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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-6
ARRÊT AU FOND
DU 12 MAI 2023
N° 2023/ 133
Rôle N° RG 19/03136 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BD2YM
Etablissement Public EPCC OPERA DE [Localité 3]
C/
[B] [Z]
Copie exécutoire délivrée
le :12/05/2023
à :
Me Isabelle CORIATT, avocat au barreau de TOULON
Me Sandrine OTT-RAYNAUD, avocat au barreau de TOULON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de TOULON en date du 15 Janvier 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00452.
APPELANTE
Etablissement Public EPCC OPERA DE [Localité 3], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Isabelle CORIATT, avocat au barreau de TOULON
INTIME
Monsieur [B] [Z], demeurant [Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Sandrine OTT-RAYNAUD, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Estelle DE REVEL, Conseillère, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SILVAN, Président de chambre
Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre
Madame Estelle DE REVEL, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Caroline POTTIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Janvier 2023 puis prorogé au 17 Mars 2023 puis au 12 Mai 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2023
Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
M. [B] [Z] a été engagé par l’Opéra de [Localité 3], devenu l’EPCC Opéra de [Localité 3], Méditerranée, en qualité de musicien timbalier par contrat d’engagement du 1er octobre 1983 devenu contrat à durée indéterminée le 1er juin 1998.
La relation de travail était régie par les dispositions de la convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles.
Contestant sa classification salariale et le montant de son salaire, M. [Z] a, le 29 juin 2017, saisi le conseil de prud’hommes de Toulon d’une demande de rappel de salaire.
Par jugement du 15 janvier 2019, le juge prud’homale de Toulon en sa formation de départage, a:
‘Considéré que Monsieur [B] [Z] peut prétendre à un salaire de base correspondant au salaire minimum conventionnel revalorisé pour un poste de musicien chef de pupitre d’un ensemble musical à nomenclature ;
Condamné I’EPCC OPERA DE [Localité 3], pris en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur [B] [Z] la somme de 28.687,16 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2017 au titre du rappel de salaire pour la période du 1″ juin 2014 au30 novembre 2018 ;
Débouté Monsieur [B] [Z] de ses autres demandes ;
Condamné I’EPCC OPERA DE [Localité 3], pris en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur [B] [Z] la somme de 2.000 euros sur le fondement de I’article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE I’EPCC OPERA DE [Localité 3], pris en la personne de son représentant légal, aux dépens.’
Le 22 février 2019, l’Epcc Opéra de [Localité 3] a relevé appel du jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 18 octobre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé détaillé des moyens, l’Opéra de [Localité 3] demande à la cour de :
‘IN LIMINE LITIS rejeter la demande de sursis à statuer
Vu les articles 564 et 910-4 du Code de procédure civile,
JUGER irrecevable la demande nouvelle de l’intimé tendant à la condamnation de l’OPERA de [Localité 3] à verser au salarié, pour la période allant de mai 2019 à septembre 2022, des sommes au titre de prime d’ancienneté et congés payés y afférents ;
Sur le fond
INFIRMER le jugement du Conseil de prud’hommes de Toulon du 15 janvier 2019 sauf en ce qu’il a dit que l’EPCC Opéra de [Localité 3] n’était coupable d’aucune résistance abusive
JUGER que les minima conventionnels sont définis pour 1224 heures par an ou 102 heures par mois ;
JUGER que les minima conventionnels donnés pour 102 heures par mois doivent être rapportés aux 81 heures appliquées au sein de l’Opéra de [Localité 3] ;
JUGER que le respect des minima s’apprécie au regard de la durée du travail pratiquée dans l’entreprise soit 81 heures par mois ;
JUGER que les salaires de base sans les primes de quelque nature que ce soit sont supérieurs aux minima conventionnels recalculés au prorata ;
JUGER que la prime d’ancienneté n’est pas exclue du calcul du minimum conventionnel
CONDAMNER en conséquence M. [Z] à restituer les rappels de salaires de 28687,16 euros bruts soit 23376.19 euros nets pour la période allant du 1 er juin 2014 au 30 novembre 2018 ;
LE CONDAMNER au remboursement des intérêts légaux ;
LE DEBOUTER de ses demandes au titre de l’article 700 du CPC
LE CONDAMNER aux dépens
Sur l’appel incident de M. [Z]
DEBOUTER M. [Z] de ses demandes de rappels de salaires du 1er juin 2014 au novembre 2018 déjà payés en exécution du Jugement du Conseil de Prud’hommes de Toulon du 15.1.2019
LE DEBOUTER de ses demandes nouvelles (prime d’ancienneté et congés payés afférents) du 1er juin 2014 au 30 septembre 2022″.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 octobre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé détaillé des moyens, M. [Z] demande à la cour de :
‘CONFIRMER le Jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes en audience de départage le 15 janvier 2019, sauf en ce qu’il a débouté Monsieur [Z] de ses demandes au titre de la résistance abusive,
EN CONSEQUENCE,
JUGER que la prime d’ancienneté doit être exclue du salaire minimum conventionnel ;
CONDAMNER l’EPCC OPERA DE [Localité 3] à régulariser la situation à compter du 1 er juin
2014 en faisant bénéficier à Monsieur [Z] du salaire de base minimum prévu par la convention collective pour les artistes musiciens chef de pupitre appartenant aux ensembles musicaux à nomenclature, sans que soit intégrée la prime d’ancienneté de 23% dans l’assiette de calcul ;
CONDAMNER l’EPCC OPERA DE [Localité 3] à payer à Monsieur [Z] des rappels de
salaires en conséquence jusqu’à la décision à intervenir, soit la somme de 32744.9 euros du 1 er juin 2014 au 30 septembre 2022, dont :
‘ Rappels de salaire différentiel salaire de base/ minimum conventionnel, soit la somme de 23264.96 euros brut du 1er juin 2014 au 30 avril 2019 ;
‘ Rappels de salaire prime d’ancienneté en plus du salaire de base, calculée sur le salaire minimum conventionnelle, soit la somme de 9’479,94 euros du 1er juin 2014 au 30 septembre 2022 ;
‘ Indemnités de congés payés y afférents soit la somme de 32’74,49 euros pour la période du 1 er juin 2014 au 30 septembre 2022 ;
CONDAMNER l’EPCC OPERA DE [Localité 3] à payer à Monsieur [B] [Z] la somme
de 1454.3 euros au titre des intérêts légaux en première instance,
CONDAMNER l’EPCC OPERA DE [Localité 3] à payer à Monsieur [Z] la somme de 5000 euros au titre des préjudices subis du fait de la résistance abusive de l’employeur ;
CONDAMNER l’EPCC OPERA DE [Localité 3] aux entiers dépens ainsi qu’à payer à Monsieur [Z] la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 CPC ;
DEBOUTER l’EPCC OPERA DE [Localité 3] de l’intégralité de ses demandes’.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le sursis à statuer
Dans la partie discussion de ses conclusions, M. [Z] fait une demande de sursis à statuer qu’il ne reprend pas au dispositif. Or, l’article 954 du code de procédure civile édictant que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, il en résulte que la cour n’est pas saisie d’une telle demande.
Sur le fond
Moyens des parties :
S’agissant de la classification du salarié, l’Opéra de [Localité 3] admet que M. [Z] est timbalier solo et classé dans la catégorie des chefs de pupitre telle que définie par la convention collective, correspondant à la catégorie 1. Il indique qu’à cette catégorie, correspondent des minima conventionnels différents selon quatre accords successifs de branche de la convention collective.
S’agissant du calcul des minima conventionnels, l’Opéra de [Localité 3] soutient qu’une durée de travail inférieure à celle prévue par la convention collective donne lieu à la proratisation du salaire par l’employeur ; que le salaire minimum conventionnel est fixé par référence à une durée de travail de 1224 heures par an soit 102 heures par mois; qu’en application de l’accord d’entreprise de juillet 2009 propre à l’Opéra de [Localité 3], la durée collective de travail pratiquée au sein de l’orchestre a été réduite à 81 heures par mois, en lieu et place des 102 heures de la convention collective, soit une durée inférieure à celle en fonction de laquelle le salaire minimum conventionnel est déterminé (102 heures) ; que le temps de préparation à domicile n’est pas du temps de travail effectif car les planning prévoient des temps de préparation collectifs ; que les planning mensuels des musiciens montrent des durées de travail qui varient entre 40 et 70 heures par mois la plupart du temps avec des maximum de 81 heures; qu’en recalculant les minima conventionnels au prorata de la durée de travail de 81 heures, les salaires de base (hors éventuelles primes d’ancienneté) perçus par M. [Z] entre juin 2014 et 2019 sont supérieurs aux minima conventionnels ; que contrairement à ce qu’indique le salarié, la référence à 151,67 heures par mois n’est qu’une norme de référence qui figure dans ses bulletins de salaire correspondant au plafond temps plein mais n’est pas un minimum conventionnel.
S’agissant de la prime d’ancienneté, l’employeur considère que ni la convention collective, ni l’accord d’entreprise ne donnent d’indication concernant l’intégration de la prime d’ancienneté dans les minima conventionnels; que le contrat de travail stipule une clause informative qui ne donne aucune indication sur l’inclusion de cette prime ou pas pour calculer le salaire conventionnel; qu’il convient d’ajouter les primes d’ancienneté au salaire de base pour vérifier le respect des minima conventionnels; que la comparaison des minimum de la convention collective et des salaires réels de M. [Z] montre qu’il a été rémunéré au dessus des minima de la convention collective.
En réplique, M. [Z] soutient qu’il est fondé à réclamer un rappel de salaire en application des minimas conventionnels.
Il fait valoir que :
Sur la durée du travail:
– l’opéra de [Localité 3] ne peut soutenir que pour apprécier le respect des minima conventionnels, il convient de proratiser les salaires garantis par la convention collective en fonction de l’horaire de travail prévue par l’accord du 1er juillet 2009;
– il ne doit pas subir une proratisation de son salaire et doit bénéficier du salaire minimum conventionnel;
– son contrat de travail et chacun de ses bulletins de salaire stipulent une durée de travail de 151,67 heures ;
– l’accord de branche du 6 décembre 2017 prévoit que la rémunération mensuelle minimale conventionnelle est garantie non proratisée et non lissée quel que soit le temps de travail effectif réalisé par l’artiste au cours du mois,
– cet accord de branche ne constitue pas une modification de ces minima en fonction du temps de travail des musiciens, mais une précision afin de palier aux abus caractérisés dans certains opéra ayant tenté par accord d’entreprise de déroger aux minima conventionnels dans un sens défavorable;
– l’accord d’entreprise du 1er juillet 2009 précise en son point 9 un horaire de référence des musiciens à temps plein de 151,67 heures et un horaire journalier de 12 heures;
– les salaires minimas conventionnels font partie des matières pour lesquelles les dispositions des accords collectifs de branche sont impératives; de sorte qu’un employeur ne peut pas négocier ou appliquer des dispositions moins favorables;
– en prétendant que l’accord d’entreprise de 2009 peut diminuer les minimas conventionnels, l’opéra de [Localité 3] se heurte à une disposition impérative à laquelle il ne peut déroger;
– en imposant une rémunération proratisée aux artistes musiciens, pourtant employés sur un salaire de base déterminé pour 151,67 heures en application de l’article X de la convention collective, l’opéra de [Localité 3] déroge à ces dispositions impératives puisque cette proratisation revient à modifier le salaire;
– en outre, cette rémunération proratisée constitue une modification du contrat de travail soumise à accord du salarié;
– l’accord d’entreprise ne fait état que des temps de service et ne concerne pas le temps de travail effectif du salarié; il ne peut modifier la durée du travail prévue au contrat de travail des artistes qui est fixée le concernant à 151,67 heures
– le salaire de base et la durée de travail prévue au contrat est indifférente du prétendu horaire collectif de service de l’entreprise mentionné dans l’accord d’entreprise;
– son temps de travail effectif ne correspond pas qu’au temps de présence à l’opéra pour le répétitions et les représentations; à ce temps de service fixé à 81 heures par l’accord d’entreprise de 2009 comprenant un temps musical et un temps de mission, il convient d’ajouter le temps de préparation individuel du musicien nécessaire pour pouvoir s’intégrer dans le travail collectif fourni par l’orchestre ainsi que le temps qu’il consacre, en tant que chef de pupitre, à la préparation de son pupitre, de la partition et au recrutement des musiciens;
Sur sa classification:
– il n’est plus contesté qu’il est chef de pupitre, musicien de première catégorie et qu’en cette qualité, son salaire est très inférieur au salaire minimum prévu par la convention collective pour cet emploi;
Sur la prime d’ancienneté:
– l’opéra de [Localité 3] ne peut soutenir qu’il faut inclure la prime d’ancienneté dans les minimas conventionnels ;
– les primes qui sont liées à l’ancienneté n’entrent pas dans le calcul minimum ;
– ce n’est pas ce qui est prévu par le contrat de travail qui stipule qu’il bénéficie de la prime d’ancienneté en plus de sa rémunération mensuelle brute,
– ce n’est pas prévu par la convention collective de sorte que la rémunération brute mensuelle prévue en annexe de la convention collective est constituée par le seul salaire de base revalorisé auquel s’ajoute la majoration prévue par l’accord d’entreprise en fonction de l’ancienneté; et la prime d’ancienneté doit s’ajouter au salaire minimum conventionnel;
– il existe un jugement définitif du 22 juin 2017 du conseil de prud’hommes de Toulon qui a jugé que le salaire minimum ne devait pas inclure les diverses primes susceptibles d’être versées au salarié distinctement de sa rémunération et qu’il y a autorité de la chose jugée;
– avant la revalorisation des salaires minima conventionnels, elle était ajoutée au salaire minimum de base versé;
– elle deviendrait sans objet puisque le salarié, quelle que soit son ancienneté devrait bénéficier du salaire minimum conventionnel;
– cela reviendrait à le rémunérer de la même façon que les chefs de pupitre nouvellement embauchés;
– une délibération du conseil d’administration du 7 octobre 2004 indique qu’une rémunération particulière est attribuée à tout le personnel recruté en contrat à durée indéterminée selon leur ancienneté dans l’entreprise
Réponse de la cour :
– sur les minima conventionnels au regard de la durée du travail
Il est de jurisprudence constante que, lorsque les minima conventionnels sont définis par rapport à une durée de travail précise et que la durée du travail dans l’entreprise est inférieure à celle-ci, l’appréciation du respect du montant des minima conventionnels doit être effectuée au regard de la durée du travail pratiquée dans l’entreprise.
Au cas d’espèce, aux termes de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984 (Etendue par arrêté du 4M2120196 14 janvier 1994 JORF 26 janvier 1994), l’article X.1 dispose que « le salaire de base est déterminé pour 151, 40 heures de travail mensuel, soit en moyenne 35 heures hebdomadaires .
Figurent dans la présente convention :
1. La définition des postes, emplois ou fonctions, et leur classification ;
2.L’échelle des salaires planchers.
La revalorisation des salaires distribués et autres rémunérations, de même que l’échelle des salaires planchers, s’effectue dans le cadre de la négociation annuelle de branche, conformément aux dispositions de l’article L. 2241-1 du code du travail. »
L’article X.2 dispose que « Sont considérés comme salaires réels tous salaires mensuels tels que définis à l’article X. 1 de la présente convention, qui se situent au-dessus des minima conventionnels de la branche.
Cette progression de 1, 5 % se cumule avec les revalorisations résultant :
a) De la négociation annuelle des salaires visés à l’article X. 1 de la convention collective des entreprises artistiques et culturelles ;
b) De toute négociation collective d’entreprise prévoyant une revalorisation générale des salaires.
Cette progression ne se cumule pas avec :
– les revalorisations individuelles obtenues par le salarié dans son emploi dans l’entreprise ;
– les revalorisations de tout accord collectif d’entreprise ayant prévu une progression des salaires en fonction de l’ancienneté du salarié dans l’emploi.
Concrètement, lors du troisième anniversaire de présence du salarié dans l’entreprise, on vérifie que le salaire brut de l’intéressé a bénéficié d’une progression individuelle au moins égale à 1, 5 % par rapport à son salaire initial.
Les années suivantes, à la date anniversaire de son entrée dans l’entreprise, une vérification de même nature est opérée pour s’assurer que le salaire brut de l’intéressé a effectivement bénéficié d’une progression individuelle d’au moins 1, 5 % par rapport au salaire qu’il percevait 36 mois auparavant.
Les périodes de suspension du contrat de travail ne sont pas décomptées des 36 mois sauf lorsqu’elles résultent de congés pour convenance personnelle ; »
L’article X.3, dans sa rédaction antérieure à l’avenant du 6 novembre 2017
disposait qu’« à chaque emploi correspond un salaire brut minimum, au-dessous duquel aucun salarié ne peut être rémunéré. Le montant de ces salaires minima figure à l’annexe Salaires de la convention.
La revalorisation de ces salaires est négociée chaque année lors de la NAO. »
Par avenant du 6 décembre 2017, relatif à la modification de l’article X.3 de la convention collective, cet article dispose « Article X. 3 Rémunération des emplois figurant dans la filière artistique
À chaque emploi correspond un salaire brut minimum, au-dessous duquel aucun salarié ne peut être rémunéré.
La rémunération mensuelle telle que prévue dans les articles X. 3.1, X. 3.2, X. 3.3, X. 3.4 et les grilles annexées à la convention est garantie non proratisée et non lissée quel que soit le temps de travail effectif réalisé par l’artiste au cours du mois.
Si le premier et/ ou le dernier mois civil est incomplet, le salaire de celui-ci est calculé en multipliant 1/21 du montant du salaire mensuel inscrit au contrat (lequel ne peut être inférieur au minimum mensuel garanti) par le nombre de jours ouvrés figurant au contrat.
À l’exception de la période de création mensualisée prévue pour le titre XIII ; voire XIV, l’engagement au cachet des artistes reste possible pour les contrats d’une durée supérieure à 1 mois. Le montant de ces salaires minimaux figure à ‘ l’annexe salaires ‘ de la convention. La revalorisation de ces salaires est négociée chaque année lors de la NAO. »M2120196 15
L’article X. 3. 3. « Rémunération des artistes musiciens » dispose que « La rémunération des artistes musiciens, s’ils ne sont pas mensualisés, donne lieu au versement d’un cachet pour chaque service de répétition, de représentation ou d’enregistrement. Dans le présent article sont aussi pris en compte les chanteurs et les répétiteurs qui ne rentrent pas dans la catégorie des chanteurs lyriques, objet de l’article X. 3. 4.
A. Artistes musiciens appartenant aux ensembles musicaux à nomenclature
Rémunération mensualisée :
Les artistes musiciens, qu’ils soient titulaires de CDI ou de CDD d’une durée supérieure à 1 mois,
perçoivent une rémunération mensuelle brute d’un montant au moins égal à celui figurant à l’annexe Salaires de la convention, montant revalorisé lors de la NAO (en distinguant les catégories suivantes : tuttiste, soliste, chef de pupitre).
Cette rémunération correspond à un temps de travail moyen dont la durée est fixée au titre XV
” Dispositions spécifiques à l’emploi des artistes musiciens ‘.
L’article XV.2.1 « Temps de travail effectif – Artistes musiciens engagés en CDI au sein de formations orchestrales avec nomenclature » dispose « Durée du travail : Les artistes sont soumis à un horaire collectif spécifique à la profession, organisé au sein de chaque
formation instrumentale.
Afin de concilier au mieux les impératifs de l’activité des formations instrumentales, d’adapter le fonctionnement des entreprises tout en respectant les rythmes de travail spécifiques liés à la création et à la diffusion musicale correspondant à la mission de service public dévolue à chaque formation, et d’améliorer les conditions de travail des artistes dans le respect de la vie personnelle et familiale, le présent titre permet aux formations instrumentales d’aménager le temps de travail, conformément aux articles L. 3122-2 et suivants du code du travail.
Cet aménagement ne concerne que les artistes rémunérés sur une base mensuelle.
Temps de travail effectif : Le décompte du temps de travail effectif est individuel dans le cadre du calendrier collectif des activités de la formation instrumentale.
Définition des différentes natures du temps de travail effectif :
a) Travail au pupitre
La notion de service recouvre les différentes prestations effectuées sous forme de répétitions, de générales, de raccords, de concerts et de représentations lyriques ou dramatico-musicales, et chorégraphiques.
Le travail au pupitre est planifié puis décompté en services de 2 heures à 4 heures, divisibles par
demi-heures.
Les temps de pause seront définis par accord d’entreprise et sont décomptés comme du temps de travail effectif.
Le raccord est le temps consacré à la répétition précédant immédiatement un concert dans le cas où la répétition générale ne se serait pas déroulée dans le lieu du concert, il est d’au plus 1 heure.M2120196 16
Afin de répondre aux impératifs d’une oeuvre lyrique ou dramatico-musicale et chorégraphique dont la durée avec entracte dépasse 4 heures, les générales et les représentations sont décomptées au-delà de 4 heures par heure.
