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Le défaut d’information claire, précise et « conforme » sur le droit de rétractation dans le contrat conclu, fait encourir la nullité de ce contrat, en application de l’article L.242-1 du code de la consommation, sans qu’il soit nécessaire de se pencher sur les autres violations du code de la consommation reprochées.
La possibilité de renonciation au droit de rétractation, offerte par l’article L.221-25 du code de la consommation, ne peut s’appliquer qu’aux contrats visés au premier alinéa de l’article L.221-4 du même code, à savoir aux contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité ou la fourniture de chauffage urbain. Par ailleurs, le contrat en cause est un contrat prévoyant la création d’un site vitrine « standard » (menu, articles, photos’), incluant un formulaire de contact, la création et l’hébergement d’une adresse e-mail et d’une base de données ainsi qu’un suivi de référencement trimestriel. Quelques options ont été « cochées » dans la liste proposée : flash-info, diaporama, newsletter, et témoignages. Ces seules mentions ne démontrent pas en quoi le bien promis serait confectionné selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisé. A supposer, comme le prétend la société LOCAM, que le contrat porte sur un bien nettement personnalisé au sens de l’article L.221-28, 3° du code de la consommation, le droit de rétractation ne peut être écarté qu’à condition d’en informer le bénéficiaire préalablement à la conclusion du contrat, comme prévu par l’article L.221-5 du code de la consommation. Enfin, le contrat de location de site n’entre pas nécessairement dans le champ d’activité de la société cliente. La clause du contrat dans laquelle le locataire atteste que le contrat est en rapport direct avec son activité professionnelle pourraît même être contraire à l’article L.221-9 du code de la consommation, qui dispose que les dispositions sont d’ordre public. Pour rappel, selon l’article L.221-18 du code de la consommation, dans sa version applicable au présent litige, le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu hors établissement. L’article L.221-28 3° précise, toutefois, que le droit de rétractation ne peut être exercé pour les contrats de fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés. Par ailleurs, l’article L.221-25 du même code prévoit dans son alinéa premier que si le consommateur souhaite que l’exécution d’une prestation de services ou d’un contrat mentionné au premier alinéa de l’article L.221-4 commence avant la fin du délai de rétractation mentionné à l’article L.221-18, le professionnel recueille sa demande expresse par tout moyen pour les contrats conclus à distance et sur papier ou support durable pour les contrats conclus hors établissement. L’article L.221-4 est ainsi rédigé : Les dispositions du présent chapitre s’appliquent aux contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité lorsqu’ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée ainsi que sur la fourniture de chauffage urbain. Elles s’appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d’un contenu numérique indépendamment de tout support matériel. L’article L.221-9 du code de la consommation, dans sa version applicable au présent litige, relatif aux dispositions particulières relatives aux contrats conclus hors établissement, dispose que : Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L.221-5. Le contrat mentionne, le cas échéant, l’accord exprès du consommateur pour la fourniture d’un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l’expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l’exercice de son droit de rétractation. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.221-5. L’article L.221-5 du code de la consommation, dans sa version applicable au présent litige, prévoit quant à lui que, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes : 2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, Il résulte de l’article L.221-3 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, qu’un professionnel employant cinq salariés au plus, qui souscrit, hors établissement, un contrat dont l’objet n’entre pas dans le champ de son activité principale, bénéficie des dispositions protectrices du consommateur édictées par ce code aux sections 2 (obligation d’information précontractuelle), 3 (dispositions particulières applicables aux contrats conclus hors établissement) et 6 (droit de rétractation applicable aux contrats conclus à distance et hors établissement). Aux termes de l’article L.221-1 du même code, est considéré comme un contrat hors établissement tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur dans un lieu qui n’est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d’une sollicitation ou d’une offre faite par le consommateur. La notion de contrat dont l’objet n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel relève de l’appréciation souveraine des juges du fond (1ere Civ., 27 novembre 2019, pourvoi n°18-22.525). Toutefois, il est jugé qu’un contrat dont l’objet est en rapport direct avec l’activité professionnelle du contractant ou qui a été conclu à la faveur exclusive de son activité professionnelle, n’entre pas nécessairement dans le champ de son activité principale (1ere civ., 17 mai 2023, pourvoi n°21-24.086). Il en va de même lorsque le contrat a été conclu pour les besoins de l’activité professionnelle du contractant (1ere civ., 13 avril 2023, n°21-23.312). |
