Contrat de franchise : 25 mai 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/04664

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Contrat de franchise : 25 mai 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/04664

25 mai 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
20/04664

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 25/05/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 20/04664 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TJDA

Jugement n°2019001062 rendu le 13 octobre 2020 par le tribunal de commerce de Valenciennes

Ordonnance de référé n° 21/72 rendue le 25 mai 2021 par le premier président de la cour d’appel de Douai

Arrêt avant dire droit n° 22/412 rendu par la cour d’appel de Douai

APPELANTS

Monsieur [K] [S]

né le [Date naissance 2] 1979 à [Localité 4]

et

Madame [M] [L] épouse [S]

née le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 5],

demeurant ensemble [Adresse 3]

représentés par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué aux lieu et place de Me Stéphane Dominguez avocat au barreau de Valenciennes

assistés de François-Xavier Awatar, avocat plaidant, substitué à l’audience par Me Marion Cornac, avocats au barreau de Lyon

INTIMÉE

La SAS Carrefour Proximité France agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 6]

représentée par Me Séverine Surmont, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Me Bertrand Charlet, avocat plaidant, substitué à l’audience par Me Caroline Demeyere, avocats au barreau de Lille

DÉBATS à l’audience publique du 25 janvier 2023 tenue par Dominique Gilles magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Dominique Gilles, président de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Clotilde Vanhove, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 25 mai 2023 après prorogation du délibéré du 13 avril 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 18 janvier 2023

****

Pour la garantie des engagements de la société JMC Distri à l’égard de la société

Carrefour proximité France, M. [S] et Mme [L] son épouse se sont portés caution, par acte sous seings privés du 16 juillet 2012, des engagements de la société JMC Distri dont M. [S] était le gérant, à hauteur de 17 420 euros en principal, intérêts et le cas échéant pénalités et intérêts de retard.

La SARL JMC Distri a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 5 septembre 2016. La SAS carrefour Proximité France a déclaré sa créance et, appelant les cautions, les a mises en demeure de lui payer 17 041,92 euros au titre de leur engagement.

Par actes extrajudiciaires du 17 janvier 2019, la société Carrefour proximité France a fait

assigner les époux [S] en exécution de leur engagement de caution.

C’est dans ces conditions que le tribunal de commerce de Valenciennes a, par jugement

rendu le 13 octobre 2020, au visa des articles L.341-3 et L.341-4 du code de la consommation et des articles 1153, 1153-1, 2288 et suivants du code civil :

– dit les époux [S] irrecevables en leurs prétentions à l’égard de la société CSF distincte de la société Carrefour Proximité France ;

– accueilli partiellement la société Carrefour Proximité France en ses demandes ;

– en conséquence, condamné solidairement les époux [S] à payer à la société Carrefour Proximité France la somme de 17 041,92 euros outre intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2019, date de l’assignation ;

– condamné solidairement les époux [S] à payer à la société Carrefour Proximité France la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– ordonné l’exécution provisoire ;

– condamné les époux [S] aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 17 novembre 2020, les époux [S] ont interjeté appel de ce jugement.

Par dernières conclusions déposées et notifiées par la voie électronique valant signification le 16 février 2021, les époux [S] demandent à la cour de :

– vu les articles 71, 72, 542, 564 du code de procédure civile ;

– vu les articles L.331-1 du code de la consommation, anciennement L.341-2 « et suivants » ;

– les déclarer recevables et bien fondés en leur appel ;

– déclarer nul le contrat de cautionnement litigieux compte tenu de l’absence d’indication précise de la durée de cet engagement ;

– dire que cet engagement leur est inopposable en raison de la disproportion de celui-ci avec leurs revenus au 16 juillet 2012, jour de sa signature ;

– en conséquence :

– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

– débouter la société Carrefour proximité France de toutes ses demandes ;

– condamner la société Carrefour proximité France à leur payer 5 000 euros à chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

Par dernières conclusions avant réouverture des débats notifiées et déposées par la voie électronique valant signification le 26 avril 2021, la société Carrefour proximité France prie la cour de :

– confirmer le jugement entrepris ;

– condamner en outre les époux [S] à hauteur de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture ayant été prise le 6 avril 2022, l’affaire a été plaidée le 1er juin 2022.

Par arrêt avant dire droit du 22 septembre 2022, la cour a rouvert les débats, invitant les parties à s’expliquer sur la validité de la déclaration d’appel.

Par dernières conclusions déposées et notifiées par la voie électronique le 18 janvier 2023, les époux [S] demandent à la cour de :

– dire que l’appel a bien saisi la cour et a produit son effet dévolutif ;

– les déclarer recevables et bien fondés en leur appel ;

– déclarer nul le contrat de cautionnement litigieux compte tenu de l’absence d’indication précise de la durée de cet engagement ;

– dire que cet engagement leur est inopposable en raison de la disproportion de celui-ci avec leurs revenus au 16 juillet 2012, jour de sa signature ;

– en conséquence :

– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

– débouter la société Carrefour proximité France de toutes ses demandes ;

– condamner la société Carrefour proximité France à leur payer 5 000 euros à chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 17 janvier 2023 et remises manuellement au greffe le 18 janvier 2023, comme suite à un dysfonctionnement du RPVA, la société CSF demande à la cour de :

– dire que l’acte d’appel contrevient aux dispositions des articles 562 et 901 du code de procédure civile ;

– en l’absence d’effet dévolutif, confirmer le jugement entrepris ;

– débouter les époux [S] de toute demande contraire ;

– confirmer le jugement entrepris ;

– condamner en outre les époux [S] à hauteur de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est du 18 janvier 2023.

SUR CE

LA COUR

S’agissant de la déclaration d’appel, le formulaire électronique renseigné ne précise les chefs du jugement expressément critiqués. Cependant, il mentionne renvoyer à une feuille annexe jointe. En effet, une feuille annexe qui mentionne être jointe à la déclaration d’appel précise les chefs du jugement expressément critiqués.

La question de la validité de la déclaration d’appel renvoyant à une feuille annexe, posée par la société CSF a été profondément transformée par le décret n° 2022-245 du 25 février 2022 et l’arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication électronique devant la cour d’appel, en présence d’un avis du 8 juillet 2022 de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation.

Il résulte de cet avis que les dispositions du décret et de l’arrêté précités sont d’application immédiate.

Or cet avis indique que la déclaration d’appel à laquelle est jointe une annexe comportant les chefs de dispositif du jugement crtiqués, constitue l’acte d’appel conforme aux exigences de l’article 901 du code de procédure civile, dans sa nouvelle rédaction, même en l’absence d’empêchement technique.

Il s’en déduit que la présente déclaration d’appel se trouve ainsi régularisée.

Sur le fond, les époux [S] soutiennent en premier lieu la nullité du cautionnement litigieux au moyen qu’il n’indique pas clairement sa durée. Si cette prétention est nouvelle en appel, ce que souligne la société Carrefour Proximité France sans pour autant en tirer de conséquence dans le dispositif de ses conclusions qui seul lie la cour, elle ne tend au demeurant qu’à faire écarter les prétentions adverses.

Il est constant que par acte du 16 juillet 2012, la SARL JMC Distri représentée par M. [S] a souscrit auprès de la société Carrefour Proximité France un contrat de franchise dont la durée est ainsi précisée : ‘Le présent contrat est conclu pour une durée de sept années pleines et entières, commençant à courir de la date de signature des présentes. Il se renouvellera ensuite automatiquement par périodes successives de sept ans, à défaut de dénonciation par l’une des parties, par lettre recommandée avec accusé de réception, un an avant l’expiration de la période en cours.’

Par acte du même jour, les époux [S] se sont portés cautions solidaire et indivisible de la société Carrefour Proxilmité France, pour la somme de 17 420 euros en principal, intérêts et, le cas échéant pénalités et intérêts de retard, en garantie de toutes les sommes pouvant être dues à ce bénéficiaire par la société JMC Distri. Il est précisé par l’acte de cautionnement que la somme garantie correspond aux cotisations et redevances relatives à la concession de l’enseigne Carrefour Contact, ainsi qu’à toute somme due par le débiteur cautionné au bénéficiaire, au titre des prestations de service et des aides financières annexes qui lui seront fournies. L’engagement de caution précise encore qu’il ‘est conclu de façon irrévocable pour la durée de la concession de l’enseigne susvisée majoré d’un délai de 90 jours à l’issue duquel seule l’obligation de couverture cessera’, et que : ‘ à l’expiration du délai de 90 jours, la caution ne sera déchargée que par le paiement effectif des sommes que le débiteur cautionné pourra devoir, même ultérieurement, au bénéficiaire, pour toutes les obligations dont l’origine serait antérieure au délai de 90 jours’.

Dans la mention manuscrite apposée par l’un et par l’autre des époux [S], chacun a précisé, conformément à la mention dactylographiée qu’ils ont recopiée, qu’il se portait caution ‘pour la durée de concession de l’enseigne visée aux présentes’.

Force est de constater la contradiction manifeste apparaissant entre, d’une part, la durée du cautionnement selon la mention manuscrite, qui coïncide avec la durée de concession de l’enseigne et, d’autre part, la durée de ce cautionnement qui résulte du reste de l’engagement de caution, qui énonce en particulier que le cautionnement est conclu de façon irrévocable pour la durée de concession de l’enseigne, majorée d’un délai de 90 jours.

Or, l’article L.341-2 du code de la consommation dans a rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016 s’énonce ainsi : ‘Toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : “En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de … couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de …, je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n’y satisfait pas lui-même.”

Pour l’application de ce texte, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass.com., 13 décembre 2017, pourvoi n° 15-24.294) la mention “pour la durée de…” qu’impose, pour un cautionnement à durée déterminée, l’article L. 341-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, implique l’indication d’une durée précise. A défaut de durée précise, il convient d’annuler le cautionnement en totalité.

En l’espèce, la contradiction déjà relevée entre la durée selon la mention manuscrite recopiée par les époux [S] et les autres dispositions de leur engagement relatives à la durée du cautionnement n’a pas permis aux cautions de connaître, au moment de la souscription du cautionnement litigieux, la date limite de celui-ci.

Le moyen, soutenu par la société Carrefour Proximité France, que la nullité n’est pas encourue au cas d’une omission ou une erreur n’affectant ni le sens ni la portée de la mention manuscrite est inopérant en l’espèce. En effet la contradiction relevée quant à la durée de l’engagement affecte bien la qualité d’information apportée par la mention manuscrite, et équivaut à une absence de mention manuscrite de la durée de l’engagement.

Par conséquent, il convient d’annuler le cautionnement litigieux en totalité.

Le jugement entrepris sera par conséquent réformé.

Toutes les demandes de la société Carrefour Proximité France seront rejetées.

La société Carrefour Proximité France sera condamnée à payer aux époux [S], ensemble, 5 000 euros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Carrefour Proximité France sera condamnée en tous les dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Réforme le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Annule le cautionnement ;

Rejette toutes les demandes de la société Carrefour Proximité France ;

La condamne à payer 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile aux époux [S], ensemble ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le greffier

Valérie Roelofs

Le président

Dominique Gilles

 


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