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5 décembre 2006
Cour de cassation
Pourvoi n°
06-10.754
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 25 novembre 2005), que la société International Movie group Canada (la société IMG) a conclu avec la société Chrysalide, aux droits de laquelle se trouve la société Studiocanal, un contrat en vue de la co-production et de la distribution de films ; que, contestant le coût des productions, la société IMG, puis la société canadienne The Movie group (la société TMG), cessionnaire du contrat, ont fait assigner la société Chrysalide pour obtenir, après expertise, le remboursement d’une somme de 16 750 000 francs ; que la société Studiocanal a formé une demande reconventionnelle en paiement de la somme de 333 958,62 euros ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que les sociétés TMG et IMG font grief à l’arrêt d’avoir condamné la société TMG, venant aux droits de la société IMG, à payer à la société Studiocanal, venant aux droits de la société Chrysalide, la somme de 224 213,24 euros au titre de sa coproduction, alors, selon le moyen :
1 / qu’un contrat de coproduction forfaitaire d’un film ne peut avoir le caractère forfaitaire que si le forfait est pur et simple ; que ne peut être qualifiée de coproduction forfaitaire la convention par laquelle un producteur de films s’est engagé à financer 50 % de la production de cinq films avec le droit, pour ledit producteur, d’intervenir sur le scénario définitif en langue anglaise, sur le budget en ce qui concerne les montants et l’affectation des fonds, sur l’engagement des deux principaux interprètes de chaque film et le choix du réalisateur ; qu’en se déterminant par les motifs susrapportés pour qualifier ” contribution forfaitaire ” de sa participation financière à ladite coproduction le financement apporté par la société IMG, la cour d’appel a dénaturé les termes de la convention, et violé l’article 1134 du code civil ;
2 / que l’article 4, alinéas 2 et 3, de la convention prévoyait que les imprévus inclus dans les budgets acceptés seront ” crosscollatéralisés “, les imprévus non dépensés sur un film pouvant servir à couvrir les dépassements du budget d’un autre film et les imprévus non dépensés constitueront des économies qui resteront acquises à la société Chrysalide ” dans la limite d’un montant global de 2 500 000 francs “, ce qui implique qu’audelà de cette somme, les fonds non dépensés devaient être restitués à la société IMG qui pouvait exercer un contrôle sur les conditions dans lesquelles le budget était utilisé ;
qu’ainsi, la cour d’appel ne pouvait, sans contradiction, relever que les imprévus non dépensés constitueront des économies qui ne resteraient acquises à la société Chrysalide que dans la limite d’un montant de 2 500 000 francs et affirmer que la contribution de la société IMG à la coproduction était une contribution forfaitaire ; que, derechef, la cour d’appel a dénaturé la convention des parties et violé l’article 1134 du code civil ;
3 / que de même, le fait qu’il eût été prévu que la société IMG aurait l’obligation de fournir les autres 50 % des budgets acceptés ou d’obtenir ce financement grâce à des contrats de préventes des droits d’exploitation des films sur son territoire ne caractérise nullement une contribution forfaitaire au caractère invariable dès lors qu’il était prévu aussi par le contrat que les sommes non dépensées ne pourraient être conservées par la société Chrysalide que dans la limite de 2 500 000 francs, cette limite impliquant que les sommes non dépensées au delà devaient donner lieu à restitution ; que ce motif ne justifie nullement la solution de l’arrêt attaqué au regard de l’article 1134 du code civil ;
4 / que dans leurs conclusions d’appel, les sociétés TMG et IMG avaient fait valoir que la stipulation du dernier paragraphe de l’article, relatif à l’absence de responsabilité personnelle de la société Chrysalide, avait pour but de ne permettre la récupération des sommes investies que sur les recettes et d’interdire que les procédures soient engagées en raison de mauvais choix qui auraient été effectués par chrysalide dans la production de la série et que cette disposition n’avait pas pour but de permettre des détournements par la société Chrysalide ou la conservation de sommes n’ayant pas servi à financer la série, ni d’empêcher les sociétés TMG et IMG de faire effectuer un audit des comptes ; qu’en s’abstenant de s’expliquer sur ce moyen des conclusions, la cour d’appel a méconnu les dispositions de l’article 455 du nouveau code de procédure civile ;
5 / qu’en décidant, contre la lettre de l’article 8.4 du contrat de coproduction, que l’obligation mise à la charge de la société Chrysalide de tenir ” une comptabilité exacte, complète et précise au sujet des recettes brutes et des déductions (y compris le coût des films) qui y seront apportées, y compris, sans que ceci soit limitatif, les pièces justificatives, les données à l’appui, les licences de sous-distribution et de projection, et les états des sousdistributeurs “, ne se rapportait pas au droit pour la société IMG d’examiner l’ensemble du coût de la production des films, y compris le coût des films, mais seulement à son droit de contrôle des recettes tirées de la distribution des films sur le territoire accordé à la société Chrysalide, la cour d’appel qui a, à nouveau, dénaturé une disposition claire et précise du contrat, a donc dénaturé la convention des parties et violé l’article 1134 du code civil ;
6 / que dans ses conclusions d’appel signifiées le 15 février 2005, réfutant le nouveau système de défense de la société Chrysalide et de la société Studiocanal venant aux droits de cette dernière, les sociétés TMG et IMG avaient fait valoir que, pendant les six premières années de procédure et en particulier au cours des expertises, la société Chrysalide avait toujours reconnu devoir justifier des dépenses réelles de la coproduction, que la société TMG ayant décidé de faire examiner les comptes de la coproduction par M. Robert X…, expert comptable et commissaire aux comptes, il est utile de relever, compte tenu du nouveau système de défense adopté par la société Studiocanal que la société Chrysalide, par lettre du 9 février 1993, accepta que M. Robert X… qui en avait fait la demande par lettre du 3 février 1993 contrôle les comptes de la coproduction ; que la société Chrysalide a fait parvenir à M. X…, le 26 février 1993, sur un document à entête de la société Chrysalide, le montant des subventions CNC acquises à ce jour, soit 3 983 657 francs, dont montant versé 2 510 000 francs ; que la société Chrysalide reconnut à la société TMG le droit de contrôle des comptes et des coûts de la coproduction et qu’elle avait adressé à M. Y… l’expert comptable et commissaire aux comptes ayant remplacé M. X…, le 22 juin 1995, une lettre dans laquelle elle écrivait
:”Je vous rappelle que notre contrat avec The Movie group prévoit que
cette dernière peut soumettre à un audit la comptabilité relative à chacun des films constituant la série “, que la société Chrysalide ne remit que des éléments extracomptables que son commissaire aux comptes, le Cabinet Z…, refusa de certifier, que la société Chrysalide reconnaissait, par sa comptabilité, devoir à la société TMG une somme de 919 000 francs, que, à la suite de cet audit, la société TMG mit en demeure par exploit d’huissier du 1er juillet 1997, la société Chrysalide de remette à M. Gérard Y… l’ensemble des documents comptables certifiés par son commissaire aux comptes, ainsi que le double des comptes définitifs déposés au CNC, que, compte tenu de l’argumentation développée par la société Studiocanal qui soutient que le coût de la série de films serait
d’un coût forfaitaire qui interdirait donc toute vérification des comptes, il est utile de rappeler que, par exploit d’huissier du 17 juillet 1997, la société Chrysalide répondant à la sommation qui lui avait été délivrée, affirmait que les comptes certifiés de la série de films auraient toujours été tenus à la disposition de la société TMG et ” que de l’avis de la requérante, seule une expertise judiciaire d’un expert de l’audiovisuel et d’un expert comptable spécialisé est en mesure de satisfaire aux voeux des deux parties et qu’elle s’associera a toute demande de ce type effectuée aux frais de la société TMG, que, par conclusions déposées devant le tribunal, la société Chrysalide, contestant les termes du rapport de M. Y… demanda : à titre principal, que la société TMG soit déboutée de ses demandes et, reconventionnellement, le versement de la somme de 2 512 109 francs, et à titre subsidiaire, ” s’associa à la demande d’expertise formulée par la société TMG et demanda au tribunal de ” désigner tel expert cinématographique et tel expertcomptable spécialisé ” ayant notamment pour mission de ” se faire remettre tous les justificatifs de paiements des dépenses sur lesquels existe une contestation et précisant sur quels points les contestations sont abandonnées par l’une ou l’autre des parties et pour quel montant ” ;
qu’en présence de ces conclusions, qui démontraient incontestablement que la société Chrysalide reconnaissait que la convention des parties prévoyait la reddition des comptes par cette dernière et excluait, par conséquent, tout caractère forfaitaire à leur convention, la cour d’appel ne pouvait, sans s’expliquer sur ces conclusions, se mettre en contradiction totale, non seulement avec ladite convention dont les termes étaient pourtant clairs et précis, mais avec l’argumentation elle-même qui avait été celle de la société Chrysalide puis de la société Studiocanal pendant les six premières années de la procédure ; que ce défaut de réponse à conclusions est une méconnaissance de l’article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu qu’ayant relevé que le contrat conclu entre la société Chysalide et la société IMG le 15 juillet 1991 prévoyait que cette dernière aurait l’obligation de fournir 50 % des budgets acceptés, que les dépassements de budget seraient supportés par la seule société Chrysalide et que les imprévus non dépensés constitueraient des économies lui restant acquises dans une certaine limite, que cinq des six films avaient fait l’objet d’une lettre-accord établissant leur budget définitif, et que l’obligation de reddition de compte constituait un élément préalable et nécessaire au droit de contrôle de la société IMG des recettes tirées de la distribution des films sur le territoire accordé à la société Chrysalide mais était sans incidence sur la contribution de la société IMG, la cour d’appel, qui a ainsi répondu aux conclusions prétendument délaissées, a pu, sans dénaturation, en déduire que la société IMG s’était engagée à apporter à la coproduction une contribution forfaitaire d’un montant égal à 50 % des budgets acceptés ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen du même pourvoi :
Attendu que les sociétés TMG et IMG font encore grief à l’arrêt d’avoir condamné la société TMG, venant aux droits de la société IMG, à payer à la société Studiocanal, venant aux droits de la société Chrysalide, la somme de 224 213,24 euros au titre de sa coproduction, alors, selon le moyen que les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi ; qu’à supposer que le prix devant être payé par la société TMG ait été forfaitaire sur la base d’un budget accepté représentant la moitié du coût de la coproduction que chaque partenaire devait financer à hauteur de 50 %, ce partage ne pouvait intervenir que sur le coût réel de la production et non sur un montant frauduleusement arrêté ; que l’expertise judiciaire de Francis A… a fait ressortir que le CNC avait facilité les fraudes commises par la société Chrysalide et que celui-ci, qui avait retenu les documents déposés auprès de lui par la société Chrysalide et demandés par l’expert pendant plus de deux ans et demi après le début de l’expertise, avait fini par communiquer lesdits documents le 27 juin 2001 et que ces documents établissaient la preuve irréfragable des fraudes commises, qu’il apparaissait de l’ensemble des documents déposés par la société Chrysalide que celle-ci n’avait cessé de manipuler les chiffres comme le rappelait l’expert dans ses conclusions p. 20 à 23 de son rapport, qu’aucune certification film par film n’avait été faite, que les comptes eux-mêmes n’avaient pas été certifiés par les experts-comptables et commissaires aux comptes, que les factures et justificatifs réclamés dès la première réunion d’expertise n’avaient pas été produits à l’expert, que la société Chrysalide n’avait produit aucune pièce justificative concernant le film intitulé ” Shooting Elisabeth ” que la société Chrysalide n’avait jamais ” travaillé dans la transparence ” ; que, dès lors qu’il était établi que les comptes de production de la série avaient été frauduleusement manipulés par la société Chrysalide et artificiellement gonflés, la cour d’appel devait constater la mauvaise foi de cette partie et rejeter sa prétention à faire juger
que la société The movie group était tenue par un engagement forfaitaire sur les chiffres frauduleux ; qu’en statuant comme elle a fait, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil ;
Mais attendu que la cour dappel a relevé que la société IMG s’était engagée à apporter à la coproduction une contribution forfaitaire égale à 50 du montant des budgets acceptés, et non du coût réel de la production ; que le moyen n’est pas fondé ;