Deux convocations individuelles au maximum par jour peuvent être planifiées. Toutefois :
1. Le raccord et la manifestation publique qui le suit comptent pour une seule convocation.
2. Dans certains cas particuliers, 3 convocations individuelles peuvent être planifiées dans la même journée pour les seuls services de 2 heures, après accord des représentants élus du personnel.
En raison de contraintes techniques ou musicales, dans la mesure où le dépassement n’excède pas 3 minutes, conformément aux usages de la profession, la durée des services peut exceptionnellement être prolongée de 15 minutes qui sont alors décomptées 30 minutes. Toute prolongation ne peut être décidée que par la direction.
b) Temps en tournée
Le temps de travail en tournée est détaillé à l’article XV. 3.
c) Temps de transport (en déplacement et en tournée)
Le temps de transport collectif organisé par la formation instrumentale est du travail effectif. Son décompte varie en fonction de sa nature : déplacement ou tournée. Sa définition est détaillée à l’article XV. 3 du présent titre.
d) Temps en résidence
L’installation des artistes dans un lieu fixe pour une certaine durée et ses modalités (temps de travail effectif, décompte…) sont détaillées à l’article XV. 3 du présent titre.
Période de référence de l’aménagement du temps de travail :
La période de référence de l’aménagement du temps de travail s’étend sur 12 mois, en principe du 1er septembre au 31 août de l’année suivante, sauf accord d’entreprise spécifique fixant des conditions différentes de l’aménagement dans les limites prévues du présent titre.
L’horaire annuel de référence d’un artiste est de 1 224 heures.
L’aménagement du temps de travail s’effectue sur un horaire annuel déterminé en tenant compte de la durée collective du travail de chaque formation instrumentale, diminuée des heures de congés légaux et conventionnels octroyés aux artistes (chaque jour étant comptabilisé pour 5 heures).
Sous réserve de ce principe, l’horaire effectif annuel des artistes est de 1 076 heures. Il pourra être
aménagé différemment dans chaque formation instrumentale par accord d’entreprise. Il est
entendu entre les parties que l’artiste doit individuellement 1 076 heures de travail annuel effectif
à savoir :
3. Temps de travail au pupitre ;
4. Temps en tournée ;
5. Temps de transport (déplacement et tournée) ;
6. Temps en résidence ;
7. Toutes autres activités conformes à l’objet social de la formation instrumentale.17
Durée maximale trimestrielle :
Dans le cadre de l’aménagement du temps de travail effectif des artistes, la durée trimestrielle du travail
effectif ne pourra excéder 320 heures, dans le respect des plafonds horaires hebdomadaires et journaliers, diminués des heures de congés légaux et conventionnels octroyés aux artistes (chaque jour étant comptabilisé pour 5 heures).
Durée maximale hebdomadaire :
La durée hebdomadaire du travail effectif ne peut excéder 46 heures, dont 30 heures au maximum de travail au pupitre. Le temps de travail au pupitre ne peut excéder 10 services hebdomadaires hors tournée. Après accord avec les représentants élus du personnel et dans la limite de 2 dérogations par an, ce nombre de services pourra être supérieur à 10.
Durée journalière du travail :
La durée journalière du travail effectif des artistes ne peut excéder 10 heures, dont 7 heures au maximum de travail au pupitre.
La durée journalière de travail effectif peut être portée à 12 heures, dont 7 heures au maximum de travail au pupitre, dans le respect des dispositions de l’article XV. 2. 1 du présent titre, dans le cadre d’une journée, d’un déplacement ou d’une résidence (cf. article XIII. 4).
Le repos entre le service du matin, quelle qu’en soit sa durée, et le service de l’après-midi ne peut être inférieur à 1 heure. Le repos entre le service de l’après-midi et le service du soir ne pourra être inférieur à 1 h 30, sauf accord avec les représentants élus du personnel. »
Les accords des 7 juillet 2014, 20 juillet 2015, 31 janvier 2019 et 8 décembre 2021 relatifs aux salaires minima ne comprennent aucune référence quant à la durée de travail sur la base de laquelle sont calculés ces salaires minima.
Selon l’accord d’entreprise des artistes musiciens permanents de l’Opéra de [Localité 3]-Provence-méditerranée du 1er juillet 2009, l’horaire de référence mensuel des artistes musiciens temps plein est de 151 heures, ou 1575 heures par an.
Selon l’article L.3121-1 du code du travail, le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.
Sont considérés comme du temps de travail effectif le temps musical, correspondant au temps consacré aux répétitions et aux représentations incluant les pauses, et le temps de mission, correspond au temps consacré au déplacement effectué par l’artie musicien à l’initiative de l’Opéra. Ce temps musical et ce temps de mission sont décomptés en services, chaque artiste musicien devant 81h/mois, soit 27 services mensuels.
Il se déduit de l’ensemble de ces éléments que le salaire minima garanti par la convention collective au profit des artistes musiciens engagés en contrat à durée indéterminée au sein de formations orchestrales avec nomenclature est dû à raison de l’exécution de 1 224 heures de travail effectif par an, correspondant à un travail à temps complet et que ces minima conventionnels ne sont donc pas définis par rapport à une durée de travail précise mais par rapport à un temps de travail correspondant à un travail à temps complet alors que l’accord d’entreprise des artistes musiciens permanents de l’Opéra de [Localité 3]-Provence-méditerranée du 1er juillet 2009, plus favorable que la convention collective, dispose que le temps de travail à temps complet d’un artiste musicien correspond à 81 heures de travail effectif par mois, soit 972 heures par an.
En conséquence, pour apprécier le respect des minima conventionnels, il n’y a pas lieu de proratiser les salaires garantis par la convention collective en fonction de l’horaire de travail prévu par l’accord du 1er juillet 2019.
– Sur l’intégration de la prime d’ancienneté dans le calcul des minima conventionnels:
Pour vérifier le respect du minimum conventionnel, il faut le comparer au salaire réellement perçu. Cette opération suppose que soient définis notamment les éléments du salaire devant être pris en compte pour apprécier si un salarié bénéficie bien du minimum conventionnel.
Il est de jurisprudence constante qu’il faut tenir compte de toutes les sommes dont le versement est directement lié à l’exécution de la prestation de travail, sauf disposition contraire de la convention collective.
Il en résulte qu’en l’absence d’indication contraire de la convention collective applicable, les primes qui ne constituent pas une contrepartie directe du travail effectué par le salarié ne peuvent être prises en compte, en l’absence de stipulation particulières, pour vérifier l’application du salaire minimum conventionnel.
Ainsi, la prime d’ancienneté liée à la présence du salarié dans l’entreprise n’a pas à être prise en compte pour le calcul du salaire minimum prévu par la convention collective, en l’absence de dispositions particulières.
En l’espèce, il n’existe aucune stipulation particulière dans la convention collective concernant l’intégration de la prime d’ancienneté dans les minima conventionnels, pas plus que dans l’accord d’entreprise du 1er juillet 2009 ou dans le contrat de travail qui stipule que M. [Z] percevra une rémunération mensuelle brute de 9397 francs plus le cas échéant la prime d’ancienneté en vigueur dans l’entreprise.
Il n’y a donc pas lieu de tenir compte de la prime d’ancienneté pour vérifier si l’Opéra de [Localité 3] a respecté le minimum conventionnel s’agissant de la rémunération de M. [Z] ; celle-ci doit en conséquence être exclue du calcul.
– Sur la demande en rappel de salaire
S’agissant du rappel de salaire de base pour la période du 1er juin 2014 au 30 avril 2014:
Il ressort des bulletins de salaire produits par M. [Z] qu’il a perçu un salaire de base inférieur au minimum conventionnel pour un artiste musicien chef de pupitre d’un ensemble musical à nomenclature tel que prévu par les annexes salaire de la convention collective qui est le suivant:
– 3 263,05 euros de juin 2014 à juin 2015,
– 3 279,36 euros de juillet 2015 à juin 2017,
– 3 295,76 euros de juillet 2017 à juin 2018.
Il en résulte une différence mensuelle détaillée dans le tableau produit en pièce 3 par le salarié, non utilement contesté, et un rappel de salaire d’un montant de 23 264,96 euros, somme au paiement de laquelle il convient de condamner l’Etablissement public Opéra de [Localité 3], outre 2 326,49 euros à titre de congés payés afférents.
Le jugement est infirmé.
S’agissant du rappel de prime d’ancienneté du 1er juin 2014 au 30 septembre 2022
La période du 1er juin 2014 au 30 avril 2019
La section IV, article 44, de l’accord d’entreprise du 1er juillet 2009 ayant pris effet le 1er juillet 2009 pour une durée indéterminée, prévoit que les artistes musiciens titulaires perçoivent une rémunération mensuelle constituée par le salaire de base de la catégorie à laquelle ils sont classés. A ce salaire de base s’applique le taux de revalorisation conventionnelle. La rémunération mensuelle est majorée comme suit en fonction de l’ancienneté : embauche; salaire de base, à partir de 5 ans d’ancienneté salaire de base + 5% (…), à partir de 25 ans d’ancienneté salaire de base + 20%, passé à 23% depuis la Négociation annuelle obligatoire de 2011, applicable à compter du 1er novembre 2011 (pièce 19).
Il convient par conséquent d’écarter la prime d’ancienneté calculée sur un pourcentage entre 15 et 20% tel qu’avancé par l’employeur.
M. [Z] ayant plus de 25 ans d’ancienneté, il peut prétendre à une prime d’ancienneté fixée à 23% sur toute la période concernée par le présent litige.
La période du 30 avril 2019 au 30 septembre 2022
Aux termes de l’article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
Pour voir déclarer irrecevables comme nouvelles les demandes du salarié tendant au paiement de rappels de salaires, de prime d’ancienneté et congés payés afférents pour la période allant de mai 2019 à septembre 2022, l’employeur retient que ces demandes formées pour la première fois en cause d’appel ne tendent pas aux mêmes fins que les demandes soumises au premier juge sur la détermination des minima conventionnels.
La cour relève pourtant que les demandes poursuivent la même fin de paiement du salaire dû par l’employeur au regard de la rémunération minimale prévue par la convention collective applicable et de la prime d’ancienneté.
Il en résulte qu’il n’y a pas lieu de les déclarer irrecevables.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’établissement public Opéra de [Localité 3] doit donc être condamné à payer au salarié la somme de 9 479,94 euros à titre de rappel de prime d’ancienneté du 1er juin 2014 au 30 septembre 2022, outre 947,99 euros à titre de congés payés afférents.
Sur la résistance abusive
Le salarié sollicite une indemnisation à hauteur de 5 000 euros estimant que l’employeur a fait preuve de résistance abusive au motif qu’il a persisté dans son attitude concernant le montant de son salaire en dépit des nombreuses condamnations concernant d’autres salariés lui donnant tort, et les dispositions du jugement de première instance.
Il soutient avoir subi un préjudice en raison du manque à gagner pour la période de rémunération prescrite et de la dégradation de ses relations avec lui.
Le non paiement de la totalité de la rémunération du salarié pour les motifs sus-évoqués et les moyens de défense opposés par l’Etablissement public Opéra de [Localité 3] à l’action de M.[Z], ne font ressortir aucune faute caractérisant de la part de la société une résistance abusive et justifiant qu’il soit fait droit à la demande indemnitaire de M. [Z] dont celui-ci sera débouté.
Sur les autres demandes
Il convient de rejeter la demande au titre des intérêts légaux en première instance qui n’est pas justifiée.
Il convient en vu de ce qui précède de rejeter l’ensemble des demandes reconventionnelles de l’Etablissement public Opéra de [Localité 3].
Celui-ci succombant au principal, il convient de le condamner aux dépens de première instance et d’appel et à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement
INFIRME le jugement entrepris pour une meilleure compréhension de la décision
Statuant à nouveau
CONDAMNE L’Etablissement public EPCC Opéra de [Localité 3] à payer à M. [B] [Z] les sommes suivantes :
– 23 264,96 euros à titre de rappel de salaire de base pour la période du 1er juin 2014 au 30 avril 2019,
– 2 326,49 euros à titre de congés payés afférents,
– 9 479,94 euros à titre de rappel de prime d’ancienneté du 1er juin 2014 au 30 septembre 2022,
– 947,99 euros à titre de congés payés afférents,
– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE M. [B] [Z] de ses autres demandes,
DEBOUTE l’Etablissement public EPCC Opéra de [Localité 3] de ses demandes reconventionnelles
CONDAMNE l’Etablissement public EPCC Opéra de [Localité 3] aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT