Contrat de location financière : enjeux de preuve et conséquences des manquements contractuels

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Contrat de location financière : enjeux de preuve et conséquences des manquements contractuels

Constitution du contrat de location

Le 26 novembre 2020, la société Queiros CK, spécialisée dans la vente de plantes et d’outils de jardin, a signé un contrat de location financière avec la société Release pour financer du matériel de vidéosurveillance. Ce contrat a été cédé à la société Siemens Lease Services le 30 novembre 2020.

Résiliation du contrat

Le 9 août 2022, Siemens Lease Services a résilié le contrat, prenant effet le 1er septembre 2022. Par la suite, le 24 août 2023, la société a assigné Queiros devant le tribunal de commerce de Nanterre.

Jugement du tribunal de commerce

Le 5 mars 2024, le tribunal a débouté Siemens Lease Services de toutes ses demandes, a déclaré qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer l’article 700 du code de procédure civile, et a condamné la société Siemens aux dépens. En réponse, Siemens a interjeté appel le 22 mars 2024.

Demandes de l’appelante

Dans ses conclusions du 31 mai 2024, Siemens a demandé à la cour d’infirmer le jugement du 5 mars 2024, en affirmant que Queiros avait manqué à ses obligations contractuelles. Elle a sollicité la résiliation du contrat, le paiement de loyers impayés, ainsi que diverses indemnités.

Analyse de la cour d’appel

La cour a constaté que le contrat de location initial portait le numéro 202011181 et que les loyers facturés correspondaient bien à ceux du contrat cédé. Elle a également noté que 17 loyers n’avaient pas été réglés, justifiant ainsi la résiliation du contrat.

Décision de la cour

La cour a infirmé le jugement précédent, prononcé la résiliation du contrat de location et a condamné Queiros à payer 5 136,38 euros pour les loyers impayés, ainsi qu’une somme de 3 500 euros au titre des clauses pénales. De plus, Queiros a été condamnée aux dépens et à payer 1 500 euros pour les frais non compris dans les dépens.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelles sont les obligations contractuelles de la société Queiros envers la société Siemens Lease Services ?

La société Queiros, en tant que locataire, avait des obligations contractuelles envers la société Siemens Lease Services, qui est le loueur. Ces obligations incluent principalement le paiement des loyers dus au titre du contrat de location financière.

Selon l’article 1719 du Code civil, le locataire est tenu de payer le loyer convenu. En cas de manquement à cette obligation, l’article 1726 du même code prévoit que le bailleur peut demander la résiliation du contrat de location.

Dans le cas présent, la cour a constaté que la société Queiros n’avait pas acquitté 17 loyers mensuels, ce qui constitue un manquement à son obligation essentielle de paiement. Ce manquement justifie la résiliation du contrat, conformément à l’article 1726 du Code civil.

Ainsi, la société Queiros devait respecter ses engagements de paiement pour éviter la résiliation du contrat de location.

Quelles sont les conséquences de la résiliation du contrat de location financière ?

La résiliation d’un contrat de location financière entraîne plusieurs conséquences pour le locataire, en l’occurrence la société Queiros. Selon l’article 1726 du Code civil, la résiliation du contrat permet au bailleur de récupérer le bien loué et de demander des indemnités pour les loyers impayés.

Dans le jugement rendu, la cour a prononcé la résiliation du contrat de location financière et a condamné la société Queiros à payer la somme de 5 136,38 euros, correspondant aux loyers impayés.

De plus, la cour a également accordé des indemnités pour les clauses pénales stipulées dans le contrat, bien que celles-ci aient été réduites à 3 500 euros en raison de leur caractère manifestement excessif, conformément à l’article 1231-5 du Code civil.

Enfin, la société Queiros a également été condamnée à payer les dépens de la procédure, ce qui inclut les frais de justice engagés par la société Siemens Lease Services.

Comment la cour a-t-elle évalué les demandes de la société Siemens Lease Services ?

La cour a évalué les demandes de la société Siemens Lease Services en se basant sur les éléments de preuve fournis et sur les dispositions légales applicables.

L’article 1353 du Code civil stipule que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit prouver que celle-ci existe. Dans ce cas, la cour a constaté que le loueur n’avait pas apporté la preuve suffisante de l’existence du contrat de location n°20201100672, ce qui a conduit à un rejet initial de ses demandes.

Cependant, la cour a ensuite reconnu que, malgré le changement de numéro du contrat, il n’y avait pas de doute sur l’identité du contrat cédé. Les loyers facturés correspondaient bien à ceux prévus dans le contrat initial, ce qui a permis à la cour d’accueillir les demandes de paiement des loyers impayés.

La cour a également pris en compte les intérêts de retard, conformément à l’article 1343-2 du Code civil, qui prévoit la capitalisation des intérêts à compter de la mise en demeure.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais non compris dans les dépens.

Dans le jugement initial, le tribunal de commerce a décidé qu’il n’y avait pas lieu à application de cet article, ce qui signifie qu’aucune indemnité n’a été accordée à la société Siemens Lease Services pour ses frais de justice.

Cependant, dans le cadre de l’appel, la cour a décidé d’accorder une indemnité de 1 500 euros à la société Siemens Lease Services au titre des frais non compris dans les dépens, en application de l’article 700.

Cette décision souligne l’importance de cet article dans le cadre des litiges, permettant à la partie gagnante de récupérer une partie de ses frais juridiques, ce qui peut être crucial pour la viabilité financière des entreprises engagées dans des procédures judiciaires.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 décembre 2024
Cour d’appel de Versailles
RG
24/01979
COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 59B

Chambre commerciale 3-2

ARRET N°

PAR DEFAUT

DU 10 DECEMBRE 2024

N° RG 24/01979 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WN5W

AFFAIRE :

S.A.S.U. SIEMENS LEASE SERVICES

C/

S.A.S.U. QUEIROS CK

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Mars 2024 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 6

N° RG : 2023F01724

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Morgane LE GALL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

APPELANT

S.A.S.U. SIEMENS LEASE SERVICES

N° SIRET : 304 505 050 RCS Nanterre

Ayant son siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social

Représentant : Me Morgane LE GALL, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 14 – N° du dossier 24.083

Plaidant : Me Rozenn GUILLOUZOU – DBC AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K 0180

INTIME

S.A.S.U. QUEIROS CK

Ayant son siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social

Défaillant, déclaration d’appel signifiée par procès-verbal de recherches infructueuses (PV 659)

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 22 Octobre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Cyril ROTH, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,

Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,

Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,

EXPOSE DU LITIGE

Le 26 novembre 2020, la société Queiros CK (la société Queiros), qui a pour activité la vente de plantes et d’outils de jardin, a conclu avec la société Release un contrat de location financièreen vue du financement de matériel de vidéosurveillance.

Le 30 novembre 2020, la société Release a cédé ce contrat à la société Siemens Lease Services (le loueur).

Le 9 août 2022, le loueur a résilié le contrat à effet du 1er septembre 2022.

Le 24 août 2023, il a assigné la société Queiros devant le tribunal de commerce de Nanterre.

Le 5 mars 2024, par jugement réputé contradictoire, le tribunal de commerce de Nanterre a :

– débouté la société Siemens Lease Services de l’ensemble de ses demandes ;

– dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la société Siemens Lease Services aux dépens.

Le 22 mars 2024, la société Siemens Lease Services a interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition.

Par dernières conclusions du 31 mai 2024, elle demande à la cour d’infirmer le jugement du 5 mars 2024 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

– dire et juger que la société Queiros a manqué à ses obligations contractuelles de paiement au titre du contrat de location en date du 26 novembre 2020 n°20201100672 ;

En conséquence,

– prononcer la résiliation du contrat de location financière en date du 26 novembre 2020 n°20201100672 ;

– condamner la société Queiros à lui payer la somme totale de 5 136,38 euros TTC correspondant aux factures impayées augmentée des intérêts de retard prévus au contrat à compter de la mise en demeure du 30 juin 2022 avec capitalisation des intérêts ;

– condamner la société Queiros à lui payer la somme totale de 680 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement ;

– condamner la société Queiros à lui payer la somme totale de 10 296 euros HT au titre de l’indemnité de résiliation majorée de 10% ;

– condamner la société Queiros à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société Queiros aux entiers dépens.

