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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 20J
2e chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 27 OCTOBRE 2016
R.G. N° 15/03536
AFFAIRE :
[P] [C]
C/
[Z], [J] [T] épouse [C]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Avril 2015 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE
N° Chambre : JAF
N° Cabinet : 01
N° RG : 12/00704
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
Me Anne-chantal CRESPY
Me Sandrine BOSQUET
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT SEPT OCTOBRE DEUX MILLE SEIZE,
La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [P] [C]
né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 1]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Anne-chantal CRESPY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 143
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/005383 du 22/10/2015 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de VERSAILLES)
APPELANT A TITRE PRINCIPAL
INTIMÉ INCIDEMMENT
****************
Madame [Z], [J] [T] épouse [C]
née le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 2]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant: Me Sandrine BOSQUET de la SCP BERGER/BOSQUET/
SAVIGNAT, Postulant, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 20 –
N° du dossier 3687
INTIMÉE À TITRE PRINCIPAL
APPELANTE INCIDEMMENT
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Septembre 2016 en chambre du conseil, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Odile BOUVENOT-JACQUOT, Présidente,
Madame Agnès TAPIN, Conseiller,
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Didier ALARY,
Greffier, lors du prononcé : Anna PANDIKIAN,
FAITS ET PROCEDURE,
Madame [Z] [T] et Monsieur [P] [C] se sont mariés le [Date mariage 1] 1970 à Saint Martin La Garenne (78), sans contrat de mariage. Ils sont soumis au régime de la communauté légale réduite aux acquêts.
Ils ont eu deux enfants, nés le [Date naissance 3] 1971 et le [Date naissance 4] 1977, aujourd’hui majeurs.
A l’audience du 25 juin 2012, le juge aux affaires familiales, saisi par Madame [Z] [T], a constaté l’acceptation par les époux du principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci, suivant procès verbal annexé à l’ordonnance de non-conciliation du 24 juillet 2012 qui a notamment attribué à l’époux la jouissance onéreuse du logement commun situé à [Localité 3] et à l’épouse la jouissance onéreuse du bien immobilier commun situé à [Localité 4] (04). Le juge aux affaires familiales a également désigné Maître [C] [A], notaire à [Localité 5], en vue de dresser un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux et d’élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager.
Par jugement du 13 avril 2015 dont appel, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Pontoise a :
* prononcé le divorce accepté des époux,
* constaté que Madame [T] a formulé des propositions de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux,
* ordonné la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux,
* condamné Monsieur [C] à payer à Madame [T] une prestation compensatoire en capital d’un montant de 45000 euros,
* dit qu’en sus de ce capital, à titre de prestation compensatoire, Monsieur [C] sera tenu, et en tant que de besoin condamné, à verser à Madame [T] la somme mensuelle de 150 euros pendant huit années, avec indexation,
* dit qu’en ce qui concerne leurs biens le jugement prend effet dans les rapports entre les époux à la date du 24 septembre 2009,
* dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
* condamné les parties aux dépens à concurrence de la moitié chacune, en ce compris les frais d’expertise notariale et dit qu’ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
* débouté les parties de leurs autres demandes.
Le 11 mai 2015, Monsieur [C] a interjeté un appel total de cette décision.
Dans ses dernières conclusions du 25 mai 2016, Monsieur [P] [C] demande à la cour de :
* prononcer le divorce d’entre les époux,
* ordonner la mention du jugement en marge de l’acte de mariage des époux ainsi qu’en marge des actes de naissance de Monsieur [C] et de Madame [T],
* fixer la date des effets du divorce entre les époux au 1er janvier 2010,
* ordonner la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux,
* débouter Madame [T] de sa demande de prestation compensatoire,
* statuer ce que de droit sur les dépens en lui accordant le bénéfice de l’article 699 du nouveau code de procédure civile,
*condamner Madame [T] à lui verser la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions du 6 juin 2016, Madame [Z] [T] demande à la cour de :
* débouter Monsieur [C] de l’intégralité de ses demandes,
* confirmer le jugement de divorce rendu le 13 avril 2015,
Y ajoutant,
* condamner Monsieur [C] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs écritures conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 21 juin 2016.
