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ARRET N°214
CP/KP
N° RG 22/00473 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GPLB
S.A.S.U. BLI MACHINE OUTILS
C/
[J]
[J]
[J]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 16 MAI 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00473 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GPLB
Décision déférée à la Cour : jugement du 03 janvier 2022 rendu par le Tribunal de Commerce de POITIERS.
APPELANTE :
S.A.S.U. BLI MACHINE OUTILS prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège.
[Adresse 1]
[Localité 4]
Ayant pour avocat postulant Me Isabelle LOUBEYRE de la SCP EQUITALIA, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Philippe LEFEVRE, avocat au barreau de LILLE.
INTIMES :
Monsieur [V] [J] entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne JM CONSULTING
[Adresse 2]
[Localité 3]
Ayant pour avocat postulant Me Florent BACLE de la SARL BACLE BARROUX AVOCATS, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Laurent MALO, avocat au barreau de BAYONNE.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 27 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Cedric LECLER, Conseiller
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 07 février 2014, la SAS BLI MACHINE OUTILS, spécialisée dans la commercialisation de machines-outils, a signé un contrat d’agent commercial avec la SASU JM CONSULTING, prise en la personne de son Président, Monsieur [V] [J].
Le 30 novembre 2017, les parties ont mis fin au contrat d’agent commercial.
En 2018, Monsieur [V] [J] a procédé à la liquidation amiable de la société JM CONSULTING dont la dissolution est intervenue le 26 octobre 2018.
De décembre 2018 à septembre 2019, Monsieur [V] [J] a exercé son activité en nom propre sous l’enseigne JM CONSULTING. Il a ainsi facturé des commissions à la société BLI MACHINE OUTILS.
Par requête en injonction de payer adressée au président du tribunal de commerce de Poitiers le 4 mars 2020, Monsieur [V] [J] a demandé à la société BLI MACHINE OUTILS le paiement de la somme de 2.805 euros en principal et de 18 euros de frais accessoires au titre d’une facture impayée.
Le 03 février 2021, le président du tribunal de commerce de Bayonne a nommé Monsieur [V] [J] mandataire ad hoc de la SASU JM CONSULTING.
Par ordonnance du 16 avril 2020, signifiée à la société BLI MACHINE OUTILS le 11 juin 2020, le président du tribunal de commerce de Poitiers a fait droit à la requête de Monsieur [V] [J].
Le 16 juin 2020, la société BLI MACHINE OUTILS a formé opposition contre cette injonction de payer au motif que la société JM CONSULTING serait elle-même redevable à son égard de la somme de 157.500 euros au titre d’avances consenties pendant la durée du contrat d’agent commercial.
Par jugement en date du 3 janvier 2022, le tribunal de commerce de POITIERS a statué ainsi :
– Dit que Monsieur [V] [J] est recevable en ses demandes ;
– Condamne la S.A.S.U. BLI Machine outils à régler à Monsieur [V] [J] la somme de 2.805 € en règlement du solde de la facture 19/002 du 29 mars 2019 ;
– Déboute Monsieur [V] [J] de sa demande d’indemnité de rupture du contrat d’agent commercial qui liait la S.A.S.U JM CONSULTING et la S.A.S.U BLI Machine outils ;
– Déboute Monsieur [V] [J] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
– Déboute la S.A.S.U. BLI Machine outils de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
– Condamne la S.A.S.U. BLI Machine Outils à verser à Monsieur [V] [J] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamne la S.A.S.U. BLI Machine Outils qui succombe aux entiers dépens de l’instance comprenant notamment les frais de greffe liquidés à la somme de 105,46 € TTC.
Par déclaration en date du 18 février 2022, la société BLI MACHINE OUTILS a fait appel de cette décision en visant les chefs expressément critiqués en intimant [V] [J] pris en sa qualité d’entrepreneur individuel de la SASU JM CONSULTING, de liquidateur amiable ainsi que de mandataire ad hoc de ladite société.
