Contrat d’agent commercial : 8 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/01192

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Contrat d’agent commercial : 8 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/01192
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 3

ARRET DU 08 MARS 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/01192 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBNUC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2019 – Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de PARIS – RG n° 16/10783

APPELANT

Monsieur [Y] [B]

[Adresse 2]

[Localité 4] LUXEMBOURG

Représenté par Me Chaouki GADADA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0739

INTIMEE

S.A.R.L. KACIUS

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Frédéric INGOLD, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Véronique MARMORAT, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Véronique MARMORAT, présidente

Madame Fabienne ROUGE, présidente

Madame Anne MENARD, présidente

Lors des débats : Madame Sarah SEBBAK, greffière stagiaire en préaffectation sur poste

ARRÊT :

– contradictoire

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Véronique MARMORAT, présidente et par Madame Sarah SEBBAK, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Après avoir exercé en tant qu’agent commercial mandataire selon un contrat du 11 septembre 2013, avec effet au 27 août 2013 pour la société Kacius, exerçant une activité de courtier en assurance et de conseil de gestion de patrimoine, monsieur [Y] [B], né le 30 août 1988 a été embauché par cette même société selon un contrat à durée déterminée en date du 1er septembre 2015 pour une durée de 12 mois en qualité de responsable partenaire, prescripteur ayant une rémunération moyenne brute égale à la somme de 2 450 euros.

Le 9 février 2016, monsieur [B] formule la prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur et saisit le 21 octobre 2016 en requalification de son contrat d’agent commercial et en diverses demandes indemnitaires et salariales le Conseil des prud’hommes de Paris lequel, statuant en formation de départage, par jugement du 4 décembre 2019 a rejeté l’exception d’incompétence formée par l’employeur, déclaré irrecevables les demandes d’indemnité pour travail dissimulé et en paiement de commissions à titre de salaire, débouté monsieur [B] de toutes ses autres demandes tant principales qu’accessoires et condamné celui-ci aux dépens.

Monsieur [B] a interjeté appel de cette décision le 11 février 2020.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 18 septembre 2020, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, monsieur [B] demande à la Cour de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence et de l’infirmer pour le surplus et statuant à nouveau de :

Requalifier le contrat d’agent commercial de monsieur [B] en contrat de travail.

Requalifier la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de monsieur [B] en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Constater le non-paiement des commissions dues à monsieur [B] par la société Kacius.

En conséquence, condamner la société Kacius à payer à monsieur [B] les sommes suivantes :

titre

montant en euros

dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

24 5000

indemnité conventionnelle de licenciement

1 029

indemnité compensatrice de préavis

congés payés afférents

7 350

735

rappels de salaires pour commissions non payées

21 317,60

indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

14 700

article 700 du code de procédure civile

2 500

Ordonner à la société Kacius de lui remettre des documents de fin de contrat, à avoir du certificat de travail, reçu pour solde de tout compte et attestation Pôle emploi, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document, à compter du lendemain du prononcé de l’arrêt.

Dans ses conclusions signifiées par voie électronique 29 août 2022 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société Kacius demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence formée par la société Kacius, et le réformer de ce chef.

En conséquence, statuant à nouveau de :

Déclarer monsieur [B] irrecevable et la juridiction prud’homale incompétente au profit du tribunal judiciaire de Paris pour trancher le litige opposant les parties, né à l’occasion du contrat d’agent commercial et, plus généralement, pour la période courant du 27 août 2013 au 31 août 2015.

Débouter monsieur [B] de toutes ses demandes.

Le condamner aux dépens dont distraction au profit de la Selarl Ingold & Thomas, représentée par maître Frédéric Ingold, en application de l’article 699 du code de procédure civile et à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

MOTIFS

Sur l’exception d’incompétence

Principe de droit applicable :

Selon l’article L 1411-1 du code du travail, le conseil de prud’hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu’ils emploient.

Application en l’espèce

La société Kacius prétend que l’exception d’incompétence, soulevée en première instance, devant le conseil de prud’hommes de Paris, est bien fondée dans la mesure où elle ne démontre pas l’existence d’un contrat de travail et que le mandat d’agent commercial a un caractère civil imposant la saisine du seul tribunal judiciaire.

En l’espèce, l’objet du litige est principalement de décider ci le contrat d’agent commercial peut être requalifier en contrat de travail et qu’en conséquence, il convient d’examiner ce litige afin de trancher cette question qui ne regarde que le juge du contrat de travail.

En conséquence, il convient de rejeter cette exception.

Sur la requalification du contrat d’agent et ses effets

Principe de droit applicable :

La relation salariale suppose la fourniture d’un travail en contrepartie du versement d’une rémunération, ainsi que l’existence d’un lien de subordination entre l’employeur et le salarié.

L’absence de rémunération n’exclut pas l’existence d’un contrat de travail dès lors que le lien de subordination, caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, est établi.

C’est à celui qui se prévaut de l’existence d’un contrat de travail d’en rapporter la preuve, qui peut se faire par tous moyens.

Application en l’espèce

Monsieur [B], soutient qu’il aurait exercé son activité dans le cadre du service organisé mis en place par la société Kacius puisqu’il aurait été intégré au sein d’une équipe de conseillers en gestion de patrimoine, il aurait à sa disposition des éléments matériels nécessaires à son activité, il serait présent dans les locaux de l’entreprise, sa présence serait obligatoire à des réunions hebdomadaires et il devait rendre compte de son activité, il aurait été mis en concurrence avec d’autres agents commerciaux de la société Kacius et enfin, il serait tenu d’une obligation de respecter les directives de ventes fixées par la société Kacius. Il explique avoir été soumis au pouvoir de direction et au pouvoir disciplinaire de l’employeur puisque selon lui, il était astreint à un objectif de chiffre d’affaires minimum et aurait été placé sous la dépendance économique de la société Kacius puisqu’il affirme n’avoir travaillé que pour elle du 27 août 2013 au 1er septembre 2015.

Or, selon l’article L 8331-6 du code du travail, dans sa version applicable, sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription :

1° Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales.

Cette présomption d’absence de contrat de travail pour les agents commerciaux s’applique à la présente espèce pour la période pour laquelle est demandée la requalification soit à compter de la date d’effet soit le 27 août 2014 du contrat d’agence commercial signé les 25 et 28 novembre 2013.

Ce contrat prévoit en son article 1-3 que monsieur [B], prend l’engagement de s’inscrire au registre spécial des agents commerciaux dès la signature de celui-ci.

Or les pièces de la procédure établissent que ce n’est que le 14 avril 2014 que le salarié s’est inscrit sur ce registre avec un début d’activité le 8 avril 2014. Cette inscription tardive avec une date erronée de début d’activité est le fait de monsieur [B] seul et ne peut entraîner un quelconque effet juridique sur la nature du contrat et la présomption établie par l’article L 8331-6 du code du travail.

Par ailleurs, les arguments présentés par le salarié relève de la stricte application du contrat qui prévoit notamment le lieu d’exercice, le matériel fourni, la définition des objectifs et le calcul de la rémunération en fonction du nombre de ventes effectuée.

Les autres pièces produites par le salarié soit quelques courriels lui rappelant des rendez-vous, la nécessité d’assister aux réunions commerciales, des félicitations pour ses bons résultats, une attestation illisible et une autre faisant état d’un travail concerté avec le donneur d’ordre ne sont pas susceptible de combattre cette présomption.

Enfin, comme l’ont justement souligné les premiers juges, le contrat à durée déterminée signé le 1er septembre 2015 concerne un poste aux attributions très différentes s’agissant essentiellement du développement du partenariat cgpi ainsi d’ailleurs que monsieur [B], le présente dans son profil professionnel.

En conséquence, il convient de confirmer la décision du Conseil des prud’hommes qui a déclaré irrecevables la demande d’indemnité pour travail dissimulé et la demande en paiement de commission à titre de salarié et débouté le salarié de sa demande de requalification.

Sur la rupture du contrat à durée déterminée

Principe de droit applicable :

Les manquements de l’employeur susceptibles de justifier la résiliation judiciaire à ses torts doivent être d’une gravité suffisante. La résiliation judiciaire aux torts de l’employeur produit les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Lorsqu’un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d’autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée. C’est seulement dans le cas contraire qu’il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l’employeur.

Lorsque le salarié n’est plus au service de son employeur au jour où il est statué sur la demande de résiliation judiciaire, cette dernière prend effet, si le juge la prononce, au jour du licenciement.

Application en l’espèce

La lettre de prise d’acte en date du 9 février 2016 de monsieur [B], est rédigé dans les termes suivants:

” Compte tenu de votre manquement à l’obligation de sécurité de résultat en matière de prévention de la santé des salariés pour ne pas avoir organisé les visites médicales auprès de la médecine du travail.

Compte tenu du non paiement de certaines commissions malgré mes multiples relances et ce pleine connaissance de ma situation personnelle et financières.

Compte tenu des multiples reproches qui ont pu m’être faites devant mes collègues ou en privé.

Et étant donné que ces éléments additionnels m’ont mené à arrêter de travailler sur avis médical du mercredi 3 février au lundi 8 février inclus, je vous informe de la rupture unilatérale qui nous lie.”

Mis à part les visites médicales dont l’employeur ne justifient pas et dont l’absence n’a pas causé de préjudice au salarié, la cour relève que la question des commissions n’est pas relative à l’exécution du contrat à durée déterminée et que le salarié ne produit aucune pièce relative aux multiples reproches qu’il aurait subi ni concernant son arrêt de travail.

Enfin, les pièces de la procédure et en particulier son profil professionnel permettent de constater que monsieur [B] a été embauché ce même mois de février 2016 par la société Bnp-Paribas.

En conséquence, cette prise d’acte ne peut avoir que l’effet d’une démission.

Le jugement entrepris sera également confirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l’article 450 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions.

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE monsieur [B] à verser à la société Kacius la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.

CONDAMNE monsieur [B], dont distraction au profit de la Selarl Ingold & Thomas, représentée par maître Frédéric Ingold, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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