Contrat de franchise : 13 septembre 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/03567

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Contrat de franchise : 13 septembre 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/03567

13 septembre 2023
Cour d’appel de Lyon
RG n°
20/03567

AFFAIRE PRUD’HOMALE

DOUBLE RAPPORTEUR

N° RG 20/03567 – N° Portalis DBVX-V-B7E-NA7N

Société CABINET HERMES

C/

[D]

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 25 Juin 2020

RG : 18/1755

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRET DU 13 Septembre 2023

APPELANTE :

Société CABINET HERMES

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Sahra CHERITI de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIME :

[W] [D]

né le 02 Mars 1965 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Raphaël DE PRAT de la SELARL INCEPTO AVOCATS CONTENTIEUX, avocat au barreau de LYON

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 06 Juin 2023

Présidée par Joëlle DOAT, présidente et Anne BRUNNER, conseiller, magistrats rapporteurs (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistés pendant les débats de Morgane GARCES, greffière

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Joëlle DOAT, présidente

– Nathalie ROCCI, conseiller

– Anne BRUNNER, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

rendu publiquement le 13 Septembre 2023 par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Morgane GARCES, greffier, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par contrat de travail à durée indéterminée du 4 juillet 2016, la SARL CABINET HERMES a embauché Mme [W] [F] épouse [D], en qualité de négociateur immobilier relevant du statut VRP multicartes, moyennant une rémunération fixée à un montant de 28% sur le chiffre d’affaire hors taxe encaissé dont le négociateur est à l’origine.

Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective nationale de l’immobilier dans ses dispositions étendues et notamment l’avenant n°31 du 15 juin 2006, relatif au statut de négociateur immobilier.

Le même jour, Mme [D] a également signé un contrat de travail VRP MULTICARTES avec la SARL CHR LINK, soumis à la convention collective nationale des VRP.

Par courrier du 25 septembre 2017, Mme [D] a démissionné de ses fonctions de VRP MULTICARTES auprès des deux sociétés et a sollicité d’être dispensée de son préavis. La SARL CABINET HERMES l’a dispensée de son préavis et déliée de son obligation de non-concurrence.

Soutenant que sa démission devait être requalifiée en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du non-paiement du salaire minimum du négociateur immobilier et de ses congés payés, de la prise en charge indue d’une redevance forfaitaire et de l’absence de prise en charge des frais professionnels, Mme [D] a saisi le conseil de prud’homme de LYON le 13 juin 2018, de diverses demandes indemnitaires et salariales.

Par jugement du 25 juin 2020, le conseil de prud’hommes de LYON a :

dit que la rupture du contrat de travail de Mme [W] [D] est bien causée par une démission ;

dit que la société CABINET HERMES a exécuté le contrat de travail de Mme [W] [D] de manière loyale ;

dit que le contrat de VRP de Mme [W] [D] était bien exclusif ;

dit que le paragraphe du contrat de travail régissant l’indemnisation de congés payés ne respecte pas les dispositions de l’avenant du 15 juin 2006 à la Convention Collective Nationale de l’Immobilier et que la société CABINET HERMES est redevable à Mme [W] [D] du paiement de cette indemnité suivant la règle des 10%.

En conséquence,

condamné la société CABINET HERMES à verser à Mme [W] [D] les sommes suivantes :

7 462,88 euros au titre de rappel de salaire de 2016

6 819,84 euros au titre de rappel de salaire de 2017

2 112,48 euros au titre des congés payés non pris.

condamné la société CABINET HERMES à verser à Mme [W] [D] la somme de 1 700 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

débouté Mme [W] [D] de ses autres demandes.

condamné la société CABINET HERMES aux entiers dépens.

Le 8 juillet 2020, la SARL CABINET HERMES a fait appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 avril 2023, la SARL HERMES demande à la cour de :

Confirmant le jugement entrepris :

juger que la rupture du contrat de travail de Mme [D] doit produire les effets d’une démission et la débouter de toutes ses demandes à ce titre ;

juger qu’elle a exécuté loyalement le contrat de travail de Mme [D] ;

juger licite la clause contractuelle sur la redevance forfaitaire de 6% ;

juger la demande de Mme [D] au titre de la prise en charge de frais professionnels infondée et injustifiée ;

juger la demande de Mme [D] au titre du droit de suite injustifiée ;

L’infirmant pour le surplus :

juger que le statut de Madame [D], tel que prévu contractuellement, était bien celui de VRP multicartes ; par conséquent, juger qu’elle ne peut prétendre au salaire minimum conventionnel et qu’elle a été remplie de ses droits ;

juger que la clause contractuelle régissant l’indemnisation des congés payés est conforme aux dispositions de l’avenant du 15 juin 2006 à la Convention Collective Nationale de l’Immobilier et débouter Mme [D] de ses demandes à ce titre ;

débouter Madame [D] de l’intégralité de ses demandes ;

fixer la moyenne des salaires de Mme [D] à la somme de 260,36 euros ;

condamner Mme [D] au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Y ajoutant,

condamner Madame [D] à lui verser, au titre de la procédure d’appel, la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par RPVA le 27 avril 2023, Mme [D] demande à la cour de

dire recevable et bien fondés son appel incident et ses demandes

Et jugeant à nouveau,

confirmer le jugement querellé en ce qu’il a condamné la Société CABINET HERMES à lui payer les sommes suivantes :

7 462,88 euros au titre de rappel de salaire pour 2016

6 819,84 euros au titre de rappel de salaire pour 2017

2 112,48 euros au titre des congés payés non pris

1 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance

réformer le jugement en ce qu’il a rejeté ses autres demandes

juger que sa démission doit s’analyser en une prise d’acte justifiée et la qualifier de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En tous les cas,

condamner la Société CABINET HERMES à lui payer les sommes suivantes :

– dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 6 mois soit 8 450 euros

– A titre subsidiaire concernant les congés payés, rappel de salaire pour congés payés non pris soit 684,20 euros

– Dommages et intérêts au titre du la retenue sur salaire liée à la redevance de 6 % et exécution déloyale du contrat, 5 000 euros

– A titre subsidiaire au titre de la retenue sur salaire de 6 %, 2995 euros

– Dommages et intérêts pour non prise en charge des frais professionnels, la somme de 5 000 euros

– Indemnité conventionnelle de licenciement de 769,44 euros

– Indemnité de préavis de 2 mois de salaire soit 2 816,66 outre 281,66 euros au titre des congés payés afférents

– Dommages et intérêts pour exécution déloyale du droit de suite 5 000 euros

– Indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 3 500 euros

– Intérêts au taux légal à compter de la sommation de payer pour les sommes à caractère salarial

– Aux entiers dépens de l’instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 avril 2023.

SUR CE,

Sur l’exécution du contrat de travail

Sur le statut de VRP exclusif et la rémunération de Mme [D] :

La société CABINET HERMES soutient qu’elle a une activité de transaction immobilière en « B to B », distincte de celle de la société CHR LINK ; qu’elle n’exerce pas dans les mêmes locaux et n’applique pas la même convention collective. Elle ajoute que Mme [D] a choisi le statut de VRP MULTICARTES, et, de son plein gré, signé un contrat avec la société CHR LINK, pour bénéficier d’une seconde carte ; qu’il lui appartenait de rechercher de nouvelles cartes et d’effectuer des prestations pour la société CHR LINK.

Elle conteste que le contrat contienne une clause d’exclusivité mais explique que Mme [D] pouvait prendre de nouvelles cartes à condition de l’en informer et de ne pas nuire à l’entreprise ; qu’elle pouvait travailler dans le secteur de l’immobilier, hors « B to B ».

Elle fait valoir que la salariée, VRP MULTICARTES, est rémunérée exclusivement à la commission et ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre du salaire minimum.

Mme [D] expose que le 4 juillet 2016, elle a été contrainte de signer deux contrats de VRP multicartes, l’un avec le cabinet HERMES, l’autre avec une société CHR LINK, deux sociétés ayant le même dirigeant, exerçant des activités similaires, à la même adresse et avec les mêmes moyens.

Elle ajoute que le contrat conclu avec la société HERMES stipule qu’il s’agit d’une représentation principale et contient une clause d’exclusivité ; qu’elle s’est engagée à ne pas prendre de nouvelle carte sans autorisation de son employeur ; qu’il lui était interdit de représenter une autre entreprise dans tous les domaines de l’immobilier à l’exception de la Société CHR-LINK. Elle estime que ces interdictions sont incompatibles avec le statut de VRP multicartes.

Elle soutient que le travail qu’elle devait réaliser l’occupait à temps plein et ne lui permettait pas de représenter une autre société.

Elle fait valoir que la dénomination contrat de travail de VRP MULTICARTES a pour unique but d’échapper à l’application de l’article 4 de l’avenant du 15 juin 2006 de la convention collective de l’immobilier, relatif au salaire minimum du négociateur immobilier.

***

Selon l’article L7311-3 du code du travail, « est voyageur, représentant ou placier, toute personne qui :

1° Travaille pour le compte d’un ou plusieurs employeurs ;

2° Exerce en fait d’une façon exclusive et constante une profession de représentant ;

3° Ne fait aucune opération commerciale pour son compte personnel ;

4° Est liée à l’employeur par des engagements déterminant :

a) La nature des prestations de services ou des marchandises offertes à la vente ou à l’achat ;

b) La région dans laquelle il exerce son activité ou les catégories de clients qu’il est chargé de visiter ;

c) Le taux des rémunérations. »

Aux termes de l’article L7313-6 du code du travail, le contrat de travail peut, pour sa durée, prévoir l’interdiction pour le voyageur, représentant ou placier, de représenter des entreprises ou des produits déterminés.

Lorsque le contrat de travail ne prévoit pas cette interdiction, il comporte, à moins que les parties n’y renoncent par une stipulation expresse, la déclaration des entreprises ou des produits que le voyageur, représentant ou placier représente déjà et l’engagement de ne pas prendre en cours de contrat de nouvelles représentations sans autorisation préalable de l’employeur.

L’annexe IV de l’avenant n°31 du 15 juin 2006 à la convention collective nationale de l’immobilier, relatif au nouveau statut du négociateur immobilier, a pour objet de définir le statut du négociateur immobilier engagé par un seul employeur (à titre exclusif) et rémunéré principalement à la commission. Les VRP multi-employeurs (non exclusif) ne bénéficient pas de cette annexe.

Le caractère exclusif de l’engagement du représentant s’apprécie au regard des dispositions contractuelles.

Le contrat de travail de Mme [D] mentionne qu’elle représente le Cabinet Hermès et la société CHR LINK, qu’elle s’engage à ne prendre, en cours de contrat, aucune nouvelle représentation sans une information préalable et écrite du représenté et qui ne pourront dans tous les cas ne concerner que des maisons dont les activités sont différentes de celles citées ci-dessus.

Les secteurs de protection et de représentation sont précisés, tant du point de vue géographique (Ain, Rhône et Saône et Loire) que de l’activité (CHR-DAB/boutiques ou murs commerciaux en direct ou en parts sociales).

A l’article 6, il est stipulé que le négociateur « s’engage dans l’activité désignée plus haut à exercer cette dernière de manière exclusive et constante et s’interdit de se livrer à toute activité allant à l’encontre des intérêts de la société », qu’il s’interdit « tout accord avec d’autres professionnels immobiliers (marchands de biens, promoteurs, administrateurs de biens, agents immobiliers, etc) sauf autorisation préalable et expresse de la société » et qu’il s’engage à « apporter son activité et ses connaissances professionnelles au service du représenté. Le représenté accepte cependant et dès à présent que cette activité ne représente pas 100% de son temps de travail, compte tenu de son statut de multicartes et des engagements qu’il aurait éventuellement pris avec d’autres maisons ».

Cette clause n’interdit pas à Mme [D] de représenter des entreprises ou produits déterminés, mais comporte l’engagement ne pas prendre de nouvelles représentation sans autorisation de l’employeur, conformément à l’alinéa 2 de l’article L7313-6 du code du travail tandis que l’interdiction de se livrer à une activité allant à l’encontre des intérêts de la société n’est que l’expression de l’obligation de loyauté pesant sur tout salarié.

Ainsi, le contrat de travail ne comporte pas de clause d’exclusivité et il autorise la salariée à travailler pour un autre employeur dès lors qu’il ne s’agit pas d’une entreprise concurrente.

La circonstance que Mme [D] ait signé le même jour, un autre contrat de travail, avec la société CHR-LINK, pour laquelle elle ne démontre pas avoir travaillé et dont elle n’a donc pas perçu de rémunération est insuffisante à démontrer que, dans les faits, Mme [D] a exercé son activité à titre exclusif pour la société CABINET HERMES.

Il est observé que Mme [D] ne verse pas aux débats ses agendas entre le 4 juillet 2016, date de son embauche, au 25 septembre 2017, date de sa démission, et qui illustrerait le temps consacré à son activité tandis que la SARL CABINET HERMES justifie des ventes réalisées avec la participation de la salariée, au nombre de six, pour cette période de 15 mois.

La salariée ne peut donc prétendre au bénéfice de la rémunération minimale prévue à l’annexe IV de l’avenant n° 31 au bénéfice des négociateurs immobiliers VRP exclusifs.

Le jugement sera infirmé et Mme [D] déboutée de sa demande de rappel de salaire.

Sur les congés payés

La société CABINET HERMES fait valoir :

que l’article 7 de l’avenant de la convention collective n° 31 du 15 juin 2006 relatif aux congés payés prévoit que l’employeur et le négociateur immobilier peuvent contractuellement convenir de l’inclusion de l’indemnité de congés payés dans la rémunération, à la condition que le contrat mentionne expressément le taux de commission et sa majoration au titre de l’indemnité légale de congés payés ;

que l’article 15 du contrat de travail, qui prévoit une indemnité de congés payés égale à 1/10ème de la rémunération variable dans laquelle elle est incluse, est clair et compréhensible

que la grille de rémunération jointe au contrat prévoit les modalités de versement de l’indemnité de congés payés, à savoir l’application d’un taux de 10 %.

Elle ajoute que la salariée ne justifie pas n’avoir pas été en mesure de prendre ses congés.

Mme [D] soutient qu’elle n’a bénéficié d’aucun paiement au titre des congés payés et n’a pas été en mesure de prendre des congés payés. Elle estime que la clause du contrat n’est ni claire ni compréhensible.

***

Il résulte des articles L. 3141-22 et L. 3141-26 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, interprétés à la lumière de l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, que s’il est possible d’inclure l’indemnité de congés payés dans la rémunération forfaitaire lorsque des conditions particulières le justifient, cette inclusion doit résulter d’une clause contractuelle transparente et compréhensible, ce qui suppose que soit clairement distinguée la part de rémunération qui correspond au travail, de celle qui correspond aux congés, et que soit précisée l’imputation de ces sommes sur un congé déterminé, devant être effectivement pris.

Le contrat de travail de Mme [D] stipule, en son article 15, que l’indemnité de congés payés sera égale à 1/10ème de la rémunération variable dans laquelle elle est incluse et qu’elle aura perçue au cours de la période de référence. Il est également prévu que, pendant son congé, le négociateur percevra les commissions sur les transactions effectivement réalisées pendant cette période et qui sont la conséquence d’un travail antérieur à son départ en vacances.

L’annexe du contrat de travail prévoit qu’en rémunération de ses services, le négociateur recevra une commission en pourcentage sur toutes les affaires qu’il aura effectivement réalisées et selon les modalités fixées dans le contrat ainsi qu’une prime annuelle sur objectifs.

Le total de la commission est fixé à 28% et il est précisé une ventilation entre négociation 25,5% et 2,5% pour les congés payés.

Dès lors, la clause est claire et compréhensible.

Au cours de l’année 2016, Mme [D] a perçu la somme de 987 euros au titre des commissions, et au titre de l’année 2017, droit de suite inclus, la somme de 5 855,03 euros. Ces sommes, calculées conformément à l’article 15 du contrat de travail et à ses annexes, comprennent les congés payés.

Le jugement sera infirmé.

Sur la redevance forfaitaire et l’exécution déloyale du contrat de travail

La salariée fait valoir qu’une redevance forfaitaire de 6% a été appliquée sur les commissions perçues, en application du contrat de franchise liant CENTURY 21 avec la SARL CABINET HERMES et estime que cette redevance est illicite car elle fait supporter au négociateur les frais de fonctionnement de l’employeur.

Elle formule une demande dommages-intérêts, à hauteur de 5 000 euros, à défaut de production des factures ayant servi à calculer les commissions et subsidiairement, à hauteur de 2 995 euros, correspondant à la somme retenue par l’employeur.

L’employeur réplique que cette redevance forfaitaire, prévue à l’article 11 du contrat est parfaitement licite ; qu’il justifie du versement de la redevance de 6% à Century 21 ; que si le contrat de franchise a été résilié le 31 mai 2016, en revanche, le commissionnement transaction de 6% a perduré sur les affaires initiées antérieurement à cette même date.

Il souligne qu’en sollicitant des dommages-intérêts, plutôt qu’un rappel sur salaire, Mme [D] tente de contourner les règles de la prescription en matière de rappel de salaire.

***

Selon l’article 11 du contrat de travail, les commissions seront calculées sur le montant HT de la facture réglée par le client déduction faite des rémunérations dues à des intermédiaires extérieurs liés à la transaction et de la redevance forfaitairement fixée à 6% et versée pour la publicité ou le réseau de franchise le cas échéant.

Le contrat de franchise liant la SARL Cabinet Hermès et Century 21 a pris fin le 31 mai 2016, le commissionnement perdurant sur les affaires initiées avant cette date.

Mme [D] ayant été embauchée le 4 juillet 2016, la preuve n’est pas rapportée que le chiffre d’affaire qu’elle a réalisé aurait été initié avant le 31 mai 2016. Au contraire, il ressort des factures d’honoraires versées aux débats et correspondant aux vente auxquelles elle a participé que tous les mandats de vente sont postérieurs au 31 mai 2016.

La SARL Cabinet HERMES ne pouvait déduire du chiffre d’affaire facturé, une redevance forfaitaire de 6%, or, il ressort de sa pièce n°13 qu’elle a déduit 6% sur les 4 affaires réalisées par la salariée, au mois de novembre 2016, avril 2017, mai 2017 et septembre 2017, pour un total de 2 995 euros.

C’est la base de calcul du chiffre d’affaire personnel et de la commission due à la salariée qui ont ainsi été faussées.

Ainsi, la base de calcul du chiffre d’affaire personnel pour l’affaire « Lumen » aurait dû être de 15 000 euros et la base de calcul de la commission de 3 750 euros, ce qui aurait généré une commission de 1 050 euros, or il a été versé 987 euros.

La base de calcul du chiffre d’affaire personnel pour l’affaire « ASTALIX » aurait dû être de 21 000 euros et celle de la commission de 10 500 euros, ce qui aurait généré une commission de 2 940 euros, or il a été versé 2 763,60 euros.

La base de calcul du chiffre d’affaire personnel pour l’affaire « LE SORBIER» aurait dû être de 5 416,67 euros et celle de la commission de 2 708,33 euros, ce qui aurait généré une commission de 758,33 euros, or, il a été versé 712,83 euros ;

La base de calcul du chiffre d’affaire personnel pour l’affaire « AU RESTO» aurait dû être de 8 500 euros et celle de la commission de 4 250 euros, ce qui aurait généré une commission de 1 190 euros, or, il a été versé 1 118,60 euros.

Le différentiel s’élève au total à la somme de 356,30 euros, au paiement de laquelle il convient de condamner la SARL Cabinet Hermès.

Mme [D], n’établissant pas une exécution déloyale du contrat de travail ni le préjudice qui en résulterait, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts.

Sur la prise en charge des frais professionnels

La salariée fait valoir que selon l’article 6 de l’avenant n°31 de la convention collective de l’immobilier, le négociateur est remboursé sur justificatif des frais qu’il engage.

Elle estime être fondée à réclamer le paiement d’une somme de 5 000 euros.

La SARL CABINET HERMES réplique :

que la salariée ne produit aucun élément justificatif ;

que, selon l’article 14 du contrat de travail, d’une part, le salarié conserve à sa charge ses frais professionnels en contrepartie d’un taux de commission majoré et d’autre part, un abattement de 30% pour frais professionnels a été appliqué, avec l’accord de la salariée, sur l’assiette des cotisations sociales ;

que, conformément au contrat de travail, elle a pris en charge le coût de l’utilisation du téléphone portable de Mme [D]

***

Les frais qu’un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur doivent lui être remboursés sans qu’ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due.

Mme [D] ne produit aucun justificatif des frais qu’elle aurait exposés. Le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a déboutée de sa demande à ce titre.

Sur les commissions restant dues sur les dossiers en cours au moment de la rupture

Mme [D] s’appuie sur l’article 21 alinéa 3 du contrat de travail et souligne que le droit de suite, fixé à une durée de six mois, court à compter de la fin du contrat. Elle estime être bien fondée à solliciter le paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail car elle est dans l’impossibilité de calculer les commissions restant dues au titre des dossiers en cours au moment de la rupture.

