Contrat de location de panneaux publicitaires : les modalités de résiliation

·

·

Contrat de location de panneaux publicitaires : les modalités de résiliation
Ce point juridique est utile ?

La résiliation d’un contrat doit être faite selon les modalités convenues entre les parties. Le commandement aux fins de saisie-vente ou encore l’opposition à injonction de payer ne sont pas de nature à manifester de façon explicite la volonté de mettre fin au contrat liant les deux parties.

Conformément à l’article 1184 du code civil, également dans sa rédaction antérieure, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Il est cependant loisible aux parties, dans le cadre de leurs relations contractuelles, de convenir d’une clause résolutoire de plein droit, qui permet aux parties de soustraire la résolution d’une convention à l’appréciation des juges, sauf la possibilité donnée à ces derniers de recouvrer leur pouvoir d’appréciation en cas de contestation sur les modalités d’application de ladite clause au visa de l’article 1134 susvisé.

A cet égard, il appartient au juge du fond d’apprécier si le manquement dans l’exécution est d’une gravité suffisante pour que la résolution doive être prononcée.

En la cause, le contrat de location de panneaux publicitaires conclu entre la société Media Line, anciennement Extérieur Media, et la société Optique des Vallées l’a été pour une durée d’un an renouvelable « par tacites reconductions par périodes de durées équivalentes à celle du contrat initial, sans limite du nombre de renouvellements, sauf dénonciation par l’une des parties par lettre recommandée, trois mois avant l’expiration de chaque période » (clause IV). En l’absence de résiliation du client, le contrat restait opposable.

Résumé de l’affaire : La société Optique des Vallées a signé un contrat de location de panneaux publicitaires avec Media Line en mai 2014, mais a rencontré des problèmes de paiement. En février 2018, une ordonnance d’injonction de payer a été rendue contre elle pour un montant de 21 461,71 euros. Après opposition, le tribunal de commerce de Nice a débouté Optique des Vallées et l’a condamnée à payer 22 250,11 euros, ainsi qu’une indemnité de 1 500 euros. Optique des Vallées a interjeté appel en mars 2020, contestant la mise en demeure et les manquements contractuels de Media Line, ainsi que des surfacturations. Media Line a demandé la confirmation du jugement et a contesté les allégations d’Optique des Vallées, affirmant que le contrat avait continué par tacite reconduction et que plusieurs relances avaient été effectuées.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

18 septembre 2024
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
20/03526
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 18 SEPTEMBRE 2024

N° 2024/ 178

Rôle N° RG 20/03526 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BFXAD

S.A.R.L. OPTIQUE DES VALLEES

C/

S.A.S. MEDIA LINE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Joseph MAGNAN

Me Pascal ALIAS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 18 Décembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2019F00301.

APPELANTE

S.A.R.L. OPTIQUE DES VALLEES,

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège sis

[Adresse 2],

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

S.A.S. MEDIA LINE,

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège sis

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Pascal ALIAS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 30 Mai 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

Mme Marie-Amélie VINCENT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marielle JAMET

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2024,

Signé par Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre et Madame Elodie BAYLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 9 mai 2014 la société Optique des Vallées, à l’enseigne Atol, a souscrit auprès de la société Extérieur Media, devenue la société Media Line, un contrat de location de quatre panneaux publicitaires pour une durée d’un an renouvelable et moyennant un prix annuel de 7 080 euros.

Au regard des incidents de paiement invoqués par la société Media Line, une ordonnance d’injonction de payer a été rendue le 6 février 2018 à l’encontre de la société Optique des Vallées à hauteur de la somme de 21 461,71 euros en principal, outre les dépens et accessoires.

Sur opposition de la société Optique des Vallées, le tribunal de commerce de Nice a, par jugement en date du 18 décembre 2019 :

– débouté la société Optique des Vallées de son opposition,

– condamné la société Optique des Vallées à payer à la société Media Line la somme de 22 250,11 euros,

– condamné la société Optique des Vallées à payer à la société Media Line la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

– ordonné l’exécution provisoire

——-

Par acte en date du 6 mars 2020 la société Optique des Vallées a interjeté appel du jugement.

——-

Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 27 novembre 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Optique des Vallées (Sarl) demande à la cour de :

Vu les dispositions des articles 1103, 1104 et suivants, 1224 et suivants du Code de civil,

Vu les pièces versées aux débats,

En la forme,

Recevoir l’appel interjeté par la société Optique des Vallées par déclaration d’appel n° 20/03526 du 6 mars 2020 et le déclarer bien fondé,

En conséquence,

Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et,

Statuant à nouveau,

Réformer l’Ordonnance rendue par le Président du Tribunal de commerce de Nice le 6 février 2018 en ce qu’elle a condamné la société Optique des Vallées à payer à la société Medialine la somme de 21952,57 euros en principal, outre les dépens, frais irrépétibles,

Prononcer la résolution du contrat à compter du 25 novembre 2015 date de signification du commandement aux ‘ns de saisie vente et à titre subsidiaire à compter de l’opposition formée par la concluante réceptionnée le 3 avril 2018.

Débouter la société Medialine de l’ensemble de ses demandes, ‘ns et conclusions ;

A titre Subsidiaire.

Si par extraordinaire, le Tribunal de céans devait entrer en voie de condamnation à1’encontre de la concluante,

Annuler les factures en date des 4 juin et 10 juillet 2018, postérieures à l’ordonnance portant injonction de payer du 6 février 2018 d’un montant respectif de 3016,68 euros et 4361,53 euros.

Ramener à de plus juste proportions la somme mise à la charge de la société Optique des Vallées, compte tenu de la mauvaise foi de la société Medialine, de l’exécution déloyale du contrat et des manquements contractuels de cette dernière.

En tout état de cause,

Condamner la société Media Line à verser à la société Optique des Vallées la somme de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Condamner la société Medialine aux entiers dépens de l’instance distraits au pro’t de la SCP Paul et Joseph Magnan, sous sa due affirmation.

La société Optique des Vallées fait valoir que :

– elle n’a pas été destinataire d’une mise en demeure à hauteur des sommes réclamées devant le tribunal de commerce de Nice, la mise en demeure du 7 juin 2017 portant sur la somme de 7 184,86 euros et non 21 467,71 euros,

– la société Media Line a manqué à ses obligations contractuelles, notamment à son obligation d’information (absence de transmission des maquettes, absence d’information sur la pose des panneaux, absence d’envoi des factures) et s’est bien gardée de mettre en oeuvre la clause résolutoire, laissant le contrat perdurer bien que disposant librement des panneaux dès le 25 novembre 2015,

– la société Media Line a procédé à des surfacturations, facturant ainsi encore des échéances en dépit de la cession du contrat de location,

– elle a été à nouveau destinataire d’un courrier de relance de la part d’un repreneur, attestant des procédés déloyaux de la société Media Line et de ses repreneurs,

– la résolution du contrat doit être prononcée à compter du 25 novembre 2015, date de signification du commandement aux fins de saisie-vente et subsidiairement à compter du 3 avril 2018, date de son opposition

——-

Par conclusions en réponse enregistrées par voie dématérialisée le 3 août 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Media Line (Sas) demande à la cour de :

Débouter la société Optique des Vallées de son appel.

En conséquence :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– Débouté l’EURL Optique des Vallées de son opposition ;

– Condamné l’EURL Optique des Vallées à payer à la SAS Media Line la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.

Infirmer le jugement entrepris quant au quantum de la condamnation prononcée à l’encontre de l’EURL Optique des Vallées au titre des factures impayées.

Condamner en conséquence l’EURL Optique des Vallées au paiement de la somme d’un montant de 26.120,78 € T.T.C. au titre des factures demeurées impayées.

En toute hypothèse :

Condamner enfin la société Optique des Vallées au paiement d’une indemnité d’un montant de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’Article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

La société Media Line réplique que :

– la société Optique des Vallées n’a jamais dénoncé le contrat en dépit d’une clause prévue à cet effet, de sorte que le contrat s’est poursuivi par tacite reconduction jusqu’à la cession des emplacements à la société Abbou Monaco,

– la société Optique des Vallées a été destinataire de plusieurs relances et mises en demeure et n’a pas réagi à ces demandes ; elle était en droit d’actualiser ses demandes devant le tribunal ; la dénonciation du contrat constitue une simple faculté à son égard,

– elle n’a jamais été destinataire de réclamations durant l’exécution du contrat et conteste tout manquement de sa part, relevant au contraire la mauvaise foi de la société Optique des Vallées, et excluant toute résolution du contrat

MOTIFS

Sur les sommes dues au titre du contrat de location :

Aux termes de l’article 1134 ancien du code civil, applicable aux contrats signés avant le 1° octobre 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Par ailleurs, conformément à l’article 1184 du code civil, également dans sa rédaction antérieure, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Il est cependant loisible aux parties, dans le cadre de leurs relations contractuelles, de convenir d’une clause résolutoire de plein droit, qui permet aux parties de soustraire la résolution d’une convention à l’appréciation des juges, sauf la possibilité donnée à ces derniers de recouvrer leur pouvoir d’appréciation en cas de contestation sur les modalités d’application de ladite clause au visa de l’article 1134 susvisé.

A cet égard, il appartient au juge du fond d’apprécier si le manquement dans l’exécution est d’une gravité suffisante pour que la résolution doive être prononcée.

En l’espèce, le contrat de location de panneaux publicitaires conclu le 9 mai 2014 entre la société Media Line, anciennement Extérieur Media, et la société Optique des Vallées l’a été pour une durée d’un an renouvelable « par tacites reconductions par périodes de durées équivalentes à celle du contrat initial, sans limite du nombre de renouvellements, sauf dénonciation par l’une des parties par lettre recommandée, trois mois avant l’expiration de chaque période » (clause IV).

La société Optique des Vallées, qui ne justifie par aucune pièce avoir notifié à la société Media Line sa volonté de mettre fin au contrat dans les conditions de l’article IV, tel que rappelé ci-dessus, est dès lors mal-fondée à opposer la résolution du contrat par l’effet de la signification qui lui a été faite d’un commandement aux fins de saisie-vente ou encore par l’effet de l’opposition à injonction de payer, ces actes n’étant pas de nature à manifester de façon explicite sa volonté de mettre fin au contrat liant les deux parties.

Ainsi, la créance de la société Media Line doit être confirmée à hauteur de la somme de 22 250,11 euros telle qu’arrêtée par le tribunal.

La société Media Line ne justifie d’aucun motif autorisant une actualisation de sa créance à la hausse alors même que l’arrêté des comptes, fixé au 3 août 2018, date à laquelle cette société indique avoir cédé le contrat de location de panneaux publicitaires à la société Abbou Monaco, est antérieur au jugement déféré, et qu’aucune circonstance postérieure à cette date ne vient au soutien de la demande additionnelle.

La circonstance que la mise en demeure adressée à la société Optique des Vallées le 7 juin 2017 porte sur une somme de 7 184,96 euros, inférieure à celle sollicitée au titre de la requête en injonction de payer formée le 5 décembre 2017 auprès du greffe du tribunal de commerce de Nice, est insuffisante à caractériser la mauvaise foi de la société Media Line dès lors que les échéances de la location ont continué à courir pendant ce délai, rendant les factures échues et exigibles à la date de la demande en justice.

En outre, la société Optique des Vallées a fait l’objet dans l’intervalle de deux nouvelles relances par mails des 9 août et 26 septembre 2017, attestant qu’elle ne pouvait ignorer être redevable d’échéances complémentaires. Enfin, sur opposition de la société Optique des Vallées, le litige a été débattu contradictoirement devant les premiers juges, de sorte que cette société est mal-fondée à contester l’actualisation de la créance à la hausse.

Par ailleurs, les manquements contractuels dont se prévaut la société Optique des Vallées, notamment au titre du devoir de conseil de la société Media Line, en ce qu’ils ne sont étayés par aucune pièce, ne sont pas caractérisés, excluant qu’ils puissent fonder une demande de résolution, étant rappelé qu’il appartient à celui qui se prévaut de l’inexécution d’établir la réalité des manquements invoqués.

Au demeurant, la société Optique des Vallées, qui se prévaut de la déloyauté et de l’inexécution par la société Media Line de ses obligations, ne justifie d’aucune mise en demeure adressée à son cocontractant pendant l’exécution du contrat et pas davantage d’une volonté de résilier ce contrat, au constat notamment des manquements reprochés, la société Optique des Vallées étant au contraire restée passive pendant des années, laissant la dette s’aggraver.

Enfin, si chaque partie avait la possibilité de dénoncer le contrat, il ne saurait être fait grief à la société Media Line de ne pas avoir elle-même pris l’initiative de cette résiliation dès lors que cette possibilité ne constitue qu’une faculté et qu’elle n’y avait aucun intérêt. De même, les griefs relatifs à l’exécution du contrat, postérieurs au 3 août 2018, en ce qu’ils concernent d’autres parties au contrat de location, lesquelles ne sont pas en la cause, sont impropres à caractériser la mauvaise foi de la société Media Line en l’état du litige portant sur le paiement des échéances dues jusqu’à cette date.

En conséquence, le jugement attaqué sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les frais et dépens :

La société Optique des Vallées, partie succombante, conservera la charge des entiers dépens, recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile et sera tenue de régler à la société Media Line la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement rendu le 18 décembre 2019 par le tribunal de commerce de Nice,

Y ajoutant,

Condamne la société Optique des Vallées aux dépens de la procédure d’appel, recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société Optique des Vallées à payer à la société Media Line la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l’appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x