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Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 3 – Chambre 1
ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2017
(n° , 20 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 16/07225
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Février 2016 – Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 14/11519
APPELANTE
Madame [F] [G] [A] veuve [H]
née le [Date naissance 1] 1936 à [Localité 1] (CHINE)
[Adresse 1]
représentée par Me Christophe CARON du Cabinet Christophe CARON, avocat au barreau de PARIS, toque : C0500
assistée de Me Clotilde FOUQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0500
INTIMES
Monsieur [H] [H]
né le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 2]
[Adresse 2]H (SUISSE)
Monsieur [I] [H]
né le [Date naissance 3] 1966 à [Localité 2]
[Adresse 3]R (SUISSE)
Monsieur [C] [H], décédé le [Date décès 1] à [Localité 3]
représentés et assistés par Me Mathilde ROELLINGER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0197
PARTIES INTERVENANTES
Madame [R] [H]
née le [Date naissance 4] 1985 à [Localité 4] (67)
[Adresse 4]
Monsieur [J] [H]
né le [Date naissance 5] 1987 à [Localité 5] (57)
[Adresse 5]
représentés et assistés par Me Mathilde ROELLINGER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0197
Madame [N] [O] veuve [H]
[Adresse 5]
appelée en intervention forcée par acte d’huissier remis à étude du 12.04.2017.
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l’affaire a été débattue le 03 Mai 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Evelyne DELBÈS, Président de chambre
Madame Monique MAUMUS, Conseiller
Madame Nicolette GUILLAUME, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
– de défaut
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Monique MAUMUS, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier.
***
[U] [T] [H], artiste sculpteur français d’origine chinoise est décédé en France le[Date décès 2] 2002, sans avoir fait de testament.
Il a laissé pour héritiers, son épouse, Mme [F] [G] née [A] avec laquelle il était marié en secondes noces en 1999, sans contrat de mariage, ses trois fils, nés de son premier mariage avec [Z] [J], MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H].
Mme [G] [H] est titulaire de l’usufruit spécial attribué au conjoint survivant d’un artiste prévu par l’article 123-6 du code de la propriété intellectuelle et en conséquence, de l’usufruit des droits d’exploitation de l’oeuvre de [U] [T].
MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H] ont assigné Mme [H] devant le tribunal de grande instance de Paris par acte du 30 juillet 2014 en contrefaçon, déchéance de ses droits d’usufruitière, afin de se voir déclarer pleinement co-titulaires du droit d’exploitation de l’oeuvre de leur père comprenant la nue-propriété et l’usufruit, leur action tendant subsidiairement à obtenir de leur belle-mère qu’elle rende des comptes sur la gestion de son droit d’exploitation.
Par jugement du 25 février 2016, le tribunal a :
– dit que Mme [F] [G] née [A] veuve [H] ne peut sans l’accord préalable de MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H] aliéner les tirages numérotés en bronze qu’elle a fait réaliser,
– débouté MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H] de leur demande en contrefaçon,
– reçu MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H] en leur action fondée sur un exercice abusif du droit d’exploitation de Mme [F] [G] née [A] veuve [H],
– débouté MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H] de leur demande en déchéance des droits d’usufruitière de Mme [F] [G] [H] sur le droit d’exploitation de l’oeuvre de [U] [T],
– fait injonction à Mme [F] [G] [H] de communiquer aux consorts [H] la liste des tirages qu’elle a fait tirer ou qu’elle a le projet de faire tirer dans le délai d’un mois à compter de la signification de la décision sous peine d’une astreinte provisoire de 50 euros par jour pendant 100 jours,
la liste doit contenir les informations suivantes : nombre, modèle, date de fonte, dimensions, nom du fondeur, numéro de tirage, matériau, indication des mentions, précision si le bronze a été effectué à partir d’un plâtre ou d’un bronze existant, leur localisation actuelle et le cas échéant, le prix de vente et les coordonnées du nouveau propriétaire dans l’hypothèse où les tirages ont été vendus ou donnés,
la liste devra être accompagnée de pièces justificatives suivantes : bon de commande de tirages, bon de livraison, factures du fondeur, photographies des tirages, échange de correspondance avec le fondeur, facture de vente des tirages,
– dit que le tribunal se réserve la liquidation de l’astreinte,
– fait injonction à Mme [F] [G] [H] de solliciter l’accord des nus-propriétaires pour toute aliénation des tirages numérotés réalisés depuis le décès de [P] [H],
– ordonné à Mme [F] [G] [H] d’exécuter son devoir d’information et de représentation de l’usufruit à l’égard des consorts [H] en rendant des comptes sur sa gestion du droit d’exploitation,
– dit que Mme [F] [G] [H] doit permettre à [C] [H], [H] [H] et [I] [H] de faire la copie du journal intime de leur père,
– débouté MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H] de leurs autres demandes,
– débouté Mme [F] [G] [H] de ses demandes reconventionnelles,
– condamné Mme [F] [G] [H] à verser à MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H] la somme globale de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision,
– condamné Mme [F] [G] [H] aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Mathilde Roellinger, avocat, en application de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.
Mme [F] [G] [H] née [A] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 24 mars 2016.
Dans ses dernières conclusions du 28 avril 2017, elle demande à la cour de :
Vu les articles L. 123-6, L. 122-9, L. 335-2, L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles 578, 599 et 582 du code civil, Vu les articles 32-1 et 70 du code de procédure civile , Vu l’article 1240 du code civil,
– infirmer le jugement sauf en ce que Messieurs [H] [H], [I] [H] et [C] [H] (ou les actuels ayants-droit) ont été déboutés de leur demande en contrefaçon, de leur demande en déchéance de ses droits d’usufruitière sur le droit d’exploitation de l”uvre de [P] [H] et de restitution des moules et plâtres, de leur demande de transfert de la jouissance du journal intime de l’artiste, de leur demande d’inventaire et de remise en cause du partage, et en ce qu’ils ont été déboutés de toutes leurs autres réclamations,
et statuant à nouveau,
sur l’aliénation des tirages en bronze
– dire et juger que l’usufruitier est en droit de « jouir de la chose comme le propriétaire lui-même », de sorte qu’il peut céder le bien matériel dès lors qu’il n’altère pas la substance de l’usufruit,
– dire et juger que l’usufruit porte sur des ‘uvres incorporelles dont l’exploitation impose une aliénation qui ne vide pas l’usufruit de sa substance, mais accroît la valeur des ‘uvres immatérielles,
– dire et juger que l’usufruit du droit d’exploitation du conjoint survivant ne peut être limité par l’accord des nu-propriétaires avant chaque acte d’aliénation d’une ‘uvre de l’esprit, sauf à créer artificiellement une indivision entre usufruitier et nu-propriétaire prohibée par la loi,
– dire et juger que la demande d’autorisation des nu-propriétaires, avant chaque aliénation, conduit à lui interdire d’exploiter les droits que la loi lui attribue et à une situation de blocage entre usufruitier et nu-propriétaires,
en conséquence,
– dire et juger qu’elle est titulaire de la totalité de l’usufruit visé à l’article L. 123-du code de la propriété intellectuelle, est en droit d’aliéner les tirages en bronze, sans l’accord des nu-propriétaires et l’autoriser à procéder seule à tout tirage et vente,
– débouter les parties adverses de toutes leurs réclamations et appel incident et, notamment, les débouter de leur demande d’une co-titularité de l’usufruit,
sur l’exercice abusif des droits d’exploitation
– dire et juger qu’aucun grief sérieux ne vient démontrer l’abus dans l’usage de son droit d’exploitation et que le tirage et l’aliénation de bronzes, conformément aux accords de partage, ne peuvent dégénérer en abus dès lors qu’ils respectent la volonté de l’artiste et la finalité du droit,
En conséquence,
– débouter les parties adverses de toutes leurs réclamations et appel incident fondés sur l’usage abusif du droit d’exploitation et les prétendus manquements aux obligations d’usufruitière et les débouter de leur demande de révocation de son usufruit du droit d’exploitation,
– débouter les parties adverses de leurs demandes d’information sous astreinte, de communication sous astreinte d’une liste des tirages et de restitution des moules, plâtres et bronzes posthumes et, à titre subsidiaire, limiter la remise de la liste des tirages aux cinq dernières années écoulées,
– débouter les parties adverses de leur demande subsidiaire sous astreinte de mise en place d’une caution,
– débouter les parties adverses de toutes les autres demandes notamment indemnitaires, sur toutes les autres demandes et appel incident des parties adverses
– dire et juger qu’aucune preuve n’est rapportée par les parties adverses visant à caractériser les prétendues contrefaçons qui résulteraient d’altérations, de surmoulages, de tirages à partir de plâtres non divulgués et, notamment, l’atteinte au droit moral et au droit de divulgation des parties adverses,
– dire et juger que les journaux intimes du défunt ne sont pas des souvenirs de famille et que leur contenu porte atteinte à sa vie privée et qu’elle doit en conserver l’exclusive jouissance sans en remettre copie aux intimés et, en tout état de cause, dire et juger que dix années du journal intime ne sont pas en sa possession,
– dire et juger qu’elle n’a pas divulgué d’extraits du journal intime et qu’aucun préjudice quel qu’il soit n’a été subi par les parties adverses,
– dire et juger que la demande d’inventaire des parties adverses, et celle relative à la demande subséquente du récolement des plâtres et moules et de désignation d’un commissaire-priseur, est infondée en ce qu’un inventaire, signé par toutes les parties, a notamment été effectué par notaire le 16 juin 2003 et dire et juger qu’une évaluation des droits d’auteur a déjà été effectuée dans l’inventaire,
– dire et juger que rien ne démontre qu’elle aurait dissimulé 97 bronzes et, encore moins, réalisé un « recel successoral » qui n’est pas caractérisé,
– dire et juger qu’aucune aliénation de bronzes n’a été effectuée, après le décès de l’artiste, sans l’accord des parties résultant notamment de l’acte de partage et dire et juger qu’une perte de chance de vendre les bronzes aliénés n’est pas caractérisée et, à titre subsidiaire
et en cas de condamnation, dire et juger que les bronzes aliénés après le décès de l’artiste devront être déduits du nombre de tirages lui revenant dans le partage successoral,
– dire et juger qu’aucun grief sérieux ni dol n’est caractérisé et que rien ne vient justifier la remise en cause des partages effectués et notamment ceux du 1er décembre 2007 et 7 janvier 2007,
– dire et juger qu’elle n’a pas à communiquer la maquette du catalogue raisonné en cours de rédaction,
– dire et juger qu’elle est titulaire d’une assurance en tant qu’usufruitière et n’a pas à donner caution,
– dire et juger que la preuve d’une transmission de photographies des ‘uvres non divulguées de [P] [H] à la fondation The Li-Ching Cultural & Educational Foundation par elle n’est pas rapportée,
En conséquence,
– débouter les parties adverses de toutes leurs réclamations, notamment indemnitaires, de toutes leurs demandes d’astreintes, de restitution, de remboursement de bronzes et de leurs demandes subsidiaires notamment au titre d’une prétendue perte de chance, et les débouter de tout appel incident,
A titre reconventionnel,
– dire et juger que M. [I] [H] a réalisé un surmoulage d’une ‘uvre unique réalisée en fer soudé (représentant une colombe) dont la contrefaçon a été vendue, le 6 avril 2014, sous le nom ‘ [U] [T] 25/30″ et dire et juger que M. [I] [H] a réalisé un surmoulage de l”uvre « le cheval », le tout en violation du droit de reproduction dont elle est l’usufruitière totale, En conséquence,
– dire et juger que M. [I] [H] a commis des actes de contrefaçon et le condamner à réparer le préjudice qui lui a été causé et cela à hauteur de 20 000 euros,
En cas d’infirmation totale
– dire et juger que les parties adverses sont à l’origine d’un préjudice moral subi par elle et que les nu-propriétaires ne font que nuire à l’usufruitier dans un but vénal,
– dire et juger que les parties adverses ont engagé cette procédure de façon abusive, dans un but lucratif et avec l’intention de nuire aux intérêts de l’épouse de leur père défunt, de nature à engager leur responsabilité sur le fondement de l’article 1240 du code civil,
En conséquence,
– condamner in solidum les parties adverses à verser la somme de 90 000 euros à titre de réparation de son préjudice et 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
En tout état de cause
– débouter les parties adverses de toutes leurs réclamations,
– condamner in solidum les parties adverses à lui payer la somme de 30 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans leurs dernières conclusions du 17 avril 2017, les consorts [H] demandent à la cour de :
Vu l’article L.123-6 du code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles L.112-2, L.121-1, L.121-2, L.122-1, L.122-9 et L.335-2 du code de la propriété intellectuelle
Vu les articles 578 et 618 du code civil,
Vu l’article 600 du code civil,
Vu l’article 1116 ancien du code civil et 1137 nouveau,
– dire et juger au vu des conclusions du 21 mars 2017 de notification de décès et de reprise d’instance que M. [J] [H] et Mademoiselle [R] [H], les deux enfants du défunt [C] [H], poursuivent la présente instance devant la cour d’appel, aux côtés de leurs oncles [H] [H] et [I] [H], les quatre ensemble désignés « les Consorts [H] »),
– confirmer le jugement dans les dispositions suivantes :
– dire et juger que Mme [A] ne peut sans leur accord préalable aliéner les tirages numérotés en bronze qu’elle a fait réaliser,
– dire et juger que Mme [A] a commis un exercice abusif dans l’usage des droits
d’exploitation de l’oeuvre de [P] [H],
– ordonner à Mme [A] de leur communiquer la liste des tirages qu’elle a fait tirer ou qu’elle a le projet de faire tirer dans le délai d’un mois à compter de la signification de la décision sous peine d’une astreinte provisoire de 50 euros par jour pendant 100 jours, étant précisé, que la liste doit contenir les informations suivantes : nombre, modèle, date de fonte, dimensions, nom du fondeur, numéro de tirage, matériau, indication des mentions, précision si le bronze a été effectué à partir d’un plâtre ou d’un bronze existant, leur localisation actuelle et le cas échéant, le prix de vente et les coordonnées du nouveau propriétaire dans l’hypothèse où les tirages ont été vendus ou donnés. La liste devra être accompagnée de pièces justificatives suivantes : bon de commande de tirages, bon de livraison, factures du fondeur, photographies des tirages, échange de correspondance avec le fondeur, facture de vente des tirages ; dit que la cour se réserve la liquidation de l’astreinte,
– faire injonction à Mme [A] de solliciter l’accord préalable des nus-propriétaires pour toute aliénation des tirages numérotés réalisés depuis le décès de [P] [H],
– ordonner à Mme [A] d’exécuter son devoir d’information et de représentation de
l’usufruit à leur égard en rendant des comptes sur sa gestion du droit d’exploitation,
– dire que Mme [A] doit permettre à [C] [H], [H] [H] et [I] [H] de faire
la copie du journal intime de leur père,
– débouter Mme [A] de toutes ses demandes, et notamment de son action en contrefaçon
contre [I] [H],
– condamner Mme [A] à verser à MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H] la somme globale de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
– ordonner l’exécution provisoire de la décision,
– constater que Mme [A] n’a pas communiqué tous les informations et documents sur les
tirages posthumes requises par injonction du jugement du 25 février 2016 et en tirer les conséquences qui s’imposent, et notamment renouveler l’injonction avec une astreinte à 1.500 euros par jour,
– constater que Mme [A] les empêche d’accéder au journal intime de l’artiste [P][H] et d’en faire une copie et donc, en tirer les conséquences qui s’imposent,
– infirmer partiellement le jugement du 25 février 2016, en ce qu’ils ont été déboutés de leur demande en contrefaçon, de leur demande en déchéance des droits d’usufruitière de Mme [A], sur le droit d’exploitation de l’oeuvre de [P] [H] et de restitution des moules et plâtres, de leur demande de qualification du journal intime de l’artiste en souvenirs de famille, de leur demande d’inventaire et de remise en cause de 40 bronze partage et sur la dissimulation de 97 bronzes à la succession,
et statuant à nouveau,
Sur l’évaluation des droits d’auteur,
Mme [A] devra leur fournir tous les éléments permettant une évaluation des droits d’auteur afin de vérifier que l’usufruit spécial ne porte pas atteinte à la réserve héréditaire sous peine d’une astreinte de 1.500 euros par jour,
Sur la contrefaçon,
dire et juger que titulaires du droit moral et du droit de divulgation sur l”uvre de [P] [H], ils sont recevables dans leur action en contrefaçon à l’encontre de Mme [F] [A],
– dire et juger que les altérations du « Buffle Debout » et du « Portrait de Do » de la part et à charge de Mme [F] [A] sont des faits de contrefaçon,
en conséquence,
– condamner Mme [F] [A] au versement de la somme de 50.000 euros à M. [H] [H], propriétaire de l”uvre, à titre de dommages et intérêts correspondant à la valeur du « Buffle debout » et de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte au droit moral,
– condamner Mme [F] [A] au versement de la somme de 140.000 euros à M. [I] [H], propriétaire de l”uvre, à titre de dommages et intérêts correspondant à la valeur du « Portrait de Do » et de la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte au droit moral,
– ordonner à Mme [A] de rédiger une attestation sur l’honneur dans laquelle elle reconnaît n’avoir fait tirer aucun exemplaire du « Portrait de Do » depuis le décès de l’artiste et que le bronze « Portrait de Do » appartenant à [I] [H] est un exemplaire unique,
Les surmoulages
– dire et juger que la réalisation d’au moins 2 surmoulages de l”uvre « Buffle debout » à partir d’un bronze achevé constitue de la part et à charge de Mme [F] [H] une contrefaçon,
En conséquence,
– condamner Mme [F] [A] à leur verser la somme de 30.000 euros pour chacun des deux surmoulages du « Buffle debout » au titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte au droit moral,
– ordonner l’apposition de la mention de « reproduction » sur les surmoulages aux frais de Mme [A],
Sur l’atteinte au droit moral
Contrefaçons du « Masque de femme » :
– dire et juger que la réalisation de trois exemplaires de l”uvre « Masque de femme » chez le fondeur [X] avec des différences grossières par rapport à l”uvre de la main de l’artiste constitue de la part et à charge de Mme [F] [A] une contrefaçon,
En conséquence,
– condamner Mme [F] [A] à leur verser la somme de 50.000 euros par exemplaire contrefait, à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte au droit moral, découlant de la réalisation grossière des tirages posthumes « Masque de femme »,
– ordonner la destruction des exemplaires en bronze « Masque de femme » tirés par Mme [A] depuis le décès de l’artiste,
Contrefaçon du « Loup qui hurle » :
– dire et juger que la réalisation d’exemplaires contrefaisants de l”uvre en fer « Loup qui hurle » constitue de la part et à charge de Mme [F] [H] une contrefaçon,
En conséquence,
– condamner Mme [F] [A] à leur verser la somme de 30.000 euros pour chacun des exemplaires contrefaisants à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte au droit moral, découlant de la réalisation de contrefaçons de l”uvre « Loup qui hurle», – ordonner la destruction des exemplaires contrefaisants « Loup qui hurle » réalisés par Mme [A],
Sur l’atteinte au droit de divulgation
Reproductions d”uvres non divulguées dans le catalogue en préparation :
– dire et juger que Mme [A] n’a sollicité aucune autorisation auprès d’eux, titulaires du droit de divulgation pour la prise de vues photographies d”uvres non divulguées,
En conséquence,
– ordonner à Mme [A] de leur communiquer dans le mois qui suit la signification de l’arrêt, la maquette du catalogue raisonné afin qu’ils puissent exercer leur droit de
divulgation sous peine d’une astreinte de 100 euros par jour,
Divulgation non autorisée d’extraits du journal intime de [P] [H] :
– dire et juger que Mme [A] a communiqué au public des extraits de passage récents du journal intime de [B] [H] sans leur autorisation par la publication de l’ouvrage « Essai de [P] sur l’art » de 2008 ou « Essai sur les Beaux-Arts de [V] [T][S] »,
En conséquence,
– condamner Mme [F] [A] à leur verser la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral né de la divulgation d’extraits du journal intime de [P] [H] dans un ouvrage « Essai de [P]sur l’art » de 2008 ou « Essai sur les Beaux-Arts de [V] [T] [S] » sans leur autorisation,
interdire À Mme [A] de faire la réimpression de l’ouvrage « Essai de [P] sur l’art » ou « Essai sur les Beaux-Arts de [V] [T] [S] » en France et à l’étranger,
Reproduction non autorisée de photographies d”uvres non divulguées :
– dire et juger que Mme [A] a divulgué à la fondation The Li-Ching Cultural & Educational
Foundation un ensemble important des photographies des ‘uvres de [P] [H] dont des ‘uvres non divulguées, ces ‘uvres ont été divulguées sur le site internet de la fondation,
En conséquence,
– condamner Mme [F] [A] à leur verser la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice né de la divulgation d”uvres non divulguées (certains bronzes, et la totalité de la production d”uvres graphiques de l’artiste) sur le site internet de Li-Ching Cultural & Educational Foundation,
Tirages en bronze réalisés par Mme [A] à partir de plâtre non divulgués :
– dire et juger que Mme [A] a commis un acte de contrefaçon par le tirage de 15 exemplaires en bronze à partir d”uvres en plâtre non divulguées du vivant de [P] [H],
En conséquence,
– condamner Mme [F] [A] à leur verser la somme de 50.000 euros pour chacun des 14 exemplaires fondus par Mme [A] à partir d”uvres non divulguées,
– ordonner à Mme [F] [A] à leur restituer la totalité des bronzes posthumes réalisés à partir d”uvres non divulguées ainsi que des plâtres et moules afférents,
Sur la révocation de l’usufruit pour les abus dans l’usage des droits d’exploitation et l’atteinte à la substance de l’usufruit
– dire et juger que Mme [F] [A] a commis des abus dans l’usage des droits d’exploitation de l”uvre de [P] [H] en portant atteinte à la substance de l’usufruit du droit d’exploitation dès lors qu’elle a aliéné au moins 31 bronzes posthumes numérotés sans leur autorisation préalable,
– dire et juger que Mme [F] [A] a commis des abus dans l’usage des droits d’exploitation en ne respectant pas le droit moral, ni le droit de divulgation des Consorts [H] dans l’édition des bronzes posthumes,
– dire et juger que Mme [F] [A] a commis un abus dans l’usage des droits d’exploitation en reproduisant des ‘uvres non divulguées dans des photographies en vue d’un projet de catalogue raisonné et en divulguant dans un ouvrage publié en Chine en 2008 des passages du journal intime de [P] [H],
– dire et juger que Mme [F] [A] est responsable de la disparition de 26 plâtres dont elle
avait la garde,
– dire que Mme [F] [A] a manqué à ses devoirs d’usufruitière, en ne donnant pas caution de jouir raisonnablement, en ne respectant pas le devoir d’information à l’égard du nu-propriétaire, en n’établissant pas d’inventaire avant d’entrer en jouissance,
En conséquence,
– prononcer la déchéance de Mme [F] [A] de ses droits d’usufruitière sur le droit d’exploitation de l”uvre de [P] [H] qu’elle a hérité en application de l’article L.123-6 du code de propriété intellectuelle,
– les déclarer (MM. [H], [I] [H] ainsi que [R] et [J] [H]) pleinement co-
titulaires du droit d’exploitation de l”uvre de [P] [H] comprenant la nue-propriété et l’usufruit,
– ordonner à Mme [F] [A] la restitution des plâtres et des moules à leur profit,
– condamner Mme [A] à leur verser une somme correspondant à la valeur des 26 plâtres disparus, étant précisé que chaque plâtre peut permettre le tirage de 12 bronzes
numérotés,
A titre subsidiaire, si la révocation de l’usufruit n’était pas ordonnée à l’encontre de Mme [A], la cour devra ordonner la mise en place d’une caution dans le mois qui suit la notification de l’arrêt sous peine d’une astreinte de 1.500 euros par jour, la caution devra correspondre à la valeur d’assurance fournie par les consorts [H] de l’ensemble des moules et plâtres qui auront été inventoriés à la demande de la cour chez Mme [A], ainsi que l’ensemble des bronzes posthumes et des ‘uvres en indivision,
– dire et juger Mme [A] devra justifier d’une police d’assurance souscrite pour les plâtres, les moules et les ‘uvres en indivision, et les bronzes posthumes dans le mois qui suit la notification de l’arrêt, avec une astreinte de 1.500 euros par jour,
En tout état de cause
– dire et juger qu’un inventaire des droits d’exploitation sur lequel a porté l’usufruit doit être réalisé : Mme [A] devra dresser une liste complète des bronzes qui restaient à tirer à l’ouverture de la succession,
– dire et juger qu’un inventaire contradictoire des plâtres et moules et sceaux devra être réalisé par un commissaire-priseur désigné,
– désigner tel commissaire-priseur qu’il plaira à la cour d’appel avec la mission de réaliser l’inventaire descriptif des plâtres, moules et sceaux de l’artiste en y intégrant d’office les 25 plâtres et moules ayant fait l’objet d’un recel successoral par Mme [A], l’inventaire comportera une description précise de chaque plâtre et moule (titre, dimensions, matériau), son estimation, ainsi que sa ‘location’ actuelle. Une photographie de chacun des plâtre et moules sera annexée à l’inventaire.