La société BLI MACHINE OUTILS, par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 12 septembre 2022, demande à la cour de :
Vu l’article 117 du Code de procédure civile,
Vu l’article L237-12 du Code de commerce,
Vu l’article L110-4 du Code de commerce,
Vu l’article 495 du Code de procédure civile,
Sur l’appel principal
– Déclarer recevable et bien fondé l’appel de la société BLI MACHINE OUTILS
– Infirmer le jugement rendu le 3 janvier 2022 par le tribunal de commerce de POITIERS en ce qu’il a :
Fait observer que Monsieur [V] [J] a exercé son activité professionnelle au sein de la SASU JM CONSULTING qu’il présidait jusqu’à sa radiation le 5 novembre 2018, qu’il a ensuite exercé son activité professionnelle en nom propre en utilisant le nom commercial JM CONSULTING ;
Fait observer que la SASU JM CONSULTING était inscrite au RCS de [Localité 5] sous le N°794 838 631 et que son entreprise individuelle porte le n° SIREN 514 164 284 ;
Fait observer qu’en conséquence il s’agit du nom commercial de l’activité individuelle de Monsieur [V] [J], – Dit que Monsieur [V] [J] est recevable en ses demandes’ alors que la procédure en injonction de payer a été conduite par la société SASU JM CONSULTING, la société liquidée, sans qu’il ne soit mentionné qu’elle eut été représentée par Monsieur [V] [J] désigné en qualité de liquidateur amiable, ni statué sur l’irrecevabilité de ses demandes formées par la société JM CONSULTING, ni statué sur la qualité à agir de Monsieur [V] [J] intervenant en qualité de liquidateur amiable de la société JM CONSULTING mais aussi en qualité de mandataire ad hoc de cette même société ;
Fait observer que la facture n°19/002 du 29 mars 2019 a été régulièrement émise par Monsieur [V] [J], qu’elle n’est pas contestée au fond par la SASU BLI MACHINES OUTILS et que par conséquent le solde de 50% de cette facture doit être réglé soit la somme de 2.805 € ;
Condamné la SASU BLI MACHINES OUTILS à régler à Monsieur [V] [J] la somme de 2.805 € en règlement du solde de la facture 19/002 du 29 mars 2019 alors que la demande en paiement est formée par la société JM CONSULTING puis par la société JM CONSULTING représentée par son mandataire ad hoc et par Monsieur [J] entrepreneur individuel ;
Fait observer que les demandes reconventionnelles de la SASU BLI MACHINES OUTILS sont formulées à l’encontre de la SASU JM CONSULTING ;
Fait observer que les demandes reconventionnelles de la SASU BLI MACHINES OUTILS sont formulées à l’encontre de la SASU JM CONSULTING ;
Fait observer que la SASU JM CONSULTING n’a pas été attraite à la cause et ne peut l’être ;
Fait observer qu’en effet, la SASU JM CONSULTING ayant été liquidée et radiée du registre du commerce et des sociétés le 5 novembre 2018, sa personne morale a disparu;
Fait observer que les créances invoquées ne sont pas l’objet du litige ;
Fait observer que par conséquent la SASU BLI MACHINES OUTILS est mal fondée dans ses demandes reconventionnelles ;
Débouté la SASU BLI MACHINES OUTILS de ses demandes reconventionnelles, fins et conclusions tendant à la condamnation de Monsieur [V] [J] pris en sa qualité de liquidateur amiable de la société JM CONSULTING, responsable des conséquences dommageables des fautes commises dans l’exercice de cette fonction, à payer la somme de 157.500 € TTC, étant précidé que le liquidateur amiable, Monsieur [J], reconnaissant devoir a minima la somme de 34.915 € ;
Condamné la SASU BLI MACHINES OUTILS à verser à Monsieur [V] [J] la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamné la SASU BLI MACHINES OUTILS aux entiers dépens de l’instance comprenant notamment les frais de greffe liquidés à la somme 105,46 € TTC.
Statuant de nouveau,
In limine litis, sur l’irrecevabilité de la procédure d’injonction de payer :
– Juger que la société JM CONSULTING est dépourvue de la capacité d’ester en justice résultant de l’inexistence de la personne morale consécutive à la disparition de la société suite à sa liquidation amiable le 5 novembre 2018 et à sa radiation ;
– Juger que la société JM CONSULTING, dépourvue de la personne morale, ne pouvait déposer le 4 mars 2020 une requête en injonction de payer auprès du tribunal de commerce de Poitiers;
– Juger que la société JM CONSULTING, dépourvue de la personne morale, ne pouvait faire signifier par acte extrajudiciaire en date du 11 juin 2021 une ordonnance d’injonction de payer;
En conséquence,
– Juger irrecevable la demande de la société JM CONSULTING ;
Sur la facture 19/002 du 29 mars 2019 :
– Juger que la société JM CONSULTING, en raison de sa liquidation amiable et radiation du 5 novembre 2018, n’avait plus aucune existence légale depuis cette date ;
– Juger que la société JM CONSULTING n’avait plus la capacité d’émettre en mars 2019 une facture et ne peut en réclamer le paiement ;
– Juger que la facture étant libellée au nom de la société JM CONSULTING et non à celui de Monsieur [V] [J] ce dernier ne peut en réclamer le paiement ;
En conséquence,
– Débouter la société JM CONSULTING et Monsieur [V] [J] de l’ensemble de leurs demandes ;
Sur la demande reconventionnelle de la société BLI MACHINES OUTILS :
– Juger que la société JM CONSULTING, représentée par Monsieur [V] [J], en qualité de mandataire ad hoc nommé par le président du tribunal de commerce de Bayonne, était bien partie à la procédure devant le tribunal de commerce de Poitiers ;
– Prendre acte que Monsieur [V] [J] reconnaît la société JM CONSULTING doit à la société BLI MACHINES OUTILS la somme de 34.915 € ;
– Juger que Monsieur [V] [J] en sa qualité de liquidateur amiable de la SASU JM CONSULTING est responsable, à l’égard tant de la société que des tiers, des conséquences dommageables des fautes par lui commises dans l’exercice de ses fonctions ;
– Juger que la radiation de la SASU JM CONSULTING a permis à son représentant légal, Monsieur [V] [J], d’organiser l’insolvabilité de sa société afin de ne pas rembourser les avances sur commission dues à la société BLI MACHINES OUTILS ;
– Juger que Monsieur [V] [J] s’est abstenu d’informer la société BLI MACHINES OUTILS de la liquidation amiable de sa société et il n’a pas procédé à l’apurement intégral du passif puisque la société BLI MACHINES OUTILS n’a jamas été réglée des avances sur commissions versées à la société JM CONSULTING soit la somme de 157.500 € TTC ;
– Juger que Monsieur [V] [J] et la société JM CONSULTING ne sont pas fondés à déduire de la créance de la société BLI MACHINES OUTILS la somme de 13.500 € ;
– Juger que Monsieur [V] [J] et la société JM CONSULTING ne sont pas fondés à déduire de la créance de la société BLI MACHINES OUTILS la somme de 35.335 € ;
– Juger que Monsieur [V] [J] et la société JM CONSULTING ne sont pas fondés à déduire de la créance de la société BLI MACHINES OUTILS la somme de 49.740 € ;
– Juger que Monsieur [V] [J] et la société JM CONSULTING ne sont pas fondés à déduire de la créance de la société BLI MACHINES OUTILS la somme de 40.368 €.
En conséquence,
– Condamner Monsieur [V] [J], en raison des fautes commises lors de la liquidation de sa société, à verser à la société BLI MACHINES OUTILS la somme de 157.500 € ;
– Débouter la société JM CONSULTING et Monsieur [V] [J] de l’ensemble de leurs demandes ;
Sur l’appel incident de Monsieur [V] [J] et la société JM CONSULTING :
– Juger que la demande d’indemnité au titre de la rupture du contrat d’agent commercial est prescrite ;
– Juger que la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive n’est pas justifiée ;
En conséquence,
– Débouter la société JM CONSULTING et Monsieur [V] [J] de l’ensemble de leurs demandes ;
En tout état de cause :
– Condamner in solidum Monsieur [V] [J] et la société JM CONSULTING à verser à la société BLI MACHINES OUTILS la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel ;
– Condamner in solidum Monsieur [V] [J] et la société JM CONSULTING à verser à la société BLI MACHINES OUTILS la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour la première instance ainsi qu’aux entiers dépens de première instance.
