Votre panier est actuellement vide !
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 10
ARRÊT DU 29 Janvier 2020
(n° , pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 19/07413 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAH4K
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Juin 2019 par le Cour d’Appel de PARIS RG n° 15/00404
REQUÊTE EN INTERPRÉTATION
DEMANDERESSE A LA REQUÊTE
Madame [G] [Y]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Marta BUKULIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D0486
DÉFENDEURESSE A LA REQUÊTE
Société FRANCE TELEVISIONS
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Fabrice AUBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0100
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Novembre 2019, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de Chambre
Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère
Madame Florence OLLIVIER, Vice Présidente placée faisant fonction de Conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 19 juillet 2019
Greffier : M. Julian LAUNAY, lors des débats
ARRET :
– Contradictoire
– mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
– signé par Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de Chambre et par Monsieur Julian LAUNAY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu la requête de Madame [G] [Y] notifiées le 18 juillet 2019 et les conclusions de la société SA France TELEVISIONS notifiées le 23 octobre 2019 et développées à l’audience du 13 novembre 2019.
EXPOSÉ DU LITIGE
Madame [Y] a été embauchée par la société France TELEVISIONS le 7 octobre 1993 en qualité de journaliste pigiste rédacteur ; les parties ont régularisé un contrat à durée indéterminée en qualité de rédacteur reporter le 1er octobre 1998 avec une reprise d’ancienneté au 17 mars 1994 dans la profession de journaliste et au 7 octobre 1993 dans la société.
Madame [Y] a ensuite occupé les postes de journaliste spécialisé à compter du 1er janvier 2001, grand reporter à compter du 1er janvier 2004 et grand reporter palier 1 depuis le 15 mars 2012 après la fusion de France 2, France 3, France 4, France 5 et RFO.
La convention collective est celle des journalistes et la société emploie plus de 10 salariés.
Des écarts de salaire entre hommes et femmes ont été relevés par les représentants syndicaux et des accords pour un rapprochement salarial ont été signés en 1997, 1999, et les 13 juillet 2007, 28 mai 2013 et 1er décembre 2017.
Dès octobre 2009, Madame [Y] s’est plaint de sa rémunération et le 5 juin 2013, elle a saisi le conseil de prud’hommes de Paris qui par jugement rendu le 10 décembre 2014 l’a déboutée de ses demandes.
Interjetant appel le 9 janvier 2015, la cour de céans a été saisie du litige et elle a rendu un arrêt le 11 juin 2019 dans les termes suivants :
« Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté l’ensemble des demandes de Madame [Y] et l’a condamnée aux dépens.
Statuant à nouveau,
Dit qu’il doit être attribué à Madame [G] [Y] une revalorisation au palier 2 de grand reporter depuis le 1er janvier 2013,
Renvoie les parties à faire le compte des rappels de salaires dus à Madame [G] [Y] pour la période du 1er janvier 2013 au 1er janvier 2017, sauf, en cas de difficulté, à l’une ou l’autre des parties à saisir la juridiction par voie de simple requête,
Dit que pour la période à compter du 1er janvier 2017, le calcul opéré par les parties sur le palier 2 devra tenir compte de l’augmentation individuelle accordée à Madame [Y] et appliquer une augmentation similaire en fonction du salaire atteint,
Condamne la société SA France TELEVISIONS à payer à Madame [Y] la somme de 5.000 euros au titre du préjudice subi,
Dit que la société SA France TELEVISIONS a manqué à son obligation d’adaptation et de formation conformément aux dispositions de l’article L 6321-1 du code du travail,
Condamne la société SA France TELEVISION à payer à Madame [G] [Y] une somme de 3.000 euros à ce titre,
Ordonne la délivrance de bulletins de paye rectifiés, sans qu’il y ait lieu de prononcer une astreinte,
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,
Condamne la société SA France TELEVISIONS à payer à Madame [G] [Y] la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société SA France TELEVISIONS aux dépens de première instance et d’appel » .
Le 18 juillet 2019, Madame [Y] a saisi de nouveau la cour d’appel d’une requête en interprétation et indique que certaines dispositions de l’arrêt ont été exécutées :
o L’indemnisation pour non-respect du principe d’égalité (5 000 €),
o L’indemnisation pour défaut de formation professionnelle entre 2009 et 2016 (3 000 €),
o Les frais irrépétibles (2 500 €).
Mais que les parties sont en désaccord sur la partie suivante du dispositif de l’arrêt :
« Dit qu’il doit être attribué à Madame [G] [Y] une revalorisation au palier 2 de Grand Reporteur depuis le 1er janvier 2013.
Renvoie les parties à faire le compte des rappels de salaires dus à Madame [G] [Y] pour la période du 1er janvier 2013 au 1er janvier 2017, sauf, en cas de difficulté, à l’une ou l’autre des parties à saisir la juridiction par voie de simple requête.
Dit que pour la période à compter du 1er janvier 2017, le calcul opéré par les parties sur le palier 2 devra tenir compte de l’augmentation individuelle accordée à Madame [Y] et appliquer une augmentation similaire en fonction du salaire atteint. »
Elle demande à la Cour de :
– Confirmer qu’il convient de calculer les rappels de salaires depuis janvier 2013 sur la base du salaire moyen Grand Reporteur Palier 2 et non sur le salaire minimum,
– Confirmer que c’est sur la base du décompte établi par elle que la société France Télévisions doit procéder au règlement des rappels de salaire depuis janvier 2013, à charge pour l’entreprise de procéder aux ventilations utiles notamment dans le cadre des bulletins de paie 2019 (salaire de base, prime d’ancienneté, compensation forfait jour et 13ème mois).
– Condamner la société France Télévisions à lui verser la somme de 1200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
France Télévisions propose de fixer la revalorisation salariale de Madame [Y] au niveau Grand Reporter Palier 2, et de lui accorder un rappel de salaire du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2018 de 19.161,78 euros brut, et à compter du 1er janvier 2019, de fixer le salaire à la somme de 4.773,69 euros (salaire de base, prime ancienneté, compensation forfait jours) et de débouter la salariée de ses demandes et de dire que chacune des parties conservera ses dépens et frais irrépétibles.
MOTIFS
Madame [Y] fait valoir que l’arrêt a indiqué à plusieurs reprises que le salaire devait être calculé sur le salaire médian « Grand Reporter Palier 2 » à compter du 1er janvier 2013 auquel il convenait d’appliquer l’augmentation individuelle en fonction du salaire atteint, alors que France Télévisions a effectué un calcul sur le salaire minimal des « Grands Reporters Palier 2 » ; elle indique avoir établi son calcul sur la base du salaire moyen des « Grands Reporters Palier 2 » tel qu’il ressort des négociations annuelles obligatoires versées aux débats et que l’employeur reste lui devoir la somme de 55.218,02 euros brut pour la période de janvier 2013 à juin 2019.
France Télévisions soutient avoir appliqué une revalorisation au palier 2 à compter du 1er janvier 2013 en appliquant les dispositions de l’article 2.1.2.4. du livre 3 de l’accord collectif du 28 mai 2013, soit en augmentant le salaire de 5% correspondant au changement de palier au 1er janvier 2013 et conclut que le salaire de Madame [Y] étant plus élevé que le salaire minimal du palier 2, le calcul est satisfaisant.
Mais il doit être relevé que si le dispositif de l’arrêt mentionne la revalorisation au palier 2 de Grand Reporter depuis le 1er janvier 2013 en tenant compte de l’augmentation individuelle accordée à Madame [Y] (en 2017) et d’« appliquer une augmentation similaire en fonction du salaire atteint », et a renvoyé les parties à faire les comptes, dans les motifs, l’arrêt a énoncé clairement que le calcul devait être fait sur le « salaire moyen palier 2 qui doit lui être accordé depuis 2013 » ;
Par ailleurs le calcul de la société France Télévisions, qui ne correspond pas à ce salaire moyen, fait ressortir une proposition de rémunération en 2019 de 4.773,69 euros brut soit 57.284,28 euros annuel, alors qu’en 2017, le salaire de Madame [Y] était de 58.649,37 euros, soit un salaire supérieur à ce que propose in fine France Télévisions qui soutient que le salaire moyen mentionné par les documents de NAO agrège des composantes de rémunération très variées (situation familiale, situation géographique et compétence) ce qui ne permet pas de le comparer avec la situation personnelle de la salariée, sans toutefois que France Télévisions ne démontre cette assertion.
De plus la Cour avait relevé qu’en 2017, le document intitulé « négociation annuelle obligatoire 2017 » faisait apparaitre que le salaire de Madame [Y] de 58.649,37 euros était en dessous du salaire moyen du palier 1 et bien évidemment très inférieur au salaire moyen du palier 2 qui devait lui être accordé.
Mais c’est à tort que Madame [Y] a retenu un salaire moyen composé d’anciennetés comprises entre 20 à 29 ans et 30 ans et plus, alors que son ancienneté sera de 30 ans le 7 octobre 2023, et qu’il doit être retenu un salaire moyen pour le palier 2 Grand Reporter (homme-femme) avec une ancienneté comprise entre 20 et 29 ans soit :
-2013 ‘ 60.134 euros
-2014 ‘ 62.815 euros
-2015 ‘ 64.149 euros
-2016 ‘ 64.610 euros
-2017 ‘ 64.788 euros
Compte tenu des salaires perçus par Madame [Y] qui ne sont pas discutés, le rappel de salaire du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2017 est de 38.304,10 euros ; il appartiendra aux parties de poursuivre leur calcul de cette façon en tenant compte des éventuelles augmentations individuelles accordées à Madame [Y] en 2018 et 2019.
Succombant, chacune des parties conservera la charge de ses dépens et l’équité commande de débouter Madame [Y] de sa demande au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Vu la requête en interprétation de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 11 juin 2019,
Dit qu’il doit être attribué à Madame [G] [Y] une revalorisation au palier 2 de grand reporter depuis le 1er janvier 2013, sur le salaire moyen homme-femme tel qu’il ressort des négociations annuelles de France Télévisions pour une ancienneté comprise entre 20 et 29 ans,
Condamne la société France Télévisions à payer à Madame [Y] la somme de 38.304,10 euros à titre de rappel de salaire du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2017,
Dit qu’il appartiendra aux parties de poursuivre leur calcul de cette façon en tenant compte des éventuelles augmentations individuelles accordées à Madame [Y] en 2018 et en 2019, et appliquer une augmentation similaire en fonction du salaire atteint, à charge pour l’employeur de procéder aux ventilations utiles et de délivrer des bulletins de paie conformes,
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,
Laisse aux parties la charge de leurs dépens et frais irrépétibles.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE