Contrat de pigiste : 18 mars 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 18-24.642

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Contrat de pigiste : 18 mars 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 18-24.642
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SOC.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mars 2020

Rejet non spécialement motivé

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10323 F

Pourvoi n° H 18-24.642

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MARS 2020

La société Le Parisien Libéré, société par actions simplifiée, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° H 18-24.642 contre l’arrêt rendu le 19 septembre 2018 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 10), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. F… J…, domicilié […] ,

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est […] ,

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Le Parisien Libéré, de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de M. J…, après débats en l’audience publique du 12 février 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Le Parisien Libéré aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Le Parisien Libéré et la condamne à payer à M. J… la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Le Parisien Libéré.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société LE PARISIEN LIBERE à verser à Monsieur J… la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts « au titre de la requalification » ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée ; Selon l’article L. 7112-1 du code du travail, toute convention par laquelle une entreprise de presse s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un journaliste professionnel est présumée être un contrat de travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties. Il résulte des pièces versées aux débats que pendant près de 6 ans, de 2009 à 2015, Monsieur J… a été le correspondant du PARISIEN LIBERE chargé du suivi quotidien de l’Olympique de Marseille et du Racing club de Toulon, la fréquence des matchs, étant d’environ une à trois fois par semaine tous les mois de l’année, à l’exception du mois de juin, traité au titre du marché des transferts. Les bulletins de salaire révèlent le caractère permanent de travail. Monsieur J… recevait des instructions de la société et devait : -chaque début de semaine, envoyer un courriel contenant une liste de propositions, le courriel devant être doublé d’un échange téléphonique dans la journée du lendemain afin de permettre un suivi et effectuer d’éventuels ajustements, -prévenir les encadrants de ses absences ou indisponibilités suffisamment à l’avance (au minimum 15 jours), -communiquer et s’adresser à l’ensemble des encadrants sans exception, -assurer une présence et un véritable suivi quotidien sur l’Olympique de Marseille, le suivi du Racing club de Toulon faisant également partie de ses prérogatives, -n’effectuer aucune collaboration sur le football avec un média de presse écrite autre que Le Parisien/Aujourd’hui en France, -tenir des propos mesurés sur les réseaux sociaux, -un point d’étape étant fait sur les sujets traités. Monsieur J… a adressé des notes de frais tous les mois d’un montant de 600 € en moyenne de septembre 2013 à février 2015. Il lui était demandé d’organiser ses congés et RTT au même titre que l’ensemble du personnel. Lorsqu’il était à l’étranger, il bénéficiait d’une lettre de mission et d’une assistance médicale de rapatriement. En juin 2012, Monsieur J… a appelé l’attention du journal sur sa situation et l’absence de contrat et il lui a été répondu : « il y aura toujours (beaucoup) de place pour le club préféré des Français ». Ses déclarations de revenus révèlent que ses revenus provenaient uniquement du Parisien libéré et qu’ils présentaient un caractère stable compris entre 31 834 € et environ 23 000 €. Il résulte ces constatations que la société LE PARISIEN LIBERE a régulièrement versé, pendant près de six ans, des piges à Monsieur J… et la régularité de ces paiements sur cette longue période atteste du caractère constant du concours qu’il a apporté à l’entreprise de presse. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a requalifié la relation de travail en contrat à durée indéterminée et sur le montant de l’indemnité de requalification » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs ; que l’existence d’un contrat de travail dépend du pouvoir de direction, de contrôle et de sanction de l’employeur ; Pour apprécier si les conditions d’exercice de l’activité relèvent ou non du contrat de travail, le juge qui n’est pas lié par la dénomination donnée par les parties à leur convention, va s’appuyer sur un faisceau d’indices parmi lesquels figurent :le respect de directives et son corollaire par le pouvoir de contrôle de l’employeur ; les contraintes d’horaires ; le lieu d’exécution du travail ; la fourniture du matériel ; l’intégration à un service organisé ; la subordination ou dépendance économique : il y a subordination ou dépendance économique lorsque la contrepartie de la prestation de travail peut être appréhendée comme un ou des moyens d’existence. Autrement dit, il s’agit de l’hypothèse des travailleurs dont l’économie est fonction de leur employeur ou de leur entreprise. Attendu que l’article L.7111-3 du code du travail dispose que: «est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources. Le correspondant, qu’il travaille sur le territoire français ou à l’étranger, est un journaliste professionnel s’il perçoit des rémunérations fixes et remplit les conditions prévues au premier alinéa. » ; que l’article L.7112-1 du code du travail dispose que : « Toute convention par laquelle une entreprise de presse s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un journaliste professionnel est présumé être un contrat de travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties. » ; que l’articleL.1242-2 du code du travail dispose que : « Sous réserve des dispositions de l’article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants : 1° Remplacement d’un salarié en cas : a) D’absence ; b) De passage provisoire à temps partiel, conclu par avenant à son contrat de travail ou par échange écrit entre ce salarié et son employeur ; c) De suspension de son contrat de travail ; d) De départ définitif précédant la suppression de son poste de travail après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’il en existe ; e) D’attente de l’entrée en service effective du salarié recruté par contrat à durée indéterminée appelé à le remplacer ; 2* Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ; 3° Emplois à caractère saisonnier, dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ou emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ; 4° Remplacement d’un chef d’entreprise artisanale, industrielle ou commerciale, d’une personne exerçant une profession libérale, de son conjoint participant effectivement à l’activité de l’entreprise à titre professionnel et habituel ou d’un associé non salarié d’une société civile professionnelle, d’une société civile de moyens d’une société d’exercice libéral ou de toute autre personne morale exerçant une profession libérale ; 5° Remplacement du chef d’une exploitation agricole ou d’une entreprise mentionnée aux I °à 4 ‘de l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime, d’un aide familial, d’un associé d’exploitation, ou de leur conjoint mentionné à l’article L. 722-10 du même code dès lors qu’il participe effectivement à l’activité de l’exploitation agricole ou de l’entreprise ; 6° Recrutement d’ingénieurs et de cadres, au sens des conventions collectives, en vue de la réalisation d’un objet défini lorsqu’un accord de branche étendu ou, à défaut, un accord d’entreprise le prévoit et qu’il définit : a) Les nécessités économiques auxquelles ces contrats sont susceptibles d’apporter une réponse adaptée ; b) Les conditions dans lesquelles les salariés sous contrat à durée déterminée à objet défini bénéficient de garanties relatives à l’aide au reclassement, à la validation des acquis de l’expérience, à la priorité de réembauche et à l’accès à la formation professionnelle continue et peuvent, au cours du délai de prévenance, mobiliser les moyens disponibles pour organiser la suite de leur parcours professionnel ; c) Les conditions dans lesquelles les salariés sous contrat à durée déterminée à objet défini ont priorité d’accès aux emplois en contrat à durée indéterminée dans l’entreprise.» ; que l’article L1245-2 du code du travail dispose que: « Lorsque le conseil de prud’hommes est saisi d’une demande de requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement qui statue au fond dans un délai d’un mois suivant sa saisine. Lorsque le conseil de prud’hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l’employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. Cette disposition s’applique sans préjudice de l’application des dispositions du titre III du présent livre relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée. » ; que l’article 1382 du code civil dispose que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » ; En l’espèce, Monsieur F… J… a commencé sa collaboration avec LE PARISIEN le 1er août 2009, la relation de travail s’est terminée en juin 2015. Pendant toute cette période, et au vu des éléments produits aux débats, Monsieur F… J… s’est tenue à disposition du PARISIEN de manière quasi permanente. Il recevait les directives de son responsable Monsieur R… de manière permanente par mail. À de nombreuses reprises, Monsieur F… J… était dans la liste de diffusion des directives que les autres salariés du service de sports. Il produit par ailleurs, ses notes de frais qu’il saisissait sur le logiciel interne du PARISIEN, et pour lequel il disposait des identifiants appropriés. Ces dernières étaient validées par son responsable. Il bénéficiait de fiche de paye à en tête du PARISIEN, sur les lesquelles figuraient des primes d’ancienneté, des indemnités au titre du treizième mois. Sont également produits aux débats, des courriels sur lesquels l’information sur la prise de congés et de RTT est adressée par Monsieur R… à l’ensemble des salariés du service des sports auquel est rattaché Monsieur F… J…. Bien que les envois étaient effectués sur sa messagerie personnelle, cette diffusion traduit une parfaite intégration au service lui-même. Tout comme est produit la copie des cartes de visite que LE PARISIEN a payé pour Monsieur F… J…, et avec l’entête du PARISIEN. Il y a donc un lien de subordination au vu des directives reçues d’un supérieur hiérarchique. Il y a intégration à un service puisque les informations diffusées par le supérieur hiérarchique sont communiquées à l’ensemble des membres du service. Il y a bien un contrôle du travail effectué, puisque la prise de congés ou RTT est soumise à approbation. Et enfin, la dépendance économique est certaine puisque la rémunération des piges par la remise de bulletin de paie, et le paiement de note de frais sur logiciel intégré de l’entreprise ne laisse aucun doute au Conseil sur la relation de travail existante entre les deux parties, d’autant que cette relation peut être qualifiée de permanente et récurrente puisqu’elle a perduré de 2009 à 2015. Par ailleurs, l’exclusivité mis à la charge de Monsieur F… J… est une preuve supplémentaire du lien de subordination et de contrôle de la charge de travail du PARISIEN sur Monsieur F… J…. D’autre part, Monsieur F… J… dépendait totalement des revenus des piges effectuées pour le compte du PARISIEN, ainsi toutes les conditions d’une relation de travail tant par le biais d’un lien de subordination, qu’un lien économique, sont réunies pour permettre de requalifier la relation existante, en un contrat de travail à durée indéterminée. En conséquence, Le Conseil requalifie la relation de travail initiale en contrat de travail à durée indéterminée. Le Conseil condamne LE PARISIEN à payer à Monsieur F… J…, la somme de 3000 € à titre de dommages et intérêts pour la requalification de son contrat en contrat de travail à durée indéterminée » ;

ALORS, D’UNE PART, QUE le juge est tenu de préciser le fondement juridique de sa décision ; que, pour condamner la société LE PARISIEN LIBERE à verser la somme de 3.000 euros au titre d’une « indemnité de requalification », la cour d’appel s’est contentée de prononcer la requalification de la relation de travail la liant à Monsieur J… en un contrat de travail à durée indéterminée ; qu’en statuant ainsi, sans préciser le fondement juridique de cette condamnation, la cour d’appel n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’exercer son contrôle et a violé l’article 12 du Code de procédure civile ;

ALORS, D’AUTRE PART, QUE la requalification d’une relation de travail, non soumise par les parties au droit du travail, en contrat de travail à durée indéterminée a pour objet de remettre le travailleur dans la situation qui aurait dû être la sienne initialement, dans la limite des prescriptions applicables aux actions susceptible de découler de la requalification ; que la cour d’appel, qui a prononcé la requalification de la relation de travail unissant Monsieur J… à la société LE PARISIEN LIBERE en un contrat de travail à durée indéterminée et a appliqué les règles correspondantes, ne pouvait en outre condamner la société LE PARISIEN LIBERE à verser des dommages et intérêts au titre de cette seule requalification ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 12 du code de procédure civile ;

ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE l’indemnité de requalification prévue à l’article L. 1245-2 du code du travail est due lorsque le conseil de prud’hommes fait droit à la demande du salarié de requalification d’un ou de plusieurs contrats de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée ; qu’en octroyant une « indemnité de requalification » à Monsieur J… sans caractériser l’existence d’un ou de contrats à durée déterminée irréguliers qui auraient fait l’objet d’une requalification, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard du texte précité.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur, d’AVOIR condamné la société LE PARISIEN LIBERE à verser à Monsieur J… les sommes de 5.828 euros à titre d’indemnités de préavis (et 582 euros au titre des congés payés afférents), 14.286 euros à titre d’indemnité de licenciement, 20.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, d’AVOIR condamné la société LE PARISIEN LIBERE à remettre à Monsieur J… une attestation PÔLE EMPLOI, un certificat de travail et un reçu pour solde de tout compte conformes, et d’AVOIR ordonné le remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage versées au salarié depuis son licenciement jusqu’à la date de l’arrêt dans la limite de deux mois ;

AUX MOTIFS QU’ « il résulte des pièces versées aux débats que pendant près de 6 ans, de 2009 à 2015, Monsieur J… a été le correspondant du Parisien libéré chargé du suivi quotidien de l’Olympique de Marseille et du Racing club de Toulon, la fréquence des matchs, étant d’environ une à trois fois par semaine tous les mois de l’année, à l’exception du mois de juin, traité au titre du marché des transferts. Les Bulletins de salaire révèlent le caractère permanent du travail ; Monsieur J… recevait des instructions de la société et devait : -chaque début de semaine, envoyer un courriel contenant une liste de propositions, le courriel devant être doublé d’un échange téléphonique dans la journée du lendemain afin de permettre un suivi et effectuer d’éventuels ajustements, -prévenir les encadrants de ses absences ou indisponibilités suffisamment à l’avance (au minimum 15 jours), -communiquer et s’adresser à l’ensemble des encadrants sans exception, -assurer une présence et un véritable suivi quotidien sur l’Olympique de Marseille, le suivi du Racing club de Toulon faisant également partie de ses prérogatives, -n’effectuer aucune collaboration sur le football avec un média de presse écrite autre que Le Parisien/Aujourd’hui en France, -tenir des propos mesurés sur les réseaux sociaux, -un point d’étape étant fait sur les sujets traités. Monsieur J… a adressé des notes de frais tous les mois d’un montant de 600 € en moyenne de septembre 2013 à février 2015. Il lui était demandé d’organiser ses congés et RTT au même titre que l’ensemble du personnel. Lorsqu’il était à l’étranger, il bénéficiait d’une lettre de mission et d’une assistance médicale de rapatriement. En juin 2012, Monsieur J… a appelé l’attention du journal sur sa situation et l’absence de contrat et il lui a été répondu : « il y aura toujours (beaucoup) de place pour le club préféré des Français ». Ses déclarations de revenus révèlent que ses revenus provenaient uniquement du Parisien Libéré et qu’ils présentaient un caractère stable compris entre 31 834 € et environ 23 000 €. Il résulte de ces constatations que la société LE PARISIEN LIBERE a régulièrement versé, pendant près de six ans, des piges à Monsieur J… et la régularité de ces paiements sur cette longue période atteste du caractère constant du concours qu’il a apporté à l’entreprise de presse. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a requalifié la relation de travail en contrat à durée indéterminée. La société avait ainsi l’obligation de demander à Monsieur J… de manière constante et régulière une prestation de travail. Il s’ensuit que l’interruption de cette relation, intervenue en juin 2015 faute de fourniture de travail, s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « la prise d’acte n’obéit à aucun formalisme ; qu’elle doit être adressée directement à l’employeur ; qu’elle constitue un mode de la rupture du contrat de travail ; qu’il appartient au salarié de motiver par les reproches qu’il impute à son employeur et qui le conduisent à rompre son contrat de travail ; que ces motifs doivent être suffisamment graves pour justifier la non poursuite du contrat de travail ; que le salarié qui demande au conseil de prud’hommes d’assimiler cette rupture à un licenciement sans cause réelle et sérieuse peut obtenir la condamnation de l’employeur à lui verser les indemnités qui en découlent. Le juge devra alors décider, une fois saisi, si la prise d’acte est justifiée ou non. C’est au salarié d’apporter la preuve de faits réels et suffisamment graves à l’encontre de l’employeur. Que si, selon les juges, les faits invoqués justifient la prise d’acte, celle-ci produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Dans ce cas, l’employeur doit verser au salarié les indemnités suivantes : . L’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ; . Les indemnités compensatrices de congés payés et de préavis ; . L’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (ou pour licenciement nul, le cas échéant) ; . L’indemnité liée à la perte de chance d’utiliser les droits acquis au titre du droit individuel à la formation (DIF) ; . Les indemnités en raison de circonstances brusques et vexatoires de la rupture ; que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse a pour objet de réparer intégralement le préjudice subi par la perte d’emploi, mais aussi la perte de revenus, mais doit aussi tenir compte des difficultés financières rencontrées par le salarié suite à la diminution de ses revenus ; que l’article L. 1222-1 du code du travail dispose que : « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi. » ; que l’article L. 1235-3 du code du travail dispose que : « Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9. » ; En l’espèce, Monsieur F… J… a dû rompre son contrat de travail avec LE PARISIEN puisque ce dernier refusait de reconnaître le contrat de travail qui les liait pour la période allant du 1er août 2009 au 30 juin 2015, date de la dernière pige effectuée par Monsieur F… J…. Or, le Conseil a requalifié la relation de travail existante en contrat de travail à durée indéterminée, au vu des arguments et des documents produits par Monsieur F… J…, et a déterminé qu’il s’agissait bien d’un contrat de travail pérenne et permanent de l’entreprise. Si le PARISIEN avait la capacité d’utiliser les services de Monsieur F… J… en tant que journaliste pigiste occasionnel, il lui était strictement interdit de poursuivre cette relation telle qu’elle l’a été tant dans la durée, que par les sollicitations de production de piges. De ce fait, le grief principal reproché par Monsieur F… J… au PARISIEN étant de ne pas avoir voulu concrétiser par un contrat salarié leur relation de travail est parfaitement fondée. Il y a donc lieu de faire droit à la demande d’indemnisation. En conséquence, le Conseil dit que la rupture du contrat de travail de Monsieur F… J… est imputable aux torts exclusifs du PARISIEN en ce qu’il n’a pas fait le nécessaire pour assurer la pérennisation de la relation contractuelle, n’assurant pas ainsi, un statut et un revenu stable à Monsieur F… J… ; que le Conseil dit la rupture intervenue abusive et doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamne le PARISIEN à payer la somme de nome à ce titre » ;

ALORS, D’UNE PART, QUE la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par un salarié ne produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse que si les manquements imputés par le salarié à l’employeur et fondant utilement cette prise d’acte sont d’une gravité telle qu’ils ont empêché la poursuite du contrat de travail ; qu’en ne constatant pas l’existence d’une faute dont la gravité rendait impossible la poursuite du contrat de travail imputable à la société LE PARISIEN LIBERE, la cour d’appel a violé les articles L. 1231-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;

ALORS, D’AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE si l’employeur d’un journaliste pigiste employé comme collaborateur régulier est tenu de lui fournir régulièrement du travail sauf à engager la procédure de licenciement, il n’est pas tenu de lui fournir un volume de travail constant ; que la cour d’appel s’est bornée à justifier la prise d’acte de la rupture de Monsieur J… par une interruption de la relation de travail intervenue en juin 2015 ; qu’en statuant de la sorte, après avoir retenu que la société LE PARISIEN LIBERE avait l’obligation de demander à Monsieur J… de manière constante et régulière une prestation de travail, cependant que la non-fourniture du travail à un pigiste au cours d’un mois ne peut pas constituer une faute empêchant la poursuite de son contrat de travail, la cour d’appel a violé les articles L. 1231-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;

ALORS, ENFIN ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la cour d’appel s’est bornée à justifier la prise d’acte de la rupture de Monsieur J… par une interruption de la relation de travail intervenue en juin 2015 ; qu’en se déterminant de la sorte, cependant que la société LE PARISIEN LIBERE faisait valoir qu’elle avait sollicité Monsieur J… à plusieurs reprises au cours du mois de juillet 2015 pour des prestations de travail, et sans rechercher si Monsieur J… était resté à la disposition de la société LE PARISIEN LIBERE durant le mois de juillet 2015, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1231-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société LE PARISIEN LIBERE à verser à Monsieur J… la somme de 12.077,76 euros au titre des primes de week-end ;

AUX MOTIFS QUE « Sur les primes de week-end ; Tous les journalistes du Parisien libéré ont droit à une prime de week-end (pièce 8). Or, Monsieur J… justifie avoir rédigé de nombreux articles le samedi et publiés le dimanche dans la mesure où la plupart des matchs de football avec l’OM et de rugby avec Toulon se déroulent soit le samedi soit le dimanche. Le nombre de semaines travaillées par an étant de 46 et le montant de la prime de week-end s’élevant à 87,52 euros, il convient de condamner la société à lui payer la somme de 12 077,76 euros » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QU’ « un employeur est en droit d’instituer par usage des avantages particuliers au profit de ses salariés s’ils bénéficient à tous les salariés placés dans une situation identique et si les conditions de leur attribution sont préalablement définies et contrôlables. L’égalité de rémunération entre les salariés placés dans une situation identique suppose que soient définies: les rémunérations en cause, l’identité des situations entre les salariés, les raisons objectives, dont le juge doit contrôler la pertinence, qui permettent, le cas échéant, à l’employeur de ne pas traiter des salariés de manière identique ; que l’article L.1132-1 du code du travail dispose que : «Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi no 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap. » ; que l’article L.3245-1 du code du travail dispose que : « L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.». En l’espèce, Monsieur F… J… produit aux débats un bulletin de paie d’un de ces collègues qui a pu bénéficier de la prime de samedi, sur laquelle il est indiqué que le montant de cette prime est de 87,52 euros unitaire. Il a également produit tous les calendriers des années 2009 à 2015 de l’Olympique de MARSEILLE qu’il était chargé de suivre dans le cadre de sa mission, et pour laquelle les piges étaient éditées par le PARISIEN. Monsieur F… J… produit certaines de ces piges, et il apparaît que beaucoup correspondent à des dates figurant sur le calendrier du club marseillais, mais également sur ses notes de frais remboursées par LE PARISIEN. L’employeur ne produit aucun document ou argumentaire permettant au Conseil de justifier une telle différence de traitement avec ses collègues. Il est donc constant que Monsieur F… J… travaillait les week-ends et qu’à ce titre il doit être indemnisé. Par ailleurs, Monsieur F… J… a saisi le Conseil de Prud’hommes en 2015, les prescriptions triennale s’applique donc de fait selon les textes sus visés. En conséquence, le Conseil condamne LE PARISIEN à payer la somme de 12.077,76€ au titre du rappel de primes de week-end » ;

ALORS QUE la cour d’appel ayant constaté que la prime de week-ends était de 87,52 euros unitaire, il en résulte qu’en octroyant la somme de 12.077,76 euros sur une période de trois ans, en conséquence de la prescription applicable aux créances salariales, la cour d’appel a nécessairement considéré que Monsieur J… avait travaillé chacun des week-ends sur les 46 semaines pouvant être travaillées par an ; qu’en statuant ainsi, cependant qu’elle constatait seulement que Monsieur J… avait rédigé de nombreux articles le samedi ou le dimanche, sans établir que de dernier avait travaillé tous les week-ends ouvrables de l’année, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L. 1221-1 du code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l’arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d’AVOIR condamné la société LE PARISIEN LIBERE à verser à Monsieur J… la somme de 14.286 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE « le jugement sera en revanche infirmé sur le montant de l’indemnité de licenciement. En effet, il y a lieu de faire application de l’article L. 7112-3 du code du travail selon lequel si l’employeur est à l’initiative de la rupture, le salarié a droit une indemnité qui ne peut être inférieure à la somme représentant un mois, par année ou fraction d’années de collaboration, des derniers appointements. Il convient de faire droit la demande en paiement d’une somme de 14 286 € à ce titre » ;

ALORS QU’ en vertu de l’article L. 7112-3 du code du travail, si l’employeur est à l’initiative de la rupture, le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à la somme représentant un mois, par année ou fraction d’année de collaboration, des derniers appointements, le maximum des mensualités étant fixé à quinze ; qu’en statuant comme elle l’a fait, en se bornant à relever que la relation de travail liant Monsieur J… à la société LE PARISIEN LIBERE s’était déroulée pendant près de 6 ans, de 2009 à 2015, sans déterminer le montant des derniers « appointements » reçus par Monsieur J…, ne mettant pas ainsi la Cour de cassation en mesure de vérifier qu’elle avait respecté la règle de calcul précitée, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé.

 


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