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COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 25 OCTOBRE 2011
N°2011/828
Rôle N° 10/05042
[V] [J]
C/
SAS ELIOT PRESS
Grosse délivrée le :
à :
Me Vianney FERAUD, avocat au barreau de PARIS
Me Grégoire HALPERN, avocat au barreau de PARIS
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de FREJUS en date du 04 Mars 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/357.
APPELANT
Monsieur [V] [J], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Vianney FERAUD, avocat au barreau de PARIS ([Adresse 3])
INTIMÉE
SAS ELIOT PRESS, demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Grégoire HALPERN, avocat au barreau de PARIS ([Adresse 1])
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 22 Septembre 2011, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Alain BLANC, Conseiller, chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Gisèle BAETSLE, Président
Monsieur Alain BLANC, Conseiller
Madame Fabienne ADAM, Conseiller
Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Octobre 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Octobre 2011
Signé par Monsieur Alain BLANC, Conseiller pour le Président empêché, et Madame Lydie BERENGUIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Monsieur [V] [J] est régulièrement appelant d’un jugement rendu le 4 mars 2010 par le Conseil de Prud’hommes de FRÉJUS qui a :
– dit qu’il a été embauché selon contrat à durée indéterminée à compter du 1 er octobre 1996 et qu’il a pris acte de la rupture de son contrat de travaille 17 juin 2009;
– dit que l’employeur n’a commis aucun manquement à ses obligations contractuelles et que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail doit s’analyser en une démission;
– dit que la Société ELIOT PRESS reconnaît devoir la prime d’ancienneté qui doit être fixée à hauteur de 10 857,60 euros,
– condamné la Société ELIOT PRESS à lui payer les sommes de:
– 10 857,56 euros au titre de la prime d’ancienneté.
– 500,00 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– débouté les parties du surplus de leurs prétentions.
– ordonné à la Société ELIOT PRESS de remettre à Monsieur [V] [J] le certificat de travail, et l’attestation Pôle Emploi.
Par des moyens qui seront analysés dans le corps du présent arrêt, l’appelant demande à la Cour de:
– confirmer le jugement en ce qu’il a dit qu’il a été embauché par la Société ELIOT PRESS selon contrat à durée indéterminée à compter du 1 er octobre 1996 ;
– condamné la Société ELIOT PRESS à lui payer la somme de 10 857, 60 euros à titre de prime d’ancienneté et 500,00 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile;
– infirmer pour le surplus et statuant à nouveau, condamner la Société ELIOT PRESS à lui payer les sommes de :
– 42 919, 22 euros à titre de rappel de salaires pour la période du 1er juillet 2004 au 19 juin 2009 ;
– 4 291, 92 euros au titre de la prime de 13ème mois y afférente;
– 3 576, 60 euros au titre des congés payés y afférents;
– ordonner la remise par la Société ELIOT PRESS de l’ensemble des justificatifs (commandes et factures) relatifs à l’exploitation des photographies dont il est l’auteur et qui ont été retenus pour le calcul de ses rémunérations, et ce sous astreinte de 200,00 euros par document et par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir;
– condamner la dite société à lui payer la somme de 55 617,74 euros à titre de remboursement de frais;
– condamner la dite société à lui payer la somme de 3 351, 83 euros au titre de la prime conventionnelle de matériel;
– dire que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail le 17 juin 2009, à son initiative, était justifiée par les fautes commises par la Société ELIOT PRESS et que, par conséquent, cette rupture doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse;
– condamner la Société ELIOT PRESS à lui payer les sommes suivantes :
– 115 360,44 euros à titre d’indemnité de licenciement;
– 17 747,75 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 1 774, 77 euros au titre des congés payés y afférents;
– 88 738, 80 euros à titre de dommages-intérêts du fait de l’absence de caractère réel et sérieux de son licenciement;
– dire que ces condamnations seront majorées des intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes;
– ordonner la remise d’un certificat de travail, d’une attestation POLE EMPLOI et des bulletins de paye conformes à la décision, le tout sous astreinte de 200,00 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours suivant notification de l’arrêt à intervenir;
– condamner la Société ELIOT PRESS à lui payer la somme de 2 000,00 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la non-remise d’une attestation POLE EMPLOI à la rupture du contrat de travail;
– faire interdiction à la Société ELIOT PRESS d’exploiter les photographies dont Monsieur [V] [J] est l’auteur, prises entre le 1er octobre 1996 et le 17 juin 2009, et ce sous astreinte de 2000,00 euros par infraction constatée;
– condamner la Société ELIOT PRESS à lui la somme de 2 000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
La société intimée demande à la Cour de:
– infirmer le jugement en ce qu’il a reconnu l’existence d’un contrat de travail
– débouter l’appelant de toutes ses demandes, fins et conclusions.
à titre subsidiaire :
– débouter Monsieur [J] de sa demande au titre de rappel de salaires, remboursement de frais;
– dire et juger que la prime d’ancienneté due par la société ELIOT PRESS est de 7 298,69 euros et ordonner le différentiel réglé par l’Agence du fait du jugement,
– dire et juger que la prise d’acte de la rupture est en fait imputable à Monsieur [J] et doit produire les effets d’une démission et le débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions à ce titre;
En tout état de cause
– condamner Monsieur [J] au paiement de la somme de 10 000,00 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Vu les conclusions des parties oralement soutenues à l’audience;
Attendu que Monsieur [J] prétend avoir été engagé le 1er octobre 1996, sans contrat de travail écrit, en qualité de ‘ reporter photo pigiste ‘ par la société sus visée;
Attendu que, par lettre recommandée avec avis de réception du 17 juin 2009 , il a pris acte de la rupture des relations contractuelles en ces termes:
‘ A ma demande, par courrier du 15 mai 2009, mon avocat Maître Vianney FÉRAUD vous a écrit pour vous faire part d’un certain nombre de griefs que je reproche à votre Société.
Il vous a notamment demandé dans ce courrier de :
– lui confirmer que je suis employé par la Société ELIOT PRESS par un contrat à durée indéterminée et que mon ancienneté remonte au 1er octobre 1996 ;
– me préciser quels sont, au regard de la convention collective, ma qualification professionnelle, le barème de référence et le montant de mon salaire mensuel ;
– lui adresser, sur la base de ce salaire mensuel” l’arriéré de salaires qui m’ est dû en contrepartie du temps effectivement passé à la préparation et à la réalisation des photographies remis à votre société, congés payés et primes de 13ème mois y afférents, ainsi que les bulletins de paye correspondant
– lui adresser l’arriéré de salaires qui m’est dû au titre de ma rémunération variable et, en toute hypothèse, préciser les modes de calcul retenus ;
– lui adresser l’arriéré d’ancienneté qui m’est dû ainsi le bulletin de paye correspondant;
– lui m’adresser l’arriéré des frais professionnels que j’ai exposés dans le cadre de l’exécution de mon contrat de travail ;
– lui adresser un listing complet des photographies dont je suis l’auteur et dont votre Société est en possession et préciser, parmi ces photographies, quelles sont celles que votre Société a commercialisées et pour lesquelles je n’ai, à ce jour, reçu aucune rémunération.
– lui communiquer également l’ensemble des justificatifs (commandes et factures) relatifs à ces photographies.
Or, Maître Vianney FÉRAUD m’informe n’avoir reçu aucune réponse positive à ce courrier ni même le moindre justificatif.
Compte tenu de l’absence de réponse favorable à ces différentes demandes que j’estime parfaitement légitimes, je vous indique prendre acte de la rupture de notre contrat de travail et ce aux torts exclusifs de votre Société.
Vous voudrez bien de ce fait me remettre un travail, une attestation ASSEDIC, ainsi que sommes me revenant en exécution de son contrat certificat de le solde des de travail.
Enfin, vous devez considérer la présente comme une mise en demeure de ne plus reproduire, ni commercialiser auprès de tiers, les photographies originales en votre possession dont je suis l’auteur. (…)’ ;
Sur la qualité de journaliste et le contrat de travail:
Attendu que, selon les termes de l’ancien article L 761-2 du Code du Travail , devenu les articles L 7111-3, L 7111-4, L 7112-1 du dit code, le journaliste professionnel est celui qui a pour occupation principale, régulière et rétribuée l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques ou dans une ou plusieurs agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources;
que sont assimilés aux journalistes professionnels les collaborateurs directs de la rédaction :
rédacteurs-traducteurs, sténographes-rédacteurs, rédacteurs-réviseurs, reporters-dessinateurs, reporters-photographes, à l’exclusion des agents de publicité et de tous ceux qui n’apportent, à un titre quelconque qu’une collaboration occasionnelle ;
que toute convention par laquelle une entreprise de presse s’assure, moyennant
rémunération, le concours d’un journaliste professionnel au sens du premier alinéa du
présent article est présumée être un contrat de travail ;
que cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties ;
Attendu que c’est en vain que la société intimée , si elle reconnaît le statut de journaliste à l’appelant, soutient qu’elle n’a pas été liée avec celui-ci par une relation salariée ;
qu’en effet, un reporter photographe, doit selon les dispositions de l’article L 7111-4 du Code du travail et de l’article 1 er de la Convention collective des journalistes, être assimilé à un journaliste professionnel et bénéficier à ce titre des dispositions légales et conventionnelles propres à cette profession ;
qu’il ressort des éléments de la cause que l’appelant est titulaire de la carte de presse depuis le 10 avril 1986 et qu’en l’état de la présomption susvisée, il appartient à la société intimée, si elle conteste la nature du lien contractuel, d’apporter la preuve contraire ;
Attendu que, selon les termes de la circulaire du 25 novembre 2008 relative au régime d’affiliation des reporters photographes journalistes professionnels, la présomption n’a pas été écartée par le législateur en ce qui concerne les journalistes professionnels travaillant pour des agences de presse ;
que c’est justement que l’appelant fait valoir que si le dernier alinéa de l’article L 7112-1 du Code du Travail ne vise expressément que les entreprises de presse, le champ d’application de cet article doit s’apprécier par rapport au renvoi au premier alinéa de l’article où les agences de presse sont visées ;
que l’appelant fait en outre observer que la société intimée a délivré des bulletins de salaire, chaque mois, pendant treize années, portant mention des retenues salariales et patronales et visant la convention collective des journalistes ;
Attendu en outre que l’appelant fait justement valoir que l’existence du contrat de travail ressort en effet de la fourniture d’un travail, du paiement d’une rémunération, seuls revenus de l’appelant, et de l’existence d’un lien de subordination ce qui est caractérisé en l’espèce par la réalisation en qualité de photographe reporter, de milliers de photographies, exploitées par la société intimée, des 151 bulletins de paye établissant le paiement d’une rémunération mensuelle, et par le lien de subordination ;
qu’il est intéressant d’observer que seule la société intimée fixait le prix de cession du droit de reproduction des photos à des tiers et que le mode de calcul du salaire a été arrêté par la seule société, l’appelant n’ayant aucune politique personnelle de prix caractérisant l’exercice de l’activité de photographe indépendant ;
qu’il n’est pas non plus sans intérêt d’observer que l’appelant a été victime en 2005 d’un accident pris en charge au titre de la législation du travail et que l’appelant a également voté aux élections prud’homales en qualité de salarié ;
Attendu qu’il y a lieu de constater, entre autres éléments analysés par les premiers juges , que la société intimée remboursait à l’appelant ses frais professionnels ;