Résumé de l’affaire : La société BKM Remorquage a signé un contrat de location de site internet avec la société Cristal’ID pour une durée de 48 mois, avec des loyers mensuels de 420 euros. La société LOCAM, désignée comme cessionnaire, a facturé l’ensemble des loyers. Après plusieurs mois sans paiement, LOCAM a résilié le contrat et a assigné BKM devant le tribunal de commerce. En réponse, BKM a assigné Cristal pour obtenir la résolution du contrat et des dommages-intérêts. Le tribunal a débouté BKM de ses demandes et a condamné BKM à payer LOCAM. BKM a interjeté appel. En appel, la cour a déclaré le contrat nul, rejeté les demandes de LOCAM, et condamné Cristal à restituer des sommes à BKM, tout en ordonnant la restitution du site internet loué. Les sociétés Cristal et LOCAM ont été condamnées aux dépens.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 17/10/2024
N° de MINUTE :
N° RG 23/01154 – N° Portalis DBVT-V-B7H-UZNS
Jugement (N° J202100054) rendu le 29 novembre 2022 par le tribunal de commerce de Lille Métropole
APPELANTE
SAS BKM Remorquage prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
ayant son siège social, [Adresse 1]
représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
assistée de Me Bassirou Kébé, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
INTIMÉES
SAS Cristal’Id prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
ayant son siège social, [Adresse 2]
représentée par Me Eric Delfly, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
SAS Locam – Location Automobiles Matériels prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
ayant son siège social, [Adresse 3]
représentée par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
assistée de Me Migaud, avocat au barreau du Val-de-Marne, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Stéphanie Barbot, présidente de chambre
Nadia Cordier, conseiller
Anne Soreau, conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Ismérie Capiez
DÉBATS à l’audience publique du 18 avril 2024
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024 après prorogation du délibéré initialement fixé au 05 septembre 2024 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Stéphanie Barbot, présidente, et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 21 mars 2024
La société BKM Remorquage (la société BKM) est spécialisée dans les prestations de remorquage de véhicules.
Le 22 octobre 2019, elle a été démarchée par la société Cristal’ID (la société Cristal), fournisseur professionnel, pour la création d’un nouveau site internet, et a signé avec cette société un contrat de location de site internet de 48 mois avec des loyers mensuels de 420 euros TTC. Le contrat précisait dans l’article 7 des conditions générales, la possibilité pour le fournisseur de céder les droits résultant du contrat à un partenaire financier, la société Location Automobile Matériel (société LOCAM) étant désignée parmi les possibles cessionnaires.
Le 4 novembre 2019, la société LOCAM a adressé à la société BKM une facture unique concernant l’ensemble des loyers afférents à la location, du 20 novembre 2019 au 20 octobre 2023.
Le 20 avril 2020, n’ayant plus reçu paiement des loyers depuis le 20 janvier 2020, la société LOCAM a fait parvenir à la société BKM un courrier recommandé en résiliation de contrat en vertu de la clause résolutoire de plein droit, lui réclamant le paiement de la somme totale de 21 279,03 euros.
Le 25 septembre 2020, faute d’obtenir paiement, la société LOCAM l’a ensuite assignée devant le tribunal de commerce de Lille.
Le 15 avril 2021, la société BKM a, à son tour, assigné la société Cristal devant le tribunal de commerce aux fins d’obtenir notamment :
la résolution du contrat aux torts exclusifs de la société Cristal ;
la condamnation de cette dernière à lui verser la somme de 21 279,03 euros au titre de l’inexécution contractuelle ;
la compensation de cette somme avec toute créance détenue éventuellement par la société LOCAM à son encontre ;
Par jugement du 29 novembre 2022, le tribunal de commerce de Lille a :
débouté la société BKM de sa demande de notification formelle de cession de contrat à la société LOCAM ;
prononcé la résolution du contrat aux torts exclusifs de la société BKM ;
débouté la société BKM de toutes ses demandes à l’encontre de la société LOCAM ;
condamné la société BKM à payer à la société LOCAM la somme de 21 279,03 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 20 avril 2020 ;
condamné la société BKM à restituer à la société LOCAM le site internet loué dans les conditions de l’article 23 du contrat dans les 30 jours de la signification du jugement ;
débouté la société BKM de toutes ses demandes à l’encontre de la société Cristal ;
condamné la société BKM à verser la somme de 500 euros à la société Locam et celle de 500 euros à la société Cristal, en application de l’article 700 du code de procédure civile et à assumer les entiers dépens.
Le 8 mars 2023, la société BKM a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions, en intimant les sociétés Locam et Cristal.