La déclaration d’appel et les conclusions de l’appelante ont été signifiées à la société Queiros le 29 mai 2024 selon les modalités prévues à l’article 659 du code de procédure civile. Celle-ci n’a pas constitué avocat.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 10 octobre 2024.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux conclusions susvisées.

MOTIFS

En application de l’article 472 du code de procédure civile, si, en cause d’appel, l’intimé ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond ; dans ce cas, le juge d’appel vérifie si l’action dirigée contre lui est régulière, recevable et bien fondée, ainsi que la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s’est déterminé.

Sur les demandes formulées au titre du contrat de location financière

Pour rejeter les demandes en paiement du loueur, le tribunal de commerce retient que le loueur ne fait pas la preuve de l’existence du contrat n°20201100672 dont il demande la résiliation et le paiement, les pièces produites étant contradictoires et incomplètes.

Le loueur expose que si le procès-verbal de réception fait référence au contrat de location financière n°202011181, postérieurement à sa cession, le contrat a pris le n° 20201100672 ; que plusieurs loyers n’ont pas été acquittés ; qu’il est bien fondée à solliciter la résiliation du contrat, le règlement des loyers impayés et une indemnité de résiliation .

Réponse de la cour

Il résulte des pièces produites d’une part, que, comme le soutient l’appelante, le contrat de location initial conclu par la société Release porte le numéro 202011181 ; que ce contrat porte le cachet de la société Siemens Lease Services, d’emblée désigné au contrat comme cessionnaire ; d’autre part, que les loyers facturés par Siemens Lease Services à Queiros au titre du contrat nouvellement numéroté 20201100672 sont bien ceux prévus au contrat initial.

La cour retient qu’il n’existe pas de doute sur l’identité du contrat cédé en cause nonobstant son changement de numéro.

Il résulte suffisamment de la mise en demeure du 24 janvier 2023 qu’à cette date, 17 des loyers mensuels n’avaient pas été acquittés.

Ce manquement du locataire à son obligation essentielle de payer les loyers justifie pleinement la résiliation sollicitée.

Il convient en conséquence d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de prononcer cette résiliation et d’accueillir intégralement la demande formulée au titre des loyers impayés, qui est justifiée par les termes du contrat et les décomptes produits. L’anatocisme réclamé est de droit.

Le loueur établit avoir acheté le contrat de location financière au prix de 15 142,72 euros TTC.

Mais il s’abstient de solliciter la restitution du matériel et n’établit pas l’étendue du préjudice que lui cause l’inexécution par la locataire de ses obligations, de sorte que les clauses pénales stipulées au contrat, au titre desquelles le loueur réclame la condamnation de la locataire à lui verser les sommes de 680 euros et respectivement de 10 296 euros, doivent être tenues pour manifestement excessives et réduites à la somme forfaitaire globale de 3 500 euros ; pour la même raison, les intérêts moratoires prévus au contrat seront ramenés au taux légal.

Les prétentions formulées  » HT  » ne peuvent être accueillies que pour leur montant nominal, dès lors que celui qui a perçu le montant de condamnations n’a pas à en reverser une partie à l’Etat.

Sur les demandes accessoires

L’équité commande d’allouer au loueur l’indemnité de procédure prévue au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

la cour, statuant par défaut,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Prononce la résiliation du contrat de location financière du 26 novembre 2020 ;

Condamne la société Queiros CK à payer à la société Siemens Lease Services la somme de

5 136,38 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2022, capitalisés dans les conditions prévues à l’article 1343-2 du code civil ;

Condamne la société Queiros CK à payer à la société Siemens Lease Services la somme de 3 500 euros au titre des clauses pénales ;

Condamne la société Queiros CK aux dépens de premières instance et d’appel ;

Condamne la société Queiros CK à payer à la société Siemens Lease Services la somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


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