La SARL CABINET HERMES répond que :

pour bénéficier du droit de suite, les affaires traitées par Mme [D] doivent remplir deux conditions : être la suite et la conséquence du travail effectué par Mme [D] et avoir donné lieu à la perception d’honoraires entre le 25 septembre 2017 et le 25 mars 2018

deux dossiers remplissaient ces conditions « la chapelle » et « la tosca »

Mme [D] a perçu son droit de suite pour ces deux dossiers.

***

La SARL Cabinet Hermès verse aux débats le tableau des affaires en cours au moment de la rupture sur lequel sont inscrites deux affaires, facturées au mois d’octobre 2017 La Tosca et La Chapelle. Elle justifie du montant de la facture d’honoraire pour chacune de ses affaires. Les commissions ont été payées à Mme [D] en octobre 2017 et en janvier 2018.

En outre, Mme [D] n’établit aucune exécution déloyale du contrat de travail.

Le jugement, qui a débouté Mme [D] de ses demandes au titre du droit de suite, sera confirmé.

Sur la démission :

Mme [D] soutient avoir démissionné en raison des manquements graves de l’employeur, le non-paiement du salaire minimum et des congés payés, la prise en charge d’une redevance forfaitaire et l’absence de prise en charge des frais professionnels ; que sa démission doit être analysée en une prise d’acte et requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La SARL CABINET HERMES réplique que la démission est claire et non équivoque ; qu’elle était motivée par le projet de rejoindre une entreprise concurrente ; que la salariée ne rapporte pas la preuve de la réalité et de la gravité des griefs invoqués ainsi que de leurs conséquences sur la poursuite du contrat.

***

La démission ne se présume pas ; il s’agit d’un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements suffisamment graves imputables à son employeur, et lorsqu’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, le juge doit l’analyser en une prise d’acte qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués étaient suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail ou, dans le cas contraire, d’une démission.

En l’espèce, Mme [D] a démissionné par un courrier ainsi libellé « je vous informe par la présente de ma décision de démissionner du poste de VRP MULTICARTES que j’occupe au sein de votre entreprise depuis le 4 juillet 2016. Je souhaite être dispensée de mon préavis et me teins à votre disposition afin d’envisager avec vous les modalités pratiques de la rupture du contrat qui nous lie. ».

Il a été fait droit aux demandes de la salariée s’agissant de l’indemnité forfaitaire de 6% que l’employeur a déduit à tort du chiffre d’affaire facturé. Il en est résulté un différentiel de 356,30 euros.

Pour le surplus, les doléances de la salariée relatives à l’exécution du contrat de travail n’ont pas été retenues.

Au jour de sa démission, le salaire du mois de septembre n’était pas réglé, c’était donc les salaires de novembre 2016, avril 2017 et mai 2017 qui avaient été payés, avec un manque à gagner de 6%. Le manquement invoqué n’est pas suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Aucune circonstance contemporaine à la démission ne rend celle-ci équivoque.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande tendant à voir analyser la démission en prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et a débouté la salariée de ses demandes au titre de l’indemnité de licenciement, de préavis et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les autres demandes

Mme [D], partie perdante pour l’essentiel, doit être condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

Sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en première instance doit être rejetée.

L’équité ne commande pas de condamner Mme [D] à payer à la SARL Cabinet HERMES une indemnité de procédure au titre des frais exposés par elle en première instance et en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition, contradictoirement

Confirme le jugement en ce qu’il a rejeté les demandes relatives à la rupture du contrat de travail, la demande en dommages et intérêts au titre de l’exécution déloyale du droit de suite et la demande de dommages et intérêts pour non prise en charge des frais professionnels

Infirme le jugement pour le surplus de ses dispositions

Statuant à nouveau,

Condamne la SARL Cabinet Hermès à payer à Mme [D] la somme de 356,30 euros au titre du rappel de salaire en raison de la déduction de la redevance forfaitaire de 6%

Déboute Mme [D] de ses demandes en paiement de rappels de salaire pour 2016 et 2017 et d’une indemnité de congés payés non pris

Condamne Mme [D] aux dépens de première instance et d’appel 

Rejette la demande de Mme [D] fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en première instance

Rejette les demandes de la SARL Cabinet Hermès fondées sur l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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