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27 octobre 2011
Cour d’appel de Paris
RG n°
11/12812
Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 5
ARRET DU 27 OCTOBRE 2011
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 11/12812
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Mai 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2010091379
APPELANTE
SAS SOFIDIA
ayant son siège : [Adresse 1]
représentée par la SCP VERDUN – SEVENO, avoués à la Cour
assistée par Me Marie-Claude SIMON, avocat au barreau de NICE,
INTIMEES
SARL GROUPE CPS
ayant son siège : [Adresse 2]
SAS I-NESS
ayant son siège : [Adresse 2]
SAS JP SERVICES
ayant son siège : [Adresse 2]
représentées par la SCP MONIN ET D’AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour
assistées de Me Emmanuel DUJOUX de la SCP B.D.L.T., avocat au barreau de PARIS, toque : C 1577, substituant Me Marie-Hélène THOMAS, avocat au barreau de PARIS,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Septembre 2011, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente et Madame Patricia POMONTI, Conseillère chargée d’instruire l’affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Colette PERRIN, présidente
Madame Patricia POMONTI, conseillère
Madame Irène LUC, conseillère
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Anne BOISNARD
ARRET :
– contradictoire
– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Colette PERRIN, présidente et par Mademoiselle Anne BOISNARD, greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE
La société Sofidia exerçait deux activités : une activité commerciale directe en matière informatique, négoce, infogérance et une activité de holding pour sa filiale la société Diane Informatique Solutions (DIS).
La société Groupe CPS a été constituée en février 2008 avec pour objectif principal la création d’un groupe informatique permettant de couvrir le marché informatique de l’achat, l’installation et l’hébergement en matière informatique.
Dans le cadre de sa stratégie de développement horizontal, la société Groupe CPS, intéressée par l’activité d’infogérance exercée par la société DIS, s’est rapprochée des sociétés Sofidia et DIS en vue de leur rachat.
La société DIS a été déclarée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Reims en date du 3 juin 2008 et a été rachetée par la société Groupe CPS après autorisation du juge commissaire par ordonnance du 10 juin 2008.
Par acte sous seing privé du 10 juin 2008, un protocole de cession d’actions de la société Sofidia, avec mise en place d’un contrat d’agent commercial pour une durée de quatre années, a été signé avec la société Groupe CPS.
Par un nouvel acte sous seing privé du 7 juillet 2008, la société Groupe CPS a résilié le protocole du mois de juin, renoncé à l’acquisition de la participation au capital de la société Sofidia et le contrat d’agent commercial n’a pas été mis en place. Par contre, deux contrats intitulés, pour l’un contrat de prestations de services et pour l’autre contrat d’apporteur d’affaires, dit « partenariat commercial », ont été signés.
Par courrier du 8 décembre 2008, la société Groupe CPS a contesté le chiffre d’affaires réalisé et bloqué le règlement des factures Sofidia. Par courrier recommandé en date du 22 janvier 2009, celle-ci l’a alors mise en demeure de régler ces sommes.
Le 12 octobre 2009, le président du tribunal de grande instance de Marseille, statuant en référés, a rendu une ordonnance par laquelle il a constaté que l’appréciation de la faute de résiliation échappait à son pouvoir.
Le 21 juin 2010, la société Sofidia a été autorisée à assigner à jour fixe les sociétés défenderesses pour le 28 juin 2010. Par jugement du 16 septembre 2010, le tribunal de grande instance de Marseille a fait droit à l’exception d’incompétence soulevée par les défenderesses et a transmis le dossier au tribunal de commerce de Paris.
Par jugement du 6 mai 2011, assorti de l’exécution provisoire avec obligation pour la société Sofidia de constituer une garantie bancaire, le tribunal de commerce de Paris a condamné les sociétés Groupe CPS, I-Ness et JP Services solidairement à régler à la société Sofidia les sommes de 200.000 € au titre de la rupture brutale du contrat de prestation de services avec les intérêts au taux légal à compter de l’assignation et 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu l’appel de ce jugement interjeté le 8 juillet 2011 par la SAS Sofidia.
Vu la requête, afin d’être autorisée à interjeter appel et assigner à jour fixe, signifiée le 22 juillet 2011, présentée par la SAS Sofidia et l’autorisation donnée par ordonnance du 8 juillet 2011.
Par ses dernières conclusions signifiées le 14 septembre 2011, la SAS Sofidia demande à la Cour de :
– infirmer la décision contestée en ce qu’elle a limité la réparation du préjudice correspondant à la rupture brutale et abusive de contrats à durée déterminée de 4 années, à la somme de 200.000 €.
– constater que ces contrats étaient conclus pour une durée de quatre années avec des conditions de résiliation très restrictives.
– constater que nonobstant un travail extrêmement important réalisé par la société Sofidia en six mois d’activité comprenant deux mois de congés d’été les sociétés défenderesses ont procédé à une résiliation abusive et brutale de ces contrats, sans respect d’aucun préavis,
– constater que le préjudice subi par la société Sofidia est constitué par la perte des commissions prévues dans ces contrats, de la perte de toute activité et fonds de commerce, et du coût des licenciements qui a dû en résulter.
– condamner les sociétés Groupe CPS, I-Ness, et JP Services solidairement à procéder au règlement des sommes dont elles sont redevables et à ce titre les condamner :
à régler solidairement à la société Sofidia les sommes de 2.026.705 € et 500.000 € au titre des contrats dits de prestation de services et de partenariat commercial ;
à supporter solidairement le coût des licenciements des salariés de la société Sofidia résultat de cette résiliation abusive, à savoir 280.666 € et 100.000 €.
– dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l’assignation et prononcer l’anatocisme des intérêts au visa de l’article 1154 du Code civil.
– condamner solidairement les sociétés Groupe CPS, I-Ness et JP Services à régler à la société Sofidia une somme de 8.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Sofidia affirme que le contrat de prestation de services et celui de partenariat commercial constituaient des mandats d’intérêts communs car chacun des mandant et mandataire avait un intérêt personnel à mener à bonne fin la mission dont il était investi puisqu’il s’agissait de l’administration et de l’accroissement d’une clientèle auxquels le mandataire et le mandant avaient un intérêt direct.
La société Sofidia estime ne pas avoir commis de faute grave commise et fait valoir le non respect par les sociétés Groupe CPS, I-Ness et JP Services de leurs obligations et le caractère totalement injustifié de la rupture qui constitue une faute de leur part.
Par ailleurs, la société Sofidia fait état du caractère brutal de la rupture ayant aggravé son préjudice dans la mesure où elle a été empêchée de retrouver une activité afin de sauvegarder ses emplois.
La société Sofidia conteste la limitation du préjudice qui lui a été alloué à 200.000 €, considérant que cette somme ne couvre pas l’intégralité du préjudice subi au titre des contrats de prestations de services, de partenariat commercial ainsi que les indemnités de licenciement de ses employés.
Vu les dernières conclusions des sociétés Groupe CPS, I-Ness et JP Services du 12 septembre 2011 par lesquelles elles demandent à la cour de :
infirmant le jugement dont appel,
-juger que la société Sofidia a détourné un client, la société Sorral et un contrat appartenant à la société I-Ness,
-juger que MM. [M] et [T] ont tenté de détourner un client, la société Club Créateur de Beauté, dès le 29 janvier 2009, au profit d’une structure concurrente qu’il projetait de constituer, avant même la prétendue rupture des contrats litigieux par les concluantes,
-juger que la société Sofidia n’a pas fourni les prestations prévues dans le contrat de missions de prestations de services,
-juger que la société Sofidia a dénigré la société I-Ness,
-juger que les sociétés Groupe CPS, I-Ness et JP Services n’ont pas rompu le contrat de missions de prestation de services et le contrat de partenariat commercial,
-juger que les agissements de la société Sofidia ont légitimement entraîné une perte de confiance des sociétés Groupe CPS, I-Ness et JP Services envers la société Sofidia,
-juger que la société Groupe CPS était bien fondée à invoquer l’exception d’inexécution de ses prestations par la société Sofidia pour suspendre le paiement de la dernière facture émise par cette dernière au titre du contrat de mission de prestations de services dans l’attente de la livraison des prestations dues,
-juger que le rapport d’expertise de Monsieur [X], qui a été soumis à la discussion contradictoire des parties, a valeur de preuve et atteste de la non exécution de la société Sofidia au titre du contrat de mission de prestations de services,
-juger que la société Sofidia ne justifie pas du quantum de son préjudice,
-débouter la société Sofidia de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Reconventionnellement,
-condamner la société Sofidia à payer à la société Groupe CPS la somme de 402.470 € HT, soit 481.354,12 € TTC, au titre de la résolution du contrat de prestations de services,
-condamner la société Sofidia à payer à la société Groupe CPS la somme de 344.450 € à titre de dommages et intérêts,
-condamner la société Sofidia à payer à chacune des sociétés Groupe CPS, I-Ness et JP Services la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés intimées affirment que les deux contrats ont une nature distincte alors qu’ils n’ont pas le même objet, ni les mêmes parties et prévoient des modes de rémunération bien distincts et qu’il n’existe aucun mandat d’intérêt commun.
Elles font valoir qu’elles n’ont pas résilié le contrat de mission de prestations de services et l’accord de partenariat commercial mais qu’il y avait des causes légitimes de suspension du paiement des prestations prévues par les contrats, à savoir l’inexécution par la société Sofidia de ses prestations.
Elles ajoutent que, non seulement la société Sofidia s’est avérée incompétente mais, qu’en outre, elle a commis des agissements dolosifs, notamment en détournant des clients.
Elles estiment que la société Sofidia ne démontre aucun préjudice et demandent reconventionnellement restitution des sommes payées sans contrepartie.
La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
-Sur la nature des contrats :
La société Sofidia estime que les contrats qui l’unissaient aux sociétés du Groupe CPS constituaient des contrats à durée déterminée de quatre années qui représentaient une même et unique convention initialement conclue sous la forme d’un contrat d’agent commercial et, qu’en application de ces dispositions, elle entretenait et développait une clientèle, tant en matière d’info gérance qu’en matière de vente de matériel et prestations, pour le compte de ses mandantes.
Selon elle, il s’agissait en fait d’un même et unique contrat divisé artificiellement en deux contrats pour échapper aux clauses d’indemnisation et préparer la rupture déjà envisagée à ce stade. Ils constituaient un mandat d’intérêt commun.
Les sociétés du Groupe CPS répliquent que, consciente de n’avoir réalisé aucune prestation dans le cadre du contrat de mission de prestations de services mais seulement dans le cadre de l’accord de partenariat commercial, la société Sofidia allègue qu’il s’agirait d’un même et unique contrat divisé artificiellement de sorte que sa prestation aurait été globale alors qu’en réalité les deux contrats litigieux n’ont pas le même objet, ni les mêmes parties et prévoient des modes de rémunération bien distincts de sorte qu’ils ne sauraient être confondus, ayant d’ailleurs donné lieu à des paiements distincts.
Les deux contrats signés le 7 juillet 2008, objets du litige, sont des contrats à durée déterminée de quatre ans.
Le contrat de mission de prestations de service, conclu avec la seule société Groupe CPS, prévoyait que la société Sofidia devait aider la société I-Ness à développer et à promouvoir l’activité qu’elle venait d’acquérir de la société DIS liée à l’hébergement et à l’info-gérance en organisant les outils et le mode de fonctionnement.
La société Sofidia devait notamment ‘mettre en place les procédures de travail’, ‘analyser les performances techniques liées à l’info-gérance’, ‘rédiger les contrats types par métiers’,
‘réaliser des études de marché par segment et offres’, ‘rechercher des prospects’, ‘rédiger les propositions, les cahiers des charges et les solutions à proposer aux prospects’.
Pour ce faire, la société Sofidia avait pour obligation de :
-établir un rapport d’activité mensuel relatant les actions du mois écoulé,
-établir le prévisionnel des actions à entreprendre lors des 3 prochains mois,
-faire le bilan de la progression des actions,
-créer tous les contrats par tâches inclues dans le métier de l’info-gérance,
-développer la fonction liée au Help Desk,
-s’assurer de la bonne faisabilité d’un dossier client,
-donner périodiquement les tendances du marché et comparer son évolution prévisible avec l’évolution du Groupe CPS,
-assurer la veille technologique et concurrentielle.
L’accord de partenariat commercial a été conclu avec les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness, qui ont accordé à la société Sofidia, à titre non exclusif, le droit de commercialiser pour leur compte l’ensemble des produits commercialisés ou mis sur le marché par elles, soit :
-la vente de matériels et prestations de services en matière informatique et d’installation de la société JP Services,
-le financement et la location en matière informatique de la société CEFI,
-l’hébergement et l’info-gérance de la société I-Ness.
Il s’agit donc de contrats distincts n’ayant, ni le même objet, ni les mêmes parties et prévoyant des modes de rémunération bien distincts.
L’accord de partenariat commercial porte sur la vente des matériels et services proposés par les sociétés du Groupe CPS alors que le contrat de mission de prestations de service porte sur la construction d’une structure de production liée à l’activité d’info-gérance de la société I-Ness qui constituait une activité nouvelle pour le Groupe CPS.
Du fait de la liquidation judiciaire de la société DIS, filiale de la société Sofidia, et du fait du rachat judiciaire de son fonds de commerce et notamment de sa clientèle par la société I-Ness, créée à cet effet, l’achat des titres de la société Sofidia et la signature d’un contrat d’agent commercial avec elle, tel que prévu au protocole du 2 juin, modifié le 10 juin 2008, n’avait plus d’intérêt économique.
C’est pourquoi ledit protocole a été résilié d’un commun accord entre les parties et que le contrat d’agent commercial n’a jamais été conclu.
La société Sofidia ne peut donc prétendre que le contrat de mission de prestations de service et l’accord de partenariat commercial seraient un seul et unique contrat, à savoir le contrat d’agent commercial prévu dans le protocole d’accord résilié alors que les prestations prévues au contrat de mission de prestations de service n’ont aucun lien avec la fonction d’agent commercial.
Par ailleurs, par le contrat de mission de prestations de service, la société Groupe CPS n’a confié aucun mandat à la société Sofidia, qui n’avait aucun intérêt commun avec la société Groupe CPS, dès lors qu’était prévue une rémunération mensuelle fixe dégressive sans aucun lien avec la clientèle, de sorte que ce contrat ne saurait être qualifié de mandat d’intérêt commun.
-Sur la rupture des contrats :
La société Sofidia prétend que les sociétés intimées auraient brutalement rompu le contrat de mission de prestations de service et l’accord de partenariat commercial, en dehors des cas de résiliation anticipée limitativement prévus, six mois après leur conclusion, alors que les sociétés intimées croyaient avoir récupéré la clientèle.
Il convient de rappeler qu’un contrat, lorsqu’il a été conclu pour une durée déterminée, doit être exécuté jusqu’à son terme et que si la condition résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisferait point à son engagement, la résiliation doit être demandée en justice et est appréciée en fonction de la nature du contrat et de la réalité du manquement.
Les sociétés intimées ne peuvent raisonnablement soutenir qu’elles n’auraient jamais résilié les contrats litigieux mais qu’elle aurait simplement demandé à la société Sofidia l’exécution de sa mission et suspendu le paiement des prestations de janvier 2009 dans cette attente.
En effet, alors qu’en six mois d’activité aucune remarque sur un manquement quelconque n’avait été fait par les sociétés intimées (à l’exception peu caractérisée d’un email de Monsieur [B] de JP Services du 16 octobre 2008, manifestant quelques critiques d’ordre très général auxquelles il avait été répondu point par point par Sofidia), les sociétés du Groupe CPS ont brutalement, par courrier du 8 décembre 2008, contesté le chiffre d’affaires réalisé et bloqué le règlement des factures Sofidia émises en décembre, tant au titre des commissions des ventes qu’au titre des prestations de services et ce malgré l’engagement de les payer par emails des 18, 19 et 20 décembre 2008.
Elles ont également coupé brutalement, du jour au lendemain, le système informatique, qui contenait l’ensemble des données qui y avaient été intégrées, pour interdire à la société Sofidia toute réalisation de ses missions et accès aux documents et ont même refusé l’accès au système informatique à l’expert comptable de Sofidia en lui indiquant que ‘l’informatique et l’internet de Sofidia seraient coupés dans l’après midi’, lui conseillant ‘d’arrêter de s’occuper de ce client’ car ‘cette société ne pourrait plus payer’ ses ‘honoraires’.
Elles ont envoyé le 22 janvier 2009 un huissier pour récupérer les originaux des contrats clients qu’elle avait en réalité déjà repris en décembre 2008 et dénigré la société Sofidia auprès de fournisseurs, de tiers et de clients.
En bloquant les commissions dues à la société Sofidia et lui supprimant brutalement l’accès informatique, six mois après le commencement d’exécution du contrat, les sociétés intimées, qui représentaient 100 % de son activité, la mettaient dans l’impossibilité de poursuivre sa mission, l’obligeaient à licencier ses salariés qu’elle ne pouvait pas régler (en janvier 2009).
C’est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu que les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness avaient pris l’initiative d’une rupture contractuelle intervenue de fait, la rupture du contrat de prestations de service entraînant nécessairement la rupture du partenariat commercial.
Or, pour justifier une telle rupture unilatérale de ces contrats à durée déterminée, les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness auraient dû faire la démonstration d’une grave défaillance de la société Sofidia dans l’exécution de ses prestations, une simple insuffisance ou la non obtention de certains résultats étant insuffisants pour constituer la faute grave justifiant la rupture.
Au contraire, la société Sofidia démontre qu’elle a réalisé, en six mois, un important travail, réalisant un chiffre d’affaires performant, aboutissant à la conclusion ou au renouvellement de nombreux contrats.
Elle a également procédé à la rédaction de contrats types par métiers, avec des comptes rendus journaliers par courriers électroniques.
La rupture ne peut être justifiée, ni par la dénonciation normale, à l’arrivée du terme des contrats d’info-gérance, ni par le non-renouvellement de certains contrats dû à des événements extérieurs au travail fourni par la société Sofidia.
Les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness ne peuvent pas plus se prévaloir d’agissements dolosifs de la société Sofidia qui ne sont pas avérés.
S’agissant plus particulièrement du rachat du fonds de commerce de la société DIS, outre le fait que ce fonds a été racheté sur ordonnance du juge commissaire dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société DIS, ce qui exclut l’application des dispositions relatives au dol, il ya lieu d’observer que les sociétés repreneuses ont disposé de l’ensemble des informations nécessaires pour apprécier l’intérêt de l’acquisition, notamment relatives à l’échéance des contrats qu’elles ont repris.
Par ailleurs, la preuve du détournement des clients société Sorral, société Club des Créateurs de Beauté, société Knauf, société Afflelou n’est pas rapportée.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que les sociétés intimées sont responsables de la rupture du contrat de mission de prestations de service et l’accord de partenariat commercial.
Il s’agit incontestablement d’une rupture brutale puisque, d’une part, la société Sofidia s’est trouvée privée sans préavis de ses moyens de fonctionnement et, d’autre part, elle pensait légitimement être assurée de relations commerciales avec le Groupe CPS pendant toute la durée des contrats à durée déterminée, soit quatre ans.
Les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness doivent donc l’indemniser du préjudice subi du fait de cette rupture brutale.
-Sur le préjudice de la société Sofidia :
La société Sofidia estime son préjudice à la somme totale de 2.915.371 € se décomposant comme suit :
-montant restant à payer sur le contrat de prestation de services : 2.026.705 €
-la perte des commissions sur le contrat de partenariat : 500.000 €
-la prise en charge du montant des indemnités de licenciement de 288.666 € pour Monsieur [T] et 100.000 € pour Monsieur [Z].
Les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness contestent ce préjudice en se fondant sur un rapport d’expertise privé de Monsieur [X], expert-comptable, commissaire aux comptes du 9 septembre 2011.
Ce rapport, non contradictoire, a été produit aux débats et a donc pu être discuté par la société Sofidia de sorte qu’il lui est opposable et ses éléments peuvent, entre autres, être utiles à l’appréciation du préjudice de l’appelante.
Le montant restant à payer sur le contrat de prestation de services, soit 2.026.705 € est incontestablement dû puisqu’il aurait été payé par les sociétés intimées si elles n’avaient pas rompu brutalement et abusivement le contrat.
S’agissant de la perte des commissions sur le contrat de partenariat commercial, il ne peut s’agir que d’une perte de chance d’encaisser des commissions pendant la durée restant à courir du contrat, soit 42 mois, sachant que pendant la période d’exécution du contrat, la société Sofidia a encaissé environ 20.000 €.
En fonction de ces éléments, la perte de chance d’encaisser des commissions au titre du contrat de partenariat commercial peut être estimée à 100.000 €.
Il ne peut être reproché à la société Sofidia une absence de recherches de solutions de remplacement, d’une part compte tenu de la brutalité de la rupture, d’autre part et surtout, au regard de la dépendance économique dans laquelle se trouvait la société Sofidia à l’égard de ses cocontractants au moment de la rupture, ces derniers représentant 100 % de son activité.
Par contre, la société Sofidia ne peut réclamer la prise en charge du montant des indemnités de licenciement de Monsieur [T] et de Monsieur [Z] par les sociétés intimées, ce préjudice se confondant avec l’indemnisation déjà allouée au titre de la perte des contrats, l’ensemble des frais de fonctionnement de l’appelante étant nécessairement inclus dans le coût des prestations mises à la charge de son cocontractant.
Les montants mis à la charge des intimées doivent être assortis des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, s’agissant de dommages et intérêts.
Il convient en outre d’ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil.
-Sur les autres demandes :
Compte tenu des motifs ci-dessus développés, les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness ne peuvent qu’être déboutées de l’intégralité de leurs demandes reconventionnelles.
L’équité commande d’allouer à la société Sofidia une indemnité de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le montant du préjudice subi par la SAS Sofidia,
Statuant à nouveau sur ce point,
CONDAMNE les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness à payer à la SAS Sofidia les sommes de 2.026.705 € au titre du contrat de prestation de services et de 100.000 € au titre du contrat de partenariat commercial, avec les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil,
DEBOUTE les parties de leurs plus amples demandes,
CONDAMNE les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness à payer à la SAS Sofidia la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE les sociétés Groupe CPS, JP Services, CEFI et I-Ness aux dépens d’appel,
AUTORISE la SCP Verdun Seveno, avoué, à recouvrer directement les dépens d’appel conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier
A. BOISNARD
La Présidente
C. PERRIN