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N° R.G. Cour : N° RG 23/00040 – N° Portalis DBVX-V-B7H-O2IL
COUR D’APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DE REFERE
DU 22 Mai 2023
DEMANDERESSE :
S.A.R.L. GROUPE SOGEFIM
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Elsa SOMAT substituant Me Laurent BURGY de la SELARL LINK ASSOCIES, avocat au barreau de LYON (toque 1748)
DEFENDEUR :
M. [I] [X] exerçant sous le nom commercial [X] CONSULTANT immatriculé
au RCS de NICE sous le numéro 482 687 340
[Adresse 3]
[Localité 1]
avocat postulant : la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
(toque 475)
avocat plaidant : Me Jocelyn GOUBET (AARPI FOURGOUX DJAVADI FDA), avocat au barreau de Paris)
Audience de plaidoiries du 24 Avril 2023
DEBATS : audience publique du 24 Avril 2023 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 janvier 2023, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée publiquement le 22 Mai 2023 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;
signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
””
EXPOSE DU LITIGE
M. [I] [X] a conclu avec la S.A.R.L. Groupe Sogefim (Sogefim) un contrat d’agent commercial à durée indéterminée, dont la prise d’effet était au 25 janvier 2018. Le 18 juillet 2019, il a reçu un courrier de résiliation pour tentatives de détournement d’autres conseillers et pour des malversations.
Par acte du 6 février 2020, M. [X] a fait assigner la société Sogefim devant le tribunal de commerce de Paris, lequel s’est déclaré incompétent par jugement du 30 septembre 2020.
Par jugement contradictoire du 29 mars 2022, le tribunal de commerce de Lyon a notamment :
– condamné la société Sogefim à payer à M. [X] les sommes suivantes :
5 406 € HT au titre de préavis,
24 328,50 € HT au titre d’indemnité de fin de contrat,
1 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamné M. [X] à rembourser à la société Sogefim la somme de 2 000 € au titre d’acompte client encaissé à tort et dit que cette somme sera déduite des sommes dues par la société Sogefim à M. [X],
– condamné la société Sogefim aux entiers dépens.
La société Sogefim a interjeté appel de ce jugement le 12 avril 2022.
Par assignation en référé délivrée le 14 février 2023 à M. [I], elle a saisi le premier président afin d’arrêter l’exécution provisoire et d’obtenir la condamnation de M. [X] à payer la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’à supporter les dépens.
A l’audience du 24 avril 2023 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s’en sont remises à leurs écritures, qu’elles ont soutenues oralement.
Dans son assignation, la société Sogefim invoque les dispositions de l’article 514-3 du Code de procédure civile et affirme qu’elle a expressément formulé la demande de voir écarter l’exécution provisoire en première instance.
Elle prétend qu’il existe des moyens sérieux de réformation tenant au fait que le délai
de préavis préalablement à la résiliation d’un contrat d’agent commercial n’a pas vocation à s’appliquer lorsque le contrat prend fin pour faute grave, faute qu’elle estime commise par M. [X] notamment du fait d’un manquement à l’obligation de loyauté.
Elle soutient que l’indemnité de rupture n’est pas due, le contrat ayant cessé en raison de fautes graves commises par M. [X].
Elle affirme l’existence de conséquences manifestement excessives tenant au fait qu’elle n’a pas la capacité de faire face au montant des condamnations compte tenu des conséquences financières qu’a entraîné la crise sanitaire.
Elle craint également un risque de non remboursement des sommes en cas de réformation du jugement par M. [X] qui ne perçoit aucun revenu et ne dispose d’aucun patrimoine à son actif.
Par conclusions déposées au greffe par RPVA le 3 mars 2023, M. [X] demande au délégué du premier président de rejeter la demande d’arrêt de l’exécution provisoire et de condamner la société Sogefim à verser la somme de 7 000 € à M. [X] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
Il conteste la qualification de faute grave invoquée par la société Sogefim et affirme qu’elle ne rapporte la preuve ni du développement d’une activité concurrente, ni du détournement des conseillers de la société Sogefim.
Il affirme qu’elle ne rapporte pas non plus la preuve du fait qu’il aurait conservé des chèques sans provision et des fonds en pièces.
Il relève que l’appréciation de la situation économique et financière de la société Sogefim est délicate eu égard à la déclaration de confidentialité et que la seule attestation comptable ne permet pas de refléter la réalité de la situation économique et financière de la société Sogefim.
Il indique qu’il est salarié depuis le 17 juillet 2020 de la société Ogram dans laquelle il occupe le poste de directeur au titre d’un contrat de travail à durée indéterminée.
Dans ses conclusions déposées au greffe par RPVA le 7 avril 2023, la société Sogefim maintient ses demandes.
Elle soutient que M. [X] a exercé son activité d’agent commercial durant au moins un an, sur le même secteur géographique que celui de la société Sogefim.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe par RPVA le 21 avril 2023, M. [X] maintient ses demandes et relève que la société Sogefim ne remet plus en cause le règlement par le chèque établi par Mme [N].
Il soutient que la nouvelle attestation du comptable de la société Sogefim est une attestation fictive qui rassemble les mêmes caractéristiques que la précédente.
Les parties ayant été autorisées à déposer des notes en délibéré, la société Sogefim, dans celle reçue au greffe le 5 mai 2023 par RPVA, entend attirer l’attention sur les garanties de solvabilité et la situation personnelle de M. [X] qui se limite à produire une attestation de son employeur et nie pas ne détenir aucun patrimoine. Elle ajoute qu’aucune pièce ne justifie de la situation financière de la société Ogram.
Dans sa note en délibéré reçue au greffe par RPVA le 9 mai 2023, M. [X] explique les motifs de sa production d’une nouvelle attestation de son employeur et considère sans fondement les critiques émises par la société Sogefim. Il relève que la demanderesse défaille à fournir la preuve des conditions cumulatives de l’article 514-3 du Code de procédure civile et que le conseiller de la mise en état dans sa décision du 3 janvier 2023 avait déjà fait état du caractère elliptique des éléments alors fournis pour faire état des conséquences manifestement excessives.
Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l’exposé des moyens à l’énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.
MOTIFS
Attendu que l’exécution provisoire de droit dont est assorti le jugement rendu le 29 mars 2022 par le tribunal de commerce de Lyon ne peut être arrêtée, que conformément aux dispositions de l’article 514-3 du Code de procédure civile, et lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives ; que ces deux conditions sont cumulatives ;
Attendu que s’agissant de l’existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu’il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue en fonction des facultés de remboursement de l’intimé si la décision était infirmée, mais également de la situation personnelle et financière du débiteur ;
Qu’en outre, le caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d’une condamnation au paiement d’une somme d’argent ou d’une décision autorisant l’expulsion, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;
Attendu qu’il appartient à la société Sogefim de rapporter la preuve de ces risques occasionnés par l’exécution provisoire et elle n’est pas fondée à exiger de M. [X] qu’il fournisse la preuve de garanties de remboursement en cas d’infirmation ;
Attendu que la société Sogefim n’est tout d’abord pas fondée à se prévaloir principalement d’une impossibilité d’exécuter la décision assortie de l’exécution provisoire, qui constitue un critère prévu pour faire écarter la demande de radiation de l’instance d’appel et qui est insusceptible de caractériser à elle-seule un risque de conséquences manifestement excessives ;
Que cette demanderesse fait état d’une situation financière qui ne lui permet pas de faire face aux condamnations prononcées par le tribunal de commerce de Lyon et produit à cet effet :
– ses bilans simplifiés et comptes de résultat pour les exercices 2020 et 2021,
– deux attestations d’expert comptable datées des 14 octobre 2022 et 17 mars 2023 ;
Attendu que si un résultat négatif de 13 767 € a été enregistré pour l’exercice 2020, un bénéfice de 20 946 € a été noté pour l’exercice 2021 ; que la dernière attestation d’expert-comptable du 13 mars 2023 fait état des chiffres d’affaires pour les trois derniers exercices, avec une baisse de celui enregistré en 2022 sans préciser le résultat prévu pour cette année ;
Attendu que si ces attestations d’expert comptable font état de soldes débiteurs du compte de la société sur la fin de l’année 2022 et jusqu’au 28 février 2023, ces éléments sont taisants sur les éventuelles ouvertures de découvert autorisées et en particulier sur la capacité de la société Sogefim à disposer d’un crédit supplémentaire ;
que les éléments comptables produits sont impropres à refléter ses capacités financières ;
Que l’incapacité alléguée de supporter de nouvelles dettes n’est ainsi pas susceptible de caractériser un risque de conséquences manifestement excessives, en l’absence invoquée de voies d’exécution de nature à priver cette société de ressources qu’elle dit ne pas avoir à sa disposition ;
Attendu que la société Sogefim fait état d’un risque de non-restitution par M. [X], au regard d’une situation économique dite instable et d’une absence de garantie de remboursement ; que ce risque est réputé ne pas pouvoir survenir en l’état de l’affirmation d’une impossibilité de couvrir les condamnations ;
Que M. [X] produit de son côté des éléments faisant état de l’existence d’un salaire brut mensuel de plus de 4 000 €, élément qui n’est pas de nature à inquiéter sur ses capacités à supporter le cas échéant le remboursement d’une somme totale de 30 734,50 € ;
Attendu qu’en l’état de cette carence à établir des conséquences disproportionnées et irréversibles de l’exécution provisoire et sans qu’il soit besoin d’apprécier le sérieux des moyens de réformation qu’elle articule, la demande d’arrêt de l’exécution provisoire présentée par la société Sogefim est rejetée ;
Attendu que la société Sogefim succombe et doit supporter les dépens de ce référé comme indemniser son adversaire des frais irrépétibles engagés pour assurer sa défense ;
PAR CES MOTIFS
Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,
Vu la déclaration d’appel du 12 avril 2022,
Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire présentée par la S.A.R.L. Groupe Sogefim,
Condamnons la S.A.R.L. Groupe Sogefim aux dépens de ce référé et à verser à M. [I] [X] la somme de 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE