le prévoyait le contrat.
Il prétend ne pas avoir été placé en capacité de vérifier si la rémunération à laquelle il pouvait prétendre en application des dispositions de l’article 3.3 du contrat de cession des droits d’auteurétait sincère et fiable dès lors que la société [F] ne lui a pas communiqué un rapport sincère, complet et justifié par des éléments objectifs tels que l’attestation d’un expert-comptable, les extraits des grands livres clients, relativement aux exploitations, complet et conforme aux conditions contractuelles susmentionnées, ce qui l’empêcherait de donner crédit à la somme de 12 254 euros versée par la société [F].
Il s’infère de ce qui précède, selon lui, que la société [F] a manqué à ses obligations contractuelles au titre du contrat de cession de droits d’auteur et par voie de conséquence la cour devra la condamner à réparer les préjudices en résultant pour lui.
Selon lui, en application des stipulations de l’article 3 du contrat de cession des droits d’auteur ce préjudice correspond :
* pour l’exploitation du logiciel ‘d.poq’ postérieurement au 31 décembre 2017 :
‘ pour le marché des notaires :
— à 2,08% du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé durant la Période de Référence non couverte – c’est-à-dire du 31 décembre 2017 au 31 décembre 2019 – au titre des droits d’utilisation du logiciel ‘d.poq’ ;
— à 2,08% du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé par la société [F] au titre des licences applicatives donnant accès au logiciel ‘d.poq’ sur la même période ;
‘ pour les marchés autres que celui des notaires :
— à 0.5% du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé par la société [F] durant la période de référence non couverte – c’est-à-dire du 31 décembre 2017 au 31 décembre 2019 – au titre des droits d’utilisation du logiciel ‘d.poq’ ;
— à 0.5% du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé par la société [F] au titre des licences applicatives donnant accès au logiciel ‘d.poq’ pendant la même période et des contrats de maintenance associés ;
* pour l’exploitation du logiciel ‘Signature’ et toute adaptation du logiciel ‘d.poq’ :
‘ pour le marché des notaires :
— à 2,08% du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé par la société [F] durant la Période de Référence – c’est-à-dire du 3 octobre 2013 (et à tout le moins du 13 juin 2017, date de la présentation du logiciel ‘Signature’) au 31 décembre 2019 – au titre des droits d’utilisation du logiciel ‘d.poq’ incorporé dans logiciel ‘Signature’ ;
— à 2,08% du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé par la société [F] au titre des licences applicatives donnant accès au logiciel ‘d.poq’ incorporé dans logiciel ‘Signature’ et des contrats de maintenance associés ;
‘ pour les marchés autres que celui des notaires :
— à 0.5% du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé par la société [F] durant la période de référence – c’est-à-dire du 3 octobre 2013 (et à tout le moins du 13 juin 2017, date de la présentation du logiciel ‘Signature’) au 31 décembre 2019 – au titre des droits d’utilisation du logiciel ‘d.poq’ incorporé dans logiciel ‘Signature’ ;
— à 0.5% du chiffre d’affaires hors taxes facturé et encaissé par la société [F] au titre des licences applicatives donnant accès au logiciel ‘d.poq’ incorporé dans logiciel ‘Signature’ et des contrats de maintenance associés.
M. [D] prétend ne pas avoir pu disposer du rapport complet, sincères des ventes de l’exploitation du logiciel ‘d.poq’ postérieurement au 31 décembre 2017 ni de celle du logiciel ‘Signature’ incorporant le logiciel ‘d.poq’ et de toute autre adaptation de ce dernier de sorte qu’il estime son préjudice à la somme de 1 000 000 euros déduction faite des sommes déjà perçues, soit 49 453 euros.
A titre subsidiaire, M. [D] sollicite la désignation d’un expert judiciaire aux fins de déterminer son préjudice financier.
Les intimées rétorquent avoir adressé l’ensemble des éléments nécessaires à la vérification du montant de la rémunération due à M. [D] pour les années 2014 à 2019 (pièces F8, F13, F12). En outre, en cause d’appel, afin de couper court aux débats fallacieux entretenus par leur adversaire quant à la conformité des montants des redevances payés avec le chiffre d’affaires effectivement réalisé par l’exploitation du logiciel sur la période contractuelle, les intimées indiquent verser aux débats des attestations certifiées par leur commissaire aux comptes qui :
* étayent la concordance entre les sommes perçues par M. [D] et leur comptabilité (pièce F13),
* portent précisément sur les critères des résiliations de licences sur logiciel ‘d.poq’, les traitements des réclamations et leur correcte prise en compte dans le calcul du montant des redevances (pièce F14).
Elles ajoutent que le contrat précise expressément que la réalisation de ces obligations était soumise à la commercialisation du logiciel ; que la commercialisation massive n’ayant pas eu lieu en raison des anomalies présentées par logiciel ‘d.poq’, la société [F] ne peut être tenue d’honorer que dans la limite du chiffre d’affaires issu de la phase de tests du logiciel dans certaines études de notaires. Il s’ensuit, selon elles, que c’est à bon droit que le tribunal a débouté M. [D] de ses demandes non étayées par des éléments de preuve probants.
‘ Appréciation de la cour
Les intimées produisent aux débats une attestation du commissaire aux comptes, la société Expérial, relative aux versements des redevances de droits d’auteur sur le logiciel ‘d.poq’ pour les exercices 2014 à 2019 (pièce F14) qui précise avoir procédé à la vérification des informations figurant au tableau récapitulatif établi sous la responsabilité du président de la société [F] faisant ressortir que le montant de ces redevances dues et versées à M. [D] s’élève à la somme totale de 49 453 euros.
Le commissaire aux comptes rappelle qu’il lui appartient de se prononcer sur la concordance de ces informations fournies par la société [F] avec l’ensemble des éléments transmis, la comptabilité et la conformité des bases, les taux et modalités de calcul utilisés pour la détermination des redevances dues avec le contrat de cession de droits d’auteur.
Il précise avoir également vérifié les critères des résiliations opérées, de traitements des réclamations, et la correcte prise en compte dans le calcul des versements effectués ; que cette intervention ne constitue ni un audit, ni un examen limité ; qu’il a été effectué selon les normes d’exercice professionnel applicables en France ; que ses travaux ont consisté à vérifier les bases utilisées pour le calcul des redevances et la correcte application des modalités stipulées au contrat.
Il conclut ne pas avoir d’observation à formuler sur la concordance des informations avec les pièces justificatives transmises et que les vérifications concernant les modalités de calcul des redevances ont été reprises dans le tableau qu’il a inséré dans son attestation. Il ajoute ne pas avoir d’observation à formuler non plus sur les critères des résiliations opérées, de traitements des réclamations et la correcte prise en compte dans le calcul des versements effectués.
Les pièces produites, examinées par le commissaire aux comptes, enseignent en particulier que le chiffre d’affaire réalisé par la société Fiducial Informatique au titre de l’ensemble des contrats relatifs aux droits d’utilisation du logiciel ‘d.poq’ en tant que tel ou/et de toute adaptation de celui-ci (dont le logiciel ‘Signature’) (contrats de licence applicative, contrats de maintenance, contrats SAAS, abonnement…) apparaît modeste (F12, F13) et le nombre d’utilisateurs tout aussi modique.
M. [D] ne produit aucun élément de preuve de nature à contredire ceux versés aux débats par ses adversaires.
Il sera en outre observé que, durant l’instruction de cette affaire, il n’a pas saisi le conseiller de la mise en état d’un incident de communication de pièces, comme il indique l’avoir envisagé (cf. page 55 de ses conclusions).
Au surplus, alors qu’il prétend n’avoir reçu ‘aucun rapport complet et sincère, justifié par des éléments objectifs’ (cf. page 66 de ses conclusions), force est de constater qu’il ne soutient ni ne justifie avoir notifié son désaccord à la société [F] sur le rapport ainsi transmis comme le prévoit pourtant l’article 3.3, avant dernier et dernier alinéas, du contrat de cession de droits d’auteurlitigieux, pas plus qu’il ne prétend ni ne justifie avoir notifié un avis d’objection ouvrant la porte à la procédure de règlement amiable du conflit sur le calcul du montant annuel de la redevance due à M. [D].
Il découle des développements qui précèdent que les manquements contractuels allégués ne sont pas justifiés et, par voie de conséquence, les demandes de M. [D] en réparation des préjudices en résultant ne pourront qu’être rejetées.
Le jugement sera confirmé de ces chefs.
Sur les demandes de M. [D] relativement à ses droits d’auteur sur la conception des nouveaux développements (pages 75 à 105 des conclusions de M. [D])
M. [D] prétend que la société Fiducial informatique a commis des actes de contrefaçon en détenant et en utilisant ce matériel de conception préparatoire, notamment le logiciel ‘d.poq’, devenu ‘Fiducial [F]’, le logiciel ‘Signature’ sans droit ni titre ni ‘bourse déliée’.
Il sollicite en conséquence la condamnation de la société Fiducial informatique à cesser toute utilisation du matériel de conception préparatoire des nouveaux développements mis au point par M. [D], y compris, du logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] », et du logiciel « Signature » en ce qu’ils incorporent/implémentent ces travaux de conception, et ce, sous astreinte de 20.000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l’arrêt à intervenir. Il demande en outre de condamner la société Fiducial informatique à lui payer la somme de 800.000 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts pour contrefaçon de ses droits d’auteur sur les nouveaux développements du logiciel « d.poq », devenu « Fiducial [F] », puis « Signature ».
A titre liminaire, il rappelle que l’expert amiable qu’il a mandaté et qui a rempli sa mission de manière non contradictoire, a démontré la réalité de ses griefs. Toutefois, il précise que si la cour l’estime nécessaire et/ou utile compte tenu de la technicité du débat, il l’invite à ‘ordonner une enquête sur le champ en entendant à la barre M. [K] relativement à son analyse des éléments du matériel de conception préparatoire de M. [D] portant sur les nouveaux développements’.
Il soutient que la cour ne pourra que retenir qu’il est titulaire des droits d’auteur sur le matériel de conception préparatoire relativement aux nouveaux développements du logiciel «d.poq » devenu « Fiducial [F] » puis « Signature » ; qu’aucune cession des droits d’auteur de M. [D] sur ce matériel de conception préparatoire n’est intervenue au profit de la société Fiducial Informatique ; qu’il n’a perçu aucune rémunération en contrepartie de la détention et l’utilisation de ce matériel de conception préparatoire par la société Fiducial Informatique, de sorte que la contrefaçon alléguée ne pourra, selon lui, qu’être retenue ; que, par voie de conséquence, la société Fiducial informatique devra être condamnée à cesser toute utilisation du matériel de conception préparatoire des nouveaux développements mis au point par ses soins y compris du logiciel ‘d.poq’ devenu ‘Fiducial [F]’ et logiciel ‘Signature’ en ce qu’ils incorporent, implémentent ces travaux de conception et ce, sous astreinte, ainsi que lui verser la somme de 800 000 euros à titre de dommages et intérêts pour contrefaçon de ses droits d’auteur sur les nouveaux développements du logiciel ‘d.poq’ devenu ‘Fiducial [F]’ puis ‘Signature’.
Selon lui, contrairement à ce que sollicitent ses adversaires, l’annulation du procès-verbal de constat du 18 mars 2020 ne saurait être prononcée et il conviendra de retenir le caractère probant du matériel de conception probatoire produit aux débats en pièce 108 (pour le contenu de la copie du DVD-ROM) et en pièce n° 118 (pour le contenu du DVD-ROM), étant précisé que grâce à l’empreinte numérique calculée M. [P], l’identité de ce matériel tel que figurant dans le DVD ROM déposé par lui et celui figurant dans la copie réalisée par M. [P], par précaution, a bien été constatée et est aisément vérifiable par les intimées.
Il ajoute que ces éléments ont été examinés par M. [K], expert près la Cour de cassation, qui a rendu son rapport non contradictoire le 16 avril 2020 (pièce 105) qui conclu à l’originalité des nouveaux développements concernant les trois composants critiques du logiciel ‘d.poq’ depuis ‘Signature’ et la qualité de M. [D] en tant qu’auteur de ces éléments identifiés comme des travaux de conception préparatoires éligibles à la protection conférée par l’article L.112-2, 13°, du code de la propriété intellectuelle sur les oeuvres de l’esprit.
Il conteste les allégations de ses adversaires selon lesquelles ces développements ou éléments de conception portent essentiellement sur une simple ‘mise à jour’.
Il soutient que ses travaux portent essentiellement sur la création de nouvelles fonctionnalités et de nouveaux modules qui ne sont absolument pas listés dans la description du logiciel ‘d.poq’ annexée au contrat de cession du 3 octobre 2013 en ce compris les travaux d’ancienne structure locale de la société Fiducial informatique en environnement web dans le logiciel ‘d.poq’ de sorte qu’il ne s’agit manifestement pas d’une simple mise à jour.
Ayant conçu le matériel de conception préparatoire des nouveaux développements, étant titulaire des droits d’auteur relativement à ce matériel de conception, qui n’ont été ni cédés ni rémunérés, il fait valoir que la société Fiducial informatique se rend coupable du délit de contrefaçon prévu à l’article L.131-1-3 du code de procédure civile et devra être condamnée à lui verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle lui cause.
M. [D] fait en effet valoir que le contrat de cession de droits d’auteur ne porte que sur le logiciel ‘d.poq’ dont les éléments sont limitativement énumérés en annexe à ce contrat et se différencient de ceux composant les nouveaux développements (pièces 4-1 à 4-3) ; que le contrat d’assistance et de prestations de services conclu entre la société Fiducial informatique et lui, puis la société IO Concept, ne prévoit aucune cession des nouveaux développements sur le logiciel ‘d.poq’ conçu par lui, lesquels ne sont pas identifiés (pièce 5), ce qui n’est pas surprenant puisqu’il n’aura pas pu céder par avance ses droits sur une oeuvre future.
Il conteste que le contrat de cession de ses droits patrimoniaux ait pu prévoir une telle cession dès lors que ce contrat ne porte que sur le logiciel ‘d.poq’ tel que décrit en annexe 3 du contrat de cession et absolument pas sur les nouveaux développements dont les travaux de conception de M. [D] sont à l’origine. Il ajoute que le contrat de cession de droits d’auteur n’identifie du reste pas les nouveaux développements dont il est question.
Il insiste sur le fait que céder le droit d’adapter le logiciel ‘d.poq’ et de l’exploiter sous une forme adaptée ne signifie pas que tous les travaux d’adaptation en lien avec le logiciel ‘d.poq’ auraient eux-mêmes été cédés par avance par M. [D].
Il admet avoir pris l’engagement d’accompagner la société Fiducial informatique dans le développement du logiciel ‘d.poq’, mais soutient qu’il n’a jamais renoncé, à l’avance, à ses droitsd’auteur portant sur des travaux qui eux-mêmes ne pouvaient pas être déterminés à l’avance ce que prohibe en tout état de cause l’article L.131-1 du code de la propriété intellectuelle.
Il en conclut avoir démontré que la société Fiducial informatique ne justifie pas être cessionnaire de droits d’auteur portant sur ses travaux de conception à l’origine des adaptations du logiciel ‘d.poq’ que ce soit la version ‘Fiducial [F]’, ‘Signature’ ou toute autre version.
Ses adversaires sollicitent la confirmation du jugement de ce chef.
‘ Appréciation de la cour
Le contrat de cession des droits d’auteur n’ayant pas été annulé, M. [D] ne réclamant pas réparation au titre de son droit moral sur l’oeuvre de l’esprit qu’est le logiciel ‘d.poq’, toutes demandes fondées sur le grief de contrefaçon au titre de l’utilisation de ce logiciel dans le cadre de ce contrat sont nécessairement irrecevables, M. [D] n’ayant pas qualité pour agir à ce titre.
Le jugement sera dès lors confirmé de ce chef.
Cependant, M. [D] prétend avoir travaillé sur des développements complémentaires sur le logiciel ‘d.poq’ devenu le logiciel ‘Signature’ à la demande de la société Fiducial informatique et que la majorité des éléments justifiant ces travaux ont été déposés le 25 février 2016 auprès de M. [P], huissier de justice agissant en qualité de tiers séquestre (pièces 7, 105, 107 et 118).
La cour observe que, aux termes de son article 2, 3ème paragraphe, du contrat de cession de droits d’auteur signé entre M. [D] et la société [F], le premier cédait à la seconde son droit de modifier, d’améliorer, de traduire et de réécrire dans un autre langage ou d’une autre façon le Logiciel, (ii) son droit d’intégrer et d’incorporer dans toute oeuvre actuelle ou future le Logiciel. Il entrait bien dans les prévisions du contrat de céder les droits d’auteur de M. [D] pour la création d’une oeuvre actuelle ou future intégrant ou incorporant le logiciel ‘d.poq’. Au reste, il n’apparaît pas surprenant ni pertinent, ni de nature à conforter la position de M. [D] que d’observer, comme il le fait, que les nouveaux développements, litigieux, ne soient pas décrits en annexe 3 du contrat de cession, puisque, précisément, ils n’étaient pas encore effectifs au jour de la signature du contrat.
Il a été indiqué précédemment que pour cette cession de ce droit patrimonial spécifique, l’article 3 de ce contrat précisait les modalités de rémunération.
En outre, le même jour M. [D] signait un contrat d’assistance et de prestation de service aux termes duquel il s’engageait à accompagner la société Fiducial informatique dans la finalisation du développement du logiciel ‘d.poq’ en contrepartie du versement d’honoraires, de complément d’honoraires au titre de l’apport de nouveau client notaire prospecté qui souscrirait un abonnement, et de remboursement de frais (article 2 du contrat d’assistance).
Contrairement à ce que soutient M. [D], en cédant ses droits de propriété intellectuelle au fur et à mesure de l’exécution de ses travaux d’assistance au développement du logiciel ‘d.poq’ dans le but de l’intégrer ou l’adapter à une oeuvre actuelle ou future, moyennant rétribution tant en exécution du contrat de cession de droits d’auteur que de celui portant sur l’assistance à la société Fiducial informatique, M. [D] s’est librement engagé à céder des droits précis et circonscrits au périmètre qu’il a lui-même défini et d’en être rémunérés en exécution de deux contrats signés le même jour. Ceci ne correspond pas à la définition d’une cession ‘globale’ au sens de l’article L.131-1 précité, de sorte que les contrats signés par M. [D] n’entrent pas dans les prévisions de l’article L.131-1 du code de procédure civile qui dispose que ‘La cession globale des oeuvres futures est nulle’.
Au surplus, la cour comprend mal la démarche de M. [D] qui consiste à reprocher à la société Fiducial informatique la réalisation d’actes de contrefaçon alors qu’il a livré spontanément et librement ses travaux à celle-ci, caractérisant ainsi le fait qu’il se sentait tenu par les termes du contrat d’assistance qu’il a signé. En outre, le fait que M. [D] cherche à titre principal à remettre en cause le contrat de cession de droits d’auteur qu’il a signé pour vice de forme (absence de cause et/ou, en première instance, dol) dans le but d’obtenir une indemnisation à la suite de l’annulation qui en résulterait apparaît également symptomatique du fait que l’appelant comprend parfaitement les termes et la portée de ses engagements.
Il découle de ce qui précède que c’est à bon droit que le tribunal a rejeté les demandes de M. [D] relativement à ses droits d’auteur sur la conception des nouveaux développements.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur le droit pour la société IO Concept d’obtenir le paiement de la somme de 95 040 euros toutes taxes comprises avec intérêts
C’est par d’exacts motifs, adoptés par cette cour, que le tribunal a rejeté ces demandes insuffisamment justifiées par les productions de M. [D] et de la société IO Concept en première instance.
A hauteur d’appel, les appelants produisent des éléments de preuve supplémentaires qui apparaissent tout aussi insuffisants dès lors que la plupart d’entre eux n’ont aucune force probante quant à la réalisation des prestations facturées litigieuses puisqu’ils ne sont corroborés par aucun élément extérieur (en particulier, les attestations de notaires prospectés par la société IO Concept ou/et M. [D] qui confirmeraient la réalité des prestations alléguées), mais émanent des demandeurs au paiement. Comme le soutiennent pertinemment les intimées, les documents émanant de M. [H] ne sont pas probants en ce qu’ils ne démontrent pas la commande ou la réalisation des prestations litigieuses par la société IO Concept ou par M. [D]. La pièce 103 évoque un projet de contrat, mais le contrat signé n’est pas produit.
Il découle de ce qui précède que les demandes de la société IO Concept injustifiées seront rejetées.
Sur la demande incidente de la société Fiducial informatique
‘ Moyens des parties
La société Fiducial informatique poursuit l’infirmation du jugement en ce qu’il rejette ses demandes indemnitaires en réparation du préjudice causé par M. [D] en raison de son manquement à ses obligations d’information pré contractuelle et de délivrance conforme. En réparation, elle demande sa condamnation à lui verser la somme de 2 400 000 euros.
Selon elle, M. [D] lui a caché l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 février 2013 révélant que les difficultés rencontrées au titre du développement du logiciel qui lui a été confié qui, selon elle, retient la responsabilité entière de la société [F].
La société Fiducial informatique affirme que cette dissimulation n’est pas sans incidence sur la nature des défauts de conception du logiciel. Selon elle, les rapports d’expertise de M. [M] et de la société Cast démontrent les nombreux défauts de conception du logiciel ‘d.poq’ à l’origine des innombrables anomalies et des dysfonctionnements qui ont contraint à suspendre la commercialisation du logiciel. Elle ajoute que M. [D] en ne respectant pas ces règles et en s’abstenant de le révéler a manqué à son obligation de délivrance conforme et a commis une faute pré contractuelle.
La société Fiducial informatique fait en outre valoir que son consentement a été altéré par la déclaration de M. [D] relative aux investissements nécessaires. En effet, elle indique que ses investissements ont atteint les 7 000 000 euros pour résoudre les défauts révélés postérieurement à l’acquisition. Elle estime que la déclaration erronée de M. [D] sur le fait que la commercialisation du logiciel ‘d.poq’ ne nécessitait qu’un investissement à concurrence de 656 000 euros engage sa responsabilité.
M. [D] sollicite la confirmation du jugement de ce chef et rappelle que la société Fiducial informatique a conclu le contrat de cession et d’achat des actions de la société [F] avec l’ensemble des actionnaires de cette société, dont il fait partie, et que ses demandes dirigées contre lui seul sont injustifiées, lui-même ne pouvant pas être confondue avec la société [F] et l’ensemble des actionnaires.
Il soutient que la société Fiducial informatique ne démontre pas plus l’existence des défauts majeurs qu’elle invoque et les pièces à l’appui de ces allégations ne sont pas probantes.
Selon lui, l’absence de preuve de ces allégations ne pourra dès lors que conduire la cour à rejeter les demandes de la société Fiducial informatique et de confirmer le jugement déféré.
‘ Appréciation de la cour
Force est de constater que la société Fiducial informatique se borne à prétendre que pèse sur M. [D] une obligation de délivrance conforme et d’information pré contractuelle sans préciser le fondement de ses demandes et sans énumérer les pièces à l’appui de ces allégations. Il apparaît en effet des pièces produites que le contrat litigieux (le contrat de cession et d’achat des actions de la société [F] par la société Fiducial informatique) a été conclu avec l’ensemble des actionnaires de cette société et pas seulement entre M. [D] et la société Fiducial informatique.
En outre et surtout, la société Fiducial informatique par ses productions ne démontre nullement l’existence des défauts majeurs du logiciel ‘d.poq’ allégués qui auraient été dissimulés intentionnellement par M. [D]. Là encore, les motifs du jugement sont particulièrement pertinents.
De même, comme l’a relevé le premier juge, le contrat de cession d’actions comporte une annexe (5.2.17c) qui détaille le contentieux entre la société [F] et la société Zenika, conforme au litige tranché par la cour d’appel de Paris dans son arrêt du 8 février 2013. Les motifs du jugement sur ce point, particulièrement pertinents et circonstanciés, seront adoptés par cette cour.
Il découle de ce qui précède que la demande reconventionnelle de la société Fiducial informatique, injustifiée, sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef.
Sur les demandes accessoires
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
M. [D] et la société IO Concept, parties perdantes, supporteront les dépens d’appel. Par voie de conséquence, leurs demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
L’équité ne commande pas d’allouer des sommes à la société Fiducial informatique et à la société [F] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,
DÉCLARE irrecevables les moyens soulevés par les intimées tirés de l’absence de démonstration préalable par M. [D] de l’existence de l’originalité du logiciel ‘d.poq’ et de son statut d’auteur de cette oeuvre de l’esprit ;
CONFIRME le jugement ;
Y ajoutant,
CONDAMNE M. [D] et la société IO Concept aux dépens d’appel ;
DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes autres demandes.
— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
— signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,