qu’il apparaît enfin que l’appelant recevait des directives de son employeur et ne jouissait nullement d’une totale liberté, comme ce dernier le prétend en vain, alors qu’il ressort également des éléments de la cause que l’appelant participait à un travail en équipe dans un service organisé et de manière exclusive ;
Attendu dès lors que c’est à bon droit que l’appelant soutient qu’une telle relation s’inscrit nécessairement dans un contrat de travail à durée indéterminée et qu’il s’en suit que les premiers juges , par des motifs que la Cour adopte, ont fait une exacte appréciation des éléments de la cause de ce chef et le jugement sera confirmé de ce chef ;
Sur l’exécution fautive du contrat de travail et la prise d’acte de la rupture :
Attendu que l’appelant invoque à l’appui de la prise d’acte de rupture le fait que l’employeur a procédé à une baisse unilatérale de ses taux de rémunération, le non-paiement de la prime d’ancienneté, le refus de l’employeur de lui communiquer les éléments permettant de vérifier le montant de sa rémunération variable, le non-remboursement d’une partie des frais professionnels et l’absence de paiement de la prime de matériel;
Attendu qu’il ressort des éléments versés aux débats que jusqu’au mois de novembre 2000, la rémunération de l’appelant était calculée sur la base des taux de 39 %, 19,5 %,13% ou 11 % ;
que ces taux étaient appliqués en fonction d’un travail effectué seul ou dans le cadre d’un ‘ pool ‘ composé d’un, deux ou trois autres photographes de la société intimée sur un même reportage photographique ;
qu’à partir du mois de décembre 2000, les taux ont été ramenés à 37 %, 18, 5% et 12, 33 % et enfin 9, 25 % ces taux de rémunération ;
qu’il apparaît également que ces pourcentages ont parfois, sans que des explications ne soient utilement données , été diminués ainsi que cela est conforté par la production des commissions encaissées de juillet 2004 à mai 2009 ;
que rien au dossier ne démontre que le salarié était d’accord pour ces modifications, peu important la poursuite des relations contractuelles aux nouvelles conditions, l’employeur ne sachant prétendre qu’il s’agit d’une acceptation tacite, même en l’absence en son temps de contestation de la part du salarié ;
qu’en outre, l’employeur ne saurait invoquer des difficultés économiques pour justifier de la modification en l’absence de respect des dispositions de l’article L 1222-6 du Code du Travail ;
qu’ainsi, les premiers juges n’ont pas fait une exacte appréciation des éléments de la cause en estimant que l’employeur n’avait pas modifié le dit contrat ;
Attendu que l’appelant fait justement valoir qu’il en droit de demander un rappel de salaires et de ses accessoires à partir du mois de juillet 2004 et que, selon un décompte non utilement discuté par la société intimée , il fait valoir que lui est due la somme de 42 919, 22 euros outre celle de 4 291, 92 euros au titre du treizième mois ainsi que celle seulement réclamée de 3 576, 60 euros au titre des congés payés afférents ;
Attendu que c’est également à bon droit que l’appelant fait valoir qu’il peut prétendre au paiement d’une prime d’ancienneté conformément à l’article 23 de la Convention collective des journalistes alors que l’employeur n’en conteste que le montant alloué par les premiers juges ;
que les taux prévus par la convention collective sont justement mentionnés par l’appelant qui produit un calcul non utilement discuté par la société intimée et justifie d’une ancienneté qui n’est pas non plus discutée par la société intimée ;
qu’il est constant que cette prime n’a jamais été payée à l’appelant et que ce n’est qu’après la saisine du Conseil de Prud’hommes que la société intimée a proposé le paiement d’une prime d’ancienneté en demandant au Conseil d’en établir l’exact montant ;
qu’ainsi, les premiers juges en estimant que l’employeur n’avait pas commis de manquement suffisamment grave pour justifier de la prise d’acte de rupture n’ont pas fait une exacte appréciation des éléments de la cause dès lors que la Cour observe qu’aucune somme n’a jamais été versée à ce titre par la société intimée qui ne saurait sérieusement prétendre qu’elle ignorait l’ancienneté de ce salarié ;