Monsieur [V] [J], par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 24 juin 2022, demande à la cour de :
Vu les articles 1103 et suivants et 1240 et suivants du Code civil,
Vu l’article 700 du Code de procédure civile,
– Déclarer recevable et bien fondé l’appel incident de Monsieur [V] [J] ;
– Déclarer recevable et bien fondé l’appel incident la SASU JM CONSULTING prise en la personne de Monsieur [V] [J], ès qualités de mandataire ad hoc ;
– Confirmer le jugement rendu le 3 janvier 2022 par le Tribunal de commerce de Poitiers en ce qu’il a :
Dit que Monsieur [V] [J] est recevable en ses demandes ;
Condamné la SAS BLI Machines-Outils à régler à Monsieur [V] [J] la somme de 2.805 euros en règlement du solde de la facture 19/002 du 29 mars 2019 ;
Débouté la SAS BLI Machines-Outils de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
Condamné la SAS BLI Machines-Outils à verser à Monsieur [V] [J] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 CPC ;
Condamné la SAS BLI Machines-Outils qui succombe aux entiers dépens de l’instance comprenant notamment les frais de greffe liquidés à la somme de 105,46 euros TTC.
– Infirmer le jugement rendu le 3 janvier 2022 par le Tribunal de commerce de Poitiers en ce qu’il a :
Débouté Monsieur [V] [J] de sa demande d’indemnité de rupture du contrat d’agent commercial qui liait la SASU JM Consulting à la SAS BLI Machines-Outils ;
Débouté Monsieur [V] [J] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Statuant de nouveau :
– Condamner la SAS BLI MACHINE OUTILS à verser à la SASU JM CONSULTING, prise en la personne de Monsieur [V] [J], ès qualités de mandataire ad hoc, la somme de 5.453 euros au titre de son indemnité de rupture du contrat d’agent commercial, après compensation ;
– Condamner la SAS BLI MACHINE OUTILS à verser à Monsieur [V] [J] la somme de 3.000 euros au titre de sa résistance abusive ;
– Condamner la SAS BLI MACHINE OUTILS à verser à Monsieur [V] [J] et à la SASU JM CONSULTING prise en la personne de Monsieur [V] [J], ès qualités de mandataire ad hoc, la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamner la SAS BLI MACHINE OUTILS aux entiers dépens de l’instance.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1) Sur la facture n° 19/002 du 29 mars 2019 :
Le tribunal a condamné la S.A.S.U. BLI Machine outils à régler à Monsieur [V] [J] la somme de 2.805 € en règlement du solde de la facture 19/002 du 29 mars 2019.
La SASU BLI Machine Outils s’oppose à cette condamnation en faisant valoir que M. [J] ne peut prétendre à aucune somme de ce chef au motif :
-que la facture a été libellée au nom de JM Consulting,
-que la requête en injonction de payer a été précédée d’une lettre d’une société de recouvrement indiquant qu’elle a été mandatée par la société JM Consulting,
-que l’ordonnance d’injonction de payer a été signifiée par la SASU JM Consulting,
-que celle-ci était dépourvue de la capacité d’ester en justice,
-que la SASU JM Consulting radiée le 5 novembre 2018 n’avait pas la capacité d’émettre une facture en mars 2019.
Conformément aux moyens développés par l’intimé, la cour fait les observations suivantes.
Une comparaison entre la facture litigieuse (pièce n° 5 de l’intimé) et une facture émise au préalable par la société JM Consulting (pièce n° 6 de l’appelante) permet de constater :
-qu’en ce qui concerne l’entête, la facture litigieuse porte la mention ‘JM Consulting – Dispensé d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS) et au répertoire des métiers’, alors que la facture de comparaison est faite à l’entête de ‘JM Consulting SAS’ sans autre précision,
-qu’en ce qui concerne les références en bas de page , la facture litigieuse porte un N° SIRENE et aucun n° de TVA, alors que la facture de comparaison porte un n° SIRET et un n° de TVA.
Certes, cette facture a fait l’objet d’une tentative de recouvrement par la société MHK Conseil qui a dit avoir été mandatée par la société JM Consulting (pièce n° 4 de l’appelante), et la signification de l’ordonnance d’injonction de payer (pièce n° 3 de l’appelante) a été faite au nom de la SASU JM Consulting.
Il n’en reste pas moins que l’opposition à injonction de payer a conduit au jugement dont appel et a nécessairement mis à néant l’ordonnance entreprise et les actes y afférents.
Les éléments déterminants sont d’une part, la qualité de l’émetteur de la facture et d’autre part, l’identité du demandeur à l’instance.
Sur le premier point, il a été vu ci-dessus que la facture émane bien de M. [J] agissant sous son n° SIRENE personnel et sous l’enseigne JM Consulting.
Sur le second point, il convient d’examiner la requête en injonction de payer. La rubrique ‘DEMANDEURS’ spécifie que si la requête émane d’une personne morale, il convient d’indiquer sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente habituellement. Or, les renseignements portés à cette rubrique sont les suivants : ‘JM Consulting – [V] [J], [Adresse 2]’. Le demandeur apparaît donc comme une personne physique – en l’absence de toute référence à quelque forme sociale que ce soit – en l’occurrence, M. [V] [J] agissant sous l’enseigne JM Consulting.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’appelante n’est pas fondée à faire valoir que la facture litigieuse aurait été émise et l’instance et initiée par une personne morale n’ayant plus d’existence légale.
Le quantum du solde de la facture à payer n’est pas discuté.
Le jugement déféré ne pourra qu’être confirmé en ce qu’il a condamné la S.A.S.U. BLI Machine outils à régler à Monsieur [V] [J] la somme de 2.805 € en règlement du solde de la facture 19/002 du 29 mars 2019.
2) Sur la demande reconventionnelle de la société BLI Machines Outils :
Le tribunal a rejeté les demandes reconventionnelles de la SASU BLI Machines Outils en ce qu’elles sont dirigées contre de la SASU JM Consulting. alors que celle-ci n’a pas été attraite à la cause et ne pouvait l’être.
La société BLI Machines Outils critique cette décision en faisant valoir :
-que la société JM Consulting était bien partie à la procédure d’opposition sur injonction de payer,
-que les demandes reconventionnelles n’étaient pas dirigées contre la société JM Consulting mais contre M. [J] en ce que, en sa qualité de liquidateur de la société, il est responsable, tant à l’égard de la société que des tiers, des conséquences dommageables des fautes commises dans l’exercice de ses fonctions, et qu’en l’occurrence, la radiation de la SASU JM Consulting a permis à son représentant légal d’organiser l’insolvabilité de sa société afin de ne pas rembourser les avances sur commission dues par la société BLI Machines Outils.
Sur le premier point, à l’instar de ce qui a été développé précédemment, la cour rappelle que la société JM Consulting n’était pas partie à l’instance mais uniquement M. [J] exerçant sous l’enseigne JM Consulting. Seules des demandes dirigées contre lui, sont recevables.
Il convient donc de rechercher, au vu des moyens développés par les parties, si M. [J], à titre personnel, a recherché, par une radiation frauduleuse de sa société, à faire échapper celle-ci aux dettes qui étaient les siennes, à l’égard de la société BLI Machines Outils. Cette analyse conduit à deux séries d’observations relatives :
-d’une part, à l’historique du partenariat entre les sociétés BLI Machines Outils et M. [J], sous couvert ou non de la société JM Consulting,
-d’autre part, au montant de la créance réclamée à titre reconventionnel.
Sur le premier point, les relations entre la société BLI Machines Outils et M. [J], de façon générale, qu’il soit représentant légal de la société JM Consulting, ou personne physique, se sont scindées en trois phases :
-du 7 février 2014 au 30 novembre 2017 : contrat d’agence commerciale entre la société BLI Machines Outils et la société JM Consulting,
-du 30 novembre 2017 au 2 juillet 2018 : contrat d’apporteur d’affaires entre la société JM Consulting et la société BLI Machines Outils, sans formalisation de contrat,
-2 juillet 2018 : Cessation de la collaboration au titre d’apporteur d’affaires entre les deux sociétés.
-29 mars 2019 : émission par M. [J] sous l’enseigne JM Consulting de la facture 19/002 de 5.610 € dont la moitié (2.805 €) sera payée par la société BLI Machines Outils.
Il résulte des échanges de courriers versés aux débats, que cette évolution des relations contractuelles s’est toujours faite à l’initiative de la société BLI Machines Outils. Au terme de cette évolution, la dissolution puis la radiation de la société JM Consulting était logique et prévisible. En toute hypothèse, la bonne foi se présume et la société BLI Machines Outils échoue à démontrer l’intention malveillante de M. [J] qui aurait pu l’animer lors de la dissolution de sa société.
Sur le second point, après avoir dit être étonné que la société BLI Machines Outils ait attendu d’être assignée en paiement d’un reliquat de facture de 2.805 € pour revendiquer une créance de 157.500 € au titre de commissions dont certaines remontent à 2015, M. [J] rappelle que la société BLI Machines Outils a été vendue, via une cession d’actions le 12 septembre 2019, circonstance non contredite par la partie adverse. M. [J] a sollicité la communication des comptes de référence annexés à ladite cession aux fins de vérifier que la créance de 157.500 € y était bien mentionnée. La cour constate à cet égard que la société BLI Machines Outils demeure taisante sur ce point et ne justifie nullement que cette créance, d’un montant non négligeable qu’elle prétend détenir contre M. [J], serait entrée dans le champ de la cession du 12 septembre 2019.
Pour l’ensemble de ces raisons, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté la société BLI machines Outils de sa demande en paiement de la somme de 157.500 €.
Le débat sur les comptes entre les parties et notamment sur les sommes que M. [J] entend voir déduire de la créance de la société appelante devient sans objet.
3) Sur la demande d’indemnité au titre de la rupture du contrat d’agent commercial :
Pour rejeter la demande, le tribunal a rappelé que la SASU BLI Machines Outils n’avait pas été attraite à la cause et ne pouvait pas l’être dans la mesure où sa personnalité morale avait disparu, après qu’elle a été liquidée et radiée.
La cour rappelle à cet égard que la demande d’indemnité est consécutive au contrat d’agent commercial ayant pu exister entre la société BLI Machines Outils et la société JM Consulting.
Comme il a été vu précédemment, le demandeur au présent litige est M. [J] et non la société JM Consulting.
Dans ces conditions, il n’ y a lieu :
-ni de faire droit à la demande présentée en paiement de la somme de 5.453 euros au titre de l’indemnité de rupture du contrat d’agent commercial,
-ni de donner acte à la société BLI Machines Outils que Monsieur [V] [J] reconnaît la société JM CONSULTING doit à la société BLI MACHINES OUTILS la somme de 34.915 €.
4) Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive :
Le Tribunal a débouté M. [J] de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive.
Devant la cour, l’intimé sollicite la somme de 3.000 € de ce chef en faisant valoir la mauvaise foi de la société appelante et le fait qu’elle ait remis en cause son honnêteté et sa probité.
La cour observe sur ce point que la société BLI Machines Outils était fondée à soumettre le présent litige à l’arbitrage du juge et que l’intimé lui-même a échoué dans sa demande tendant à obtenir une indemnité de rupture du contrat d’agence commerciale.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté M. [J] de sa demande pour résistance abusive.
5) Sur les demandes accessoires :
La société BLI Machines Outils qui succombe au principal sera condamnée aux dépens d’appel, déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles et condamnée de ce chef à payer à M. [J] la somme de 3.000 €.
PAR CES MOTIFS:
La Cour,
Déclare l’appel recevable,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit que les demandes de l’appelante quant aux sommes que M. [J] prétend voir venir en déduction de la somme de 157.500 € sont sans objet,
Dit qu’il n’y a pas lieu de donner acte à la société BLI Machines Outils que Monsieur [V] [J] reconnaît la société JM CONSULTING doit à la société BLI Machines Outils la somme de 34.915 €,
Déboute la société BLI Machines Outils de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société BLI Machines Outils à payer à M. [J], la somme de 3.000 €au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société BLI Machines Outils aux dépens d’appel,
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,