SUR CE, LA COUR
Sur la prestation compensatoire :
Monsieur [P] [C] conclut à l’infirmation du jugement en invoquant une erreur d’appréciation du premier juge dont il allègue qu’il a confondu son chiffre d’affaires avec son résultat. Il conteste également la disparité entre les parties dont il soutient qu’elle n’est pas démontrée au regard de leur situation respective et qu’en tout état de cause elle n’est pas liée au divorce, l’appelant ajoutant que lors de la tentative de conciliation Madame [Z] [T] qui n’a pas sollicité de devoir de secours- n’a ainsi manifesté aucun besoin. Il fait valoir qu’en s’installant à [Localité 4], Madame [Z] [T] a décidé d’exploiter à son seul profit le local commercial acquis par le couple, essentiellement sur des fonds propres selon le demandeur, ce qui le prive d’une partie du chiffre d’affaires que le couple y réalisait auparavant puisqu’il y vendait ses créations et qu’ainsi la cour peut constater la baisse de son chiffre d’affaires depuis le départ de l’intimée. Soutenant que ses propres droits à retraite seront très faibles, il fait enfin valoir que le partage de la communauté, même en tenant compte de ses droits à récompense, permettra à Madame [Z] [T], du fait de l’attribution préférentielle à son profit des biens de [Localité 4] à laquelle il dit ne pas être opposé, de bénéficier d’un niveau de vie au moins équivalent au sien quand elle cessera son activité, par la revente notamment du droit au bail et par la location du local commercial.
Madame [Z] [T] qui avait sollicité devant le premier juge le règlement d’une prestation compensatoire sous la forme de l’attribution des immeubles de [Localité 4] et d’une allocation d’une rente viagère mensuelle de 500 euros conclut à la confirmation du jugement. Elle insiste en particulier sur la disparité de la situation des époux concernant leur pension de retraite respective en soulignant qu’elle n’aura droit à aucune pension de retraite résultant de sa collaboration bénévole à l’activité de son époux puisqu’elle n’a quasiment jamais cotisé. S’agissant des revenus de son époux, elle observe que d’après sa déclaration d’impôts il a déclaré un revenu cumulé de 24 592 euros, qu’il ne justifie ni de ses charges ni de son résultat et qu’il aurait fait chuter ses bénéfices depuis l’introduction de la procédure de divorce. Enfin sur la situation prévisible des époux, elle fait valoir qu’ils ne seront pas dans une situation identique puisque, indépendamment de la récompense due par la communauté à l’époux qui serait de 111 532,83 euros, Monsieur [P] [C] se verra attribuer les biens sis à [Localité 3] d’une valeur plus importante que ceux de [Localité 4] dont l’état se dégrade de surcroît.
Suivant l’article 270 du Code civil, l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives, en fonction de la situation au moment du prononcé du divorce et de l’évolution dans un avenir prévisible. La disparité s’apprécie à la date à laquelle la décision prononçant le divorce est passée en force de chose jugée.
L’article 271 prévoit que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. Il y a lieu de tenir compte, notamment, de la durée du mariage, de l’âge et de l’état de santé des époux, de la qualification et de la situation professionnelles des époux, des conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, du patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, de leurs droits existants et prévisibles, et de leur situation respective en matière de pension de retraite.
Selon l’article 274 du Code civil, le juge décide des modalités selon lesquelles s’exécutera la prestation compensatoire en capital ; celles-ci sont limitativement prévues par la loi et l’article 275 du Code civil précise que lorsque le débiteur n’est pas en mesure de verser le capital dans les conditions prévues à l’article 274, le juge fixe les modalités de paiement du capital, dans la limite de huit années, sous la forme de versements périodiques indexés selon les règles applicables aux pensions alimentaires.
