Contrat de pigiste : 22 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/11138

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Contrat de pigiste : 22 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/11138
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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 10

ARRET DU 22 JUIN 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/11138 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFUZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mai 2020 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS RG n° 17/11718

APPELANTE

Madame [W] [R]

née le 15 Mai 1983 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée et assistée à l’audience de Me Clément BONNIN, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 250

INTIMEE

Association REPORTERS SANS FRONTIERES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée et assistée à l’audience de Me Emmanuel BURGET, avocat au barreau de PARIS, toque : B0062

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été appelée le 23 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Valérie MORLET, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Florence PAPIN, Présidente

Madame Valérie MORLET, Conseillère

Monsieur Laurent NAJEM, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Catherine SILVAN

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Florence PAPIN, Présidente et par Catherine SILVAN, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

***

Faits et procédure

Madame [W] [R] et l’association Reporters sans Frontières (RSF) ont le 1er septembre 2011 conclu un « contrat de correspondant » pour une durée d’un an renouvelable par tacite reconduction.

Dans ce cadre, Madame [R] a été amenée à collaborer avec l’association en qualité de correspondante de presse en Macédoine.

A l’occasion du déplacement en France au cours de l’été 2013 du ministre de l’information macédonien, il lui a été demandé de rédiger un rapport sur la situation politique du pays.

Madame [R] a le 12 août 2013 remis à l’association Reporters sans Frontières 42 feuillets rédigés de sa main, sur ce sujet. L’association reconnaît lui avoir réglé, en paiement de son travail, la somme de 305 euros pour 10 feuillets.

Contestant ce seul paiement et faute de solution amiable, Madame [R] a par acte du 1er août 2014, assigné l’association Reporters sans Frontières devant le conseil de prud’hommes de Paris.

Le conseil, par jugement du 31 mai 2017, s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Paris, auquel le dossier a été transmis.

*

Le tribunal, devenu tribunal judiciaire, par jugement du 15 mai 2020, a :

– débouté Madame [R] de l’intégralité de ses demandes,

– débouté l’association Reporters sans Frontières de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– condamné Madame [R] à payer à l’association Reporters sans Frontières la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Madame [R] aux dépens,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires qui ont été reprises dans l’exposé du litige.

Madame [R] a par acte du 28 juillet 2020 interjeté appel de ce jugement, intimant l’association Reporters sans Frontières devant la Cour.

*

Madame [R] a signifié des conclusions le 28 octobre 2020 et l’association Reporters sans Frontières le 12 janvier 2021.

La clôture de la mise en état du dossier a été ordonnée le 29 mars 2023.

*

Postérieurement à cette clôture, Madame [R] a signifié de nouvelles conclusions le 7 avril 2023, demandant à la Cour de :

A titre principal,

– déclarer recevable et fondé son appel,

Y faisant droit,

– infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau,

– la décharger des condamnations prononcées contre elle en principal, intérêts, frais et accessoires,

– condamner l’association Reporters sans Frontières à lui verser les sommes de :

. 976 euros au titre de rappel de rémunération portant intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er août 2014,

. 350 euros au titre du préjudice matériel (déplacements et démarches),

. 2.000 euros au titre du préjudice moral,

– condamner l’association Reporters sans Frontières à lui payer la somme de 4.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner l’association Reporters sans Frontières en tous les dépens,

A titre subsidiaire,

– en cas de confirmation de la décision rendue au fond, infirmer la décision par laquelle elle a été condamnée au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ou à tout le moins réduire ce montant à de plus justes proportions.

Afin de permettre à l’association Reporters sans Frontières, intimée, de répliquer à ces dernières écritures, le conseiller de la mise en état a par ordonnance du 20 avril 2023 révoqué l’ordonnance de clôture initiale.

L’association Reporters sans Frontières a signifié ses dernières conclusions le 10 mai 2023, demandant à la Cour de :

– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, excepté sur sa demande reconventionnelle,

Infirmant le jugement sur ce point et statuant à nouveau,

– condamner reconventionnellement Madame [R] à lui payer la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Y ajoutant,

– condamner Madame [R] à lui payer une somme de 4.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

*

La clôture de la mise en état du dossier a été ordonnée le 11 mai 2023, l’affaire plaidée le 23 mai 2023 et mise en délibéré au 22 juin 2023.

Motifs

Sur la demande en paiement de Madame [R]

Les premiers juges, reprenant la chronologie des échanges par e-mails entre Madame [R] et l’association Reporters sans Frontières, ont observé que la première avait été informée dès le début des discussions des contraintes budgétaires de la seconde et que si le sujet devant être abordé dans l’article demandé à la correspondante a été précisé tout au long de ces échanges, il n’avait jamais été évoqué un nombre de feuillets attendu par l’association supérieur à dix. Faute pour Madame [R] de justifier d’un accord de l’association pour la réalisation de plus de feuillets, les magistrats l’ont déboutée de sa demande de complément de rémunération.

Madame [R], appelante, affirme que les stipulations de son « contrat de correspondant » signé avec l’association Reporters sans Frontières laissent figurer une mention selon laquelle elle serait rémunérée 30,5 euros par feuillet « pour toute information transmise ». Selon elle, il existe donc un accord portant sur les 42 feuillets, l’association ayant accepté son travail et l’en ayant même félicitée. Le nombre de sujets à traiter n’a fait qu’augmenter selon les demandes de l’association et elle ne pouvait donc que rendre un travail aussi conséquent pour les satisfaire. Elle réclame en conséquence le paiement des 42 – 10 = 32 feuillets non réglés, soit 976 euros.

L’association Reporters sans Frontières, intimée, conteste tout manquement contractuel de sa part, rappelant les termes du contrat la liant à Madame [R] et la commune intention des parties, reprenant la chronologie des faits, affirmant avoir respecté ses obligations de bonne foi contrairement à la correspondante. L’association conteste la réalité d’un accord avec Madame [R], même implicite, pour 42 feuillets.

Sur ce,

Le SNJ (Syndicat National des Journalistes), sur son site internet dans un article publié le 24 janvier 2006 relatif aux « pigistes » reconnaît que « l’accord écrit n’est pas dans les m’urs », ajoutant qu’il « appartient à tous de faire évoluer les pratiques professionnelles » et propose un modèle d’« accord de pige ».

C’est ainsi que l’association Reporters sans Frontières et Madame [R] ont le 1er septembre 2011 conclu un « contrat de correspondant ».

Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi (article 1134 du code civil en sa version applicable en l’espèce, antérieure au 1er octobre 2016, date d’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations).

Le contrat de correspondant conclu entre les parties énonce, au titre des interventions du correspondant, que celui-ci « prend l’initiative, à chaque fois qu’il estimera qu’une situation le justifie, d’informer dans les meilleurs délais le Secrétariat international des Reporters sans frontières des atteintes à la liberté de la presse qu’il constate dans son pays », ajoutant que ledit secrétariat « pourra également lui demander de réaliser certaines investigations liées à l’objectif poursuivi par l’association » (dont le correspondant est de facto membre). Au titre de la contrepartie financière, le contrat stipule que « l’activité de correspondant donnera lieu à une rétribution calculée comme suit : pour toute information transmise à Reporters sans frontières par le correspondant, dans le cadre du présent contrat, il lui sera versé un montant forfaitaire de 30,50 euros sur la base d’un feuillet de presse de 1500 signes ».

Il ressort des termes de ce contrat que le correspondant peut prendre l’initiative d’informations adressées à l’association Reporters sans Frontières, mais également que cette dernière peut solliciter le premier, sans qu’aucun formalisme spécifique ne soit prévu, tel notamment un accord préalable formel sur un volume déterminé. Cette absence de formalisme pour les journalistes est évoquée dans les témoignages versés aux débats par Madame [R] : Monsieur [D] [C], journaliste, mentionne ce manque de « cadres précis » (attestation du 27 octobre 2020) ; Madame [G] [F], journaliste, fait état des adaptations nécessaires des formats selon « les éléments recueillis sur le terrain » (attestation du 27 octobre 2020) ; Madame [K] [P], journaliste, relate une demande de Radio-France par une « conversation informelle au téléphone » (attestation du 28 octobre 2020) ; Madame [U], journaliste, confirme que « des commandes sont très souvent faites par téléphone, sans aucune preuve écrite » (attestation du 27 octobre 2020).

