Contrat d’apporteur d’affaires : 5 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/14556

·

·

Contrat d’apporteur d’affaires : 5 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/14556
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

5 janvier 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/14556

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 2

ARRÊT DU 05 JANVIER 2023

RÉINSCRIPTION APRÈS RADIATION

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/14556 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGIUN

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juillet 2022 -Cour d’Appel de PARIS – RG n° 22/08739

APPELANTE

S.A.S. ENERGIE+, RCS de CRÉTEIL sous le n°880 529 896, placée sous le régime de la liquidation judiciaire selon jugement du 1er juin 2022 rendu par le TC de CRETEIL

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

Assistée par Me Patrick TARDIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : E831

INTIMEE

S.A.S. [C], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Stéphane FERTIER de l’AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

Assistée à l’audience par Me Cyril DELCOMBEL, avocat au barreau de LYON

PARTIE INTERVENANTE :

S.E.L.A.R.L. S21Y prise en la personne de Maître [M] [H] es qualité de liquidateur de la Société ENERGIE +

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

Assistée par Me Patrick TARDIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : E831

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 24 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Michèle CHOPIN, Conseillère, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

La société [C] est une société d’accompagnement dans la maîtrise de la consommation énergétique. Elle agit, dans ce cadre, pour inciter les particuliers, entreprises et collectivités, à réaliser des travaux d’amélioration de performance énergétique en leur versant des aides financières incitatives. Elle bénéficie pour cette activité de certificats d’économie d’énergie (CEE) résultant de ces travaux, qu’elle revend dans le cadre d’un marché contrôlé par le Pôle National des Certificats d’Economie d’Energie (PNCEE) sur la base d’un registre d’échange desdits « CEE » « Registre EMRY ».

L’aide, ou prime incitative destinée aux particuliers, bénéficiaires au final, est versée à des installateurs qui, en contrepartie, effectuent une remise d’au moins 53% de son montant sur leurs devis et factures des travaux d’économie d’énergie réalisés.

Les installateurs sont rémunérés, quant à eux, sur le solde de la prime qu’ils conservent. Une fois les travaux réalisés, l’installateur et son intermédiaire sont censés transmettre à la société [C], en retour, un dossier complet et conforme au dispositif des certificats d’économie d’énergie. Si les contrôles administratifs effectués sur pièces ne révèlent aucune irrégularité, la société [C] verse l’aide incitative à l’installateur ainsi que la commission à l’intermédiaire. Un contrôle sur site par échantillonnage est également effectué par un bureau de contrôle agréé COFRAC tandis que des contrôles sur site, a posteriori, peuvent être commandés dans les cas où un particulier bénéficiaire procéderait au signalement d’une anomalie.

La société [C] a conclu un contrat d’apporteur d’affaires avec la société FME le 11 avril 2019 qui lui a présenté plusieurs installateurs, dont la société Energie+ avec laquelle elle a conclu un contrat de partenariat, le 16 juillet 2020.

Dans le cadre de ce contrat, la société Energie+ a collecté et lui a transmis, via la société FME, plus de 320 dossiers qu’elle estimait valorisables au titre des certificats d’économie d’énergie. En contrepartie, la société [C] lui a versé les aides incitatives destinées aux particuliers bénéficiaires au final.

Suite aux signalements de particuliers, la société [C] a demandé au bureau de contrôle ONIS de réaliser des contrôles de la conformité d’une dizaine de dossiers. Ce bureau de contrôle a conclu à des non-conformités systématiques et a relevé de manière commune à tous les dossiers que les particuliers n’avaient jamais signé de devis avec la société Energie+, la signature fournie sur les devis n’étant pas la leur, et que la société Energie+ n’avait pas réalisé les travaux d’économie d’énergie, objets de l’aide incitative, ou alors les avait débutés sans les achever.

Un audit des 322 dossiers transmis par la société Energie+ a ensuite été lancé, qui a confirmé que, pour chacun des dossiers, les chantiers n’avaient pas été réalisés ou alors avaient seulement été commencés, que les aides incitatives qu’elle avait versées à la société Energie+ avaient été détournées de manière frauduleuse par cette dernière.

Par exploit du 30 novembre 2021, la société [C] a fait assigner la société Energie+ devant le président du tribunal de commerce de Créteil aux fins de la voir condamner au paiement de :

‘ la somme de 3.235.899,35 euros, à titre de provision, outre les intérêts à compter du 24 septembre 2021 avec capitalisation à chaque échéance annuelle ;

‘ 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance de référé du 13 avril 2022, le président du tribunal de commerce de Créteil a :

– ordonné le paiement, par provision, par la société Energie+, de la somme de 3.235.899,35 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2021 ;

– ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;

– condamné la partie défenderesse au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

– rejeté toutes autres demandes ;

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit ;

– liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 40,66 euros dont TVA 20%.

Par déclaration du 29 avril 2022, la société Energie+ a relevé appel de l’ensemble des chefs du dispositif de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 26 octobre 2022, la société Energie+ et la société S21Y ès-qualités de liquidateur de la société Energie + demandent à la cour de :

– donner acte à la société S21Y représentée par Me [H], prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Energie +, de son intervention volontaire ;

– juger l’appel recevable et bien fondé ;

– juger que la société [C] n’apporte pas la démonstration de la réalité d’une créance fondée en son principe, de sorte que l’obligation de la société Energie+ est sérieusement contestable ;

– en conséquence et au regard des contestations sérieuses soulevées par la société Energie+ ;

– infirmer l’ordonnance de référé du 13 avril 2022 prononcée par le président du de commerce de Créteil sous le n° de RG 2021R00367 ;

Et statuant à nouveau :

– dire le juge des référés incompétent pour faire droit à la demande de la société [C] qui sera déboutée de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

– juger en revanche que la société Energie+ est bien fondée à demander à la juridiction saisie toute mesure d’instruction lui permettant d’accéder aux éléments de preuve qui lui permettront d’assurer la défense loyale de ses intérêts ;

En conséquence,

– désigner tel expert informaticien qu’il plaira à la cour d’appel de nommer avec pour mission de :

‘ se rendre sur place dans les locaux de la société [C] ;

‘ se faire remettre les clés et codes informatiques permettant d’accéder à la plateforme « PROCEE » dédiée par la société [C] ;

‘ rechercher l’ensemble des dossiers, pièces, éléments comptables, historiques, photographies tels qu’ils ont été remis par la société Energie+ et déposés sur ladite plateforme soit directement à la société [C], soit par l’intermédiaire de la société FME, mandataire de la société [C] ;

‘ d’accéder à tous moyens permettant de vérifier les éventuels effacements ou modifications des dossiers de la société Energie+ avec datations de ces opérations ;

‘ dire que l’expert informaticien se fera assister de tel huissier de justice que la cour d’appel de céans voudra désigner qui aura pour mission de conserver les preuves ainsi recueillies par l’expert informaticien et ce, au moyen notamment de captures d’écran ou enregistrements sur clef USB ou CD ROM ;

– désigner également tel autre expert qu’il plaira à la cour d’appel de nommer ayant pour mission de :

‘ se rendre sur place dans les locaux de la société [C] ou sur les lieux d’exécution des travaux d’isolation réalisés par la société Energie+ pour lesquels la société [C] fait état de désordres ;

‘ se faire communiquer tous documents et pièces qu’il estimera utiles à l’accomplissement de sa mission, même détenus par des tiers, et entendre tous sachant ;

‘ décrire les travaux réalisés par la société Energie+ tels que listés par la société [C] ;

‘ examiner et décrire les désordres ou non-façons allégués par la société [C] ;

‘ fournir tous les éléments techniques et de faits de nature à permettre à la juridiction compétente de déterminer les responsabilités encourues notamment au regard de l’étendue des obligations contractuelles de la société Energie+ et au respect des règles de l’art ;

‘ évaluer à l’aide de devis produits par les parties et ayant fait l’objet d’un débat contradictoire, le coût des travaux rendus nécessaires par les malfaçons ou non façons en ce qu’elles seraient contractuellement à la charge de la société Energie+ ;

– débouter la société [C] de toutes ses demandes ;

– condamner la société [C] à payer à la société Energie+ la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Energie+ soutient en substance que :

– il est impossible que la société [C] ait pu être trompée sur l’antériorité et la réalité des travaux effectués,

– elle n’est intervenue qu’en qualité de sous-traitante de la société Isopi, titulaire de plusieurs marchés de travaux d’isolation auprès de particuliers propriétaires souhaitant bénéficier du dispositif CEE,

– ce n’est qu’à la suite de la défaillance de cette société que certains particuliers se sont dirigés vers elle et qu’elle a tenté de reconstituer des dossiers pour qu’ils puissent percevoir la prime « Renov » de l’agence nationale d’aide à l’habitation (ANAH),

– elle a été contrainte d’établir les devis de la société Isopi à son nom pour que ladite prime finance les travaux d’isolation, lesdits devis mentionnant le « reste à charge » pour les clients en ce qui concerne les finitions et travaux de ravalement,

– c’est bien en regard de la défaillance de la société Isopi et de l’ANAH que la société FME, mandataire, lui a proposé de reprendre en l’état la gestion des clients abandonnés par la société Isopi en signant un contrat de partenariat avec la société [C] pour que celle-ci puisse reprendre l’intégralité des dossiers de la société Isopi,

– la créance alléguée souffre de plusieurs contestations,

– la société [C] avait connaissance, contrairement à ce qu’elle soutient, de l’antériorité et de la réalité des travaux,

– les devis indiquaient au titre de la désignation des travaux « isolation thermique par l’extérieur – BAR en 102 », alors que les particuliers ne se sont plaints que de l’absence de finition en ce compris le ravalement alors même qu’elle n’en était pas contractuellement tenue, et qu’elle a pris soin de préciser, dans les devis de reprise que le montant concernant les travaux de ravalement et de finition restaient à charge,

– elle n’avait de relation qu’avec la société FME, mandataire de la société [C], à laquelle elle transmettait le dossier, complet, contenant les devis signés par la société Isopi et les devis de remplacement signés par ses soins, les documents administratifs et les photographies de l’avancement des travaux,

– elle a été réglée de ses factures par la société [C], ce qui atteste de la réalité des travaux qui ne peuvent être aujourd’hui considérés par la société [C] comme non terminés,

– les pièces versées aux débats par la société [C] n’apportent pas la preuve du caractère non sérieusement contestable de la créance, alors que les audits et contrôles n’ont pas été réalisés de manière contradictoire,

– compte tenu de la plainte déposée auprès du procureur de la république pour les mêmes faits la créance alléguée est d’autant plus sérieusement contestable que le juge pénal n’a pas encore statué,

– elle sollicite une mesure d’instruction puisque l’historique des dossiers est détenu par la société [C] sur la plateforme dédiée à cet effet et à laquelle elle lui a interdit l’accès, cette demande d’expertise n’étant pas nouvelle, contrairement à ce qu’affirme la société [C].

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 9 novembre 2022, la société [C] demande à la cour de :

– déclarer irrecevables les demandes des sociétés Energie+ et S21Y, représentée par Me [H], prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Energie + aux fins de désignation d’experts judiciaires ;

– débouter les sociétés Energie+ et S21Y, représentée par Me [H], prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Energie + de leur appel et intervention volontaire ainsi que de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

– confirmer la décision attaquée ;

– rejeter toutes prétentions contraires ;

– condamner les sociétés Energie+ et S21Y, représentée par Me [H], prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Energie +, à lui payer à la société [C] la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l’instance dont le recouvrement sera effectué par Me Fertier conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La société [C] soutient en substance que :

– la société FME n’est pas son mandataire comme le prétend la société Energie+ mais seulement son apporteur d’affaires,

– la demande de la société Energie+ portant sur une mesure d’instruction est dilatoire et fantaisiste mais aussi, au regard des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile, irrecevable puisque nouvelle en cause d’appel,

– subsidiairement sur ce point, elle ne présente aucun intérêt au regard de l’évidence des prétentions qu’elle présente et des moyens développés à leur soutien,

– la créance qu’elle détient n’est pas sérieusement contestable,

– il est incontestable que la société Energie+ a manqué à ses obligations contractuelles telles que visées à l’article 4 du contrat de partenariat conclu le 16 juillet 2020,

– la société Energie + n’a pas respecté ses obligations puisque les audits réalisés ont révélé que les 322 dossiers transmis présentaient des non-conformités à la réglementation au titre des CEE, que les travaux n’avaient pas été réalisés ou avaient été simplement commencés, ce, dans des conditions déplorables et en dépit du respect des règles de l’art,

– les audits réalisés ont également révélé que les travaux réalisés l’avaient été avant même la signature du contrat de partenariat du 16 juillet 2020, de sorte que la société appelante a indûment perçu la somme de 2.941,726,68 euros de sa part, alors que ces aides étaient destinées aux clients bénéficiaires,

– l’ensemble des développements de la société Energie+ sont totalement faux et varient selon les instances,

– concernant la société Isopi, dont la société Energie+ se prétend aujourd’hui la sous-traitante, l’appelante se contredit en affirmant qu’elle aurait repris les devis de la société Isopi à son nom alors qu’elle ne peut être à la fois sous-traitante et contractante principale des particuliers bénéficiaires et de la société [C],

– la société Energie+ n’était pas seulement tenue aux travaux d’isolation décrits dans la fiche d’opération standardisée Bar-en-102,

– les contrôles et audits ont été effectués par des bureaux de contrôles, organismes indépendants accrédités par le COFRAC (comité français d’accréditation) dont la mission est justement de réaliser les contrôles in situ des chantiers et de vérifier l’éligibilité des travaux aux exigences du dispositif CEE,

-contrairement à ce qu’affirme l’appelante, les contrôles qu’elle réalise avant le règlement ne sont qu’administratifs et sur pièces, de sorte qu’ils ne pouvaient pas révéler une quelconque anomalie – le fait que la société Energie+ ait été réglée de ses factures n’atteste pas de la réalité des travaux et de la conformité des dossiers transmis.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

L’article 873 du code de procédure civile dispose que le président peut même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

Il ressort pièces et écritures des parties que :

– la société [C] sollicite la restitution des aides financières versées à la société Energie + en application des stipulations du contrat de partenariat signé par les parties le 16 juillet 2020,

– la société Energie+ lui oppose des contestations qu’elle estime sérieuses en ce que la société Isopi dont elle a repris les devis et dont elle était sous-traitante, a été seule défaillante, en ce que les contrôles des travaux ont été effectués par la société FME, mandataire de la société [C], qui a validé les dossiers soumis, en ce que les finitions et ravalements ne lui incombaient pas, les articles 7 et 8 du contrat du 16 juillet 2020 s’opposant en outre à tout paiement.

La société Energie + invoque en réalité le caractère contestable de la créance, et estime tout d’abord que la seule défaillance est en réalité celle de la société Isopi dont elle a repris les devis, et reconstitué les dossiers pour que les particuliers, bénéficiaires au final, perçoivent la prime “Renov” de l’agence nationale d’aide à l’habitation (ANAH).

Toutefois, le contrat de partenariat avec la société [C] a bien été signé par la société Energie + qui, dans ces conditions, ne peut se prévaloir de sa qualité de sous-traitante de la société Isopi, cette qualité étant indifférente au litige, tandis qu’elle a, selon ses propres dires, “repris” les devis établis par la société Isopi à son nom, pour établir des devis de remplacement adressés par ses soins à la société [C], de sorte qu’elle est indiscutablement contractante de la société [C] et débitrice des obligations prévues par ce contrat.

Il ressort du contrat de partenariat du 16 juillet 2020 que :

– son article 4 prévoit que la société Energie + s’engage à “respecter la réglementation au titre des CEE, respecter les règles de l’art pour les travaux entrepris, respecter les clients bénéficiaires et appliquer les bonnes pratiques de vente ne nuisant pas à l’image de la société [C], transmettre les dossiers complets garantissant la véracité et l’authenticité des informations et éléments contenus, garantir la conformité des dossiers et la satisfaction des clients”,

– l’article 7 de ce contrat stipule qu’aucune prime n’est due en cas de non-conformité “relevée par le bureau de contrôle et n’ayant pas fait l’objet de mesure corrective validée par [C]”,

– l’article 8 de ce même contrat précise que “l’installateur s’engage à rembourser [C] de l’intégralité des sommes déjà versées, majorées d’une pénalité de 10%, en cas de rejet d’opérations CEE ou d’invalidation de CEE du fait de l’installateur, notamment (…) en cas de rejet de tout ou partie des opérations du dépôt par l’autorité compétente après contrôle ou demande de complément de cette dernière, en cas d’invalidation rétroactive des opérations de dépôt lors d’un contrôle ultérieur par les autorités compétentes, en cas d’audit par [C] portant constatation de l’irrecevabilité de la demande pour l’opération d’économies d’énergie en question, comme par exemple, sans que la liste soit exhaustive, en cas de doublon avec une demande déjà déposée ou en cas de non-respect des caractéristiques techniques demandées pour que l’opération d’économies d’énergie soit valide (…) [C] informera par tout moyen l’installateur des non-conformités détectées et adressera la facture correspondante à l’installateur qui en réglera le montant par virement bancaire sur le compte de [C] dans un délai de quinze jours”.

Il est incontestable tout d’abord que les travaux dont s’agit ont été réalisés avant la signature du contrat de partenariat, ce, en contradiction avec l’article 2 du contrat de partenariat qui lie les parties, lequel stipule que l’engagement d’aide financière pris par la société [C] doit être pris “antérieurement au déclenchement des travaux d’efficacité énergétique par le bénéficiaire”, alors que les devis dits “de remplacement” ont été établis pour leur part postérieurement à la signature de ce contrat.

L’article 2 cité précisant que “[C] garantit ainsi au PNCEE ou auprès de toute autorité administrative ou auprès de toute autorité administrative compétente son rôle actif et incitatif en amont de tout déclenchement d’action d’efficacité énergétique”, il s’en déduit que la société Energie + en établissant les devis de remplacement postérieurement aux travaux et au contrat de partenariat a placé la société [C] dans l’impossibilité de prendre un engagement d’aide financière antérieurement au déclenchement desdits travaux. Sur ce point encore, la société Energie + soutient vainement que la société [C] était informée de la situation alors qu’elle ne verse aux débats aucun élément, que le contrat de partenariat est muet sur le montage créé par la société Energie + et que l’ensemble des devis produits sont au nom de la société Energie + et non de la société Isopi.

Il résulte ensuite a minima du rapport d’audit du bureau Onis Contrôle que les dossiers transmis par la société Energie + sont affectés de non-conformités, caractérisées soit par la non- réalisation des travaux d’économies d’énergie soit par des travaux non poursuivis, ce qui, in fine, n’est pas contesté par la société Energie + qui indique en revanche que seuls les travaux d’isolation lui incombaient, les travaux de finition étant exclus et que les rapports d’audit ne lui sont pas opposables.

Il résulte des devis produits que les travaux d’isolation sont décrits dans une fiche standardisée “BAR EN 102” mais qu’ils comportent la mise en place d’une finition qui inclut “l’uniformisation du support avant l’enduit, la pose de sous-enduit sur ma trame de verre en deux couches, pose du régulateur du fond/ pose de l’enduit final”, ces informations étant reproduites dans les factures établies par la société Energie + elle-même. De la sorte, la société Energie + ne peut sérieusement soutenir que les travaux de finition ne lui incombaient pas, alors qu’elle les a manifestement réalisés au surplus.

Les rapports d’audit ont été établis par un bureau de contrôle Onis Contrôle, dont la société Energie + se contente d’affirmer qu’il serait lié à la société [C], alors que les vérifications ont été faites “in situ”, et qu’aucun élément précis ne permet de remettre en cause leur impartialité.

Force est de constater que la société Energie + ne conteste d’ailleurs pas les non-conformités relevées par ce bureau de contrôle.

Dans ces conditions, les stipulations des articles 7 et 8 du contrat étant claires et précises et prévoyant respectivement qu’aucune prime n’est due en cas de non-conformité “relevée par le bureau de contrôle et n’ayant pas fait l’objet de mesure corrective validée par [C]” (article 7), et que “l’installateur s’engage à rembourser [C] de l’intégralité des sommes déjà versées, majorées d’une pénalité de 10%, en cas de rejet d’opérations CEE ou d’invalidation de CEE du fait de l’installateur, notamment (…) en cas d’audit par [C] portant constatation de l’irrecevabilité de la demande pour l’opération d’économies d’énergie en question, comme par exemple, sans que la liste soit exhaustive, en cas de doublon avec une demande déjà déposée ou en cas de non-respect des caractéristiques techniques demandées pour que l’opération d’économies d’énergie soit valide ( article 8), l’obligation de la société Energie + de procéder au remboursement des sommes versées au titre des aides financières par la société [C], majorée d’une pénalité de 10%, n’est pas sérieusement contestable”.

Ainsi, au regard de l’ensemble de ces éléments, la demande de provision doit être accueillie, y compris celle relatives aux pénalités de retard, la société Energie + ayant failli à ses obligations issues du contrat de partenariat signé avec la société [C], étant observé que le quantum de la provision sollicitée est justifié par la société [C] et non contesté par la société Energie +.

S’agissant de la demande de la société Energie + tendant à voir ordonner une mesure d’instruction, une telle demande s’analyse sans difficulté comme étant l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de la demande principale au sens de l’article 566 du code de procédure civile, puisque visant à établir l’existence d’une contestation sérieuse. Cette demande est donc recevable.

Reste que la demande d’expertise, nécessairement fondée sur les dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, ne saurait pas plus prospérer, faute de motif légitime pour les motifs rappelés ci-avant, alors que, pour mémoire, la société Energie + ne conteste pas le quantum de la provision réclamée. Cette demande sera donc rejetée.

Il y a donc lieu de confirmer la décision du premier juge en toutes ses dispositions.

Le sort des dépens et des frais irrépétibles a été exactement tranché par le premier juge.

A hauteur d’appel, la société Energie + qui succombe sera condamnée aux dépens.

La société Energie + et la selarl S21Y, ès-qualités de liquidateur de la société Energie + seront condamnées à indemniser la société [C] de ses frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS,

Déclare recevable la demande d’expertise de la société Energie + ,

Rejette cette demande,

Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Rejette toute autre demande,

Condamne in solidum la selarl S21Y,ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Energie +, et la société Energie + à payer à la société [C] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la selarl S21Y, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Energie +, et la société Energie + aux dépens de l’appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x