Il convient de rappeler que la prestation compensatoire n’est pas destinée à égaliser les fortunes ni à corriger les conséquences du régime matrimonial adopté par les époux et qu’elle doit permettre d’éviter que l’un des époux ne soit plus atteint que l’autre par le divorce.
Monsieur [P] [C] ayant interjeté un appel total à l’encontre du jugement, la situation respective des parties doit être appréciée à la date du présent arrêt.
Il convient d’indiquer, en préalable de l’examen de la situation respective des ex-époux à ce jour et au vu de leurs explications et des pièces qu’ils ont produites, en particulier des articles de journaux communiqués par Monsieur [P] [C], qu’avant leur séparation les époux exerçaient ensemble une activité artisanale ayant pour objet la création et la fabrication de tissus et leur vente. Ils s’étaient établis dans le village de [Localité 3] où ils avaient acheté deux bâtiments anciens comprenant d’une part, sur une surface de 40 m², une boutique et un petit atelier outre un studio à l’étage et d’autre part, sur une surface de 70 m², un atelier en rez de chaussée et des locaux d’habitation à l’étage. Madame [Z] [T] – qui avait une formation de licière- créait également, à partir des tissus fabriqués, des modèles comme des abat-jour puis au fil des années et de la diversification de leurs fabrications, des vêtements. Monsieur [P] [C] se consacrait davantage à la création et à la fabrication des tissus. Les époux qui disposaient de leur boutique sur [Localité 3] pour vendre leurs créations, ont acquis le 9 novembre 2005 un local commercial à [Localité 4] où ils étaient déjà propriétaires d’un appartement selon acte de vente du 18 décembre 1996 et ils vendaient leurs créations durant l’été sur [Localité 4].
Madame [Z] [T] , âgée actuellement de 61ans, s’est mariée avec Monsieur [P] [C] le [Date naissance 5] 1970, celle-ci ayant alors 15 ans et son mari 19 ans. Ils comptaient 41 ans de mariage quand ils ont signé devant le juge aux affaires familiales le procès-verbal d’acceptation du principe de la rupture. Madame [Z] [T] ne fait pas état de problème de santé particulier.
Les revenus actuels de Madame [Z] [T], artiste créatrice, sont constitués par les revenus qu’elle retire de son activité de vente de ses créations dans le local commercial qu’elle exploite désormais seule à [Localité 4].
Elle a communiqué ses avis d’impositions établis à son seul nom à compter de 2012 et portant sur ‘les bénéfices non commerciaux, régime spécial’ déclarés de 2011 à 2014, soit :
– en 2011, 12 582 euros,
– en 2012, 12 528 euros,
– en 2013, 10 815 euros,
– en 2014, 14 600 euros.
D’après sa déclaration faite à l’administration fiscale en 2015, selon le formulaire 2042, elle a perçu de ses revenus artistiques déclarés en ‘ micro BNC’, une somme de 14 900 euros.
Comme l’indique Madame [Z] [T] dans ses écritures, les sommes déclarées sous la mention de BNC correspondent à ses revenus. Il s’agit en effet, compte tenu de son activité artistique, de ses recettes brutes sans déduction de ses charges, revenus sur lesquelles l’administration a appliqué d’ailleurs un abattement forfaitaire de 34 %.
Ainsi son revenu mensuel moyen sur ces 5 dernières années s’établit à la somme de 1090,42 euros, étant précisé que contrairement à ce que soutient Monsieur [P] [C], il conviendra de déduire de ce revenu notamment les charges de la boutique qu’elle exploite.
Concernant les droits à retraite de Madame [Z] [T], il apparaît d’après le récapitulatif établi par la caisse nationale d’assurance vieillesse le 17 mars 2014, qu’elle n’a cotisé au titre du régime général que de 1978 à 1980 puis ensuite à compter de 2011. Il n’a en effet été retenu une activité salariée que durant 20 trimestres de 1978 à 2012. Ses droits à retraite sont donc particulièrement limités puisque d’après ce document, elle peut prétendre – sur la base de 20 trimestres – qu’à une retraite mensuelle de 33,26 euros, en cas de départ à la retraite le 1er novembre 2017, à 62 ans. Certes, Madame [Z] [T], depuis 2013, cotise pour sa retraite mais celle-ci restera très modeste compte tenu de son âge et des 31 ans durant lesquels elle n’a pas cotisé.
Si Monsieur [P] [C] soutient qu’aucune information n’est apportée par Madame [Z] [T] sur les conditions dans lesquelles elle a cessé l’activité salariée qu’elle avait de 1978 à 1980, il est cependant constant – au vu des pièces communiquées par l’appelant lui même- que Madame [Z] [T] a activement participé aux côtés de son mari à l’exploitation de leur activité d’artisans tisserands et créateurs, quand bien même elle n’était pas salariée. Il ne peut être sérieusement soutenu par Monsieur [P] [C] que l’absence de cotisation par Madame [Z] [T], durant cette longue période de vie commune et de travail en commun, résulterait d’un choix personnel de dernière.
En outre, s’il apparaît qu’au cours du mariage, il a été souscrit auprès de la Mutuelle des artisans un contrat complémentaire retraite dénommé Aria Vie, alimenté par les époux, les sommes valorisées sur ce contrat à hauteur de la somme de 11 317 euros jusqu’en janvier 2010 seront comptabilisées dans l’actif commun, étant précisé que ce contrat a été racheté par Madame [Z] [T] suivant courrier de la mutuelle des artisans du 16 mai 2011. Ce capital ne compensera que dans une part minime l’absence de cotisation de Madame [Z] [T].
Enfin, Monsieur [P] [C] ne justifie nullement que la vente du droit au bail par Madame [Z] [T] quand elle cessera son activité et la location du local commercial pourraient lui assurer un revenu compensant le montant très faible de sa retraite dès lors que le droit au bail pour ce local de 22 m² a été évalué à 16 000 euros en 2011, aucune évaluation du loyer auquel le bien pourrait être loué n’étant communiquée.
Selon les pièces produites et notamment le rapport établi le 13 octobre 2014 par Maître [C] [A], notaire associé établi à [Localité 5], désigné par le juge aux affaires familiales, le patrimoine commun des époux est constitué de :
– du bien immobilier situé à [Localité 3] qui constituait le domicile conjugal des époux et le lieu où ils exerçaient leur activité de tisserands créateurs, acquis le 9 août 1976 ; Maître [A] l’a évalué en 2014, compte tenu de la tendance à la baisse du marché immobilier, à la somme de 230 000 euros, après avoir fait procéder à une évaluation notariée de ce bien, étant précisé que Madame [Z] [T] conteste cette évaluation qu’elle estime inférieure à la valeur du bien,
– d’un appartement de deux pièces en duplex ( d’une surface habitable de 56 m²) situé à [Adresse 3], acquis par acte du 18 décembre 1996, évalué par Maître [A] à 50 000 euros,
– d’un local commercial d’environ 22 m², situé également à [Adresse 4], acquis le 9 novembre 2005, évalué par Maître [A] à 30 000 euros compte tenu de la situation du marché immobilier.
S’agissant des activités artisanales exercées par chacun des époux, aucune valorisation n’a été communiquée à Maître [A] qui a indiqué que chacun d’eux a repris sa propre activité.
Maître [A] a évalué l’actif mobilier commun à 34 295 euros qui correspond selon les précisions portées à son rapport au capital financier commun qui existait au jour où les époux ont procédé à la répartition directement entre eux du capital qu’ils avaient en commun. Il doit y être ajouté le montant du capital se trouvant sur le plan épargne retraite racheté par Madame [Z] [T] lors de la séparation des époux, soit un capital mobilier de 45 612 euros au total.
Le patrimoine propre de Madame [Z] [T] comme l’ayant recueilli de la succession de son père, selon acte de partage dressé le 27 mai 2003 par Maître [C], notaire à [Localité 6] et de sa mère décédée le [Date décès 1] 2009, se compose de la nue-propriété d’une parcelle cadastrée section F n° [Cadastre 1] et des droits immobiliers indivis recueillis après le décès de sa mère sans autre précision indiquée au rapport de Maître [A].
Les charges fixes justifiées de Madame [Z] [T] comprennent outre les charges habituelles d’électricité et d’assurance, ainsi que les dépenses courantes d’entretien, de nourriture et d’habillement :
– la taxe foncière pour les biens situés à [Localité 4], d’un montant mensuel en 2015 de 102,42 euros,
– la taxe d’habitation payée pour les biens qu’elle occupe d’un montant mensuel moyen en 2015 de 17,33 euros,
– les cotisations versées pour sa retraite pour un total mensuel de 167,75 euros en 2015,
– les charges de copropriété d’un montant mensuel moyen en 2015, compte tenu des travaux en cours, de 150 euros, étant précisé qu’elle n’est pas imposable.
De son côté, Monsieur [P] [C], âgé de 65 ans, ne fait pas état de problème de santé particulier.
Les revenus actuels de Monsieur [P] [C] sont constitués par les revenus procurés par son activité de tisserand et de vente de tissus.
Il indique – sans contestation adverse – qu’il est organisé sous le régime des micro-entreprises. Il est exact que sous ce régime, les sommes déclarées à l’administration fiscale, mentionnées dans les avis d’imposition qu’il communique, sous la mention ‘ BIC profess., régime micro, déclarés’, correspondent à son chiffre d’affaires et non au résultat de l’entreprise. Cependant, il n’est pas établi que le bénéfice réel de Monsieur [P] [C] corresponde au chiffre mentionné par l’administration fiscale sous la mention ‘BIC profess., régime micro nets’ dès lors que ce chiffre est obtenu après un abattement forfaitaire qui est pour ce qui le concerne de 71 %. Le bénéfice réel de Monsieur [P] [C] correspond à la différence entre ces recettes et les dépenses exposées pour la poursuite de son activité artisanale. Celui-ci ne fournit cependant aucun élément pour établir ce bénéfice réel.
Par conséquent, pour comparer la situation de Monsieur [P] [C] avec celle de Madame [Z] [T] dont les revenus ont été pris en compte, il convient de tenir compte- comme l’a justement fait le premier juge- des revenus déclarés par l’appelant à l’administration fiscale à partir de 2011, année à partir de laquelle il a déclaré ses seuls revenus, qui ont été – au vu des documents versés aux débats par l’une ou l’autre des parties – de :
– 23 200 euros en 2011,
– 23 786 euros en 2012,
– 24 345 euros en 2013,
– de 24 592 euros en 2014,
soit des revenus mensuels tirés de son activité professionnelle de 1 998,40 euros en moyenne, étant précisé que Monsieur [P] [C] ne communique pas la déclaration faite à l’administration fiscale pour les revenus perçus en 2015.
Il ressort également de ses avis d’imposition que depuis 2012, il loue une partie des biens de [Localité 3], à savoir le studio situé au dessus de la boutique selon les indications portées dans sa pièce 38, à hauteur d’une somme annuelle -avant abattement- de 1 800 euros en 2012, 2 760 euros en 2013 et 2 790 euros en 2014, soit un revenu mensuel complémentaire de 231,25 euros calculé sur les deux dernières années de location.
Ses revenus mensuels sont donc de 2 229,65 euros.
Monsieur [P] [C] qui indique que ses droits à retraite seront ‘extrêmement faibles’ percevra, d’après le document qu’il produit sous sa pièce 36, une retraite mensuelle totale, régime général et complémentaire compris, de 924 euros s’il part à la retraite à 65 ans. Ce même document indique également que Monsieur [P] [C] bénéficiera d’un ‘taux plein’ dès lors qu’il partira en retraite à compter de 63 ans.
Outre le patrimoine commun détaillé précédemment, Monsieur [P] [C] a justifié auprès de Maître [A] qu’il a bénéficié, au cours de son mariage :
– de fonds provenant de la succession de son père, Monsieur [T] [C], décédé le [Date décès 2] 1994, pour une somme de 192 112,09 francs – soit 29 287,29 euros – encaissée sur les comptes de la communauté outre une somme de 31 688,59 euros provenant de la vente de titre dont était détenteur son père,
– de la somme de 32 014,29 euros provenant de la cession à son frère de la moitié indivise lui appartenant sur un bien immobilier situé à [Localité 7] dont il était propriétaire avec ce dernier par donation-partage du 18 mars 1982,
– de la somme de 100 000 francs, soit 15 244,90 euros, correspondant à sa part indivise et à la moitié de la part de son père (partagée entre ses deux fils) sur la vente intervenue le 8 mars 1990 d’une maison qui dépendait de l’indivision [I]-[C],
– de la somme de 21 631,92 francs, soit 3 297,76 euros, perçu dans le cadre de la succession de sa grand-mère Madame [M] [I].
Maître [A] indique que ces sommes ont été encaissées sur les comptes de la communauté et qu’en conséquence il sera dû par la communauté à Monsieur [P] [C], en application de l’article 1433 du code civil, une récompense de 111 532,83 euros, étant également précisé par le notaire qu’il n’a pas été transmis d’éléments suffisants pour qu’il soit tenu compte des déclarations de Monsieur [P] [C] qui a indiqué que certains de ces fonds auraient servi à financer les travaux d’aménagement de la résidence principale.
Monsieur [P] [C] indique également dans ses dernières écritures que l’acquisition des biens de [Localité 4] se serait faite ‘essentiellement’grâce à ses fonds propres. Cet éventuel droit à récompense devra être apprécié dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial.
Enfin, il est justifié que Monsieur [P] [C] est propriétaire en propre, à la suite du décès de son frère, du quart en toute propriété d’une maison située à Saint Dier d’Auvergne (63) qu’un notaire de La [Localité 8] Guyon (95) a évaluée à 5 000 euros.
Les charges fixes de Monsieur [P] [C] comprennent outre les charges habituelles d’électricité, d’assurance et de téléphone dont il fait état dans sa déclaration sur l’honneur datée du 11 décembre 2014 ainsi que les dépenses courantes d’entretien, de nourriture et d’habillement la taxe foncière pour le bien de de [Localité 3] d’un montant mensuel moyen de 163 euros en 2014.
Il n’est pas imposable et a été exonéré également de la taxe d’habitation en 2014. Il n’évoque pas d’autres charges que ce soit dans l’attestation sur l’honneur que dans ses écritures.
Eu égard à la durée du mariage des époux, de leur âge, des conséquences des choix professionnels faits par les époux pendant la vie commune, du patrimoine prévisible de ceux-ci en capital après la liquidation du régime matrimonial, de leurs droits prévisibles et de leur situation respective en matière de pension de retraite qui, même si la pension dont Monsieur [P] [C] bénéficiera est modeste, sont nettement en défaveur de Madame [Z] [T], est établie la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux, disparité qui s’effectue au détriment de Madame [Z] [T]. En outre si Monsieur [P] [C] soutient que du fait de la rupture ses revenus sont moindres que ceux perçus avant la séparation, il en est de même pour son ex-épouse dès lors qu’ils exerçaient leur activité en commun et déclaraient tous leurs revenus comme perçus par Monsieur [P] [C].
Enfin, le fait que Madame [Z] [T] n’ait pas sollicité de pension alimentaire au titre du devoir de secours ne peut être valablement allégué par l’appelant pour contester son droit à prestation compensatoire.
Le paiement d’une prestation compensatoire en capital à son bénéfice lui permettra de compenser sa situation financière avec celle de Monsieur [P] [C]. Il convient dans ces conditions de la fixer en capital, infirmant le jugement de ce chef, à la somme totale de
49 200 euros dont 30 000 euros en capital net de droits et 19 200 euros sous forme de paiement mensuels de 200 euros pas mois pendant 8 ans, avec indexation selon les modalités précisées au dispositif.
Sur la date des effets du divorce :
Monsieur [P] [C] sollicite que la date des effets patrimoniaux du divorce soit fixée au 1er janvier 2010, celui-ci expliquant que s’il admet une certaine rétroactivité des effets du divorce, il ne saurait être retenu la date du départ de Madame [Z] [T] alors même que cette dernière a sollicité le partage des avoirs bancaires le 19 novembre 2009 et que son conseil a évoqué devant le notaire chargé d’établir un projet d’acte liquidatif la date du 1er janvier 2010.
Madame [Z] [T] conclut à la confirmation du jugement qui a fixé la date des effets du divorce entre les époux à la date où il ont cessé de cohabiter et de collaborer, soit le 24 septembre 2009.
Il ressort de l’application combinée des alinéa 1 et 2 de l’article 262-1 du code civil, que dans le cas des divorces autres que par consentement mutuel, chaque époux peut demander le report des effets patrimoniaux du divorce, antérieurement à l’ordonnance de non conciliation, à la date où, cumulativement, toute collaboration et cohabitation ont cessé. La cessation de la cohabitation fait présumer la cessation de la collaboration. Il incombe à celui qui s’oppose au report des effets du divorce à la date de la cessation de la cohabitation de prouver que des actes de collaboration ont eu lieu postérieurement entre les époux.
Si le premier juge a indiqué que les époux avaient demandé que le jugement de divorce prenne effet dans leurs rapports entre eux, en ce qui concerne leurs biens, à la date du 24 septembre 2009, date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer, Monsieur [P] [C] – en appel – n’est plus d’accord sur cette date.
Il ressort de la lettre adressée le 19 novembre 2009 par Madame [Z] [T] à son mari, qu’à cette date les époux ne cohabitaient plus depuis ‘presque deux mois’, étant précisé qu’ils se sont séparés de fait le 24 septembre 2009. S’il est exact qu’en novembre 2009, ils avaient encore des comptes en commun, ce seul fait ne peut suffire à établir la persistance d’une collaboration entre les époux.
Par conséquent, il convient de confirmer le jugement qui a fixé la date des effets patrimoniaux du divorce au 24 septembre 2009.
Sur les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens :
La nature du litige et la solution qui y est apportée ne justifient pas en équité qu’il soit fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Chacune des parties conservera la charge de ses dépens exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après débats en chambre du conseil,
INFIRME partiellement le jugement déféré du 13 avril 2015,
ET STATUANT à nouveau,
FIXE à la somme totale de 49 200 euros la prestation compensatoire en capital due par Monsieur [P] [C] à Madame [Z] [T] et dit qu’elle devra être réglée pour
30 000 euros en capital, net de frais et de droits et 19 200 euros sous forme de paiements mensuels de 200 euros pendant 8 mois, et au besoin l’y condamne,
DIT que cette mensualité de 200 euros sera réévaluée le 1er novembre de chaque année par le débiteur et pour la première fois le 1er novembre 2017 en fonction de la variation de l’indice mensuel des prix à la consommation des ménages urbains (hors tabac) dont le chef est ouvrier ou employé publié par l’INSEE (tel.01.41.17.50.50 ou 66.11, minitel 3615 code INSEE, internet : www.insee.fr ), l’indice de base étant le dernier publié à la date de la présente décision,
DIT n’y avoir lieu à application en appel des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions non contraires au présent arrêt,
LAISSE à chacune des parties les dépens exposés en appel avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Odile BOUVENOT-JACQUOT, Président, et par Madame Anna PANDIKIAN greffier en pré-affectation auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
LE GREFFIER LE PRESIDENT