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SOC.
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 31 mai 2018
Rejet
Mme X…, conseiller doyen faisant fonction de président
Arrêt n° 852 F-D
Pourvoi n° H 16-27.279
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par M. Thomas Y…, domicilié […] ,
contre l’arrêt rendu le 13 octobre 2016 par la cour d’appel de Versailles (5e chambre), dans le litige l’opposant à la société Editialis, société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,
défenderesse à la cassation ;
En présence : du Syndicat national des journalistes CGT, dont le siège est […] ,
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 3 mai 2018, où étaient présents : Mme X…, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z…, conseiller référendaire rapporteur, Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller, Mme A…, avocat général, Mme Jouanneau, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Z…, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. Y…, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Editialis, l’avis de Mme A…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 13 octobre 2016), que M. Y… a été engagé à compter du 3 juillet 1992 en qualité de reporter-photographe par la société Editialis, moyennant un « salaire de 5 500 francs [soit 838,47 euros] brut mensuel x 11, congés payés et prorata treizième mois inclus sur la base d’un tiers temps soit 57 heures/mois modulées en fonction de nos propres besoins » ; que par acte du 19 avril 2013, le salarié a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein, ainsi que la condamnation de la société Editialis à lui payer les rappels de salaire correspondant, outre diverses sommes à titre de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes de rappels sur primes d’ancienneté, de primes de treizième mois, outre les congés payés afférents, ainsi que de dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation d’exécuter de bonne foi le contrat de travail, alors, selon le moyen :
1°/ alors que, à l’appui de sa demande tendant à obtenir diverses sommes relatives à la prime d’ancienneté, au treizième mois et au manquement de l’employeur à son obligation d’exécuter de bonne foi le contrat de travail, M. Y… avait démontré que son employeur lui avait injustement appliqué le statut de pigiste alors qu’il devait bénéficier de la qualité de journaliste non pigiste de sorte qu’il avait été indûment privé de ce statut et en particulier, du droit d’être rémunéré sur douze mois, de voir sa prime d’ancienneté et son treizième mois calculés en conséquence, mais encore que son employeur, arguant d’un prétendu statut de pigiste, l’avait privé d’un certain nombre de dispositions du code du travail et des avantages applicables aux autres salariés tels que le statut de cadre, l’évolution professionnelle, ou encore l’augmentation de sa rémunération, autant d’éléments justifiant que lui soient octroyées diverses sommes à titre de rappel de salaire au titre du douzième mois sans fourniture de travail, de prime d’ancienneté, de treizième mois et de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ; qu’en retenant néanmoins, pour débouter M. Y… de ses demandes à ce titre, qu’il convient de confirmer le jugement en ce qu’il n’a pas requalifié la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps plein et a débouté le salarié de ses demandes subséquentes de primes d’ancienneté et de treizième mois et de manquement de l’employeur à son obligation d’exécuter loyalement le contrat de travail quand ces demandes n’étaient pas uniquement liées à celle relative à la requalification de son contrat de travail à temps partiel mais reposaient notamment sur la qualité de journaliste professionnel collaborateur régulier de M. Y…, la cour d’appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2°/ alors que, dans ses écritures, M. Y… avait démontré que dès lors que son employeur lui appliquait sans fondement un statut de pigiste occasionnel alors qu’il était collaborateur régulier, il était privé du bénéfice de son salaire pour le mois d’août et en conséquence, d’une partie de son ancienneté et de son treizième mois mais encore de l’ensemble des avantages liés à la qualité de journaliste professionnel régulier à savoir une part de rémunération variable, le statut de cadre, l’évolution professionnelle mais encore l’augmentation régulière de sa rémunération ; qu’en se bornant à affirmer, pour débouter M. Y… de ses demandes sur ce point, que le débouté de sa demande de requalification en temps complet emportait celui des demandes subséquentes relatives à l’ancienneté, le treizième mois et l’exécution déloyale du contrat de travail, sans rechercher, ainsi cependant qu’elle y était invitée, si le statut de journaliste professionnel collaborateur régulier, dont elle a constaté qu’il s’appliquait à M. Y…, n’imposait pas à l’employeur de faire bénéficier M. Y… de l’ensemble des dispositions du droit du travail et des celles applicables aux autres salariés de l’entreprise, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 7111-2 et L. 7111-3 du code du travail ;
3°/ alors que l’employeur d’un journaliste, collaborateur régulier, s’il n’est pas tenu de lui fournir un volume de travail constant, doit lui fournir du travail à l’instar de tout autre salarié ; qu’en retenant que la discussion relative au statut de M. Y… était vaine dès lors que celui-ci bénéficiait d’une rémunération mensuelle garantie, après avoir pourtant constaté que M. Y… avait été privé de toute rémunération chaque mois d’août et du bénéfice d’une prime d’ancienneté et d’un treizième mois calculés sur cette base, la cour d’appel, qui a statué par un motif inopérant, a violé les articles L. 7111-2 et L. 7111-3 du code du travail ;
4°/ alors que M. Y… avait démontré, que, nonobstant la question de sa rémunération, la société Editialis, prenant argument de son statut de collaborateur irrégulier, lui avait toujours refusé le bénéfice des avantages dont bénéficiaient les salariés réguliers, tels que, notamment, la rémunération variable, l’évolution professionnelle, l’augmentation régulière de sa rémunération ou encore le statut de cadre, ce qui caractérisait une exécution déloyale du contrat de travail ; qu’en retenant que la discussion relative au statut de M. Y… était vaine dès lors que celui-ci bénéficiait d’une rémunération mensuelle garantie, la cour d’appel, qui a statué par un motif inopérant, a derechef violé l’article L. 1121-1 du code du travail, ensemble l’article 1134 du code civil alors en vigueur ;
Mais attendu qu’ayant retenu, ainsi que le revendiquait M. Y…, que ce dernier était un collaborateur régulier de la société Editialis dès lors que cette société s’était engagée à lui verser une rémunération forfaitaire constante quel que soit le nombre de reportages réalisés, la cour d’appel en a exactement déduit que cette qualification, non exclusive d’une rémunération à la pige, était en elle-même sans incidence sur son statut ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à temps complet, alors, selon le moyen :
1°/ alors que lorsque le contrat de travail à temps partiel est présumé avoir été conclu à temps complet, il appartient à l’employeur de démontrer quelle était la durée exacte de travail convenue et que le salarié était en mesure de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il ne se trouvait pas à la disposition permanente de son employeur ; que tel n’est pas le cas du salarié laissé dans l’ignorance du rythme auquel il devait travailler et soumis à des variations permanentes quant à ses horaires ou jours de travail ; qu’en déboutant M. Y… de sa demande tendant à ce que son contrat à temps partiel soit requalifié en contrat de travail à temps complet après avoir pourtant constaté que M. Y… n’était prévenu que deux jours avant chaque reportage à effectuer, outre les commandes en urgence, et que les jours et le nombre de reportages variaient d’un mois sur l’autre, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses propres constatations, a violé l’article L. 3123-14 du code du travail ;
2°/ alors que, en affirmant, pour se déterminer comme elle l’a fait, que compte tenu du faible nombre de reportages par mois, M. Y… n’était pas à la disposition permanente de la société Editialis, la cour d’appel, qui a statué par un motif inopérant, a derechef violé l’article L. 3123-14 du code du travail ;
3°/ alors que M. Y… avait démontré, pièces à l’appui, que son rythme de travail était totalement irrégulier, qu’il ne disposait d’aucun planning et était informé en moyenne deux jours avant chaque reportage pour des rendez-vous déjà fixés, que sa lettre d’engagement précisait en ce sens que ses heures de travail pouvaient être modulées en fonction des besoins de l’entreprise et qu’il devait, de ce fait, se tenir à la disposition permanente de l’employeur sans connaître par avance son rythme de travail ; qu’en se bornant à affirmer que M. Y… ne pouvait soutenir qu’il était à la disposition permanente de l’employeur compte tenu du faible nombre de reportage, sans rechercher si les modalités d’organisation de son temps de travail n’aboutissaient pas, nonobstant le nombre de reportages effectués, à ce qu’il se tienne à la disposition permanente de son employeur, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3123-14 du code du travail ;
4°/ alors que, en retenant encore, pour statuer comme elle l’a fait, que M. Y… exerçait d’autres activités, la cour d’appel qui a statué par un motif inopérant, a derechef violé les dispositions de l’article L. 3123-14 du code du travail ;
5°/ alors que en affirmant en outre qu’il importait peu que les autres activités de M. Y… n’aient pas été lucratives, la cour d’appel a derechef violé l’article L. 3123-14 du code du travail ;
6°/ alors que M. Y… avait démontré, pièces à l’appui, et sans être contesté sur ce point, que l’essentiel de ses autres activités, par ailleurs minimes au regard de l’absence de toute prévisibilité de ses horaires, étaient réalisées les week-ends, que les photos visées avaient été prises au cours du mois d’août, période où la société Editialis ne lui fournissait pas d’activité, ou dans les années 1980/1990, alors qu’il ne travaillait pas encore pour le compte de son employeur ; qu’en se bornant à se référer aux recherches de l’employeur et à entériner ses dires, sans rechercher, ainsi cependant qu’elle y était invitée, si les activités visées n’avaient pas été réalisées pendant les wee-kends, l’été ou encore à des périodes où M. Y… ne travaillait pas encore pour le compte de la société Editialis, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3123-14 du code du travail ;
7°/ alors que, en s’abstenant de répondre aux écritures de M. Y… lequel avait démontré que l’essentiel de ses autres activités, par ailleurs minimes au regard de l’absence de toute prévisibilité de ses horaires, étaient réalisées les week-ends, que les photos visées avaient été prises au cours du mois d’août, période où la société Editialis ne lui fournissait pas d’activité, ou dans les années 1980/1990, alors qu’il ne travaillait pas encore pour le compte de son employeur, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;