Cependant, malgré les termes du contrat précités, malgré ces témoignages divers mais sans lien avec le cas précis de l’espèce et contrairement aux affirmations en ce sens de Madame [R], aucune disposition de son « contrat de correspondant » n’interdit aux parties de s’accorder sur un format particulier, sur un nombre de piges.

Or, ainsi que l’ont justement relevé les premiers juges, un tel accord est intervenu en l’espèce.

Les échanges initiaux entre les parties, concernant l’article litigieux relatif à la situation en Macédoine au mois de juillet 2013, ne sont versés aux débats d’aucune part. Madame [R] reconnait dans ses écritures que l’association lui a adressé une commande.

Par e-mail du 29 juillet 2013, Madame [R] a informé Monsieur [Z] [A] (responsable à l’époque du bureau « Union européenne Balkans » de l’association) de ce qu’elle allait s’efforcer de lui donner des éléments supplémentaires liés à la visite en France du ministre macédonien, précisant que « deux feuillets seront un peu court » et lui demandant « quelle quantité de feuillets » elle pouvait alors fournir. Monsieur [A], de l’association, lui a répondu le même jour en ces termes : « Ok, on part sur 4 feuillets », faisant en outre état des contraintes financière de l’association (« les conditions économiques sont ce qu’elles sont 🙂 »). Quelques jours plus tard, par e-mail du 7 août 2013, Madame [R] a demandé à Monsieur [A] « une rallonge de pige », proposant « 6 feuillets » et le responsable de l’association lui a répondu le même jour qu’elle pouvait « aller jusqu’à 10 feuillets » (caractères gras du message), avec une « analyse poussée du cas [S] » et encore « quelque chose sur le processus d’intégration à l’UE » (e-mail du même jour, quelques minutes plus tard). Dans leurs échanges suivants, Monsieur [A] et Madame [R] ont évoqué les sujets à traiter. Puis, par e-mail du 8 août 2013, Madame [R] s’est interrogée sur le « nombre de piges que [l’association pouvait se] permettre » et Monsieur [A] lui a répondu le 8 août 2013 qu’elle ne devait pas se soucier « pour les piges », rappelant néanmoins le nombre de dix (« une dizaine »), Madame [R] répondant alors le même jour qu’il y avait « déjà 7 » feuillets et qu’il convenait de prévoir « que le comptage grossira, voire doublera aussi ».

Si ces échanges laissent apparaître que le sujet de l’intervention réclamée à Madame [R] a été progressivement précisé et augmenté, ils révèlent également clairement les interrogations de la correspondante quant au nombre de feuillets à rédiger, d’une part, et les contraintes budgétaires de l’association et sa volonté de limiter le nombre de feuillets, rappelées à plusieurs reprises à la correspondante par l’association, d’autre part, ainsi que l’accord des parties sur un nombre d’une dizaine de feuillets, nombre sur lequel elles ne sont pas revenues après le 8 août 2013. Les sujets devant être abordés (l’affaire « [S] », l’intégration de la Macédoine à l’Union européenne, le profit du ministre de l’information, etc.) étaient certes nombreux et complexes, mais Madame [R], qui s’est à plusieurs reprises interrogée sur le nombre de feuillets que l’association accepterait, n’a jamais remis en cause la demande de celle-ci de ne pas dépasser « une dizaine » de feuillets : lorsqu’elle a indiqué que ce nombre pouvait atteindre 14 (sept feuillets à doubler), cela pouvait encore s’inscrire dans les limites imprécises d’une « dizaine » de feuillets réclamés par l’association.

Dans ces conditions, adressant le 12 août 2013 à l’association Reporters sans Frontières non une dizaine de feuillets (ni même 14, voire une quinzaine) mais 42 pages, Madame [R] a dépassé l’accord des parties quant à ce nombre. Les premiers juges ont justement fait observer que si le 8 août 2013 Madame [R] avait rédigé sept pages et en prévoyait le double, l’association « ne pouvait donc imaginer qu’elle réaliserait 42 feuillets, nombre sans rapport avec l’augmentation qu’elle évoquait ».