PRETENTIONS des PARTIES
Par conclusions notifiées par la voie électronique le 13 février 2024, la société BKM demande à la cour de :
Vu les articles L.221-1 et suivants du code de la consommation
Vu l’article L.242-1 du code de la consommation,
Vu les articles 1130 et suivants du code civil,
Vu les articles 1194 et suivants du code civil,
Vu les articles 1178, 1128, 1163, 1216, 1302, 1353 et 1359 du code civil,
Infirmer le jugement entrepris ;
Débouter la société LOCAM de ses demandes tendant à l’irrecevabilité de ses demandes ;
Statuant de nouveau,
A titre principal,
Annuler le contrat litigieux pour les motifs non exhaustifs suivants :
o Violation de l’obligation d’information sur le droit de rétractation,
o Violation de l’obligation d’information sur le délai de livraison ou d’exécution des prestations,
o Violation de l’obligation d’information sur les caractéristiques essentielles du site et des services,
o Contenu indéterminé,
o Violation de l’article L.221-5 du code de la consommation, si la cour estime que l’objet du contrat porte sur un bien nettement personnalisé excluant le droit de rétractation ;
En conséquence,
Débouter les sociétés Cristal et LOCAM de l’ensemble de leurs demandes ;
Les condamner à lui restituer les sommes de 540 euros et 840 euros avec intérêts :
o calculés selon les modalités de l’article L.242-4 du code de la consommation à compter de l’appel, et capitalisation, en cas de violation du code de la consommation,
o au taux légal avec capitalisation, à compter de l’appel, en l’absence de violation du code de la consommation.
Premier niveau de subsidiarité :
Prononcer la résolution rétroactive du contrat litigieux et ce, avec effet rétroactif à la date de sa conclusion ;
En conséquence,
débouter les sociétés Cristal et LOCAM de l’ensemble de leurs demandes ;
Les condamner à lui restituer respectivement les sommes de 540 euros et 840 euros outre les intérêts au taux légal, avec capitalisation à compter de l’appel ;
En tout état de cause,
Condamner in solidum les sociétés Cristal et LOCAM à lui verser la somme de 7 500 euros au titre des frais irrépétibles.
Par conclusions notifiées par la voie électronique le 30 juin 2023, la société LOCAM demande à la cour de :
Vu l’article 564 du code de procédure civile
Vu les articles 1103, 1104, 1343-2 du code civil
La juger recevable et bien fondée en l’ensemble de ses demandes fins et conclusions ;
Par conséquent,
In limine litis
– Juger irrecevable la demande de la société BKM de condamnation de la société LOCAM à lui payer la somme de 840 € avec intérêts :
* calculés selon les modalités de l’article L.242-4 du code de la consommation à compter de l’appel, et capitalisation, en cas de violation du code de la consommation,
* au taux légal avec capitalisation, à compter de l’appel, en l’absence de violation du code de la consommation.
– l’en débouter ;
Sur le fond
Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Déclarer la société BKM REMORQUAGE irrecevable et mal fondée à solliciter la nullité du contrat de location.
La débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions.
La condamner au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Laurent, pour les frais par lui exposés.
Par ordonnance du 24 août 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de la société Cristal notifiées le 7 juillet 2023.
I – Sur la recevabilité de la demande en paiement de 840 euros avec intérêts (soit le paiement de deux loyers qu’elle aurait indument réglés), formée par la société BKM sur le fondement de la nullité du contrat
La société LOCAM fait valoir qu’il s’agit d’une demande nouvelle en appel, qui devra être déclarée irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile.
La société BKM réplique que :
L’article 565 du même code précise que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ; en l’espèce elle a demandé en première instance la résolution du contrat litigieux et sa demande d’annulation du contrat formée pour la première fois en cause d’appel tend aux mêmes fins que la demande de résolution de première instance ;
l’article 566 du code de procédure civile permet aux parties d’ajouter les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. La demande de restitution formée, n’étant que la conséquence de la demande d’anéantissement rétroactif du contrat soumise au premier juge, est donc recevable.
Réponse de la cour :
L’article 564 du code de procédure civile dispose qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou la révélation d’un fait.
L’article 565 du même code précise toutefois que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
Selon l’article 566 du même code, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
En l’espèce, la société BKM a sollicité en première instance la résolution du contrat conclu le 22 octobre 2019. En appel, elle en demande la nullité à titre principal, la résolution à titre subsidiaire.
Ces prétentions, même si leur fondement juridique est différent, tendent aux mêmes fins, à savoir l’anéantissement rétroactif du contrat litigieux (voir not. 1re Civ., 24 novembre 2021, pourvoi n° 19-19.036, 19-23.452)
La demande en nullité du contrat, formée par la société BKM devant la cour d’appel est donc recevable en application de l’article 565 du code de procédure civile.
La demande en paiement de 840 euros avec intérêts correspond à la restitution des loyers déjà acquittés par la société BKM. Il s’agit donc de la conséquence, si elle devait être prononcée, de la nullité sollicitée du contrat litigieux.
Cette demande est donc recevable en application de l’article 566 du code de procédure civile.
II- Sur la demande principale en nullité du contrat conclu avec la société Cristal’ID
Sur l’application du droit de la consommation au contrat litigieux :
La société BKM fait valoir que le droit de la consommation doit s’appliquer dès lors que :
Le contrat en cause a été conclu hors établissement, suite à un démarchage dont elle a fait l’objet par un commercial de la société Cristal ;
elle emploie moins de 5 salariés, ce qui n’est pas contesté ;
l’objet de ce contrat n’entre pas dans le champ de son activité principale, étant spécialisée dans le remorquage de véhicules, non dans la location d’un site web ;
la clause du contrat dans laquelle le locataire atteste que le contrat est en rapport direct avec son activité professionnelle est contraire à l’article L.221-9 du code de la consommation, qui dispose que les dispositions sont d’ordre public ; les articles 6, 1102 et 1162 du code civil interdisent d’écarter des dispositions d’ordre public avec des stipulations contractuelles ;
la jurisprudence juge que les parties peuvent soumettre leur contrat aux dispositions du code de la consommation, alors même que les conditions légales ne sont pas réunies, dès lors que leur volonté est dénuée d’équivoque ; en l’espèce, la société Cristal a volontairement soumis la relation contractuelle aux dispositions du code de la consommation, en lui remettant un formulaire de rétractation ;
La société Locam réplique que :
l’article L. 221-2 du code de la consommation exclut du champ d’application de l’article L.221-3 du même code les contrats portant sur des services financiers ; elle est une société de financement soumise au code monétaire et financier ; le contrat de location qu’elle propose est un acte de démarchage financier au sens de l’article L.341-1 du code monétaire et financier ; il ne se trouve pas soumis au code de la consommation mais au code monétaire et financier, qui prévoit que les règles du démarchage financier ne s’appliquent pas aux contrats destinés aux besoins d’une activité professionnelle, notion moins restrictive que celle de « champ de l’activité principale du professionnel » édictée par le code de la consommation ;
En tout état de cause le contrat en cause entre bien dans le champ de l’activité principale de la société BKM et les conditions de l’article L.221-3 du code de la consommation ne sont pas réunies pour une application des dispositions protectrices du droit de la consommation
Réponse de la cour :
Il résulte de l’article L.221-3 du code de la consommation, dans sa version applicable au présent litige, qu’un professionnel employant cinq salariés au plus, qui souscrit, hors établissement, un contrat dont l’objet n’entre pas dans le champ de son activité principale, bénéficie des dispositions protectrices du consommateur édictées par ce code aux sections 2 (obligation d’information précontractuelle), 3 (dispositions particulières applicables aux contrats conclus hors établissement) et 6 (droit de rétractation applicable aux contrats conclus à distance et hors établissement).
Aux termes de l’article L.221-1 du même code, est considéré comme un contrat hors établissement tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur dans un lieu qui n’est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d’une sollicitation ou d’une offre faite par le consommateur.
La notion de contrat dont l’objet n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel relève de l’appréciation souveraine des juges du fond (1ere Civ., 27 novembre 2019, pourvoi n°18-22.525).
Toutefois, il est jugé qu’un contrat dont l’objet est en rapport direct avec l’activité professionnelle du contractant ou qui a été conclu à la faveur exclusive de son activité professionnelle, n’entre pas nécessairement dans le champ de son activité principale (1ere civ., 17 mai 2023, pourvoi n°21-24.086).
Il en va de même lorsque le contrat a été conclu pour les besoins de l’activité professionnelle du contractant (1ere civ., 13 avril 2023, n°21-23.312).
En l’espèce, la société BKM a comme activité le remorquage et le dépannage de véhicules. Elle produit une attestation de M. [Y], son expert-comptable, selon laquelle elle n’a jamais eu de salarié depuis sa création.
Il n’a par ailleurs pas été contesté par les parties que le contrat litigieux est issu d’un démarchage.
Le contrat signé entre la société BKM et la société Cristal le 20 octobre 2019 avait pour objet la création et la location d’un site internet vitrine.
Si ce contrat a été conclu pour les besoins de l’activité de la société BKM, il n’entre cependant pas dans le champ d’activité de la société BKM, qui est le remorquage et le dépannage, non la création de sites internet.
La société LOCAM prétend cependant qu’elle a la qualité d’établissement financier au sens de l’article L.511-1 du code monétaire et financier et que le contrat de location qu’elle propose est un acte de démarchage financier au sens de l’article L.341-1 du même code, qui n’est pas soumis aux dispositions strictes du code de la consommation.
Toutefois, la société LOCAM indique intervenir en qualité de cessionnaire du contrat initialement conclu entre la société BKM et la société Cristal.
La nullité est prononcée lorsque le contrat ne remplit pas les conditions requises pour sa validité (article 1178 du code civil). Elle est une sanction de la formation du contrat et doit donc être appréciée à la date de conclusion du contrat.
C’est donc la validité du contrat conclu entre la société BKM et la société Cristal qui doit être étudiée, la qualité d’établissement financier ou non de la société LOCAM étant dès lors sans incidence.
En l’espèce, il n’a pas été contesté que le contrat du 20 octobre 2019 conclu entre la société BKM et la société Cristal est un contrat conclu hors établissement, qui se trouve donc soumis aux dispositions du code de la consommation en application de l’article L.221-3 du code de la consommation.
Il apparaît, en tout état de cause, que les parties ont entendu soumettre leur contrat au droit de la consommation, un droit de rétractation y étant inclus, ainsi qu’une renonciation à ce droit faisant expressément référence à l’article L.221-25 du code de la consommation.
Les dispositions protectrices du droit de la consommation visées à l’article L.221-3 du code de la consommation s’appliquent donc au contrat de location de site internet conclu entre la société BKM et la société Cristal le 20 octobre 2019.
Sur la violation des dispositions du code de la consommation et la nullité
La société BKM fait valoir tout d’abord une violation de l’obligation d’information sur le droit de rétractation, justifiant sa demande de nullité du contrat.
Elle estime que :
-Le point de départ du délai de rétractation est erroné ; il s’agit d’un subterfuge ayant pour effet d’entraver l’exercice de la rétractation ; en effet, selon les dispositions combinées des articles L.221-18 et L.221-1 du code de la consommation dans leur version applicable au litige, lorsque le contrat prévoit une prestation de service incluant un bien, le bénéficiaire peut se rétracter dès la conclusion du contrat, mais le point de départ du délai de rétractation ne commence à courir qu’à compter de la livraison du bien ; en l’espèce, le contrat en cause est un contrat mixte portant sur un service de location incluant la livraison d’un bien ; le délai de rétractation commençait donc à courir à la date de livraison effective du site internet ;
-En prévoyant que la demande de rétractation devait se faire par lettre recommandée, la société Cristal ID a ajouté un formalisme non prévu par la loi, dans le but de faire obstacle au libre choix du mode d’exercice du droit de rétractation ;
– Si la renonciation au droit de rétractation est possible, elle ne peut cependant se faire par une stipulation contractuelle et doit se faire postérieurement à l’information régulière sur le droit de rétractation ; or, en l’espèce, la renonciation au droit de rétractation est intervenue dans une clause contractuelle et a été faite concomitamment à l’information sur le droit de rétractation (et non postérieurement à la naissance du droit de rétractation) ; en outre, il aurait fallu l’informer correctement et loyalement sur le droit de rétractation (point de départ, formalisme’) pour que la renonciation soit valable ;
En application de l’article L.242-1 du code de la consommation, lorsque l’information sur le droit de rétractation prévu par les articles L.221-5 et L.221-9 du même code, est inexistante ou non conforme aux prescriptions de la loi, la nullité du contrat peut être demandée ;
– A supposer, comme le prétend la société LOCAM, que le contrat porte sur un bien nettement personnalisé au sens de l’article L.221-28, 3° du code de la consommation, le droit de rétractation ne peut être écarté qu’à condition d’en informer le bénéficiaire préalablement à la conclusion du contrat, comme prévu par l’article L.221-5 du code de la consommation.
La société LOCAM réplique qu’en application de l’article L.221-28 du code de la consommation, le droit de rétractation ne peut être exercé pour les contrats de fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés, ce qui est le cas du contrat litigieux dont l’objet est un bien nettement personnalisé, puisque conçu selon le cahier des charges élaboré par la société BKM.
Réponse de la cour :
Comme déjà énoncé, la société BKM, dont le champ d’activité principale n’est pas la conception et la location de site internet, doit bénéficier des dispositions protectrices du droit de la consommation en matière de contrat conclu hors établissement.
* Sur le fond, selon l’article L.221-18 du code de la consommation, dans sa version applicable au présent litige, le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu hors établissement.
L’article L.221-28 3° précise, toutefois, que le droit de rétractation ne peut être exercé pour les contrats de fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés.
Par ailleurs, l’article L.221-25 du même code prévoit dans son alinéa premier que si le consommateur souhaite que l’exécution d’une prestation de services ou d’un contrat mentionné au premier alinéa de l’article L.221-4 commence avant la fin du délai de rétractation mentionné à l’article L.221-18, le professionnel recueille sa demande expresse par tout moyen pour les contrats conclus à distance et sur papier ou support durable pour les contrats conclus hors établissement.
L’article L.221-4 susvisé est ainsi rédigé :
Les dispositions du présent chapitre s’appliquent aux contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité lorsqu’ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée ainsi que sur la fourniture de chauffage urbain.
Elles s’appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d’un contenu numérique indépendamment de tout support matériel.
* Sur la forme, l’article L.221-9 du code de la consommation, dans sa version applicable au présent litige, relatif aux dispositions particulières relatives aux contrats conclus hors établissement, dispose que :
Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties.
Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L.221-5.
Le contrat mentionne, le cas échéant, l’accord exprès du consommateur pour la fourniture d’un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l’expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l’exercice de son droit de rétractation.
Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.221-5.
L’article L.221-5 du code de la consommation, dans sa version applicable au présent litige, prévoit quant à lui que, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;
5°Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L.221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
L’article L.221-8 du même code dispose quant à lui que dans le cas d’un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues à l’article L.221-5.
Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible.
L’article L.242-1 du même code précise que les dispositions de l’article L.221-9 du code de la consommation sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
En l’espèce, si un droit de rétractation a été prévu en première page du contrat conclu entre la société BKM et la société Cristal et un formulaire de rétractation joint en fin de contrat, un encart intitulé « renonciation du droit de rétractation » est également inséré en page 2 du contrat, demandant la rédaction par le preneur de la mention suivante : « en application de l’article L.221-25 du code de la consommation et l’article 6 des conditions générales du contrat, je renonce expressément à mon droit de rétractation du contrat. Je demande en conséquence à Cristal l’exécution immédiate du contrat de prestation de site internet ».
La société BKM a rempli ce formulaire de renonciation au moment de la signature du contrat.
Toutefois, cette possibilité de renonciation, offerte par l’article L.221-25 du code de la consommation, ne peut s’appliquer, selon ce texte ci-dessus reproduit, qu’aux contrats visés au premier alinéa de l’article L.221-4 du même code, à savoir aux contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité ou la fourniture de chauffage urbain.
La société BKM, dont le contrat portait sur la création d’un site internet, ne pouvait donc renoncer à son droit de rétractation sur la base de l’article L.221-25 du code de la consommation.
La société LOCAM estime cependant que la société BKM ne pouvait, en tout état de cause, pas bénéficier du droit de rétractation, comme prévu au 3° de l’article L.221-28, le contrat en cause portant sur la fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés.
Il apparaît cependant que le contrat en cause est un contrat prévoyant la création d’un site vitrine « standard » (menu, articles, photos’), incluant un formulaire de contact, la création et l’hébergement d’une adresse e-mail et d’une base de données ainsi qu’un suivi de référencement trimestriel. Quelques options ont été « cochées » dans la liste proposée : flash-info, diaporama, newsletter, et témoignages.
Ces seules mentions ne démontrent pas en quoi le bien promis serait confectionné selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisé.
La société LOCAM ne justifie pas qu’un cahier des charges aurait été établi ou que la société BKM aurait transmis des instructions particulières, propres à qualifier le contrat de nettement personnalisé.
Par ailleurs, quand bien même ce contrat entrerait dans les exceptions visées à l’article L.221-28 susvisé, la société Cristal se devait, en application du 5° de l’article L.221-5 du code de la consommation, d’informer le consommateur de ce qu’il ne bénéficiait pas de ce droit de rétractation.
Or aucun élément du dossier ne permet d’établir que cette information lui aurait été donnée.
Il s’ensuit que les dispositions du 2° et 5° de l’article L.221-5 du code de la consommation n’ont pas été respectées et que des informations erronées ont été délivrées sur le droit de rétractation dont bénéficiait la société BKM, la conduisant notamment à y renoncer sur la base de dispositions législatives qui ne s’appliquaient pas au contrat en cause.
L’article L.221-9 du code de la consommation prévoit que le contrat conclu hors établissement doit contenir toutes les informations prévues à l’article L.221-5.
L’article L.242-1 du même code, applicable au présent litige, dispose que les dispositions de l’article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Le défaut d’information claire, précise et « conforme » sur le droit de rétractation dans le contrat conclu, fait encourir la nullité de ce contrat, en application de l’article L.242-1 du code de la consommation, sans qu’il soit nécessaire de se pencher sur les autres violations du code de la consommation reprochées par la société BKM. Il y a lieu, cependant, d’examiner à présent le moyen tiré de l’exécution du contrat, dont le bien-fondé s’opposerait à son annulation.
Sur le moyen tiré de l’exécution du contrat, rendant irrecevable toute demande de nullité
La société LOCAM fait valoir que, selon la jurisprudence constante, toute demande de nullité est irrecevable quand le contrat a reçu un commencement d’exécution. Or, en l’espèce, le site, objet du contrat de location, a été livré à la société BKM, qui l’a réceptionné sans réserve. Cette dernière a par ailleurs réglé les deux premiers loyers. Dans ces conditions, le contrat a donc bien reçu exécution.
La société BKM réplique que :
Tant que le délai de prescription quinquennal n’est pas expiré, ce qui est le cas présent, elle peut soulever la nullité du contrat, par voie d’action comme par voie d’exception, peu important son exécution ou non ;
La cour de cassation n’a jamais dit qu’un contrat qui a commencé à être exécuté ne pouvait plus être annulé ;
L’exécution du contrat ne vaut pas confirmation de ses nullités, dès lors qu’elle n’a pas été faite en connaissance de la cause de nullité, conformément aux dispositions de l’article 1182 du code civil.
Réponse de la cour :
Il résulte de l’article 1182 alinéa 3 du code civil que l’exécution du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation.
La confirmation d’un acte nul exige à la fois la connaissance de l’acte nul et la volonté de le réparer (Civ.1ère, 28 novembre 2018, n°17-30.966).
En outre, le commencement d’exécution ou l’acceptation sans réserves d’une livraison ne sont pas de nature à démontrer que le consommateur connaissait le vice affectant l’acte (voir notamment 1ère Civ, 4 octobre 2017, n°16-23.022 ; Civ.3ème, 20 novembre 2013, n°12-27.041).
Pour qu’il y ait confirmation, la société LOCAM, qui s’en prévaut, doit donc établir que la société BKM avait connaissance de la violation des dispositions destinées à la protéger, qui ne se déduit pas du fait qu’elle ait accepté la livraison du bien et exécuté le contrat.
Or, elle ne produit aucun élément, laissant penser que la société BKM avait conscience du vice affectant le contrat conclu avec la société Cristal.
La confirmation du contrat conclu avec la société Cristal ne peut donc être retenue en l’espèce.
Par conséquent, le moyen tiré de la confirmation du contrat conclu entre la société BKM et la société Cristal doit être rejeté.
Compte tenu de la violation des dispositions du code de la consommation relatives au droit de rétractation applicable aux contrats conclus hors établissement, et sans qu’il soit besoin d’étudier les autres irrégularités soulevées, il y a donc lieu de prononcer la nullité du contrat conclu le 22 octobre 2019 entre la société BKM et la société Cristal.
La décision entreprise sera donc infirmée en ce qu’elle a :
Prononcé la résolution du contrat aux torts exclusifs de la société BKM ;
Débouté la société BKM de toutes ses demandes à l’encontre de la société LOCAM ;
Condamné la société BKM à payer à la société LOCAM la somme de 21 279,03 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 20 avril 2020 ;
La société LOCAM sera déboutée de ses demandes visant à obtenir la résolution du contrat du 22 octobre 2019 aux torts de la société BKM, de sa demande de paiement de la somme de 21 279,03 euros majorée des intérêts au taux appliqué par la BCE prévu par l’article L.441-10 du code de commerce, à compter du 20 avril 2020, et à l’anatocisme de ces intérêts.
III ‘ Sur les restitutions
L’annulation du contrat entraîne la remise des parties en l’état antérieur à la conclusion du contrat.
Sur la restitution des paiements
La société BKM sollicite la restitution des sommes versées, soit 540 euros à la société Cristal à la signature du contrat, et 840 euros correspondant à deux loyers versés à la société LOCAM.
Comme indiqué précédemment, cette demande est recevable en appel.
En conséquence de la nullité du contrat conclu le 22 octobre 2019, la société Cristal doit être condamnée à verser à la société BKM la somme de 540 euros représentant, selon le contrat produit, les frais de mise en service de la ligne.
La société LOCAM, destinataire des loyers à compter du 20 novembre 2019, indique ne plus avoir été réglée depuis l’échéance du 20 janvier 2020 et reconnaît donc avoir reçu paiement des échéances du 20 novembre et 20 décembre 2019, soit la somme totale de 840 euros.
Elle sera donc condamnée à verser cette somme de 840 euros à la société BKM.
La société BKM demande que les sommes restituées soient majorées du taux d’intérêt particulier prévu à l’article L.242-4 du code de la consommation.
Cependant, les dispositions de l’article L.242-4 du code de la consommation, relatives au calcul des intérêts, renvoient à l’article L.221-24 du même code, et visent donc le remboursement des sommes versées par le consommateur lorsque le droit de rétractation est exercé.
En l’espèce, la société BKM n’a pas fait jouer son droit de rétractation, sa demande visant la nullité du contrat.
En conséquence, les deux condamnations en remboursement des sommes de 540 euros et 840 euros seront uniquement assorties des intérêts au taux légal à compter des premières conclusions d’appel du 29 mars 2023, valant mise en demeure, conformément aux dispositions de l’article 1231-6 du code civil.
Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêts, comme prévu à l’article 1343-2 du code civil.
– Sur la restitution du matériel
La société LOCAM sollicite la confirmation du jugement entrepris, lequel a condamné la société BKM à lui restituer le site internet loué dans les conditions de l’article 23 du contrat, et dans les 30 jours à compter de la signification du jugement.
La société BKM reconnaît dans ses conclusions, qu’à la suite d’une nullité du contrat, « en matière de location de site, le bailleur restitue les loyers et le locataire restitue le site internet en demandant à l’agence web qui détient les codes d’administration de le désactiver ».
Il convient en conséquence d’ordonner la restitution par la société BKM du site internet à la société LOCAM.
Toutefois, la décision sera infirmée de ce chef, ayant dit que la restitution se ferait dans les conditions de l’article 23 du contrat, alors que ce contrat a été déclaré nul et ne trouve dès lors pas à s’appliquer.
IV ‘ Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile :
Les sociétés Cristal et LOCAM étant parties perdantes à la procédure, la décision entreprise sera infirmée du chef des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile.
Ces deux sociétés seront condamnées in solidum aux entiers dépens de première instance et d’appel, et à une indemnité procédurale en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La demande d’indemnité procédurale de la société Locam sera rejetée.
La cour,
DECLARE recevable la demande en paiement de 840 euros formée par la société BKM ;
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant de nouveau,
DIT que le droit de la consommation est applicable au contrat conclu par la société BKM et la société Cristal le 22 octobre 2019 ;
REJETTE le moyen soulevé par la société LOCAM, tiré de la confirmation du contrat conclu le 22 octobre 2019 ;
PRONONCE la nullité du contrat conclu le 22 octobre 2019 entre la société BKM et la société Cristal, aux droits de laquelle vient la société LOCAM ;
REJETTE en conséquence la demande de la société LOCAM visant à obtenir la résolution du contrat du 22 octobre 2019 aux torts de la société BKM et sa demande en paiement de la somme de 21 279,03 euros majorée des intérêts au taux appliqué par la BCE prévu par l’article L.441-10 du code de commerce, à compter du 20 avril 2020, et à l’anatocisme de ces intérêts ;
DEBOUTE la société BKM de sa demande d’intérêts calculés conformément à l’article L.242-4 du code de la consommation ;
CONDAMNE la société Cristal à restituer à la société BKM la somme de 540 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2023 ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts dus par la société Cristal conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
CONDAMNE la société Locam à verser à la société BKM la somme de 840 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2023 ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts dus par la société LOCAM conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
ORDONNE la restitution par la société BKM du site web loué ;
CONDAMNE in solidum les sociétés Cristal et LOCAM aux entiers dépens de première instance et d’appel ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, REJETTE la demande de la société Locam, et CONDAMNE in solidum la société Cristal et la société LOCAM à verser à la société BKM la somme globale de 4 000 euros.
Le greffier
Marlène Tocco
La présidente
Stéphanie Barbot