L’inventaire sera réalisé de manière contradictoire en présence des parties, l’inventaire devra être déposé au greffe de la juridiction dans le mois qui suit la décision, il sera référé à la cour en cas de difficulté,
– ordonner contre Mme [A] une injonction de communication forcée de toutes les informations et documents concernant les tirages posthumes sous peine d’une astreinte de 1.500 euros par jour de retard,
Sur le recel successoral
– dire et juger Mme [A] a recelé 97 bronzes de la succession,
– dire et juger Mme [A] a recelé 25 plâtres et moules de la succession,
En conséquence,
– condamner Mme [A] à restituer les 97 bronzes à l’indivision de la succession de [P] [H] et dire qu’elle sera privée de sa part successoral, ou bien, selon les cas, à titre subsidiaire, Mme [A] sera condamnée à leur rembourser le prix des 97 bronzes selon leur valeur actuelle et les indemniser du préjudice de la perte de chance pour ceux qui auraient été aliénés par elle,
– condamner Mme [A] à restituer 25 plâtres et moules à l’indivision de la succession de [P] [H] et dire qu’elle sera privée de sa part successorale sur ces biens recelés, – condamner Mme [A] à leur verser des dommages et intérêts pour la réparation d’un préjudice moral à hauteur 150.000 euros résultant du recel successoral,
Sur les bronzes posthumes aliénés par Mme [A] sans leur accord
– dire et juger que Mme [A] a aliéné sans leur autorisation des Consorts [H] 31 bronzes posthumes numérotés qu’elle fait réaliser,
En conséquence,
– condamner Mme [A] à leur restituer les 31 bronzes posthumes aliénés ou bien à leur remettre 31 bronzes de l’artiste de valeur équivalente,
– condamner Mme [A] à verser la somme de 150.000 euros en réparation de leur préjudice moral découlant de l’aliénation des 31 bronzes posthumes à leur insu,
A titre subsidiaire, le remboursement de la valeur actuelle des 31 bronzes
A titre subsidiaire, et en cas d’incapacité de Mme [A] de restituer les bronzes ou de les remplacer par un équivalent, condamner Mme [A] à leur rembourser la valeur des 31 bronzes de l’artiste aliénés correspondant aux prix actuels du marché de l’art :
– 8 grandes sculptures évaluées à 94.200 euros par exemplaire
– 20 sculptures de taille moyenne évaluées à 56.500 euros par exemplaire
– 3 petites sculptures évaluées à 23.000 euros par exemplaire, soit un total de 1.952.600 euros.
A titre subsidiaire sur la perte de chance
– condamner Mme [A] à leur verser des dommages et intérêts résultant de l’impossibilité de remettre les 31 bronzes sur le marché de l’art dans des conditions favorables, l’estimation de la perte de chance est évaluée par exemplaire selon les trois catégories de sculptures en fonction de leur taille :
-pour les 8 grandes sculptures, la perte de chance est évaluée à 1.266.000 euros par exemplaire, -pour les 20 moyennes sculptures, la perte de chance est évaluée à 887.000 euros par exemplaire, -pour les 3 petites sculptures, la perte de chance est évaluée à 94.000 euros par exemplaire.
Sur le dol
– dire et juger que le partage 40 des bronzes du 1er décembre 2007 soit déclaré nul en raison des man’uvres dolosives de Mme [A],
En conséquence,
– ordonner à Mme [A] la restitution des 25 bronzes reçus en surplus de cette man’uvre dolosive aux Consorts [H],
Sur le journal intime de l’artiste
– qualifier les 61 carnets du journal intime qui appartiennent à l’indivision, de souvenirs de famille afin d’éviter la dispersion des carnets du journal intime de l’artiste et de faire échec au règle de partage,
– désigner M. [I] [H] comme étant le gardien et l’attributaire des 61 carnets qui sont des souvenirs de famille,
– condamner Mme [A] à leur verser la somme de 30.000 euros en réparation de leur préjudice moral découlant de la privation du journal intime depuis 2002,
Sur les demandes de Mme [A]
– débouter Mme [F] [A] de toutes ses demandes y compris au titre de l’article 700,
En tout état de cause,
– condamner Mme [F] [A] à leur verser la somme de 25.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [F] [A] aux entiers dépens avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
A l’audience du 3 mai 2017 , avant la tenue des débats, les parties ayant exprimé leur accord par l’intermédiaire de leurs avocats, l’ordonnance de clôture rendue le 18 avril 2017 a été révoquée et une nouvelle ordonnance de clôture a été prononcée, de sorte que la cour statue sur les dernières conclusions susvisées.
SUR CE, LA COUR
Considérant que selon l’article L.123-6 du code de la propriété intellectuelle, ‘pendant la période prévue à l’article L.123-1, le conjoint survivant, contre lequel n’existe pas un jugement passé en force de chose jugée de séparation de corps, bénéficie, quel que soit le régime matrimonial et indépendamment des droits qu’il tient des articles 756 à 757-3 et 764 à 766 du code civil sur les autres biens de la succession, de l’ usufruit du droit d’exploitation dont l’auteur n’aura pas disposé. Toutefois, si l’auteur laisse des héritiers à réserve, cet usufruit est réduit au profit des héritiers, suivant les proportions et distinctions établies par les articles 913 et 914 du code civil’ ;
Considérant qu’il n’est pas contesté par les enfants et petits-enfants de l’auteur que Mme [H] bénéficie de cet usufruit, les parties étant toutefois contraires quant à l’exercice et l’étendue de ce droit ;
Considérant que Mme [H] estime que l’usufruit du droit d’exploitation lui confère le droit de vendre les tirages en bronze qu’elle a fait effectuer, tandis que les intimés considèrent que cet usufruit ne déroge pas aux règles de droit commun, de sorte que les pouvoirs de l’usufruitier sont limités, que l’usufruitier a l’obligation de conserver la substance dans une perspective de restitution de la chose ou du droit et que l’aliénation des bronzes posthumes par elle, sans autorisation préalable des nus-propriétaires, revient à une privation du droit d’exploitation des héritiers nus-propriétaires ;
Considérant que le tribunal a fait droit à l’argumentation des consorts [H] en retenant que ‘par la fabrication d’un bronze, la nue-propriété et l’usufruit se trouvent incorporés dans le support matériel de l’oeuvre.
Ainsi l’usufruitier qui vend l’oeuvre, cède plus que son seul droit d’usufruit.
La vente des épreuves fabriquées fait sortir irrémédiablement les oeuvres du patrimoine de la succession sur lesquelles porte le droit d’exploitation des nus-propriétaires qui s’en trouvent définitivement privés’ et a en conséquence, dit que l’appelante devait avoir l’autorisation des nus-propriétaires pour aliéner les tirages numérotés en bronze qu’elle a fait réaliser ;
Considérant, toutefois, que le conjoint d’un auteur, en application du texte précité, bénéficie de l’usufruit sur le droit d’exploitation qui est un bien incorporel, et non pas seulement d’un usufruit sur les choses issues de l’exercice de ce droit d’exploitation ;
Considérant qu’à l’issue de l’usufruit du conjoint survivant, les nus-propriétaires retrouveront la pleine propriété de ce droit d’exploitation mais pendant la durée de l’usufruit, l’usufruitier est en droit d’exploiter l’oeuvre, sauf à retirer toute utilité au droit reconnu à l’article précité ;
Considérant, en conséquence, qu’en faisant un tirage et en le vendant, l’usufruitier ne fait qu’exercer le droit d’exploitation qui lui est conféré par l’article L.123-6 du code de la propriété intellectuelle ;
Considérant qu’il doit être observé que la prétention des intimés qui souhaitent que l’appelante leur demande l’autorisation d’aliéner les tirages en arguant du droit commun de l’usufruit, ne peut se fonder sur aucune disposition relative à ce droit commun, l’usufruitier n’ayant jamais le pouvoir de vendre la pleine propriété d’un bien sur lequel le droit est démembré ;
Que reconnaître à l’appelante le droit de vendre à condition qu’ils en donnent l’autorisation est dépourvu de fondement juridique ;
Considérant, au vu de ces éléments, que l’usufruit prévu à l’article L.123-6 du code de la propriété intellectuelle porte sur le droit d’exploitation, bien incorporel et non sur le bien matériel issu de cette exploitation et qu’il n’y a pas reconstitution sur le tirage obtenu d’une nue-propriété et d’un usufruit, les nus-propriétaires recouvrant leur pleine propriété sur le droit d’exploitation à l’issue de l’usufruit, si l’oeuvre n’est pas tombée dans le domaine public, hypothèse peu probable en l’espèce, compte-tenu de la durée du monopole en la matière ;
Considérant, en conséquence, que le jugement doit être infirmé en ce qu’il a jugé de ce chef et qu’il convient de dire que Mme [H] est en droit d’aliéner les tirages en bronze, sans l’accord des nus-propriétaires en ce qui concerne l’oeuvre divulguée ;
Considérant qu’en ce qui concerne l’étendue de ce droit, il appartient aux demandeurs à une éventuelle action en réduction de prouver l’atteinte à leur réserve de sorte que les intimés doivent être déboutés de leur demande requérant de Mme [H] qu’elle leur fournisse tous les éléments permettant une évaluation des droits d’auteur afin de vérifier que l’usufruit spécial ne porte pas atteinte à la réserve héréditaire ;
sur le journal intime
Considérant que Mme [H] sollicite l’infirmation du jugement de ce chef et s’oppose à la communication du journal de son défunt époux qui contient de nombreux passages de leur vie intime, et notamment des passages érotiques qu’il convient de ne pas communiquer aux enfants et petits-enfants, étant donné les relations actuelles entre les parties, et eu égard à la volonté des intimés d’exercer leur droit de divulgation sur ce journal alors qu’elle a droit au respect de sa vie privée ;
Qu’elle soutient que le droit de divulgation ne peut neutraliser son droit au respect de la vie privée, l’auteur, au surplus, n’ayant pas manifesté de son vivant une quelconque volonté de voir son journal intime publié, contrairement aux intentions des intimés et que dix années de ce journal sont en possession du frère de l’artiste, de sorte qu’en tout état de cause, elle ne peut pas permettre aux intimés de faire la copie de l’intégralité du journal intime de leur père ;
Considérant que les intimés sollicitent également l’infirmation du jugement en ce qu’il les a débouté de leur demande de qualification du journal en souvenir de famille et concluent à la nécessité de confier le journal intime à [I] [H] ;
Qu’ils exposent qu’ils sont bien fondés à ce que le journal intime rassemblant 61
carnets de leur père reçoive la qualification de souvenirs de famille afin que ces biens soient conservés au sein de la famille et ne soient pas dispersés, que les 61 carnets de [P] [H] pris ensemble offrent un témoignage de la vie d’un artiste ainsi qu’un fond d’archives permettant la compréhension de son ‘uvre artistique, que la qualification de souvenirs de famille implique ‘ la reconnaissance d’une véritable copropriété indivise familiale, échappant au droit commun de l’indivision, spécialement par l’exclusion du partage’, que l’attributaire, parmi les héritiers à qui sont confiés les souvenirs de famille, n’est pas le propriétaire mais le gardien et ne peut donc en disposer, qu’au vu des agissements de l’appelante, les carnets du journal intime devront lui être retirés ;
Considérant qu’ils expliquent qu’ils avaient confié en dépôt le journal intime à leur belle-mère, l’érigeant en tant que gardienne et dépositaire et que dans ce document, ils acceptaient également le principe que Mme [A] le confie au Musée National de littérature chinoise [Localité 6],qu’il ne s’agissait pas d’en faire un don, que cependant, il ressort d’une lettre de Mme [A] adressée à [C] [H] du 6 avril 2004 qu’elle « veut donner tous ces documents à ce musée de littérature chinoise » ce qu’elle ne peut faire sans leur accord puisque le journal intime appartient à l’indivision et que la fragmentation et la dispersion de ces 61 carnets entre les mains d’un tiers leur seraient lourdement préjudiciables, qu’enfin et surtout, Mme [A] les empêche constamment d’avoir accès au journal intime de leur père, que dans ces conditions, les 61 carnets doivent être qualifiés de souvenirs de famille et [I] [H] devra être désigné comme l’attributaire et le gardien des 61 carnets ;
Considérant que par un document sans date les consorts [H] ont confié à leur belle- mère le journal intime de leur père dans les termes suivants « [C], [H] et [I], nous nous déclarons d’accord pour confier le journal intime de notre père [U] [T] à [G] qui s’engage à confier celui-ci au Musée national de littérature chinoise à [Localité 6]. Il est clair que nous pourrons au préalable en faire une copie. » ;
Considérant que le jugement a dit que Mme [H] devait leur permettre de faire la copie du journal intime de leur père ;
Que l’appelante s’oppose à cette disposition du jugement tandis que les intimés ne se satisfont pas de cette mesure et souhaitent que ce journal soit confié à M. [I] [H] ;
Considérant que les intimés avaient confié de leur propre chef, le journal de leur père, qui peut être qualifié de souvenir de famille à Mme [H] et n’ont pas jugé opportun d’en faire une copie avant cette remise, contrairement à ce qui avait été évoqué ;
Considérant que dès lors qu’ils n’ont pas procédé à cette copie préalable à la remise, il n’existe aucune justification à la copie de ces documents aujourd’hui, de sorte que le jugement doit être infirmé de ce chef ;
Considérant que le motif à l’appui de leur demande de changement de gardien de ce journal consiste dans le fait que Mme [H] aurait en 2004, soit il y a plus de dix ans, sans provoquer de réactions de leur part à cette époque, donné ce journal au Musée national de littérature chinoise à [Localité 6] alors qu’ils avaient donné leur accord pour qu’il soit confié à ce Musée ;
Considérant, en tout état de cause, qu’ils ne rapportent pas la preuve du don de ce journal audit Musée, de sorte que leur grief infondé ne peut justifier la demande de changement de gardien de ce journal qui doit rester entre les mains de la veuve selon l’accord initial des parties et qu’ils doivent être déboutés de leur demande de désignation de M. [I] [H] comme l’attributaire et le gardien des 61 carnets et de leur demande de la somme de 30.000 euros en réparation de leur préjudice découlant de la privation du journal intime depuis 2002, dès lors qu’ils sont entièrement à l’origine de cette situation pour n’avoir pas pris copie préalable de ce journal et qu’ils ne démontrent nullement un dommage qui en serait résulté ;
sur l’usage du droit d’exploitation et la révocation de l’usufruit
Considérant que Mme [H] demande l’infirmation du jugement en ce qu’il a dit qu’elle abusait de son droit d’exploitation en ne rendant pas de comptes sur ce droit, les consorts [H] sollicitant son infirmation en ce qu’il n’a pas considéré que l’abus était suffisamment grave pour justifier la révocation de son usufruit ;
Considérant que pour statuer sur cette disposition critiquée, il convient d’examiner préalablement les griefs invoqués par les intimés ;
sur les contrefaçons reprochées à Mme [H]
‘le Buffle debout’
Considérant que les intimés expliquent que l’oeuvre était initialement dans les tons bleu-vert comme cela ressort de la photographie annexée dans l’inventaire notarié du 16 juin 2003, que cette oeuvre a été remise en dépôt à Mme [H] le 7 janvier 2007 et ne portait pas à cette date de numéro, que le 25 janvier 2014, lorsque M. [H] [H] a récupéré l’oeuvre, il a fait constater dans le reçu de réception les altérations suivantes : ‘Buffle debout maintenant avec une nouvelle patine brune et inscrit EAT (avant sans numéro) et 4 petites taches dorées’;
Considérant que l’appelante réplique que le 20 avril 2005, le fondeur [F] lui a demandé de lui confier un modèle de la sculpture « Le buffle debout » afin de réaliser deux bronzes ce qui avait été voulu par l’artiste de son vivant, que l’un des intimés lui a donc remis un exemplaire du bronze pour permettre cette fabrication, que les deux bronzes (EAIII/IV et EAIV/IV) fabriqués, ont été partagés entre les héritiers, que la mention « EAT », à savoir « épreuve d’atelier », a été apposée par le fondeur sur le bronze ayant servi à la réalisation du moule car ce bronze ne comportait pas de numéro, que les photographies non datées et intitulées « avant » et « après » fournies par les intimés ne prouvent absolument pas qu’elle est à l’origine de cette inscription, qu’en ce qui concerne la patine, la cour constatera que l’exemplaire du « buffle debout » reproduit dans le catalogue de l’exposition Mountain Art Museum en 1999 présente une patine brune ;
Considérant que des photographies prises à plusieurs années d’écart sont totalement insuffisantes pour établir un changement de couleur de patine, eu égard aux variations dans le rendu de la couleur qui s’attache à un cliché photographique ;
Considérant qu’en ce qui concerne la mention EAT qui elle est apparente et dont la présence n’est pas contestée par l’appelante, force est de constater que M. [H] [H] qui a confié cette sculpture à Mme [H] en 2007, ne s’est soucié de la récupérer qu’en 2014, de sorte que les conditions, les motifs et le donneur d’ordre quant à cette mention ne sont pas établis, aucune preuve d’une instruction en ce sens de Mme [H] n’étant rapportée par les intimés sur lesquels pèse la charge de la preuve de la contrefaçon qu’ils allèguent ;
Que le jugement doit être confirmé de ce chef en ce qu’ils les a déboutés de leurs demandes ;
‘le portrait de Do’
Considérant que les intimés exposent que cette oeuvre a été terminée en 1975, qu’en 1994, elle figure dans une exposition collective « Confrontation entre huit artistes [Localité 7]- [Localité 2] », et apparaît sous le titre de « Buste de Do », que la photographie bien qu’en noir et blanc témoigne que la surface du bronze est brillante, et non mate comme elle l’est aujourd’hui ;
Qu’elle figure avec une patine dorée dans le catalogue de l’exposition « [H] [U] [T], Contemporary Chinese art collection » publié en mai 1999 à la page 167 et décrit comme suit « A Lady’s Head, 1975, 40 x 20 x 30 cm, Bronze », que de même, elle est reproduite dans l’annexe de l’inventaire notarié avec une patine brillante , qu’il ne fait donc pas de doute qu’en janvier 2007, lorsqu'[I] [H] prête le « Portrait de Do » à Madame [A] sa patine était brillante aux reflets dorés, que le 25 janvier 2014, lorsque [H] [H] a récupéré le « Portrait de Do » chez sa belle-mère, il a expressément fait mentionner dans le reçu que le bronze avait été patiné pendant le prêt, que la photographie « Portrait de Do » dans son état actuel montre une nouvelle patine mate et terne de couleur noire, causée par une couche de cirage ou de cire passée de façon grossière, que dans le catalogue d’exposition Art Mountain de l’exposition de 1999, le bronze est brillant avec une finition dorée et des dégradés de teintes, tandis que dans son état actuel le bronze est d’un noir opaque et uniforme sans nuance ;
Considérant que l’appelante réplique qu’elle est totalement étrangère au changement de patine qui existait déjà du vivant de l’artiste, que les photographies prises pendant l’exposition de 1999/2000 prouvent que le bronze litigieux était déjà patiné avant le décès de l’artiste et avait été patiné en vue de ladite exposition à la demande de l’artiste lui-même, qu’il avait décidé de faire patiner le bronze abîmé par l’oxydation en vue de l’exposition, malgré ce que soutiennent les parties adverses en fournissant des photographies non datées et dont les nuances de couleurs ne démontrent rien, qu’elle communique la facture de [F], fondeur, en date du 15 avril 1999, prouvant que le bronze litigieux a été patiné et soclé à la demande de l’artiste, que si le bronze litigieux apparaît non patiné dans le « catalogue » de l’exposition comme les parties adverses semblent le souligner, c’est en raison du fait que la photographie a été réalisée en janvier 1999 alors que la patine et le montage sur socle en bois ont été effectués en avril 1999 pour l’exposition ;
Considérant que les intimés soutiennent que cette sculpture figure dans une exposition collective « Confrontation entre huit artistes [Localité 7]- [Localité 2] » de 1994 et qu’à cette époque elle est brillante ;
Considérant qu’il résulte de la photographie de la sculpture ‘a lady’head’ 1975 40X20X30 figurant à la pièce 40-1 que cette sculpture n’est pas uniformément patinée d’une couleur sombre ;
Considérant toutefois que la photographie du ‘buste de Do’ 40x31x22 du catalogue de l’exposition est en noir et blanc ne permet aucune constatation (pièce 41) et que rien ne permet de dire que la pièce 40-1 est une photographie issue de ce catalogue, la mention manuscrite ‘photo du catalogue’ étant dépourvue de toute portée ;
Considérant, en conséquence, que la preuve de l’état de la patine de la sculpture lors de sa remise à Mme [H] en 2007 n’est pas établie, de sorte qu’il ne peut être valablement soutenu que cette patine a été modifiée pendant le dépôt chez l’appelante ;
Considérant que les intimés demandent à la cour ‘d’ordonner à Mme [A] de rédiger une attestation sur l’honneur dans laquelle elle reconnaît n’avoir fait tirer aucun exemplaire du « Portrait de Do » depuis le décès de l’artiste et que le bronze « Portrait de Do » appartenant à [I] [H] est un exemplaire unique’;
Considérant toutefois qu’il n’entre pas dans les pouvoirs d’une juridiction de contraindre une partie à rédiger une attestation sur l’honneur de sorte que les intimés doivent être déboutés de cette prétention ;
les surmoulages
Considérant que les intimés exposent que le 26 décembre 2012, ‘lors d’une conversation avec les héritiers’, l’appelante ‘a indiqué qu’elle avait fait tirer entre 17 et 18 exemplaires en bronze sans plus de précisions’, que lors d’une conversation téléphonique du 19 janvier 2014 avec M. [H] [H], elle a confirmé que le ‘Buffle debout’ a servi de modèle, que le surmoulage est attesté par l’étiquette du fondeur [F] accrochée au bronze « Buffle debout » qui porte la mention suivante : « [H] [H] N° MODÈLE BUFFLE », que le moulage à partir d’un bronze achevé est également avéré par une lettre du 20 avril 2005 dans laquelle le fondeur SAS BLANCHET ET CIE invite Mme [A] « à rapporter un modèle de l”uvre « Buffle debout » pour mettre en fabrication le moulage élastomère », que ce qui a servi de modèle pour le moulage élastomère ce n’est pas un plâtre qui n’existe plus, mais le bronze non numéroté de [H] [H] qui a été remis à Mme [A] à sa demande, que Mme [A] a fait tirer au moins 2 surmoulages du « Buffle debout » (EA III/IV et EA IV/IV) ;
Considérant que Mme [H] réplique que s’agissant de l”uvre « Le buffle debout », [P] [H] a lui-même commandé de son vivant deux bronzes au fondeur [F], que le plâtre de l”uvre « Le buffle debout » ayant été égaré, l’auteur lui-même a demandé au fondeur de réaliser un moule à partir d’un bronze de la sculpture « le buffle debout », que c’est la raison pour laquelle, après la mort de [P] [H], le fondeur lui a demandé de lui transmettre un modèle de l”uvre afin d’honorer les commandes passées par l’artiste ce que ne peuvent ignorer les intimés puisqu’à cette fin précise [H] [H] lui a remis un exemplaire du bronze « le buffle debout », que ces deux fontes, voulus par l’auteur de son vivant, ont ensuite été partagées entre les héritiers ainsi que le bronze ayant servi de modèle et qui ne portait pas de numéro à l’origine ;
Qu’elle sollicite en conséquence la confirmation du jugement ;
Considérant que ce rappel des prétentions et arguments des parties recoupe ce qui a été exposé ci-dessus en ce qui concerne le ‘buffle debout’;
Considérant, comme les premiers juges l’ont dit qu’une prétention ne peut être justifiée par des propos tenus au téléphone s’agissant des 17 ou 18 exemplaires évoqués ;
Que pour les deux surmoulages à laquelle le dispositif des conclusions se limite, les intimés exposant qu’il s’agit des surmoulages EA III/IV et EA IV/IV, le rappel des circonstances de l’exécution de ces surmoulages connues des intimés ou à tout le moins de celui qui a remis la sculpture litigieuse justifie le débouté de leurs demandes de ce chef et la confirmation du jugement ;
les contrefaçons du ‘masque de femme’
Considérant que les intimés exposent que pour les tirages de bronzes en France, [P] [H] a exclusivement travaillé avec la SAS Blanchet et Cie- [F] fondeur, que toutefois, Mme [A] a pris la décision de travailler avec la fonderie [X] sans les consulter, que le résultat entre les deux fonderies n’est pas comparable, que Mme [A] a réalisé des tirages posthumes de très mauvaise qualité qui portent atteinte au droit moral de l”uvre, qu’elle a admis avoir fait réaliser 3 tirages non conformes à l’original à partir du Masque de femme : 1/8, 5/8, EA I/IV chez le fondeur [X], que le « Masque de femme » tiré par Mme [A] chez [X], que l’on voit en photo sur le site de la Li-Ching Foundation n’a rien à voir avec l’original réalisé par leur père qui appartient à [I] [H], qu’une comparaison des photographies des bronzes fait apparaître des différences manifestes, que le bronze posthume tiré par Mme [A] repose sur le socle par une tige grossière et agressive, que le visage reflète une expression, une personnalité toute différente de l’original, qu’enfin, le portrait original est parfaitement droit tandis que le bronze posthume réalisé par Mme [A] est incliné sur la gauche ;
Considérant que Mme [H] réplique que les consorts [H] ne démontrent pas que la photographie du site de la fondation culturelle Li-Ching reproduit un exemplaire du bronze posthume qu’elle aurait fait tirer, qu’il pourrait s’agir d’un exemplaire tiré du vivant de l’auteur-les parties adverses se contentent d’affirmer que l”uvre aurait été tirée en exemplaire unique du vivant de l’auteur sans le démontrer- ou bien d’un exemplaire tiré par M. [I] [H] lui-même, puisque ce dernier serait prétendument en possession de l’unique exemplaire, qu’il sera à ce titre relevé que le nom de l”uvre qui serait détenue par M. [I] [H] est différent (« Portrait de Tan » au lieu de « Masque de femme »), qu’en tout état de cause, les consorts [H] ne rapportent nullement la preuve d’une quelconque altération de l”uvre, que le choix du fondeur [X] est justifié, l’artiste ayant maintes fois travaillé avec lui, et le fondeur [F] étant liquidé ;
Considérant que Mme [H] a fait réaliser trois tirages du ‘Masque de femme’;
Considérant que les intimés déclarent prouver la contrefaçon commise à trois reprises par l’appelante en produisant la photographie de l’original, propriété de l’un d’eux et une photographie tirée à partir d’une photo parue sur le site de la Li-Ching Fondation ;
Considérant, outre le fait, que cette démonstration ne pourrait concerner qu’un tirage, force est de constater que les éléments de preuve produits sont insuffisants, aucun élément versé aux débats ne permettant de dire que la photo parue sur le site de la Li-Ching Fondation correspond à l’un des tirages 1/8, 5/8, EA I/IV effectués chez le fondeur [X] ;
Que les intimés doivent être déboutés de leur demande de ce chef ;
Loup qui hurle
Considérant que les intimés exposent que ‘Loup qui hurle’ est une oeuvre unique en fer réalisée par [P] [H], reproduit en photographie dans l’annexe de l’inventaire de succession du 16 juin 2003 et sur le site de la fondation taiwanaise, Li-Ching Fondation, attribué à l’appelante lors d’un partage, qu’en 2017, sur le site chinois http://[M].news.cn/, ils ont découvert une ‘uvre contrefaisante de l”uvre en fer Loup qui hurle, la contrefaçon est flagrante, l’oeuvre est en fer recouverte d’une peinture noire très brillante, qu’il s’agit d’un nouveau fait de contrefaçon commis par Mme [A] ;
Considérant que l’appelante réplique que les parties adverses ne rapportent qu’une seule photographie de l”uvre aperçue sur ledit site Internet en soutenant que cette seule preuve suffirait à démontrer la contrefaçon à son initiative, ce qui n’est pas sérieux ;
Considérant que les pièces produites, un cliché photographique d’un format très réduit et d’une impression très grossière pour ce qui est du constat d’huissier, s’agissant d’une copie d’écran, et une photographie plus précise issue d’après les intimés d’un site chinois, ne sont pas de nature à établir la contrefaçon alléguée, aucune comparaison sérieuse ne pouvant être effectuée entre des éléments aussi dissemblables quant à leur qualité d’impression et eu égard à l’incertitude sur la provenance du second, de sorte que les intimés doivent être déboutés de leur demande de ce chef ;
sur l’atteinte au droit de divulgation
Considérant que les intimés exposent que Mme [A] devra être condamnée pour atteinte au droit de divulgation pour avoir fait reproduire des ‘uvres non divulguées et ce, sans leur autorisation, ses actes de contrefaçon se manifestant par :
– la reproduction d”uvres non divulguées dans un catalogue raisonné en préparation,
– la divulgation d’extraits du journal intime non divulgués du vivant de l’artiste,
– la reproduction d”uvres non divulguées sur le site internet de la fondation taiwanaise The Li-Ching Foundation,
– le tirage en bronze d”uvres à partir de plâtres non divulgués ;
Considérant que Mme [H] réplique qu’en hommage à l’artiste, elle a entrepris la réalisation d’un catalogue raisonné en chinois intitulé « L’Art de M. [H] [U] [T] » (d’environ 300 pages), projet dont les parties adverses ont été parfaitement informées, que c’était de la volonté du défunt qu’elle réalise un catalogue raisonné, que ce catalogue a pour finalité de faire connaître l’oeuvre de l’artiste, et ne peut que bénéficier aux intimés, que pour rappel, ce catalogue est en cours de rédaction et ne constitue à ce stade qu’un projet ;
Considérant qu’elle explique en ce qui concerne la prétendue diffusion d’extraits du journal intime dans un ouvrage en Chine, qu’elle n’est pas l’auteur de l’ouvrage « Essai de [H], [U] [T] sur l’Art » publié par les Editions de Littérature du peuple et ignore totalement comment l’auteur a pu se procurer des passages du journal intime, s’il s’agit bien de passages du journal car il se peut également que ce soit des extraits d’interviews ;
Considérant que s’agissant du reproche d’avoir communiqué des photographies d”uvres non divulguées au site internet de la fondation taiwanaise The Li-Chi Foundation et, mieux encore, des photographies familiales, les intimés ne rapportant pas la preuve qu’elle serait à l’origine de cette communication, que la liste des ‘uvres litigieuses diffusées contient des ‘uvres qui ont en réalité déjà été divulguées et notamment dans le catalogue Mountain Art Museumum publié en 1999 du vivant de l’auteur ,que les photographies de famille présentes sur le site internet de la fondation The Li-Chi Foundation sont également toutes issues de ce catalogue ;
Considérant qu’elle réplique en ce qui concerne le prétendu tirage en bronze d”uvres à partir de plâtres non divulgués, que certaines d’entre elles ont déjà été divulguées du vivant de[B]g [H] et que s’agissant du reste des tirages en bronze litigieux, elle a en effet effectué quelques fontes, comme elle a le droit de le faire, et ce pour son usage exclusivement personnel et que lorsqu’il n’y a pas de mise en contact de l”uvre avec le public, il n’y a pas divulgation ;
Considérant qu’en ce qui concerne le catalogue raisonné, les intimés doivent être déboutés de leur demande, s’agissant d’un ouvrage en préparation qui ne peut en conséquence, être le siège d’aucun fait de divulgation ;
Que leur demande de communication de la maquette de ce catalogue afin qu’ils puissent exercer leur droit de divulgation doit être rejetée en l’absence d’éléments d’information précis sur une publication prochaine de cet ouvrage ;
Considérant que les griefs portant sur la divulgation d’extraits du journal intime non divulgués du vivant de l’artiste, sont infondés, aucune preuve sérieuse n’étant rapportée que l’appelante a conçu et publié l’ouvrage « Essai de [H], [U] [T] sur l’Art » , de même que le grief portant sur la reproduction d”uvres non divulguées sur le site internet de la fondation taiwanaise The Li-Ching Foundation, ce reproche totalement imprécis étant au surplus non démontré, l’ouvrage ‘le Contemporary Chinese Art Collection’ publié en 1999 comportant de nombreuses photographies des oeuvres, de sorte que rien ne permet de dire que celles, au demeurant non listées dans le dispositif des conclusions, figurant sur le site internet de la fondation taiwanaise The Li-Chi Foundation auraient pour origine des faits de divulgation de la part de l’appelante ;
Considérant que les intimés demandent à la cour de dire et juger que Mme [A] a commis un acte de contrefaçon par le tirage de 15 exemplaires en bronze à partir d”uvres en plâtre non divulguées du vivant de [P] [H] ;
Considérant que selon l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ;
Considérant que force est de constater que le dispositif des conclusions des intimés est totalement imprécis, de sorte que la cour, dans l’ignorance du contenu exact de la prétention ainsi exprimée, ne peut que les en débouter, un acte de contrefaçon ne pouvant être retenu sans indication de l’oeuvre contrefaite, les motifs des écritures qui font état de diverses oeuvres ne pouvant suppléer la carence affectant le dispositif qui fait état de 15 exemplaires puis sollicite le versement de 50 000 € pour chacun des 14 exemplaires ;
Considérant que sur la révocation de l’usufruit, les intimés demandent à la cour de dire que Mme [H] a commis des abus dans l’usage des droits d’exploitation de l”uvre de [B] [H] en portant atteinte à la substance de l’usufruit du droit d’exploitation dès lors qu’elle a aliéné au moins 31 bronzes posthumes numérotés sans leur autorisation préalable, en ne respectant pas le droit moral, ni le droit de divulgation dans l’édition des bronzes posthumes, en reproduisant des ‘uvres non divulguées dans des photographies en vue d’un projet de catalogue raisonné et en divulguant dans un ouvrage publié en Chine en 2008 des passages du journal intime de [P] [H], eu égard à la disparition de 26 plâtres dont elle avait la garde, et qu’elle a manqué à ses devoirs d’usufruitière, en ne donnant pas caution de jouir raisonnablement, en ne respectant pas le devoir d’information à l’égard du nu-propriétaire, en n’établissant pas d’inventaire avant d’entrer en jouissance ;
Considérant, eu égard, au point tranché sur l’usufruit du droit d’exploitation, que le reproche portant sur l’absence d’autorisation des héritiers nus-propriétaires avant l’aliénation des tirages, et en ce qu’elle a aliéné 31 bronzes posthumes sans leur accord, est injustifié ;
Considérant en ce qui concerne le refus de communiquer toute information sur les tirages des bronzes que Mme [H] a fait réaliser depuis la mort de l’artiste, il convient de dire qu’il est effectivement légitime que les intimés soient tenus au courant de l’exercice par l’usufruitière du droit d’exploitation aux fins que lorsqu’ils en recouvreront la pleine propriété, ils soient en mesure de connaître les droits restants de manière à les exercer en conformité avec les règles en vigueur notamment sur le nombre d’originaux, de sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a fait injonction à Mme [H] de communiquer aux consorts [H] les éléments d’information sur les tirages, aucune nouvelle injonction avec astreinte n’étant prononcée, l’instance en liquidation d’astreinte étant pendante devant le tribunal de grande instance ;
Considérant qu’aucune atteinte n’a été retenue quant au droit moral et au droit de divulgation et que la disparition alléguée de 26 plâtres n’est pas fondée dès lors que le dispositif global et imprécis n’est éclairé dans les motifs des conclusions que par la mention de quatre plâtres (Buffle à tête retournée, Chien, Tête de l’enfant, Petits Buffles) et surtout que le constat effectué à la demande de Mme [H] le 12 mai 2014 n’avait pas pour but de procéder à un inventaire exhaustif des plâtres mais de faire procéder à un constat portant sur leurs conditions de conservation ;
Considérant en ce qui concerne l’absence de caution et d’inventaire, que c’est par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont débouté les consorts [H], en l’absence de démonstration d’actes de gestion qui ne seraient pas raisonnables pour le premier grief et en observant que les parties ont fait réaliser un inventaire notarié des biens de l’artiste le 16 juin 2003 avec l’office d’un commissaire-priseur pour le second ;
Considérant qu’à l’issue de cet examen, le seul grief établi quant à l’usufruit du droit d’exploitation concerne le défaut d’information portant sur son exercice ;
Considérant, toutefois, qu’eu égard à la particularité du litige et le peu de précédents jurisprudentiels en la matière qui auraient pu éclairer Mme [H] sur la conduite à tenir en une telle situation, et compte-tenu du caractère apaisé qui a prévalu dans les premières années qui ont suivi le décès de l’artiste qui a pu laisser penser à la veuve que les enfants lui faisaient confiance, ce manquement n’est pas suffisamment grave pour justifier la révocation de l’usufruit , de sorte que les intimés doivent être déboutés de leur demande en ce sens et de toutes leurs demandes subséquentes, le jugement étant confirmé en ce qu’il a jugé de ce chef ;
Considérant que leur demande subsidiaire de mise en place d’une caution et d’une assurance doit également être rejetée pour les motifs retenus par le tribunal, à savoir l’absence d’actes de gestion déraisonnables et l’absence d’obligation légale d’assurance pour l’usufruitier ;
sur le recel successoral
Considérant que les intimés exposent que 97 bronzes dont 69 fondus entre 1997 et 2002 n’ont pas été intégrés dans l’inventaire de succession ainsi qu’en atteste l’inventaire informel établi le 5 mars 2013 par M. [I] [H], que parmi ces 97 bronzes sept ventes récentes ont eu lieu ;
Qu’ils soutiennent que cette dissimulation de 97 bronzes est imputable à Mme [H] à laquelle il convient d’appliquer la sanction du délit de recel ;
Considérant que la preuve de fait matériel constitutif de recel et d’une intention frauduleuse doit être rapportée par la partie qui agit sur ce fondement ;
Considérant qu’une grande partie des 97 bronzes prétendument recelés ont été fondus du vivant de l’artiste, de sorte qu’aucun élément ne permet de mettre en cause sa veuve, dès lors qu’il a pu en disposer, étant souligné que sa cote n’a augmenté que récemment, et qu’en conséquence, l’absence de fonds issus des éventuelles ventes de ces sculptures n’est pas l’indice d’un recel ;
Considérant que pour le surplus des oeuvres, force est de constater que les intimés ne rapportent pas la preuve du délit qu’ils invoquent puisqu’ils soutiennent que ‘Mme [A] devra s’expliquer sur le sort des 28 autres oeuvres dès lors qu’elle est en possession de toutes les archives de [P] [H]’ ;
Qu’ils doivent être déboutés de leur demande au titre du recel en l’absence de démonstration de l’existence d’un tel délit ;
sur la nullité du partage du 1er décembre 2007
Considérant que les intimés exposent que sur les bronzes figurant sur cet acte de partage partiel, 40 ont été partagés dans la proportion de 5/8 pour l’appelante et 3/8 pour les enfants de l’artiste, Mme [H] ayant prétendu qu’il s’agissait de biens communs puisque commandés du vivant de [U] [T] [H] ;
Qu’ils expliquent que la lettre du 13 octobre 2000 de la société Blanchet et Cie concernant la commande du ‘Buffle à genoux’ qui fait partie des 40 oeuvres, est antidatée dès lors que le capital social de 108 000 € indiqué sur cette lettre n’a été porté à cette somme que par décision du 20 novembre 2002 ;
Qu’ils demandent la nullité de ce partage en raison des manoeuvres dolosives de Mme [H], étant souligné qu’une telle commande à la fin de la vie de l’artiste qui n’avait pas suffisamment d’argent pour y procéder n’est pas réaliste et n’est attestée par aucun document
contemporain de l’artiste ;
Considérant que l’appelante réplique que les 40 bronzes ont bien été commandés par l’artiste avant son décès ainsi que l’établit la lettre du fondeur de 12 mai 2004 ;
Considérant que la lettre du fondeur du12 mai 2004 est rédigée comme suit : ‘comme suite à nos différents entretiens, nous vous prions de bien vouloir trouver ci-joint, une facture pro forma correspondant aux sculptures en bronze que votre mari nous avait commandé du 30 avril 1999 à fin 2001, soit 40 pièces’;
Considérant que la lettre du 13 octobre 2000, seul élément sur lequel les intimés fondent leur demande ne concerne en tout état de cause que 3 exemplaires du ‘Buffle à genoux’ et est tout à fait insuffisante pour établir des manoeuvres frauduleuses de la part de Mme [H], s’agissant d’une anomalie sur un document de la société Landowki ;
Considérant, en outre, que cette même société fait bien référence dans la lettre précitée du 12 mai 2004 à une commande de 40 pièces de la part de l’artiste de son vivant, les intimés n’apportant aucun élément pour contredire cette affirmation du fondeur et prouver que la commande serait postérieure au 14 décembre 2002 ;
Considérant, en conséquence, en l’absence de démonstration d’un dol qui incombe aux intimés, leur demande de nullité du partage du 1er décembre 2007 doit être rejetée et le jugement confirmé de ce chef ;
sur les demandes de Mme [H] à l’encontre de M. [I] [H]
Considérant que l’appelante expose qu’une oeuvre ‘la Colombe’ a été vendue par la société Sotheby’s Hong Kong le 6 avril 2014, qu’il s’agit d’une sculpture en bronze qui constitue manifestement une contrefaçon dès lors que l’originale est en fer soudé et est unique, que M. [I] [H] est à l’origine de cette contrefaçon car cette oeuvre unique lui appartient ;
Considérant qu’elle expose également qu’elle a découvert chez M. [C] [H], un bronze intitulé ‘le cheval’, qui est un surmoulage réalisé par M. [I] [H] ce que M. [C] [H] a reconnu, étant souligné que le fondeur suisse qui l’a réalisé est domicilié près du domicile de M. [I] [H] ;
Considérant, toutefois, que l’affirmation que M. [I] [H] serait à l’origine de la contrefaçon de ‘la Colombe’ n’est corroborée par aucun élément de preuve, pas plus que pour le bronze ‘le cheval’, les messages échangés en juin 2014 entre elle et M. [C] [H] sur lesquels Mme [H] fonde sa demande, n’établissant pas ce qu’elle allègue, et la proximité géographique entre un fondeur et le domicile de M. [I] [H] étant dépourvue de toute portée probatoire ;
Qu’elle doit être déboutée de ces demandes ;
sur les dommages intérêts
Considérant qu’aucune faute ne peut être reprochée aux intimés dans la conduite de leur action de nature à justifier la réparation d’un préjudice moral subi par Mme [H] qui doit être déboutée de sa demande de ce chef ;
Considérant, en outre, que les demandes des intimés en appel ne révèlent pas un abus de procédure justifiant une indemnisation au profit de l’appelante qui doit être déboutée de ce chef de demande ;
PAR CES MOTIFS,
Constate l’intervention volontaire de M. [J] [H] et de Mme [R] [H],
Confirme le jugement sauf en ce qu’il a dit que Mme [A] veuve [H] ne peut sans l’accord préalable de MM. [C] [H], [H] [H] et [I] [H] aliéner les tirages numérotés en bronze qu’elle a fait réaliser, fait injonction à Mme [F] [G] [H] de solliciter l’accord des nus-propriétaires pour toute aliénation des tirages numérotés réalisés depuis le décès de [P] [H], dit que Mme [F] [G] [H] doit permettre à [C] [H], [H] [H] et [I] [H] de faire la copie du journal intime de leur père,
Statuant à nouveau de ces chefs infirmés et y ajoutant,
Dit que Mme [H] est en droit d’aliéner les tirages en bronze, sans l’accord des nus-propriétaires du droit d’exploitation en ce qui concerne l’oeuvre divulguée,
Rejette la demande des consorts [H] de copie du journal intime de leur père, de désignation de M. [I] [H] comme gardien et attributaire de ce journal et de condamnation au paiement de la somme de 30.000 euros à titre de préjudice moral,
Rejette toute autre demande,
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes,
Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés,
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,