Madame [R], à ce titre, ne peut se prévaloir d’autres échanges concernant d’autres missions, sans lien avec les piges de l’été 2013 relatives à la Macédoine, pour lesquelles aucun accord concernant le nombre de pages ne serait intervenu, ce point ne suffisant pas à contredire l’existence d’un accord sur un nombre de pages limité dans le cas de la présente espèce.

Au regard de la commande de l’association Reporters sans Frontières puis des termes de l’accord intervenu ensuite quant aux sujets à aborder et au nombre de feuillets à adresser par Madame [R], éléments qui circonscrivent un accord contractuel, les félicitations de Monsieur [A], accusant réception du travail le 12 août 2013 (« merci encore pour ce gros boulot ») ou de Monsieur [J] [H], responsable, selon la correspondante, de l’association au niveau de l’Union européenne (« un très grand merci pour tes papiers », e-mail très peu lisible du 17 août 2013), ne peuvent valoir acceptation du nombre important de feuillets, dépassant largement l’accord intervenu sur ce point.

Cet accord n’est pas non plus remis en cause par l’attestation de Monsieur [A], du 21 mars 2019, dans laquelle il reconnait que le travail de Madame [R] « dépassait, en volume, le cadre de [sa] demande initiale », ajoutant qu’il « était très probablement impossible de répondre de manière satisfaisante à la commande, augmentée au fil des jours de [son] fait (à [son] initiative ou sur proposition de Mme [R]), dans la limite impartie » et qu’en conséquence, « considérant que le travail de Mme [R] avait été utile et réalisé sincèrement – puisqu’elle avait traité des seuls sujets demandés – que la pratique permettait des dépassements de volume, notamment dans les cas d’urgence comme en l’espèce, et enfin que son investissement pour RSF devait être rétribué à sa juste valeur et non sur la base d’une limite budgétaire définie arbitrairement », il avait « soumis à [sa] hiérarchie un dépassement de la rémunération prévue ». Les termes mêmes de ce témoignage accréditent l’existence d’un accord des parties arrêté sur une dizaine de pages et l’absence de pouvoir de l’intéressé pour prévoir une rémunération supplémentaire exceptionnelle au vu des circonstances. Si, ensuite, Monsieur [A] fait état d’une situation d’urgence, celle-ci n’est aucunement établie et ne découle pas des échanges entre les parties à l’époque de l’article litigieux produits aux débats.

Dans une attestation du 4 avril 2023, certes dactylographiée, mais conforme aux prescriptions de l’article 202 du code de procédure civile (mention manuscrite du risque encouru en cas de fausse attestation, signature, copie de la pièce d’identité du rédacteur), Madame [M] [B], journaliste, indique elle-même qu’« une commande d’article est passée avec son lignage (‘) » et que « si ce lignage est dépassé mais qu’il est publié ou utilisé pour un article écrit par la rédaction et que cette dernière n’ai [sic] pas relevé et refusé le dépassement de signes, il est payé selon la totalité du lignage envoyé ». Elle confirme ainsi qu’un accord concernant la longueur de l’article commandé peut toujours intervenir, ainsi que cela est le cas de la présente espèce, et qu’il n’est alors réglé dans son intégralité que s’il est publié ou utilisé. La Cour constate que ce dernier point n’est pas établi, Madame [R] ne démontrant pas que son article ait été publié ni utilisé par l’association Reporters sans Frontières. Or, au titre de sa rémunération, le contrat de Madame [R] stipule que «sont pris en compte : les feuillets d’information rédigés par le correspondant et utilisés pour la rédaction des communiqués de presse, lettres de protestations, rapports de mission et toute autre publication de Reporters sans frontières ».

Il est enfin relevé que Madame [N] [L], de l’administration de l’association Reporters sans Frontières, a par e-mail du 19 décembre 2014 proposé à Madame [R], « sans que cela ne vaille reconnaissance du bien fondé de [ses] prétentions (‘) » de lui verser « à titre transactionnel et pour solde de tout compte la somme de 500 € ». Cette somme dépassait la rémunération de la quinzaine de pages annoncées par Madame [R]. Par e-mail du 12 janvier 2015, Madame [L] a également indiqué que l’association accepterait de verser à la correspondante « les 930 euros sollicités, en contrepartie de [son] désistement d’instance et d’action (‘) ». Madame [R] a refusé cette proposition.

C’est en conséquence à juste titre, au regard de l’accord intervenu entre les parties pour une rémunération de 30,50 euros par feuillet (contrat de correspondant du 1er septembre 2011), d’une part, et pour une dizaine de feuillets au titre de l’article sur la Macédoine de l’été 2013, d’autre part, que les premiers juges ont débouté Madame [R] de sa demande de rémunération supplémentaire à hauteur de 976 euros correspondant à 32 feuillets impayés, au-delà de la somme de 305 euros réglée à l’intéressée par l’association Reporters sans Frontières correspondant à dix feuillets.

Sur les demandes de dommages et intérêts

Les premiers juges ont rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par Madame [R], estimant que celle-ci ne justifiait pas que l’association Reporters sans Frontières ait remis en cause son professionnalisme et se soit abusivement opposée au règlement du litige et ne démontrait pas que les déplacements qu’elle évoque ont été rendus nécessaires par le litige. Ils ont également rejeté la demande indemnitaire de l’association, rappelant que l’appréciation inexacte par la correspondante de ses droits n’était pas constitutive d’une faute.

Madame [R] sollicite l’indemnisation de ses déplacements dans le cadre du présent litige à hauteur de 350 euros et la réparation de son préjudice moral à hauteur de 2.000 euros.

L’association Reporters sans Frontières s’oppose aux demandes indemnitaires ainsi présentées par Madame [R]. A titre reconventionnel, estimant les procédures poursuivies par cette dernière « frappées du sceau de l’outrance », elle sollicite sa condamnation à lui payer la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts

Sur ce,

Tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer (article 1240 du code civil).

1. sur les demandes indemnitaires de Madame [R]

Madame [R], qui n’a pas démontré le manquement contractuel de l’association Reporters sans Frontières à son égard, n’établit pas plus de faute délictuelle imputable à celle-ci. Elle seule a assigné l’association en justice et a interjeté appel du jugement. Ses frais de déplacement sont liés à sa seule action. Il est ajouté qu’il n’est aucunement démontré que les billets de train versés aux débats, pour des trajets entre [Localité 5] et [Localité 6], correspondent à des trajets effectués dans le cadre de la présente procédure (première instance et cause d’appel).

Madame [R] n’établit ensuite par aucun moyen que l’association Reporters sans Frontières ait pu remettre en cause ses qualités professionnelles ni que son comportement ait pu lui causer un préjudice moral, étant rappelé qu’elle a engagé son action pour obtenir le paiement de sommes qu’elle estimait dues par un dépassement de sa part des limites d’un accord intervenu avec l’association.

Les premiers juges ont en conséquence à juste titre débouté Madame [R] de toute demande indemnitaire présentée contre l’association. Le jugement sera également confirmé de ce chef.

2. sur la demande indemnitaire de l’association

Le refus de la proposition transactionnelle de l’association Reporters sans Frontières, l’appréciation inexacte qu’elle a pu faire de ses droits et l’augmentation de ses prétentions en justice ne caractérisent pas la mauvaise foi de Madame [R] et l’exercice de son action et de son recours n’apparaissent en l’état aucunement abusifs. Il est ajouté que l’association ne justifie d’aucun préjudice distinct de celui causé par la nécessité pour elle de présenter sa défense en justice, examiné sur un autre fondement.

Les premiers juges ont ainsi justement débouté l’association Reporters sans Frontières de sa demande de dommages et intérêts formulée contre Madame [R]. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Le sens de l’arrêt conduit à la confirmation du jugement en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance, mis à la charge de Madame [R].

Ajoutant au jugement, la Cour condamnera Madame [R], qui succombe en son recours, aux dépens d’appel en application de l’article 696 du code de procédure civile.

Tenue aux dépens, Madame [R] sera également condamnée à payer à l’association Reporters sans Frontières la somme de 2.000 euros en indemnisation des frais exposés en cause d’appel et non compris dans les dépens, conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Madame [W] [R] aux dépens d’appel,

Condamne Madame [W] [R] à payer la somme de 2.000 euros à l’association Reporters sans Frontières en indemnisation de ses frais irrépétibles d’appel.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

 


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