Contrat d’Artiste : 5 novembre 2015 Cour d’appel de Paris RG n° 12/08986

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Contrat d’Artiste : 5 novembre 2015 Cour d’appel de Paris RG n° 12/08986
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Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRET DU 05 NOVEMBRE 2015

(n° , 17 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/08986

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mars 2012 – Tribunal de Grande Instance de PARIS – 3ème chambre 2ème section – RG n° 07/06237

APPELANTS

Monsieur [J] [J] [J]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]

Madame [U] [J] [J] née [E], agissant en qualité de tutrice de Monsieur [J] [J] [J]

née le [Date naissance 1] 1933 à [Localité 7], de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]

Représentés par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

Assistés de Me Roger D’ALMEIDA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1816

INTIMES

Monsieur [G] [K]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 1]

SARL LA TUILERIE DE CHAILLOU

ayant son siège social à [Localité 3]

[Localité 3]

prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège

Représentés par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Assistés de Me François-Henri BLISTENE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0654

SARL GALERIE [X] [O]

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 2]

prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Joëlle VALLET-PAMART, avocat au barreau de PARIS, toque : D1476

Assistée de Me Christian BEER, avocat au barreau de PARIS, toque : E0107

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Mai 2015, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre, chargée du rapport, et Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président

Madame Françoise LUCAT, Conseillère

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Feu M.[J], artiste céramiste, a conclu un contrat en 2003 mais avec la société Galerie [X] [O] et Monsieur [K], agissant pour son compte et représentant l’atelier La Tuilerie du Chaillou, ayant pour objet la fabrication et l’édition de 24 céramiques en tirage multiple, 6 des 24 pièces étant constituées d”uvres déjà existantes.

Se prétendant victime de divers manquements de ses cocontractants à leurs obligations parmi lesquelles des défauts de paiement, le défaut de remise de bons à tirer, l’absence de réalisation d’un catalogue, le défaut de reddition des comptes, Monsieur [J], par lettre du 19 février 2007, a mis en demeure les intéressés de cesser toute production, exposition ou mise en vente de céramiques conçues à partir des originaux, de restituer les « multiples » réalisés et les moyens en permettant la fabrication.

C’est dans ces conditions que, par actes d’huissier en date des 4 et 10 avril 2007, Monsieur [J] a fait assigner la Galerie [X] [O] et la société Editions [K] devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir obtenir la résiliation du contrat à leurs torts exclusifs, et la condamnation à lui restituer tous multiples encore en leur possession et tous éléments permettant de dupliquer les originaux.

Monsieur [K] et la société La Tuilerie du Chaillou sont intervenus volontairement à l’instance par conclusions signifiées le 12 novembre 2008.

M.[J] qui était représenté en appel par son épouse en qualité de tutrice est décédé en cours de procédure et son épouse Mme [U] [J] [J] est intervenue en qualité d’ayant droit de son époux par conclusions en date du 9 avril 2015.

Par jugement du 30 mars 2012, le tribunal de grande instance de Paris a :

– débouté Monsieur [J] de sa demande de résiliation du contrat d’édition et de toutes les demandes en découlant.

– débouté la société La galerie [X] [O] de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles.

– rejeté les demandes de Monsieur [K] et de la société La tuilerie du Chaillou au titre de préjudice matériel.

– condamné Monsieur [J] à payer à Monsieur [K] la somme de 30.000 euros au titre du préjudice moral.

– débouté la société La tuilerie du Chaillou de sa demande au titre du préjudice moral.

– débouté Monsieur [K] et la société La tuilerie du Chaillou de leur demande de condamnation sous astreinte de Monsieur [J] de délivrance d’un certificat d’authenticité.

– rejeté la demande de publication du jugement formée par Monsieur [K] et la société La tuilerie du Chaillou.

– débouté Monsieur [J] et la société La Tuilerie du Chaillou des demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– condamné Monsieur [J] à payer à Monsieur [K] la somme de 6.000 euros et à la société La Galerie [X] [O] celle de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– débouté les parties de toutes demandes amples ou contraires.

– condamné Monsieur [J] aux dépens de l’instance.

Vu l’appel interjeté contre cette décision le 15 mai 2012 par Monsieur [J] et Madame [J] agissant en qualité de tutrice de Monsieur [J].

Vu les dernières conclusions déposées par Madame [J], agissant en qualité d’ayant droit de Feu Monsieur [J], le 9 avril 2015 par lesquelles il est demandé à la cour de :

– déclarer la concluante recevable et bien fondée en son appel.

– infirmer le jugement entrepris.

Statuant à nouveau :

– constater que, n’étant plus gérant en exercice de la société Galerie [X] [O], Monsieur [X] [O], n’a plus la qualité d’appelant incident, n’ayant plus aucun intérêt ès qualité à agir dans la présente instance, sa déclaration d’appel incident étant, de ce fait, affectée d’une irrégularité qui ne peut plus être couverte.

– ordonner néanmoins le maintien de Monsieur [X] [O] dans la cause, à titre personnel et à toutes fins utiles que de droit, dès lors qu’il n’a régularisé aucune écritures tendant à solliciter soit sa mise hors de cause, soit son désistement d’instance et/ou d’action es qualité de gérant de la société Galerie [X] [O].

– constater, dire et juger que la société Galerie [X] [O] n’a pas exécuté plusieurs des obligations essentielles du contrat tripartite d’édition litigieux.

– prononcer la résiliation du contrat tripartite d’édition, signé en 2003, relatif à l’édition des séries de multiples de plats en céramique litigieux, ‘uvres de l’artiste français, d’origine chinoise, [J] [J].

A titre principal :

– condamner solidairement la société Galerie [X] [O], Monsieur [X] [O], Monsieur [G] [K] et la société La tuilerie du Chaillou à verser à la concluante la somme de 2 092 200 euros.

A titre subsidiaire :

– ordonner le sursis à statuer dans l’attente de voir les co-intimés déférer et satisfaire à leurs obligations conjointement tirées des articles L 132-13 et L 132-14 du code de la propriété intellectuelle en produisant et en communiquant à la concluante, des exemplaires des pièces ci après listées :

* le nombre d’exemplaires de plats en céramique fabriqués en cours d’exercice, de 2004 à 2007 inclusivement.

* la date et l’importance des tirages de plats en céramique.

* le nombre d’exemplaires de plats en céramique en stock.

* l’état qui devra mentionner également le nombre des exemplaires de plats en céramique respectivement vendus par les co-éditeurs que sont les co-intimés.

* l’état mentionnant le nombre des exemplaires de plats en céramique éventuellement inutilisables ou éventuellement détruits par cas fortuit ou force majeure.

* le montant des redevances qui sont dues à l’artiste sur les ventes de plats en céramique réalisées à son insu et dont la vente est confirmée par deux pièces au moins émanant de la galerie [O].

* l’ensemble des bons à tirer présentés à Monsieur [J] [J] et signés par lui, entre 2004 et 2007.

* un état précis et détaillé de l’ensemble des ventes des séries de plats en céramique en la possession de chacun des co-intimés, ventes réalisées en France et/ou à l’étranger.

* tous les éléments comptables et financiers faisant apparaître le chiffre d’affaires exact qui a été réalisé respectivement par la galerie [O] et par monsieur [G] [K], ainsi que sa composition et sa ventilation, s’agissant de l’exploitation des céramiques depuis 2003.

* toutes informations justifiant de la fabrication des 40 séries de 24 céramiques sur les 40 prévues au contrat.

* toutes informations justifiant de ce que 9 séries seraient encore en la possession de la galerie [O].

* toutes justifications comptables propres à établir l’exactitude des comptes présentés.

A titre infiniment subsidiaire :

– ordonner une expertise judiciaire et désigner tel expert judiciaire qu’il plaira.

A titre encore plus infiniment subsidiaire :

– condamner solidairement la société Galerie [X] [O], Monsieur [X] [O] et monsieur [G] [K] et la société La tuilerie du Chaillou à restituer à la concluante toutes les séries de plats en céramique fabriqués en exécution du contrat litigieux.

En conséquence et sur la demande de dommages-intérêts formulée par la concluante :

– condamner solidairement la société Galerie [X] [O], Monsieur [X] [O], Monsieur [G] [K] et la société La tuilerie du Chaillou à payer à la concluante la somme de 2 500 000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 1147 du code civil.

– condamner solidairement, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, la société Galerie [X] [O], Monsieur [X] [O], Monsieur [G] [K] et la société La Tuilerie du Chaillou à payer à la concluante la somme de 1 000 000 d’euros en réparation du préjudice moral subi.

– condamner solidairement la société Galerie [X] [O], Monsieur [X] [O], Monsieur [G] [K] et la société La tuilerie du Chaillou à publier l’arrêt à intervenir à leur frais dans le « journal des arts » ainsi que dans le magazine « beaux arts », le tout sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification à partie de l’arrêt à intervenir.

L’appelante soutient que l’artiste a été victime de plusieurs manquements contractuels, retards et défaut de paiement, défaut de remise à l’artiste aux fins de signature de tous les bons à tirer, défaut d’information et de reddition de comptes et défaut de réalisation d’un catalogue de la part de la société Galerie [O].

Elle sollicite également l’infirmation du jugement en ce qu’il a débouté l’artiste de ses demandes indemnitaires découlant de sa demande de résiliation judiciaire du contrat d’origine, fondées sur l’article 1147 du Code Civil, justifiées par la réparation du préjudice qu’il a subi à raison de l’inexécution par ses cocontractants de leurs obligations contractuelles et légales de résultat et sur la condamnation solidaire de la société Galerie [O] et de Monsieur [G] [K], co-éditeurs et cocontractants de Monsieur [J] [J] dans cette affaire, à régler à la concluante, sur le fondement juridique précité, la somme de 2 500 000 €.

Elle demande aussi la condamnation solidaire de la société Galerie [O] et de monsieur [K] en paiement de 1 000 000 d’euros en réparation du préjudice moral, ainsi qu’à la publication de l’arrêt à intervenir dans le « journal des arts ».

Vu les dernières conclusions déposées par la société Galerie [X] [O] en date du 26 décembre 2014 par lesquelles il est demandé à la cour de :

– confirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a constaté que Monsieur [J] [J] a donné son « bon à tirer » pour chacune des épreuves ayant servi à réaliser, pour la Galerie [X] [O], 24 plats en céramique à 40 exemplaires, plus 8 épreuves d’artiste.

– confirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a jugé que le processus de fabrication mis en ‘uvre par la société Tuillerie du Chaillou afin d’effectuer le tirage desdites céramiques a été parfaitement conforme aux règles de l’édition de céramiques.

– confirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a constaté qu’il y a eu des retards importants dans la remise par Monsieur [J] de certaines pièces originales à partir desquelles ont été fabriqués les premiers tirages acceptés par celui-ci, lequel les a revêtus de son « bon à tirer » à des dates nécessairement tardives par rapport aux prévisions du contrat.

– confirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a jugé que tous ces chèques ont été remis à l’encaissement par Monsieur [J] en novembre 2007 et qu’ils ont tous été payés.

– confirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a jugé qu’en raison des paiements effectués par Monsieur [G] [K] entre les mains de Monsieur [J] de la somme de 38 976 euros que celui-ci a reconnu avoir perçue, il avait intégralement reçu, à fin octobre 2007 la somme totale de 194 880 euros.

– confirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a jugé que la production a été achevée avec un retard significatif imputable à monsieur [J].

– confirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a jugé que la galerie [X] [O] avait tout mis en ‘uvre afin de réaliser le catalogue visé par le contrat et que la lettre de mise en demeure et l’action judiciaire ont rendu impossible son achèvement.

– confirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a jugé que la galerie [X] [O] a exécution toutes ses obligations contractuelles.

– confirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a débouté Monsieur [J] de toutes ses demandes fins et conclusions.

– infirmer le jugement du 30 mars 2012 en ce qu’il a jugé que monsieur [J] n’avait pas commis de faute et a débouté les appelants de leurs demandes.

En conséquence :

– juger que monsieur [J] a failli à ses obligations contractuelles sur le fondement des articles L 132-8 et L 132-9 du code de la propriété intellectuelle et de l’article 1147 du code civil et condamner Madame [U] [J] [J] à payer à la galerie [X] [O] la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts.

– juger que Monsieur [J] a commis une faute qui a directement causé un préjudice sur le fondement de l’article 1382 du code civil en engageant et maintenant cette procédure abusive et condamner Madame [U] [J] [J] à payer à la Galerie [X] [O] la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts.

– rejeter la demande de communication de pièces qui a fait l’objet d’une décision de rejet du conseiller de la mise en état, le 31 janvier 2014.

– rejeter car inutile et redondante la demande de désignation d’un expert devant faire un rappel à la loi, ce qui est hors de la compétence des experts judiciaires et devant, refaire le travail déjà réalisé par l’expert judiciaire saisi, Madame [D] [Q].

– condamner Madame [J] à payer tant à la galerie [X] [O] qu’à Monsieur [X] [O] agissant en tant que dirigeant de l’entreprise individuelle [X] [O] New York la somme de 30 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’intimée estime n’avoir commis aucun manquement dans l’exécution de ses obligations pouvant justifier une demande de résiliation du contrat, ayant réglé les sommes fixes prévues au contrat et n’étant redevable d’aucune somme supplémentaire.

Elle fait valoir que la publication du catalogue n’était soumise à aucun délai et qu’elle a mis en oeuvre tous les moyens pour réaliser celui-ci et que c’est le courrier de mise en demeure de février 2007 qui en a rendu impossible la publication.

Elle soutient que l’artiste n’a en effet pas respecté ses obligations contractuelles, ayant livré ses modèles de base avec retard et interrompu sans raison le contrat ; elle demande également réparation du préjudice qu’elle a subi en raison du caractère abusif de la procédure engagée par M.[J]

Vu les dernières conclusions déposées par Monsieur [G] [K] et la société La tuilerie du Chaillou en date du 28 avril 2015 par lesquelles il est demandé à la cour de :

– déclarer Madame [U] [J] [J], en sa qualité d’ayant droit de feu Monsieur [J] [J] irrecevable et mal fondée en son appel du jugement de la 3° chambre du TGI de Paris en date du 30 mars 2012.

l’en débouter,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté [J] [J] [J] de l’ensemble de ses demandes, notamment de résiliation du contrat d’édition et de dommages et intérêts.

– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné [J] [J] [J] à réparer le préjudice moral subi par Monsieur [K] mais porter ce montant à 150.000 euros à titre de dommages et intérêts.

l’infirmer pour le surplus,

– condamner Madame [U] [J] [J] à payer à [G] [K] la somme de :

* 686.168,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice commercial.

* 381.000,00 euros en réparation de son préjudice matériel lié à sa perte de trésorerie.

– la condamner à payer à la société La tuilerie du Chaillou la somme de 430.540,00 euros en réparation de son préjudice lié à sa perte de fabrication.

– condamner Madame [U] [J] [J], ou tout titulaire du droit moral de l’artiste [J] [J] [J], à établir dans les huit jours du prononcé de l’arrêt à intervenir, un certificat d’authenticité afférent à chaque pièce éditée, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard.

– condamner Madame [U] [J] [J] aux frais d’insertion et de publication dans le journal des arts, suivant le prononcé de l’arrêt à intervenir, du dispositif dudit arrêt dans un format identique à celui de son « communiqué » du 14 octobre 2008.

– la condamner à une astreinte de 1.000 par jour en cas d’inexécution.

– condamner Madame [U] [J] [J] en tous les dépens.

– la condamner à payer tant à [G] [K] qu’à la société La tuilerie du Chaillou la somme de 50.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les intimés soutiennent qu’ils ont respecté toutes leurs obligations contractuelles envers Monsieur [J] [J] [J] en ce que chaque plat n’avait pas à être signé au dos par l’artiste, une telle formalité n’étant prévue ni par les usages ni par le contrat, et cette absence ne saurait leur être reprochée. L’artiste n’avait pas contractuellement à être informé des ventes mais seulement de la production, de la livraison et du prix des expositions, information qui lui a été donnée.

Ils soutiennent que l’artiste a pris un important retard dans sa production et sa livraison expliquant le retard consécutif dans les paiements sans qu’il puisse lui être reproché un défaut de paiement des sommes convenues.

Ils ajoutent que la demande de dommages et intérêts formée contre eux est dépourvue du moindre fondement tant juridique que factuel, aucune ‘uvre n’ayant été vendue à un prix supérieur à celui contractuellement prévu, aucune rémunération supplémentaire n’était due à l’artiste, qui n’a donc subi aucun préjudice.

Les intimés estiment avoir subi un très lourd préjudice du fait de la dépréciation évidente des ‘uvres en leur possession ou de la suspicion portée à celles déjà vendues et retournées ce qui a entraîné des retour d”uvres précédemment vendues et d’importantes annulations de commandes, ainsi que l’impossibilité absolue de commercialiser tant les séries de 24 plats que les pièces issues du deuxième programme liant exclusivement [J] [J] [J] et [G] [K], portant sur 13 vases et stèles, soit 118 pièces importantes qui constituent la dotation de l’éditeur, pour un montant de 686.186 euros. Ce préjudice serait également moral et de notoriété consécutif au dénigrement, évalué à 150.000 euros.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Considérant que les parties, M.[J], la Galerie [X] [O] et M.[G] [K] agissant pour son compte et celui de la société Atelier du Chaillou ont conclu en 2003 un contrat dit tripartite mais faisant intervenir quatre personnes distinctes qui définissait un projet portant sur :

« la réalisation de 24 céramiques en tirage multiple.

Chaque modèle sera tiré à 40 exemplaires (numérotés 1à 40) et 8 épreuves d’artiste numérotées dont 2 épreuves pour la galerie, 4 pour l’artiste et 2 pour [G] [K]/La Tuilerie » ;

Que ces 24 modèles devaient se décomposer en 12 plats ronds et 12 carrés, les 24 originaux restant la propriété de l’artiste ;

Considérant que les pièces produites démontrent que les parties ont échangé avant de parvenir à cet accord ; qu’aucun élément ne démontre que M.[J], installé de très longue date en France ne maîtrisait pas suffisamment le français et n’en aurait pas compris les termes ;

Considérant que Mme [J] soutient que le contrat n’a pas été exécuté en ce que les paiements prévus ont été faits avec retard et de façon incomplète, en ce que l’artiste n’a pas été en mesure de contrôler l’exploitation de son oeuvre de façon conforme aux usages de la profession et qu’il ne lui en a pas été rendu compte, qu’il n’a pas perçu la rémunération proportionnelle prévue et enfin en ce qu’aucun catalogue n’a été réalisé ;

Sur l’avance financière à charge de la galerie [X] [O]

Considérant que le contrat a stipulé que la Galerie [O] s’engageait à verser une rémunération fixe à l’artiste selon trois versements de 16 240€ chacun à fin février, fin juin et fin octobre 2004 soit 48 720€ pour l’année 2004 et selon le même calendrier et les mêmes montants pour les trois années suivantes ce qui représentait un total garanti de 194 880€ ;

Considérant que la société [O] indique avoir payé à M.[J] ce qui lui était dû, alors que celui-ci avait remis avec un retard de plusieurs mois un tiers des originaux servant de base aux multiples ce que conteste Mme [J] ;

Considérant que le contrat a stipulé que la réalisation se ferait d’une part à partir de 6 pièces existantes à l’issue de l’exposition de la Bouquinerie à l’Institut, d’autre part de modèles de base à réaliser par l’artiste « à compter de fin juin à décembre 2003 et si possible d’en clore la réalisation pour fin juillet 2003 » ; qu’il résulte de cette indication que la réalisation des modèles de base devait être terminée au plus tard en décembre 2013 ;

Considérant que M.[K] a écrit le 14 novembre 2003 :

« J’ai fait le point des multiples, selon le choix que nous avons fait il manque 3 modèles de chaque (3ronds, 3 carrés) ;

Pour bien équilibrer la série rond il faudrait :

2 bleus vifs (genre B3 ou C7)

1 noir avec tâche couleur vive (genre B2) ou 1 rouge

Pour compléter les carrés il faudrait :

1 bleu vif (genre C11)

1 très léger (genre C12)

1 très dur (genre C18) ou 1 rouge

ajoutant c’est bien si on a 4 modèles de chaque pour 3 pièces, cela permet de faire un bon dernier choix » ; qu’il résulte de ce courrier qui n’a pas donné lieu à contestation par l’artiste que, si celui-ci avait adressé des modèles, il en avait d’un commun accord avec M.[K] éliminé un certain nombre de sorte qu’il devait en envoyer de nouveaux ce qui conduit M.[K] à lui demander de lui adresser un modèle supplémentaire ; que d’ailleurs M.[K] a écrit le 18 novembre 2003 à M.[J] en lui indiquant qu’il lui retournait 11 plats en céramique et lui demandant « la réalisation de quelques gouaches que nous pourrons photographier », demande que M.[K] explique comme devant permettre de mettre au point les séries manquantes ; que M.[J] n’a pas davantage contesté cette demande ; que M.[K], dans un courrier du 15 mars 2007 ajoute « il n’y avait pour la galerie [X] [O] ou l’atelier La Tuilerie aucun caractère d’urgence à terminer la série. Notre désir était de parvenir à un équilibre esthétique sur le choix des 24 plats » ; qu’il résulte de ces éléments que l’artiste a fourni des modèles de base qui ont été écarté avec son accord pour des raisons esthétiques à l’initiative de M.[K], de sorte qu’il ne peut il être fait grief de ne pas avoir respecté le délai contractuel.

Considérant que, de plus, la société Decalcor, chargée du travail de mise au point du premier multiple devant être soumis à l’artiste pour accord et remise du bon à tirer, a reconnu, par un courrier du 18 février 2004 le dépassement du délai contractuellement prévu de 4 semaines concernant la réalisation des chromos, écrivant alors « certains modèles ont été techniquement plus difficiles à réaliser que nous l’avions prévu et nous avons dû les refaire, ceci notamment à cause de l’abandon de certaines références de couleurs par nos fournisseurs nous obligeant ainsi à procéder à de nouvelles formulations pour les contretyper », que dans un courrier du 4 avril 2004 M.[K] l’a reconnu, faisant

part à l’artiste de ce que le laboratoire de chromies revenait à une technique traditionnelle écrivant « A nouveau les résultats sont bons y compris les résultats provenant des gouaches » ;

Considérant qu’il résulte de ces éléments que les retards à la fabrication ne résultent pas d’un retard de l’artiste à fournir des plats originaux mais de ce que, d’une part, sur les modèles proposés, M.[K] en accord avec l’artiste en a écarté certains, d’autre part la réalisation du premier multiple des séries à posé des problèmes techniques ;

Considérant que M.[K] a conclu que le dernier bon à tirer a été signé par M.[J] le 3 décembre 2005 alors même qu’il a écrit à ce dernier le 15 mars 2007 « les derniers bons à tirer ayant été acceptés par toi en août 2004 »de sorte qu’il ne saurait alléguer du mensonge de l’artiste qui indique « ses pièces ont été données à [K] fin 2003 », les circonstances précitées concernant des remises de pièces qui ne seront finalement pas retenues comme modèles de base expliquant cette affirmation de l’artiste qui ne saurait être qualifiée de mensongère ; qu’en toute hypothèse la Cour constate le caractère mensonger de l’affirmation de M.[K] quant à une signature en décembre 2005 puisqu’en contradiction avec ses propres écrits ; que d’ailleurs une exposition des céramiques a pu se tenir à [Localité 6] en octobre 2004 ;

Considérant que, si la galerie [X] [O] n’a reçu sa première série qu’à l’échéance d’octobre 2004, puis une deuxième en novembre 2004, comme il vient d’être vu, ces retards ne sont pas imputables à l’artiste et aucune des partie n’allègue d’un préjudice de ce fait ;

Considérant que, s’agissant des paiements garantis, M.[J] a reçu :

* trois chèques de 16 240€ chacun le 31 janvier 2005 qui, à défaut de justification de tout autre paiement, ne pouvaient concerner que les échéances de 2004 ;

* trois chèques de ce même montant le 15 mars 2006, la galerie demandant à M.[J] de ne les encaisser que les 30 mars, 30 juin et 30 octobre 2006 qui au regard de l’observation précédente ne pouvaient concerner que 2005 ;

* trois chèques du même montant les 22 février 2007.

Considérant que la Galerie [O] fait valoir que M.[J] a été réglé d’une somme de 38 976€ par M.[K] selon un accord avec celui-ci au terme duquel il s’est vu attribuer 8 séries au lieu des deux prévues au contrat et qu’il a réalisé à ce titre quatre règlements de 9 744€ chacun entre les mains de M.[J] ce que Mme [J] conteste pas, faisant valoir qu’il s’agit d’une décision unilatérale de M.[K] modifiant le contrat qui ne lui est pas opposable ; que la galerie [O] et M.[K] exposent que cette répartition des séries n’a pas modifié le contrat puisqu’elle concerne la seule répartition des séries entre la galerie et M.[K] ; qu’au surplus la galerie [X] [O] a adressé le 9 janvier 2014 un chèque de 38 976€ au titre du solde des trois échéances de 2007 ;

Considérant que le contrat a stipulé que « Le défaut de paiement des honoraires aux dates convenues entraîne la suspension du contrat. M.[J] pouvant alors poursuivre l’opération pour son compte et pour le nombre de pièces dont les honoraires n’auraient pas été réglés » ; que M.[J] n’a pas mis en oeuvre cette possibilité et a été rempli de ses droits au titre des sommes qui lui avaient été garanties ;

Sur les bons à tirer et les certificats d’authenticité

Considérant que Mme [Q], expert judiciaire nommé dans le cadre de la procédure en référé, a indiqué qu’il n’est pas d’usage de revêtir les originaux créés par l’artiste de la mention « bon à tirer » et cette mention n’est pas susceptible d’être apposée que sur le premier exemplaire du tirage multiple considéré par l’auteur comme suffisamment conforme à sa création originale pour être revêtu de la mention « bon à tirer » ;

Considérant qu’il résulte des avis produits par des professionnels dont celle de M.[M], président de la chambre syndicale estampe dessin et tableau que les bons à tirer sont « parfaitement et uniquement valables pour le tirage, dans la limite du nombre d’exemplaires prévu au contrat » et ajoute « je rejoins l’expert, M.[L] lorsqu’il déclare qu’une double validation serait incohérente et inusitée… Cela risquerait de créer une confusion, n’étant pas techniquement conforme au tirage multiple » ;

Considérant que le conseil de M.[J] par conclusions du 10 octobre 2008 a écrit « Les créations ont été validées par un premier BAT au dos de la pièce originale avec date et signature » ce qui a été confirmé par l’expert judiciaire ; que l’expert a constaté que M.[J] a signé les bons à tirer pour chacune des épreuves ayant servi à réaliser les 24 plats en céramique, les 40 exemplaires numérotés et les 8 épreuves d’artiste, et que les certificats d’authenticité ne présentaient plus aucune utilité ;

Considérant que M.[K] qui est un professionnel, a néanmoins réclamé de tels certificats pour des céramiques qui avaient été vendues et qui revenaient dans le circuit marchand, ce qu’il explique par la nécessité de clarifier la situation auprès des clients en possession des séries de céramique en raison du doute jeté par l’artiste ; que toutefois la société Artco fait état d’un certificat d’authenticité remis peu après l’achat des céramiques en septembre 2006 alors qu’il n’existait aucune suspicion à cette date ;

Considérant qu’il ne saurait être tiré aucune conséquence dans le présent litige de l’existence de certificats d’authenticité puisque la preuve a été rapportée de l’existence de 24 bons à tirer ce qui correspond à l’objet du contrat litigieux, sauf que cette délivrance était de nature à créer une confusion et un doute sur les céramiques en circulation.

Sur l’information

Au titre de la fabrication

Considérant que l’article L132-13 du code de la propriété intellectuelle dispose que « l’éditeur est tenu de rendre compte. L’auteur pourra, à défaut de modalités spéciales prévues au contrat, exiger au moins une fois l’an la production par l’éditeur d’un état mentionnant le nombre d’exemplaires fabriqués en cours d’exercice et précisant la date et l’importance des tirages et le nombre des exemplaires en stock » ;

Considérant que l’article L132-14 dispose que « l’éditeur est tenu de fournir à l’auteur toutes justifications propres à établir l’exactitude de ses comptes » ;

Considérant que le contrat stipule :

« [G] [K] s’engage à tenir [J] [J] [J] informé de la production et des livraisons effectuées ».

Considérant que M.[K] expose que M.[J] a été informé de la fabrication, une situation lui ayant été remise en juin 2006 sur laquelle il n’a formulé aucune observation ; que le 15 mars 2007, il a indiqué au conseil de M.[J] qu’ « à ce jour la galerie [X] [O] a enlevé 15 séries [G] [K] 8 séries et [J] [J] [J] a reçu 2 séries » ;

Considérant que M.[K] entretenait des relations de confiance avec M.[J] qui n’a formulé aucune demande quant à l’état de la fabrication et le nombre d’exemplaires en stock ; qu’il n’a formulé aucune demande nouvelle avant 2008, ayant même confié en 2007 la réalisation à M.[K] de nouvelles séries portant sur des vases ;

Considérant que M.[J] a fait sommation le 15 mai 2008 à la galerie [O] de lui communiquer :

* l’ensemble des bons à tirer signés par M.[J],

* un état précis et détaillé de l’ensemble des ventes des séries en sa possession, ventes réalisées en France ou à l’étranger,

* tous les éléments comptables et financiers laissant apparaître le chiffre d’affaires s’agissant des céramiques depuis 2003.

Considérant que la galerie [O] a produit un document de 54 pages intitulé « mise à jour des résultats de ventes publiques » ; que, si cette pièce fait état de plats créés en 2002, qui certes ne peuvent être ceux objets du contrat litigieux ; il n’en demeure pas moins qu’ils sont concernés puisque s’agissant d’oeuvres de M.[J] et que sont relatées les ventes réalisées de 2008 à 2013.

Considérant qu’il résulte de ces éléments que M.[J] a été régulièrement informé.

Sur le paiement des honoraires d’intéressement au titre des ventes

Considérant que le contrat a stipulé que l’artiste serait rémunéré par un pourcentage de 14 % sur les prix publics fixées à 1 300€ TTC pour les plats ronds et 1 600€TTC pour les plats carrés outre des honoraires annuels sur la base de 10 épreuves de chaque modèle par an soit 48 720€ étant précisé que ces prix sont des prix minimum auxquels la galerie [O] s’engage pour la vente des multiples ;

Considérant que le contrat a stipulé que « le calcul des honoraires se fera sur la base des listes des prix des expositions », la Galerie et [G] M.[K] s’engageant à fournir à M.[J] ou à défaut à sa femme ou à ses enfants un exemplaire de ces listes de prix correspondant à chacune des expositions jusqu’en 2007 ;

Considérant que dans son courrier du 15 mars 2007 M.[K] fait état de trois expositions :

* la première au Carrousel du Louvre en octobre 2004 avec des prix conformes à ceux convenus.

* la deuxième au musée national de la céramique à Saragosse en Espagne de mars à juin 2005, précisant qu’elle n’avait aucun caractère commercial.

* la troisième à la galerie [Établissement 1] à [Localité 6] de mai à juin 2006 où 4 plats avaient été présentés et les prix fixés en accord avec l’artiste.

Considérant que sur les ventes :

Par lettre du 15 mars 2007 la galerie [O] a écrit « en novembre 2006 nous avons vendu dans le cadre de cette association 16 séries de céramiques Monsieur [J] dont 8 restent à livrer. Le contrat englobe d’autres multiples de celui-ci que nous avons pré financés depuis 4 ans, d’autres achetés à Poligrafa il y a plus de cinq ans, trois originaux. Le montant des autres multiples [J] [J] [J] est supérieur à 1 000 000 d’euros » ; qu’il résulte de ce courrier qu’il concernait un ensemble de céramiques dont partie ne faisait pas partie du contrat litigieux ;

Que, par courrier du 30 novembre 2007 elle a précisé par l’intermédiaire de son conseil que d’une part, « Il a été fabriqué 32 séries de céramiques sur 40 prévues au contrat », d’autre part que « les séries numérotées 1,3,4,5,6,7,8,14,17,18,19,20,21,22,23et 24/40 ont été vendues globalement par la galerie [X] [O] à des clients asiatiques qui les ont achetées à un prix largement remisé sur la base du prix public contractuellement prévu » ;

Considérant que la galerie [O] prétend avoir été dans l’impossibilité de réaliser effectivement ces ventes du fait des interventions de M.[J] e du doute jeté sur l’authenticité de ses oeuvres ;

Considérant que M.[K] a reconnu avoir réalisé des ventes sur les 8 séries qu’il s’est attribuées ; que par courrier du 15 mars 2007 il indique avoir vendu au cours des années 2004-2005-2006, 5 séries de 24 pièces aux professionnels suivants :

[B] (France)

[C] (France)

[T] (Suède)

[Y] (Belgique)

Artco (France),

sur la base des prix prévus au contrat moyennant une remise professionnelle la vente à Artco s’est faite au prix de 25 000€TTC soit un prix moyen unitaire de 1040€ ce qui correspondait à une remise de 30% ainsi que deux autres séries en mai 2007 à Mme [A] de la galerie Artco qui a indiqué que M.[K] lui a été adressé des certificats d’authenticité signés par M.[J] correspondant à ces plats ; qu’ainsi M.[K] a mentionné avoir vendu 7 séries alors qu’il en détenait 8 ;

Considérant que la galerie [O] a relaté que M.[K] a vendu « des exemplaires en vente publique en France tout au long des années 2007 et 2008 » ; qu’une vente a eu lieu à [Localité 5] en octobre 2007avec des estimations à 3000/3200€ ; que M.[K] explique que cette vente portant sur le plat 9/40 provenant d’une série vendue en Suède et non de la galerie [O] ; qu’il n’est pas démontré qu’elle ait atteint le prix d’estimation ;

Considérant qu’il résulte de ces éléments que les oeuvres de l’artiste ont été exploitées dès 2004 tant par des expositions que par des ventes dont des ventes aux enchères ; que la galerie indique qu’à l’occasion de ces dernières l’artiste a perçu des droits de suite ; qu’il résulte des attestations produites par M.[K] que les ventes auxquelles il a procédé ont été faites à des prix inférieurs au minimum garanti de sorte qu’elles n’ouvraient pas droit à l’intéressement contractuel ; qu’il n’est pas démontré la réalisation des ventes à des prix supérieurs à ceux convenus et ouvrant droit à rémunération variable.

Sur l’obligation de réaliser un catalogue

Considérant que la galerie s’est engagée à réaliser un catalogue de qualité dans l’esprit des ouvrages qu’elle édite habituellement ;

Considérant que si le contrat met cette obligation à la charge de la Galerie [O], il n’a fixé aucune date pour l’édition de celui-ci ; que la galerie [O] justifie que sa préparation était en cours et que celle-ci a été suspendue en raison de sa mise en cause par M.[J] de sorte qu’il ne saurait lui être reproché un manquement à cette obligation.

Sur les demandes reconventionnelles de M.[K]

Considérant que M.[K] fait état de ce qu’il présente en cause d’appel un dossier plus complet que devant les premiers juges afin de démontrer la réalité du préjudice qu’il a subi à savoir un préjudice matériel du fait des annulations de plusieurs galeries et de plusieurs peintres, un préjudice du fait du rachat d’oeuvres et de méventes, soit un montant global de 381 000€, résultant du dénigrement dont il a fait l’objet et de la suspicion ;

Sur le rachat d’oeuvres (24 000€)

Que s’il fournit deux lettres de M. [T] celles-ci sont en anglais et n’ont pas été traduites ; qu’elles ne sauraient valoir preuve ni d’un achat ni dès lors d’un rachat ;

Sur des annulations de commande

Qu’il fait état de l’annulation de commandes portant sur des vases et stèles qui avaient donné lieu à un nouveau contrat d’édition entre M.[J] et lui postérieurement au contrat, objet du litige ; qu’il produit les éléments suivants :

* les deux lettres de M. [T] non traduites,

* un courrier de la galerie [Établissement 1] qui se dit toujours désireuse d’acquérir des céramiques mais attend l’issue de l’instance,

* un courrier de la galerie [Établissement 2] en date du 28 octobre 2008 qui indique annuler une commande de vases et stèles pour un montant de 45 000€ qui devait être livrée en fin d ‘année et qui précise « nous reparlerons de cette livraison pour autant que le marché reprenne après cette lourde suspicion »,

* deux courriers de M.[Z] du 20 décembre qui indique annuler sa commande de vases et du 20 septembre 2012 qui le confirme,

* un courrier du 17 février 2009 de la galerie Artco qui indique annuler sa commande additionnelle,

* un courrier de M.[C] du 2 décembre 2008 qui indique annuler une seconde commande de vases et stèles ;

Considérant que ces courriers ne sont pas suffisants dans la mesure où ils ne sont accompagnés d’aucun bon de commande pour en établir la réalité de pièces comptables comme relevées par les premiers juges.

Sur les méventes

Considérant que M.[K] fait état de la mévente de deux séries de plats, de vases et de stèles sans pour autant faire la démonstration que celles-ci résulteraient des faits de la cause ;

Sur la perte de commercialisation pour [G] [K]

Considérant que M.[K] soutient que lui-même a subi une perte de ce fait dans la mesure où il partage les pièces produites et commercialise les pièces de sa dotation ; que s’agissant de programmes qui devaient être exploités de 2007:2008 à 2015, il ne démontre pas que ceux-ci avaient fait l’objet de contrats fermes ; que dès lors il ne s’agit pas d’un préjudice certain.

Sur la perte de la société La Tuilerie

Considérant que M.[K] se prévaut d’une perte de fabrication pour la société La Tuilerie, faisant valoir que certains artistes ont renoncé à travailler avec elle, estimant à 1251 le nombre de pièces annulées soit une perte estimée à 430 540€ ; qu’il résulte du récapitulatif produit que cette demande a varié depuis la première instance, qui mentionne que « certaines demandes reconventionnelles ont été abandonnées ([N], [P], [R] [W] [F]) » et qu’il vise en appel « des accords conclus au 2ème semestre 2011 et début 2012 » ce qui démontre que le phénomène de suspicion avancé n’intervenait plus ; qu’il indique que « suite à l’appel de M.[J] ces accords sont définitivement annulés ce qui explique le nombre de pièces annulées en fabrication (1251 pièces) » ; que cette explication n’est pas pertinente en ce qui concerne le motif réel de la prétendue annulation d’autant qu’il n’est pas justifié des commandes en cause ;

Considérant que si M.[K] fait valoir qu’en raison des allégations de M.[J], certains artistes ont refusé de travailler avec l’Atelier de la Tuilerie qui a perdu la moitié de son chiffre d’affaires, il n’apporte aucun document financer à ce titre.

Sur le préjudice moral et de notoriété consécutif au dénigrement

Considérant que M.[K] fait enfin état d’un préjudice moral et de notoriété, affirmant avoir été contraint de vendre à perte des oeuvres de sa collection personnelle dans un marché affecté par la crise et de renoncer à certaines éditions faute de trésorerie ;

Considérant que l’expert [L] a noté qu’après la parution du communiqué de M.[J] dans le Journal des Arts, « la commercialisation des oeuvres sera sérieusement compromise » ;

Considérant que pour autant l’artiste qui avait signé les bons à tirer contractuellement convenus mais qui se voyait réclamer des certificats d’authenticité contrairement aux usages en vigueur pouvait à juste titre s’interroger sur la circulation de ses oeuvres ; que celles-ci ayant été éditées jusque là par M.[K], les doutes légitimes de l’artiste ne pouvaient que rejaillir sur celui-ci; qu’en sa qualité d’éditeur il lui appartenait de prendre les mesures pour les lever car ceux-ci étaient aussi préjudiciables à l’artiste qu’à son éditeur ; qu’il y a lieu en conséquence de débouter M.[K] de sa demande au titre de son préjudice moral et de réformer le jugement entrepris.

Sur la demande reconventionnelle de la galerie [O]

Considérant que la galerie [O] soutient que M.[J] n’a pas respecté ses obligations contractuelles ni celles que lui imposait le Code de la propriété intellectuelle vis à vis de la galerie en ce qu’il aurait contrarié de manière malicieuse l’exercice par l’éditeur de ses droits ;

Considérant que comme il a été vu précédemment la preuve d’un retard imputable à l’artiste n’a pas été rapportée : que ne l’est pas davantage la preuve d’une faute dans le déroulement des opérations contractuellement prévues, l’édition des séries ayant été réalisées et la galerie ayant pu les exposer et les commercialiser ; que, si à l’occasion de reventes de céramiques, l’artiste a pu avoir des doutes sur leur authenticité et a informé la galerie organisant celles-ci, il convient de relever que celle-ci a retiré les céramiques de la vente sans que le doute soulevé par l’artiste ait été levé à un moment quelconque; qu’il ne saurait lui être fait grief d’avoir refusé de délivrer un certificat d’authenticité car, si les céramiques faisaient partie des séries contractuelles, un tel certificat était de l’avis des experts consulté inutile ;

Considérant en conséquence que la preuve de manquements de M.[J] à ses obligations n’étant pas rapportée; que c’est à bon droit que la galerie [O] a été déboutée de sa demande ;

Sur la demande de délivrance d’un certificat d’authenticité

Considérant que M.[K] demande enfin à la Cour de condamner Mme [J] à délivrer un certificat d’authenticité pour chacune des pièces éditées ; que comme il a été vu précédemment tel n’est pas l’usage s’agissant de l’édition de séries dont le premier multiple est seul revêtu de la signature de l’artiste ; qu’il y a lieu de le débouter de sa demande.

Sur la demande de communication de pièces et d’expertise

Considérant que Mme [J] demande à la Cour d’ordonner la production d’un certain nombre de pièces, demande qui avait été rejetée par le conseiller de la mise en état ;

Considérant que la Cour s’estime suffisamment informée par les pièces produites par chacune des parties ; qu’il n’y a donc lieu ni d’ordonner la production de nouvelles pièces, ni d’ordonner une expertise.

Sur la demande d’insertion

Considérant que le litige concerne un contrat signé en 2003 et un artiste aujourd’hui décédé; que ces circonstances conduisent la Cour à confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté les demandes de publication.

Sur la demande de maculation des propos figurant dans les conclusions de Mme [J]

Considérant que la galerie [O] demande à la Cour demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté sa demande tendant à maculer les propos suivants de Mme [J] :

«  la volonté prédatrice de Monsieur [O]

Monsieur [O] s’approprie inlassablement le travail des autres

Le conseil de l’artiste aurait pu poursuivre Monsieur [O]

Le comportement est caractéristique de l’attitude prédatrice de la Galerie [O] et de son dirigeant  »;

Considérant que, si les termes employés stigmatisent un comportement qualifié de prédateur de la part de M.[O], ils se situent dans le cadre d’un contentieux relatif à l’exécution de leurs obligations de la part de professionnels vis à vis d’un artiste et de son oeuvre de sorte que celui-ci a pu se sentir dépouillé de son oeuvre quand bien même il n’en a pas rapporté la preuve ; que c’est à bon droit que les premiers juges ont débouté la galerie [O] de ses demandes.

Sur la demande de dommages et intérêts de la galerie [O] pour procédure abusive

Considérant que la preuve n’est pas rapporté que Mme [J] aurait agi avec une légèreté blâmable dans l’intention de nuire à la galerie [O] et à M.[K] ; qu’il y a lieu de rejeter la demande de la galerie [O].

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Considérant qu’il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Et, adoptant ceux non contraires des Premiers Juges,

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu’il a dit le retard imputable à M.[J] et en ce qu’il a fait droit à la demande de préjudice moral de M.[K] à hauteur de 30 000€.

Et statuant à nouveau de ces chefs.

DIT que la preuve d’un retard imputable à feu M.[J] n’est pas rapportée.

DEBOUTE M.[K] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.

DIT que chaque partie conservera ses dépens en cause d’appel.

Le Greffier La Présidente

B.REITZER C.PERRIN

 


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