Contrat de dépôt d’oeuvre d’art : l’absence d’écrit
Contrat de dépôt d’oeuvre d’art : l’absence d’écrit
Ce point juridique est utile ?

En l’absence d’un écrit la preuve du dépôt d’une oeuvre d’art est difficile à rapporter. La présomption de propriété joue en faveur du galeriste. L’article 1924 ajoute que lorsque le dépôt d’une valeur supérieure à 1 500 euros n’est pas prouvé par écrit, celui qui est attaqué comme dépositaire en est cru sur sa déclaration, soit pour le fait même du dépôt, soit pour la chose qui en faisait l’objet soit pour le fait de sa restitution.

Mme [O] [A] et Mme [S] [R], héritières du sculpteur [Y] [R] décédé en 1976, ont assigné sans succès M. [Z] [E] et Mme [C] [B], héritiers du galeriste et marchand d’art [I] [E] décédé en 1981, en revendication de quatorze oeuvres.

Il appartenait aux consorts [R] de rapporter la preuve de l’un ou l’autre des contrats de prêt ou de dépôt dont l’existence était prétendue, préalable nécessaire à la démonstration d’une faute dans l’exécution des obligations en découlant.

La preuve du dépôt

Aux termes de l’article 1915 du code civil, ‘le dépôt, en général est un acte par lequel on reçoit la chose d’autrui à la charge de la garder et de la restituer en nature.’

L’article 1921 du même code précise que ‘Le dépôt volontaire se forme par le consentement réciproque de la personne qui fait le dépôt et de celle qui le reçoit.’

L’article 1924 ajoute que lorsque le dépôt d’une valeur supérieure à 1 500 euros n’est pas prouvé par écrit, celui qui est attaqué comme dépositaire en est cru sur sa déclaration, soit pour le fait même du dépôt, soit pour la chose qui en faisait l’objet soit pour le fait de sa restitution.

La règle de l’article L.110-3 du code de commerce sur la liberté de la preuve entre commerçants ne peut conduire à écarter cette règle de preuve spécialement prévue par la loi.

L’absence d’écrit

En l’espèce, il est constant qu’aucun contrat de dépôt écrit relatif à l’oeuvre litigieuse n’a existé entre les auteurs des parties.

De surcroît, le parcours de l’oeuvre retracé dans les pièces produites (1-1 et 1-2 de M. [E], 12 à 14, 22 à 28 et 34 des consorts [R]), et la présentation qui en est faite lors des différentes expositions où elle a été présentée, ne mentionnent ni la date de sa remise à [I] [E], ni celui-ci, la société [E]-[M] ou les galeries [E] de [Localité 16], [Localité 13], [Localité 14] ou [Localité 9] en qualité de dépositaire mais laissent à penser, comme prétendu par les consorts [E] au cours de ces procédures, qu’ils détenaient cette oeuvre en qualité de propriétaires.

Ainsi, et comme justement retenu par les premiers juges, les consorts [R] ne rapportent pas la preuve de la remise de l’oeuvre par [Y] [R] à [I] [E] à charge pour celui-ci de la garder et de la restituer en nature.

Le contrat de prêt écarté

Le prêt est, selon l’article 1880 du code civil, un contrat par lequel une partie livre une chose à l’autre pour s’en servir, à la charge pour le preneur de la rendre après s’en être servi.

Là aussi, il n’était pas plus justifié de l’existence d’un contrat écrit de prêt concernant le mobile ‘Un verre et deux cuillères’.


23 janvier 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/14128

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 13

ARRET DU 23 JANVIER 2024

(n° , 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/14128 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGHWB

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 19 Mai 2022 – Cour de Cassation

Arrêt du 20 Octobre 2020 – Cour d’Appel de Paris RG n° 18/08788

Jugement du 01 Février 2018 – Tribunal de Grande Instance de Paris RG n° 16/04380

DEMANDEURS A LA SAISINE :

Monsieur [Y] [U] [X]

[Adresse 11]

[Localité 1]

Ayant pour avocat postulant Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Ayant pour avocat plaidant Me Claire JOLIBOIS, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [T] [X]

[Adresse 12]

[Localité 1] ETATS-UNIS

Ayant pour avocat postulant Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Ayant pour avocat plaidant Me Claire JOLIBOIS, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [H] [A] en qualité d’ayant droit de [O] [A]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Ayant pour avocat postulant Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Ayant pour avocat plaidant Me Claire JOLIBOIS, avocat au barreau de PARIS

Madame [K] [A] en qualité d’ayant droit de [O] [A]

[Adresse 8]

[Localité 10]

Ayant pour avocat postulant Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Ayant pour avocat plaidant Me Claire JOLIBOIS, avocat au barreau de PARIS

DEFENDEURS A LA SAISINE :

Madame [C] [B]

[Adresse 4]

[Localité 7]

Ayant pour avocat postulant Me Stéphane FERTIER de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

Ayant pour avocat plaidant Me Anne-Sophie NARDON, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [Z] [E]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Ayant pour avocat postulant Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Frédéric DUMONT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 21 Novembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre

Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère

Mme Patricia LEFEVRE, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Sophie VALAY-BRIERE dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 23 janvier 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre et par Florence GREGORI, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

Le 12 mai 2005, Mme [O] [A] et Mme [S] [R], héritières du sculpteur [Y] [R] décédé en 1976, ont assigné M. [Z] [E] et Mme [C] [B], héritiers du galeriste et marchand d’art [I] [E] décédé en 1981, en revendication de quatorze oeuvres.

Par arrêt du 26 novembre 2010, devenu irrévocable par l’effet du rejet du pouvoir formé par les consorts [E] (1re Civ, 22 mars 2019), la cour d’appel de Paris a débouté les ayants droit d'[Y] [R] de leur demande pour quatre oeuvres, constaté la précarité de la possession des ayants droit d'[I] [E] sur sept oeuvres dont un mobile suspendu intitulé ‘ Un verre et deux cuillères’, condamné les ayants droit d'[I] [E] à les restituer et sursis à statuer sur la demande d’indemnisation de trois autres mobiles dans l’attente de la production des documents relatifs à leur vente.

La restitution du mobile ‘Un verre et deux cuillères’ est intervenu le 15 avril 2011 en présence des conseils des parties, de M. [G], expert mandaté par les héritiers [R] qui a constaté l’existence de dommages et de maître [J] [W], huissier de justice.

Par suite de la réouverture des débats sur la demande d’indemnisation au titre des trois mobiles restés en litige, la cour d’appel de Paris, par arrêt du 14 janvier 2015, a notamment déclaré prescrite l’action en indemnisation concernant l’une des ‘uvres et a condamné les consorts [E] à indemniser les consorts [R] pour les deux autres mobiles vendus.

Le 4 mars 2016, Mme [O] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X] venant aux droits de leur mère [S] [R] (les consorts [R]) ont assigné les ayants droit d'[I] [E] en indemnisation des préjudices résultant de la détérioration du mobile intitulé « un verre et deux cuillères », soutenant qu'[I] [E] en avait la garde en vertu d’un contrat de dépôt.

Par jugement du 1er février 2018, le tribunal de grande instance de Paris, après avoir rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription et de l’autorité de la chose jugée attachée aux arrêts des 26 novembre 2010 et 14 janvier 2015. soulevées en défense, a débouté les consorts [R] de leurs demandes en réparation d’un manquement aux obligations d’un contrat de dépôt et condamné in solidum les consorts [R] au paiement d’une indemnité procédurale ainsi qu’aux dépens.

Sur appel des consorts [R], la cour d’appel de Paris, par arrêt du 20 octobre 2020, a confirmé le jugement en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action, condamné in solidum les consorts [R] au paiement d’une indemnité procédurale ainsi qu’aux dépens mais l’a infirmé en ses autres dispositions, et, statuant à nouveau, a déclaré irrecevable la demande des consorts [R] comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée et les a condamnés au paiement d’une indemnité procédurale ainsi qu’aux dépens.

Par arrêt du 19 mai 2022, la Cour de cassation a cassé cet arrêt, sauf en ce qu’il rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action, au motif que :

– en application de l’article 1355 du code civil, s’il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime être de nature à fonder celle-ci, il n’est pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits,

– la demande d’indemnisation de l’état détérioré du mobile restitué « un verre et deux cuillères » avait un objet distinct de celui de la demande d’indemnisation de l’absence de restitution des trois ‘uvres vendues.

Par déclaration du 21 juillet 2022, les consorts [R] ont saisi la cour d’appel de Paris désignée comme cour de renvoi.

[O] [A] étant décédée le 9 août 2022, l’interruption d’instance a été constatée par ordonnance notifiée le 31 janvier 2023. M. [H] [A] et Mme [K] [A], en qualité d’ayants droit, se sont constitués le 20 avril 2023.

Dans leurs dernières conclusions, notifiées et déposées le 17 novembre 2023, M. [H] [A] et Mme [K] [A], en qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] demandent à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté toutes les fins de non-recevoir opposées par M. [Z] [E] et Mme [B] et ainsi la prescription de l’action, l’autorité de la chose jugée et le principe du non cumul des responsabilités,

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [B] de sa demande de mise hors de cause,

– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté les demandes reconventionnelles de M. [Z] [E] et Mme [B] pour procédure abusive,

– débouter M. [Z] [E] de sa demande de nullité des conclusions signifiées le 16 novembre 2022 par les demandeurs à la saisine,

à titre subsidiaire,

– dire que cette nullité n’affecterait que la signification faite au nom de Mme [O] [A],

– infirmer le jugement en ce qu’il les a déboutés de leur demande d’indemnisation du préjudice résultant de l’état de ruine dans lequel le mobile « Un verre et deux cuillères » leur a été restitué en exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 26 novembre 2010,

et statuant à nouveau sur ces questions,

– juger que la responsabilité de M. [Z] [E] et Mme [B] est engagée pour leur avoir restitué, le 15 avril 2011, le mobile suspendu « Un verre et deux cuillères » dans un état endommagé,

– condamner en conséquence solidairement M. [Z] [E] et Mme [B] à leur payer à titre de dommages et intérêts les sommes suivantes :

* 11 000 000 euros au titre de l’indemnisation du préjudice matériel résultant de la détérioration de l”uvre,

* 2 000 000 euros au titre de la réparation du préjudice moral résultant de la détérioration de cette ‘uvre,

– juger que ces sommes porteront intérêts à compter du 26 novembre 2010, date de l’arrêt de la cour d’appel de Paris ordonnant aux consorts [E] de leur restituer l”uvre,

– infirmer le jugement quant aux condamnations prononcées in solidum à leur encontre au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

– débouter M. [Z] [E] et Mme [B] de l’ensemble de leurs demandes,

– condamner solidairement M. [Z] [E] et Mme [B] à leur payer une somme de 50 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de maître Nadia Bouzidi Fabre, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 16 novembre 2023, Mme [B] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a :

* débouté M. [T] [X], M. [Y] [U] [X] et [O] [A], aux droits de laquelle viennent M. [H] [A] et Mme [K] [A], de leurs demandes en réparation de violation des obligations d’un contrat de dépôt,

* les a condamnés in solidum à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* ordonné l’exécution provisoire,

* les a condamnés in solidum aux entiers dépens,

– infirmer le jugement en ce qu’il a :

* rejeté la fin de non-recevoir tirée du non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle,

* rejeté la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive,

statuant à nouveau,

– la recevoir en son appel incident,

– déclarer Mme [K] [A], M. [H] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X] irrecevables en leurs demandes pour violation du principe de non-cumul des responsabilités,

– condamner solidairement Mme [K] [A], M. [H] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X] à lui verser une somme de 50 000 euros pour abus du droit d’agir,

– débouter Mme [K] [A], M. [H] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X] de leurs entières demandes,

subsidiairement,

– juger Mme [K] [A], M. [H] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X] défaillants à établir leur préjudice,

– débouter Mme [K] [A], M. [H] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X] de leurs demandes de dommages et intérêts,

– débouter Mme [K] [A], M. [H] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X] de toute demande indemnitaire à son encontre, l”uvre litigieuse n’ayant jamais été ni en sa détention ni en sa possession, ni sous sa garde et ne lui ayant pas été attribuée lors du partage successoral au décès de son père [I] [E].

à titre infiniment subsidiaire,

– fixer à 7 620 euros le montant des dommages et intérêts dus par M. [Z] [E] et elle-même en réparation des préjudices prétendument subis par Mme [K] [A], M. [H] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X]

en tout état de cause,

– condamner in solidum Mme [K] [A], M. [H] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X] à lui verser chacun une somme de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel,

– condamner in solidum Mme [K] [A], M. [H] [A], M. [T] [X] et M. [Y] [U] [X] aux entiers dépens d’appel.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 17 novembre 2023, M. [Z] [E] demande à la cour de :

à titre principal :

– juger Mme [K] [A] et M. [H] [A] en leur qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] irrecevables à se contredire à son préjudice en raison du principe de l’estoppel,

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [K] [A] et M. [H] [A] en leur qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] de leurs demandes en réparation de violation des obligations d’un contrat de dépôt,

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a rejeté sa demande reconventionnelle pour procédure abusive,

statuant à nouveau :

– condamner in solidum Mme [K] [A] et M. [H] [A] en leur qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U]. [X] au paiement de la somme de 50 000 euros au titre de la procédure abusive,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour infirmait le jugement en ce qu’il a débouté Mme [K] [A] et M. [H] [A] en leur qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] de leurs demandes en réparation de violation des obligations d’un contrat de dépôt,

– juger que Mme [K] [A] et M. [H] [A] en leur qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] n’établissent pas l’existence d’un contrat de dépôt-vente, et à titre subsidiaire d’un contrat de prêt, conclu entre M. [Y] [R] et M. [I] [E], et en conséquence entre [O] [A] et MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] d’une part et lui-même et Mme [C] [B] d’autre part,

– débouter Mme [K] [A] et M. [H] [A] en leur qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] de l’ensemble de leurs demandes,

en toute hypothèse,

– débouter Mme [K] [A] et M. [H] [A] en leur qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] de toutes demandes contraires au présent dispositif,

– condamner in solidum Mme [K] [A] et M. [H] [A] en leur qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U]. [X] au paiement de la somme de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la selarl Lexavoué [Localité 14]-[Localité 15].

SUR CE

Sur le périmètre de la saisine

La Cour de cassation ayant cassé l’arrêt confirmatif de la cour d’appel de Paris sauf en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action, la cour de renvoi n’est pas saisie de cette fin de non-recevoir, de sorte qu’il n’y a pas lieu de confirmer le jugement de ce chef comme demandé par les consorts [R].

Sur les conclusions régularisées par les consorts [R] le 16 novembre 2022

Dans ses dernières conclusions M. [E] ne demande plus la nullité des conclusions signifiées le 16 novembre 2022 par les demandeurs à la saisine, de sorte qu’il n’y a pas lieu de l’en débouter comme sollicité par les consorts [R].

Sur la mise hors de cause de Mme [B]

En cause d’appel Mme [B], qui forme appel incident, ne sollicite plus sa mise hors de cause, de sorte qu’il n’y a pas lieu de statuer de ce chef.

Sur la fin de non-recevoir tirée du principe de l’estoppel

M. [Z] [E] soulève une fin de non-recevoir tirée du principe de l’estoppel car il estime que les consorts [R], après avoir devant les premiers juges invoqué un prétendu contrat de dépôt tout en niant l’existence d’un contrat de prêt, invoquent pour la première fois en appel l’existence d’un contrat de prêt après avoir formellement reconnu son inexistence dans leurs dernières conclusions de première instance. Il ajoute que ces contradictions lui préjudicient ainsi qu’à Mme [B] car s’ils avaient prétendu en première instance à l’existence d’un contrat de prêt, il lui aurait suffi de relever que l’arrêt du 26 novembre 2010 relevait l’inexistence d’un tel prêt s’agissant de l’oeuvre ‘Un verre et deux cuillères’ pour que cet argument soit écarté comme celui relatif au dépôt.

Les consorts [R] répondent que :

– le principe de l’interdiction de se contredire au détriment d’autrui ne peut limiter le droit des parties de soulever des moyens nouveaux en cause d’appel, droit expressément consacré par l’article 563 du code de procédure civile,

– leurs prétentions n’ont jamais été modifiées en ce qu’elles tendent à leur procurer la réparation de leur préjudice,

– leur demande est constante et n’a pas évolué depuis la délivrance de leur assignation du 4 mars 2016,

– les consorts [E] n’ont pas pu être trompés sur la finalité de l’action qui est toujours la même, eux-mêmes ayant toujours soutenu que l’auteur des consorts [E] détenait les oeuvres de [R] en vertu d’un contrat emportant obligation de les restituer, qu’il s’agisse d’un dépôt ou d’un prêt.

La fin de non-recevoir tirée du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d’autrui sanctionne l’attitude procédurale consistant pour une partie, au cours d’une même instance, à adopter des positions contraires ou incompatibles entre elles dans des conditions qui induisent en erreur son adversaire sur ses intentions.

Le changement sanctionné par ce principe est celui au titre des prétentions et non au titre des moyens.

Si les consort [R] ont évoqué différents moyens contradictoires au cours de cette instance, notamment l’existence d’un contrat de dépôt puis de prêt, leurs prétentions qui tendent à obtenir réparation d’un préjudice résultant des dégradations subies par l’oeuvre ‘Un verre et deux cuillères’ n’ont pas varié, de sorte que les consorts [E] n’ont pu être trompés sur les intentions de leur auteur.

La fin de non-recevoir soulevée à ce titre est par conséquent rejetée.

Sur la fin de non-recevoir tirée du principe du non cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle soulevée par Mme [B]

Le tribunal après avoir constaté que les ayants droits de [R], dans leurs dernières conclusions récapitulatives fondaient toutes leurs demandes indemnitaires sur la responsabilité contractuelle en faisant valoir la qualité de dépositaires des défendeurs, en a déduit que la fin de non-recevoir tirée du cumul des responsabilités n’était plus pertinente et l’a rejetée.

Mme [B] soutient que l’action des consorts [R] est irrecevable comme étant contraire au principe de non cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle en ce qu’elle est ambiguë car semblant se fonder sur la responsabilité contractuelle, tout en invoquant dans le dispositif de leurs dernières conclusions un fondement délictuel à savoir l’article L.121-1 du code de propriété intellectuelle.

Les consorts [R] répondent que :

– la règle du non cumul des responsabilités n’est pas une condition de recevabilité de la demande mais une règle de fond,

– elle n’interdit pas au demandeur, lorsque la situation est susceptible de recevoir plusieurs qualifications, de s’appuyer à la fois sur la responsabilité contractuelle et sur la responsabilité extracontractuelle,

– par ailleurs, la règle du non-cumul n’est pas applicable lorsque la responsabilité découle de la loi, telle celle prévue à l’article L.442-6 I du code de commerce,

– en l’espèce, l’article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle n’institue pas une responsabilité délictuelle mais un droit dont la violation peut intervenir dans le cadre d’un contrat ou indépendamment d’un contrat et en application de celui-ci l’auteur dispose sur son ‘uvre d’un droit extrapatrimonial, attaché à sa personne qui est perpétuel, inaliénable et imprescriptible,

– l’existence d’un contrat de dépôt vente ou de prêt n’emporte aucune dérogation à la jouissance de ce droit,

– la cour d’appel de Douai a jugé à la suite de la destruction d’une oeuvre que le dépositaire avait manqué à son obligation de restitution et cumulativement que cette destruction de l’oeuvre portait atteinte au droit moral de l’auteur.

Bien qu’ils visent l’article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle dans le dispositif de leurs conclusions, les consorts [R] n’articulent aucun moyen sur ce fondement mais forment leurs demandes sur la responsabilité contractuelle des ayants droit d'[I] [E] au titre d’un contrat emportant une obligation de restituer, peu important qu’il s’agisse d’un dépôt ou d’un prêt.

Outre qu’il n’est pas interdit par principe au créancier d’une obligation contractuelle de se prévaloir à un autre titre d’une responsabilité extracontractuelle, la demande des consorts [R] est dénuée d’ambiguïté.

Cette fin de non-recevoir est en conséquence également rejetée.

Sur la responsabilité des ayants droit d'[I] [E]

Pour rejeter la demande en indemnisation fondée sur la violation des obligations pesant sur le dépositaire, le tribunal a jugé que :

– les décisions précédentes n’ont pas statué spécifiquement pour le mobile « Un verre et deux cuillères » sur l’existence d’un contrat de dépôt conclu entre les parties,

– il n’est établi ni les conditions ni la date ni l’existence même d’une remise du mobile « Un verre et deux cuillères » par l’artiste [R] à son galeriste [E] qui l’aurait reçu à charge d’être gardé ou restitué en nature,

– les ayants droit de [R] échouent à démontrer l’existence d’un contrat de dépôt conclu entre [Y] [R] et [I] [E].

Les consorts [R] soutiennent que :

– le jugement méconnaît l’autorité de chose jugée des précédentes décisions rendues entre les parties qui ont irrévocablement jugé que les consorts [E] étaient tenus de restituer les ‘uvres qu'[I] [E] avait reçues d'[Y] [R], pour certaines en vertu d’un contrat de dépôt, pour d’autres en vertu d’un contrat de prêt, l’un et l’autre contrat emportant obligation de les restituer aux ayants droits de l’artiste,

– [I] [E] était commerçant de sorte que la preuve est libre à son égard conformément aux dispositions de l’article L.110-3 du code de commerce,

– les développements de M. [E] et Mme [B] relatifs à l’application de l’article 1924 du code civil et à la nécessité d’un écrit sont donc inopérants,

– la qualification juridique du contrat résulte du constat opéré par les précédentes décisions de ce que les oeuvres étaient déposées auprès de la galerie en vue de leur commercialisation sauf lorsque l’artiste demandait à les conserver, en sorte que dans les deux cas, il s’agissait d’un dépôt que ce soit pour vendre ou pour conserver.

M. [E] estime que :

– les consorts [R] ne prouvent pas l’existence d’un contrat de dépôt entre [I] [E] et [Y] [R],

– celui qui se prévaut d’un contrat de dépôt doit prouver la remise de la chose et le titre de la remise, à savoir une convention manifestant l’engagement en qualité de dépositaire,

– il est inopérant d’alléguer de la prétendue liberté de la preuve en matière commerciale pour tenter d’écarter la règle de preuve prévue par l’article 1924 du code civil,

– en l’espèce, il n’existe aucun contrat écrit entre les parties, ni commencement de preuve par écrit établissant que le mobile aurait été remis par [Y] [R] à [I] [E] dans le cadre d’un dépôt simple ou de vente,

– les relations contractuelles entre [Y] [R] et son marchand [I] [E] n’ont jamais été formalisées dans un écrit, comme le veut l’usage dans ce secteur, leur relation commerciale reposant sur un mécanisme d’avances de sommes d’argent à l’artiste en contrepartie de cessions d”uvres d’art au marchand,

– si leur possession a été jugée précaire, faute de justifier d’un écrit actant du transfert de propriété, cela ne fait pas d’eux des dépositaires en l’absence d’un écrit en ce sens,

– en tout état de cause, faute de produire un contrat écrit et signé, pour un objet que les consorts [R] valorisent à des montants bien supérieurs à 1 500 euros, ceux-ci ne rapportent pas la preuve d’un dépôt au sens de l’article 1924 du code civil,

– les consorts [R] ne prouvent pas plus l’existence d’un contrat de prêt entre [I] [E] et [Y] [R],

– ils ne peuvent pas soutenir qu'[Y] [R] aurait prêté son oeuvre à [I] [E]

pendant de nombreuses années, la date de la remise n’étant pas prouvée, sans jamais apparaître en qualité de prêteur dans les expositions et sans jamais en solliciter la restitution,

– les décisions de justice invoquées par les consorts [E] n’ont jamais reconnues l’existence d’un contrat de dépôt ou de prêt mais seulement que la possession d'[I] [E] était entachée de précarité et ne se sont pas prononcées sur la nature de la relation entre l’artiste et son marchand,

– les consorts [R] ne peuvent déduire de la difficulté probatoire à laquelle ils ont été confrontés pour prouver leur propriété des conséquences contractuelles quelles qu’elles soient,

– c’est uniquement parce que M. [L] [N] leur a restitué le mobile ‘Un verre et deux cuillères’ qui figurait dans la déclaration de succession d'[I] [E] qu’ils ont détenu cette oeuvre et ont considéré en être propriétaires,

– plusieurs situations juridiques peuvent justifier une obligation de restitution d’un bien,

– si les consorts [R] avaient été en mesure de prouver l’existence d’un contrat comprenant une obligation de restitution tel que l’article 1353 du code civil les y oblige, ils n’auraient pas été contraints de démontrer la précarité de la possession des consorts [E] puisque l’obligation de restitution née du contrat aurait suffi à fonder la solution,

– subsidiairement, le prétendu contrat de dépôt ou de prêt a pris fin à la mort d'[I] [E] en 1981 en raison de son caractère intuitu personae.

Mme [B] fait valoir que :

– les décisions précédentes n’ont pas jugé que l’oeuvre litigieuse avait fait l’objet soit d’un prêt soit d’un dépôt par l’artiste à son galeriste,

– l’autorité de la chose jugée ne porte que sur la restitution de certaines oeuvres,

– les allégations des consorts [R] sur l’autorité de la chose jugée des décisions précédentes sont vagues et imprécises, eux-mêmes étant incapables de se prononcer sur la nature du contrat,

– les consorts [R] ne démontrent pas l’existence d’un contrat de dépôt concernant l’ouvre litigieuse, contrat dont les conditions ne sont pas réunies,

– attaquée comme dépositaire, elle doit être crue lorsqu’elle déclare que l’oeuvre n’a pas été remise en dépôt à [I] [E] par application de l’article 1924 du code civil,

– les consorts [R] échouent également à rapporter la preuve d’un contrat de prêt.

Si les motifs d’une décision ne bénéficient pas de l’autorité de la chose jugée et ne peuvent être pris en considération pour justifier un nouveau droit d’agir, il n’est pas pour autant interdit d’éclairer la portée du dispositif d’une décision par ses motifs.

Sur l’action en revendication de propriété de plusieurs oeuvres initiée par les consorts [R], l’arrêt de la présente cour rendu le 26 novembre 2010, devenu irrévocable, a tiré de ses constatations la conclusion que la possession d'[I] [E] était entachée de précarité de sorte que ses héritiers ne pouvaient utilement bénéficier de la présomption de propriété instaurée par l’ancien article 2279 du code civil. Il a donc par voie de conséquence condamné les consorts [E] à remettre sous astreinte aux consorts [R] plusieurs oeuvres dont ‘Un verre et deux cuillères’, précisant que les consorts [E] reconnaissaient les ‘détenir’.

L’arrêt de la Cour de cassation du 22 mars 2022 ayant rejeté le pourvoi formé par les consorts [E] à l’encontre de cet arrêt a estimé que la cour d’appel avait souverainement estimé que les écrits et documents produits établissaient la détention précaire d'[I] [E].

L’arrêt de la présente cour rendu le 14 janvier 2015, devenu irrévocable en raison du désistement du pourvoi formé par les consorts [E], en suite de la réouverture des débats ordonnée dans l’arrêt précédent, ne concerne que l’indemnisation des consorts [R] au titre de trois autres oeuvres.

Ainsi et contrairement à ce qui est allégué par les consorts [R] aucune de ces décisions n’a statué sur l’existence d’un contrat de dépôt ou de prêt s’agissant de l’oeuvre ‘Un verre et deux cuillères.’, de sorte que le moyen tiré de l’autorité de la chose jugée attachée à celles-ci pour fonder une responsabilité contractuelle est inopérant.

Il appartient dans ces conditions aux consorts [R] de rapporter la preuve de l’un ou l’autre des contrats dont l’existence est prétendue, préalable nécessaire à la démonstration d’une faute dans l’exécution des obligations en découlant.

Aux termes de l’article 1915 du code civil, ‘le dépôt, en général est un acte par lequel on reçoit la chose d’autrui à la charge de la garder et de la restituer en nature.’

L’article 1921 du même code précise que ‘Le dépôt volontaire se forme par le consentement réciproque de la personne qui fait le dépôt et de celle qui le reçoit.’

L’article 1924 ajoute que lorsque le dépôt d’une valeur supérieure à 1 500 euros n’est pas prouvé par écrit, celui qui est attaqué comme dépositaire en est cru sur sa déclaration, soit pour le fait même du dépôt, soit pour la chose qui en faisait l’objet soit pour le fait de sa restitution.

La règle de l’article L.110-3 du code de commerce sur la liberté de la preuve entre commerçants ne peut conduire à écarter cette règle de preuve spécialement prévue par la loi.

Il est constant qu’aucun contrat de dépôt écrit relatif à l’oeuvre litigieuse n’a existé entre les auteurs des parties.

Par ailleurs, le mobile litigieux vaut à tout le moins, selon les consorts [E], la somme de 7 620 euros correspondant au prix de la restauration à dire d’expert.

Les consorts [E] doivent donc en application des dispositions de l’article 1924 du code civil être crus lorsqu’ils déclarent que l’oeuvre n’a pas été remise en dépôt à [I] [E].

De surcroît, le parcours de l’oeuvre retracé dans les pièces produites (1-1 et 1-2 de M. [E], 12 à 14, 22 à 28 et 34 des consorts [R]), et la présentation qui en est faite lors des différentes expositions où elle a été présentée, ne mentionnent ni la date de sa remise à [I] [E], ni celui-ci, la société [E]-[M] ou les galeries [E] de [Localité 16], [Localité 13], [Localité 14] ou [Localité 9] en qualité de dépositaire mais laissent à penser, comme prétendu par les consorts [E] au cours de ces procédures, qu’ils détenaient cette oeuvre en qualité de propriétaires.

Ainsi, et comme justement retenu par les premiers juges, les consorts [R] ne rapportent pas la preuve de la remise de l’oeuvre par [Y] [R] à [I] [E] à charge pour celui-ci de la garder et de la restituer en nature.

Le prêt est, selon l’article 1880 du code civil, un contrat par lequel une partie livre une chose à l’autre pour s’en servir, à la charge pour le preneur de la rendre après s’en être servi.

En l’espèce, il n’est pas plus justifié de l’existence d’un contrat écrit de prêt concernant le mobile ‘Un verre et deux cuillères’.

Les consorts [R], s’ils allèguent de l’existence d’un tel contrat, ne produisent pas plus de pièce susceptible de constituer un commencement de preuve d’un tel contrat.

En effet, [Y] [R] n’apparaît pas en qualité de prêteur au cours des expositions dont le parcours est retracé dans les pièces susvisées.

Il n’est pas plus justifié d’un bulletin de prêt pour cette oeuvre, étant relevé que dans leurs conclusions en réponse n°4 notifiées le 26 novembre 2017 dans l’instance devant le tribunal qui a abouti au jugement déféré, dans lesquelles ils concluaient à l’existence d’un contrat de dépôt vente, les consorts [R] reconnaissaient eux même que l’arrêt du 26 novembre 2010, qui ‘constate, en outre, mais pas pour le mobile suspendu ‘Un verre et deux cuillères’ que certaines oeuvres en litige faisaient l’objet de prêts.’, concluait à l’absence de tout contrat de prêt concernant l’oeuvre litigieuse.

Ils échouent donc également dans l’administration de la preuve d’une remise entre [Y] [R] et [I] [E] à charge pour le preneur de la rendre après.

Enfin, les consorts [R] ne démontrent pas l’existence par les ayants droit d'[I] [E] d’une atteinte au droit moral de l’auteur sur son oeuvre.

Dans ces conditions, les demandes en indemnisation résultant d’une faute commise par le dépositaire ou l’emprunteur ne peuvent qu’être rejetées en confirmation du jugement.

Sur les demandes reconventionnelles

Le tribunal a considéré que la preuve d’une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part des demandeurs, lesquels avaient pu légitimement se méprendre sur l’étendue de leurs droits, n’était pas rapportée.

M. [E] soutient que l’action est abusive en ce qu’elle a été intentée près de cinq ans après la restitution du mobile dans le but de profiter de la hausse exponentielle de la valeur des ‘uvres d'[Y] [R] et de lui nuire alors qu’il est âgé de 93 ans.

Mme [B] prétend que l’action introduite s’inscrit dans une stratégie de nuisance et d’étouffement manifeste des héritiers d'[P] [E] qui supportent depuis 15 ans de multiples procédures. Elle souligne que les héritiers [R], qui ont attendu la veille de l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de la restitution pour agir, cherchent à instrumentaliser la justice, alors qu’un lien d’instance et des négociations étaient actifs après la restitution.

Les consorts [R] répondent que ces derniers sont mal venus de leur reprocher les longues années de procédure alors qu’ils ont été contraints d’agir en justice pour obtenir la restitution des ‘uvres leur appartenant et détenus abusivement par les consorts [E]. Ils ajoutent que cette demande de réparation ne pouvait pas être faite dans les précédentes procédures puisque la cour était dessaisie du litige relatif à l’oeuvre en cause. Ils estiment que le comportement fautif et l’intention de nuire allégués ne sont pas établis et qu’ils n’ont fait qu’user de leur droit d’agir en justice.

Conformément à l’article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés.

La faute faisant dégénérer en abus le droit d’agir en justice doit être caractérisée par la partie qui l’invoque, étant rappelé que l’accès au juge est un principe fondamental et que l’exercice d’une voie de recours ne peut constituer un abus de droit que dans des circonstances particulières le rendant fautif.

Il n’est justifié d’aucun abus de procédure de la part des appelants qui, comme justement retenu par le tribunal, ont pu se méprendre sur l’étendue de leurs droits, en sorte que les demandes indemnitaires formées de ce chef doivent être rejetées.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions relatives aux dépens et aux frais de procédure de première instance sont confirmées.

Les dépens d’appel doivent incomber aux consorts [R], partie perdante, lesquels sont également condamnés à payer à Mme [B] et à M. [E] la somme de 12 000 euros chacun, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de sa saisine,

Rejette les fin de non-recevoir soulevées par M. [Z] [E] et Mme [C] [B],

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute M. [H] [A] et Mme [K] [A], en qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] de leurs demandes en réparation d’un manquement aux obligations d’un contrat de prêt,

Condamne M. [H] [A] et Mme [K] [A], en qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] aux dépens d’appel avec droit de recouvrement direct au profit des Selarl Lexavoué [Localité 14]-[Localité 15] et JRF et associés, représentée par [F] [D], pour les frais dont elles auraient fait l’avance, conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

Condamne M. [H] [A] et Mme [K] [A], en qualité d’ayants droit de [O] [A], MM. [T] [X] et [Y] [U] [X] à payer à Mme [B] et à M. [E] la somme de 12 000 euros chacun, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente,

 


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