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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 7
ARRÊT DU 23 Juin 2011
(n° 1, 4 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S 08/08002
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Mars 2008 par le conseil de prud’hommes de PARIS Section ENCADREMENT RG n° 06/09742
APPELANT
Monsieur [R] [V]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Dominique DE LA GARANDERIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0487 substitué par Me Marie-alice JOURDE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0487
INTIMÉE
TELEVISION FRANCAISE 1 (TF1)
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Jocelyne CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T11
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Mai 2011, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Michèle BRONGNIART, Présidente, chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Michèle BRONGNIART, Président
Monsieur Thierry PERROT, Conseiller
Monsieur Bruno BLANC, Conseiller
Greffier : Madame Violaine GAILLOU, lors des débats
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
– signé par Madame Michèle BRONGNIART, Président et par Mlle Véronique LAYEMAR, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA COUR,
Engagé le 2 novembre 1989, en qualité de journaliste pigiste, M. [V] a poursuivi son activité au sein de TF1, à partir du 1er janvier 1993, comme reporter puis comme rédacteur en chef.
Le 31 mars 2006, M. [V] a été nommé ‘directeur des magazines et des opérations spéciales de la rédaction de TF1′.
Le 16 juin 2006, M. [V] a pris acte de la rupture de son contrat de travail.
La cour statue sur l’appel interjeté le 21 mai 2008 par M. [V] du jugement rendu par le Conseil des prud’hommes de Paris le 26 mars 2008 notifié par lettre datée du 25 avril 2008 qui l’a débouté de l’ensemble de ses demandes et notamment de celle tendant à voir imputer à l’employeur la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail.
Vu les conclusions déposées le 4 mai 2011 par les parties au soutien de leurs observations orales,
SUR CE,
Sur la rupture
Considérant que M. [V] soutient que la prise acte de la rupture de son contrat de travail est imputable à TF1 qui n’a respecté ni le contenu de son contrat de travail ni ses obligations en matière de congés payés et qu’en conséquence, elle doit produire les effet d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que TF1 réplique que l’argumentaire de M. [V] procède d’une présentation en droit et en fait qu’elle conteste ainsi que d’un revirement de position sur les griefs relevés à son encontre ; que M. [V] ne démontre aucune atteinte à un élément essentiel de son contrat de travail, le manquement au titre des congés payés apparaissant pour la première fois en cause d’appel ; que la prise d’acte de la rupture doit produire les effets d’une démission ;
Considérant qu’il ressort d’un courrier du 6 mars 2006 à la signature de M. [T], vice-président de TF1 d’une part que le 2 mars, TF1 avait proposé à M. [V] de prendre la responsabilité des magazines de l’Information de TF1 sous l’autorité de [W] [M], d’autre part que cette responsabilité, lui ‘permettrait de piloter, non seulement la responsabilité éditoriale de 7 à 8 … mais aussi des autres magazines de l’Information’ et enfin qu’il s’agissait d’une ‘promotion importante dans la hiérarchie’ ; qu’il sera ajouté que ce courrier a été adressé à M. [V] pour le convaincre d’accepter ces nouvelles fonctions qu’il avait, dans un premier temps, refusées (‘Je regrette que tu aie refusé pour l’instant cette promotion importante…’) ;
Qu’aux termes du courrier du 31 mars 2006, à effet au 1er avril, en sa qualité de directeur des magazines, M. [V] avait ‘la responsabilité et le suivi du «7 à 8» et «Reportages» et ‘il lui appartenait également de proposer à la Direction de l’information ainsi qu’à la Direction générale, de nouveaux concepts de magazines’, en celle de directeur des opérations spéciales de la rédaction de TF1, il ‘aurait à assurer la couverture et le suivi des événements dont l’Antenne décidera la retransmission’ et il lui était ‘également demandé de proposer et d’organiser des émissions spéciales de la Rédaction sur des sujets d’actualité particuliers’ ; qu’il n’est plus discuté que M. [V] a accepté ces nouvelles fonctions qui s’accompagnaient d’une augmentation de salaire de 10% soit un salaire brut mensuel de 16500 € ;
Qu’il est constant, par ailleurs, que postérieurement au 1er avril 2006, M. [V] a continué à assurer la co-présentation du magazine «7 à 8» avec [K] [D] ; que le 2 mai 2006, [K] [D] démissionnait de TF1 ; que le 11 mai 2006, TF1 nommait Mme [I], qui succédait à [K] [D] comme remplaçante de [P] [Z], co-présentatrice pour le magazine «7 à 8» ;
Que M. [V] soutient vainement qu’à la suite de la démission [K] [D], il lui avait été confirmé qu’il présenterait seul l’émission «7 à 8» et que cet engagement n’ayant pas été tenu, TF1 a manqué à ses obligations en ne respectant pas son contrat de travail ; que ni les messages électroniques qu’il a échangés avec d’autres journalistes ni l’article du Nouvel Observateur (communiqué sous le numéro de pièce 38) n’établissent un engagement contractuel de la direction de TF1 sur une présentation en solo ; qu’en effet dans l’article du Nouvel Observateur, il est seulement indiqué ‘L’émission «Sept à Huit» que [K] [D] co-présente avec son mari, devrait se poursuivre avec [R] [V] en solo aux commandes’ ; que cet article n’est pas une interview de M. [M] ; qu’en recourant au conditionnel, son rédacteur a envisagé un fait possible (présentation en solo) comme éventuel ;
Que, par contre, M. [V] reproche pertinemment à TF1 de ne pas l’avoir, à tout le moins, associé au choix de la nouvelle co-présentatrice avec laquelle il allait co-présenter le magazine «Sept à Huit» dont la responsabilité et le suivi lui incombaient contractuellement ;que ce fait n’est pas non contesté par TF1 qui ne tente même pas de le justifier ; que M. [V] avait le statut de cadre dirigeant, les bulletins de salaires émis à compter du 1er mars 2006 portant le mention ‘cadre dirigeant art. 27’ ; que dans ses écritures (p 11), TF1 vise les qualifiées de ‘fonctions dirigeantes’ de M. [V] ; qu’eu égard à l’importance des fonctions de M. [V], importance soulignée par M. [T] dès le courrier du 6 mars 2006, en n’associant pas M. [V] au choix de la co-présentatrice d’une émission dont il était responsable, TF1 a vidé de réalité les responsabilités confiées au Directeur des magazines et ainsi porté atteinte à un élément essentiel de son contrat de travail ;
Qu’en conséquence, la prise d’acte de la rupture est imputable à l’employeur et doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur les conséquences
Considérant que M. [V] qui ne justifie d’aucune demande de congés rejettée, a été dispensé de l’exécution du préavis qui lui a été réglé sur la base d’un mois ; qu’il est fondé à demander paiement de deux mois complémentaires, le délai de préavis des journalistes ayant plus de deux ans d’ancienneté étant conventionnellement de trois mois ;
Qu’il sera fait droit à la demande en paiement de l’indemnité conventionnelle de l’article 44 de la CCNTJ calculée sur la base d’un mois de salaire par année d’ancienneté et à l’indemnité complémentaire prévue à l’accord d’entreprise en son article 22 ;
Considérant qu’au vue des bulletins de paie des trois derniers mois, M. [V] est fondé à retenir un salaire mensuel brut de 23063 € pour la liquidation de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, cette moyenne incluant la rémunération variable qui n’avait pas à être retenue pour le calcul des autres indemnités ;
Que compte tenu de l’effectif du personnel de l’entreprise, de l’ancienneté et de l’âge du salarié ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard, telles qu’elles résultent des pièces produites et des débats, il lui sera alloué, en application de l’article L.122-14-4 du Code du travail ancien devenu L 1235-3, une somme de 138738 € ;
Sur les congés payés
Considérant que M. [V] qui ne justifie d’aucune demande de congés payés, procède par affirmation pour soutenir que TF1 l’a empêché de prendre l’intégralité de ses congés payés ; qu’il ressort des bulletins de paie que sur les périodes de référence de 2002 et 2003 telles que définies à l’article 11 de l’accord d’entreprise des journalistes TF1, M. [V] n’a pris 26 et 28 jours de congés payés au lieu des 30 jours auxquels il avait droit par application de ce même article ; qu’en conséquence, il sera fait droit à sa demande en paiement de 6 jours de congés payés ;
Sur les frais irrépétibles
Considérant que l’équité et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ;
PAR CES MOTIFS,
INFIRME le jugement entrepris,
Et statuant à nouveau
DIT que TF1 a manqué à ses obligations contractuelles,
DIT la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de M. [V] imputable à TF1,
DIT que cette rupture doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE TF1 à payer à M. [V]
. 6068,96 € à titre de solde de congés payés,
. 35750 € à titre de solde d’indemnité compensatrice du préavis,
. 393250 € à titre d’indemnités conventionnelle et complémentaire de licenciement,
. 138732 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE TF1 à payer à M. [V] 1500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE TF1 aux entiers dépens de première instance et d’appel,
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,