Attendu que l’appelant soutient que la société intimée ne lui a volontairement pas remis les éléments servant de calcul à sa rémunération, l’employeur se bornant à prétendre la calculer sur la base d’un pourcentage sur les recettes encaissées du fait de la cession des droits de reproduction des photos à des tiers et invoquant le fait qu’elle ne recevait pas de commande écrite de ses clients ;
qu’ainsi en ne fournissant pas au salarié les éléments, que seul l’employeur détenait, lui permettant de vérifier les sommes qui lui étaient dues, ce dernier a commis un manquement à ses obligations mais que cependant , compte tenu des rappels ordonnés, il n’y a pas lieu d’ordonner la production d’éléments supplémentaires ;
Attendu que l’appelant invoque également un manquement de l’employeur tenant au fait qu’il ne lui a réglé ses frais professionnels qu’à hauteur de 50 % ;
Attendu cependant que l’appelant ne justifie pas que les frais qu’il prétend avoir engagé l’ont été dans le cadre de son activité professionnelle au service de la société intimée dans leur ensemble;
que seuls les frais engagés pour le mois de septembre 2008 qui apparaissent effectivement n’avoir été remboursés qu’à hauteur de 50 % alors qu’il est justifié de la somme globale engagée;
qu’il sera en conséquence fait droit à cette demande à hauteur de 664,99 euros;
Attendu que l’appelant prétend enfin que la prime d’appareil photographique telle que prévue par les accords collectifs des 23 avril 2002 et 5 mars 2005 ne lui a pas été payée alors qu’il en ressort que l’employeur doit verser au photographe qui utilise son propre matériel photographique une prime mensuelle de 52,00 euros ;
qu’il sera en conséquence fait droit à la demande pour un montant de 3 094,00 euros, le surplus de la demande n’étant pas justifié;
Attendu que de l’ensemble des éléments qui précèdent, il résulte qu’en estimant que l’employeur n’avait pas commis de manquements suffisamment graves pour justifier la prise d’acte de rupture, les premiers juges n’ont pas fait une exacte appréciation des éléments de la cause et qu’il s’en suit que cette prise d’acte doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse , le jugement étant réformé en ce sens ;
qu’il s’ensuit que le juge qui décide que les faits invoqués justifiaient la rupture doit accorder au salarié qui le demande, l’indemnité de préavis et les congés payés afférents, l’indemnité de licenciement et les dommages-intérêts auxquels il aurait eu droit en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu qu’en application des dispositions de l’article L.7112-3 du Code du travail, Monsieur [V] [J] a droit à une indemnité de licenciement égale à 1 mois par année ou fraction d’année d’ancienneté soit en l’espèce 13 mois ;
que, selon les termes de l’article 44 de la Convention collective applicable, l’indemnité de licenciement est calculée pour les journalistes professionnels employés à plein temps ou temps partiel sur le dernier salaire perçu ou, pour les journalistes salariés ne percevant pas un salaire mensuel régulier, sur la base de 1/12 des salaires perçus au cours des 12 mois précédant le licenciement ou de 1/24 des salaires perçus au cours des 24 derniers mois précédant le licenciement au choix du salarié ;
que la somme est augmentée de 1/12 pour tenir compte du treizième mois conventionnel défini à l’article 25 de la même convention collective ;
Attendu que , selon un décompte non utilement discuté, l’appelant fait valoir qu’au cours des 24 derniers mois, son salaire moyen a été 8 873,88 euros ;
qu’ainsi l’indemnité conventionnelle doit être fixée à 115 360,44 euros ;
Attendu que selon les termes de l’article 46 de la Convention collective précitée, la durée du préavis est de deux mois et qu’est due en conséquence la somme de 17 747,75 euros à ce titre, outre celle de 1 774, 77 euros au titre des congés payés afférents ;
Attendu que le salarié ayant plus de deux ans d’ancienneté dans une entreprise employant habituellement plus de dix salariés, il lui sera accordé le minimum d’indemnisation auquel il peut prétendre sur le fondement de l’article L 1235-3 du Code du Travail soit la somme de 53 243,28 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’appelant étant débouté du surplus de sa demande comme n’étant pas justifié ;
Attendu que la société intimée devra remettre à Monsieur [J] un certificat de travail et une attestation POLE EMPLOI conforme aux dispositions du présent arrêt et que le nécessaire préjudice résultant de la non remise des documents précités sera réparé par l’allocation de la somme de 500,00 euros ;
Sur l’interdiction, sous astreinte, d’utiliser les photographies dont M. [J] est l’auteur :
Attendu qu’il ressort des éléments versés aux débats que la société intimée n’a reçue aucune autorisation de Monsieur [J] pour continuer à exploiter, après la rupture des relations contractuelles, les photographies dont il est l’auteur, prises entre le 1 er octobre 1996 et le 17 juin 2009 ;
qu’il fait justement valoir qu’une telle exploitation, non autorisée, est illicite en l’absence de cession du droits de reproduction et qu’il sollicite donc à bon droit qu’il soit fait interdiction à la société intimée , sous astreinte de 500,00 euros par infraction constatée, d’exploiter les photographies dont il est l’auteur “entre le 1er octobre 1996 et le 17 juin 2009 ;
Attendu que les sommes qui sont dues en exécution du contrat de travail, en l’espèce rappels de salaire, indemnité compensatrice de préavis, congés payés afférents , indemnité de licenciement , prime d’ancienneté, remboursement de frais, prime d’appareil photographique, portent intérêts de droit à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le Bureau de Conciliation, convocation qui vaut sommation de payer, soit en l’espèce à partir du 3 juillet 2009 ;
Attendu que les créances indemnitaires ne produisent intérêts moratoires que du jour de leur fixation judiciaire ; qu’en l’espèce il ne convient pas de faire remonter, à titre de complément d’indemnisation, le point de départ du cours des intérêts au jour de la demande en justice ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe, et en matière prud’homale,
Confirme le jugement en ce qui concerne la somme allouée au titre de la prime d’ancienneté;
Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,
Dit que la prise d’acte de rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ,
Condamne la société ELIOT PRESS à payer à Monsieur [V] [J] les sommes suivantes :
– 42 919, 22 euros à titre de rappel de salaires pour la période du 1er juillet 2004 au 19 juin 2009,
– 4 291, 92 euros au titre de la prime de 13ème mois afférente,
– 3 576, 60 euros au titre des congés payés,
– 664,99 euros euros à titre de remboursement de frais,
– 3 094,00 euros au titre de la prime conventionnelle de matériel,
– 115 360,44 euros à titre d’indemnité de licenciement,
– 17 747,75 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 1 774, 77 euros au titre des congés payés afférents,
Précise que ces sommes porteront intérêts de droit à compter du 3 juillet 2009.
Condamne en outre la dite société à payer à Monsieur [V] [J] les sommes suivantes :
– 53 243,28 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 500,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non remise de documents.
Ordonne la remise à Monsieur [J] d’un certificat de travail, d’une attestation destinée à POLE EMPLOI et des bulletins de paye conformes au présent arrêt dans un délai de un mois suivant sa notification ;
Fait interdiction à la Société ELIOT PRESS d’exploiter les photographies dont Monsieur [V] [J] est l’auteur, prises entre le 1er octobre 1996 et le 17 juin 2009, sous astreinte de 500,00 euros par infraction constatée ;
Condamne en outre la société intimée à payer à l’appelant la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne la société intimée à supporter les entiers dépens.
LE GREFFIER.LE CONSEILLER, Alain BLANC
POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ.