Contrat d’agent commercial : 14 juin 2022 Cour d’appel de Poitiers RG n° 20/02551

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Contrat d’agent commercial : 14 juin 2022 Cour d’appel de Poitiers RG n° 20/02551

14 juin 2022
Cour d’appel de Poitiers
RG n°
20/02551

ARRET N° 363

N° RG 20/02551 – N° Portalis DBV5-V-B7E-GDUF

S.A.S. NORMANDIS

C/

[G]

[W]

[M]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 14 JUIN 2022

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/02551 – N° Portalis DBV5-V-B7E-GDUF

Décision déférée à la Cour : jugement du 06 octobre 2020 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de la rochelle.

APPELANTE :

S.A.S. NORMANDIS

6 avenue du 8 mai 1945

[Localité 2]

ayant pour avocat Me Christophe BELLIOT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

INTIMES :

Monsieur [O] [G]

né le 20 Mars 1950 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Madame [J] [W] épouse [G]

née le 30 Juin 1951 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

ayant tous les deux pour avocat Me Daphné VERLUISE, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

Monsieur [H] [M]

né le 10 Août 1961 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

ayant pour avocat Me Sébastien GRELARD de la SELARL AVOCIM, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 14 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Madame Anne VERRIER, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

– Contradictoire

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS

Le 6 février 2018, la société Normandis a obtenu un permis d’aménager 8 lots situés commune de [Localité 7].

Par compromis réitéré le 4 juillet 2018, les époux [G] ont acquis un terrain à construire formant le lot n°4 du lotissement [Adresse 6] pour un prix de 79 500 euros.

Ils ont confié la construction de la maison à la société CTC.

La demande de permis de construire a été déposée par le constructeur le jour de la signature du compromis.

Le coût de la construction de l’immeuble s’est élevé à 128 947,06 euros.

Les époux [G] ont pris possession de leur immeuble le 30 avril 2019.

Ils ont alors découvert le long de leur terrasse une plate-forme de stockage de poubelles, plate-forme absente sur les plans annexés aux compromis et acte de vente, plans soumis à leur signature.

Par acte du 24 septembre 2019, les époux [G] ont assigné la société Normandis devant le tribunal de grande instance de la Rochelle aux fins d’indemnisation de leurs préjudices sur le fondement du dol.

La société Normandis a conclu au débouté.

Par jugement du 6 octobre 2020 , le tribunal judiciaire de La Rochelle a condamné la société Normandis à payer aux époux [G] avec exécution provisoire les sommes de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour dol et une indemnité de procédure.

Le premier juge a notamment retenu que :

-sur le dol

L’action est dirigée contre le seul vendeur du terrain à construire.

Le plan annexé à la promesse de vente du 4 juillet 2018 et à l’acte de vente est un document de géomètre sans mention relative à l’environnement.

La société CTC, constructeur, qui a déposé la demande de permis de construire a le même dirigeant que la SCI venderesse.

L’aire de stockage ne figure pas en face du lot n°4 acheté par les époux [G] sur le plan annexé à la demande de permis.

Cette aire figure en face du lot n°8, figure sur des plans annexés à des permis de construire antérieurs (2015,2016).

Le vendeur ne pouvait ignorer présence de la plate-forme de stockage des poubelles du lotissement au droit du lot n°4, a omis d’en signaler l’existence aux époux [G].

L’omission est d’autant plus manifeste que M. [M] leur a offert une somme de 6000 euros à titre de transaction.

Le dol doit porter sur un élément déterminant du consentement.

Le lot n°8 qui supporte également une aire de stockage n’a pas été vendu.

Le vendeur l’a occulté pour finaliser la vente.

La dissimulation est intentionnelle. Le dol est caractérisé.

-sur le préjudice

Le préjudice doit être évalué en tenant compte des nuisances olfactives, sonores, sanitaires, visuelles.

L’aire se trouve de l’autre côté de la rue, n’est pas accolée au mur de clôture.

Des nuisances sonores ne sont effectives que les vendredis et samedis matins.

Le préjudice de jouissance sera évalué à la somme de 25 000 euros.

LA COUR

Vu l’appel en date du 12 novembre 2020 interjeté par la société Normandis

Vu l’article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 2 mars 2022, la société Normandis a présenté les demandes suivantes :

Il est demandé à la Cour d’Appel de Poitiers :

-Déclarer recevable et fondé l’appel interjeté par la société NORMANDIS.

-En conséquence infirmer le jugement.

Statuant à nouveau,

-Débouter les époux [G] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

-Donner acte à la société NORMANDIS de son désistement à l’encontre de Monsieur [M].

-Condamner les époux [G] à payer à la société NORMANDIS la somme de 7.500,00 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel ainsi qu’aux entiers dépens des deux instances.

A l’appui de ses prétentions, la société Normandis soutient notamment que:

-Elle avait appelé en intervention forcée M. [M] aux fins de garantie, se désiste de ses demandes dirigées à son encontre.

-La question posée est celle de l’imputabilité de la responsabilité des plans.

-Le plan du géomètre n’est pas trompeur.

-Il n’est pas contestable que l’espace de stationnement des poubelles ne figure pas sur les plans annexés à la demande de permis déposée par la société CTC, qu’il figure sur les autres plans annexés aux permis [P], [I].

-Les éléments comparés ne sont pas comparables.

-Les plans annexés au permis n’ont pas un caractère contractuel. Ils sont destinés à l’administration.

-L’absence de l’espace de stationnement des poubelles sur les plans du permis ne révèle pas une volonté de tromper, une intention dolosive.

-Subsidiairement, l’existence d’un préjudice actuel n’est pas démontré.

L’huissier de justice s’est déplacé les 2,10,11,14 février 2022, n’a jamais constaté de sac ou de bac. Les bacs sont stationnés ailleurs à proximité d’un local technique.

-Chacun a sa poubelle individuelle, la dépose devant chez lui.

-L’espace de stationnement n’est pas utilisé ou très peu.

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 11 mars 2022, les époux [G] ont présenté les demandes suivantes :

-CONFIRMER le jugement rendu par le tribunal judiciaire de LA ROCHELLE en date du 6 octobre 2020;

-CONDAMNER au titre de la présente instance la société NORMANDIS à verser 5 000 euros à [J] et [O] [G] sur le fondement de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens

A l’appui de leurs prétentions, les époux [G] soutiennent notamment que :

-L’aire de stationnement des poubelles ne figurait ni sur les plans remis lors de l’achat du terrain ni sur celui déposé pour le permis de construire.

-M. [M] leur a fait une proposition financière le 14 juin 2019.

-Le maire leur a confirmé que les emplacements figuraient tous sur le plan de composition du lotissement le 26 juin 2019.

-Ils ont mis en demeure la société CTC le 24 juin 2019 de leur payer 25.000 euros.

-Ils se prévalent des manoeuvres et mensonges du vendeur.

-Les aires de stationnement des poubelles figurent sur les plans de composition et d’aménagement détenus par le maire.

-Elles sont sur les plans des lots 2 et 5 appartenant respectivement aux consorts [P]-[I].

-Le plan doit indiquer tous les aires de stockage ou aucun.

-Le vendeur a camouflé délibérément les aires de stockage.

-Le lot 4 a été vendu tardivement. Le lot 8 n’est toujours pas vendu.

-Le vendeur a reconnu implicitement sa faute.

-Le vendeur devait informer ses acquéreurs, connaissait l’existence de l’aire.

-Les sociétés venderesse et constructeur ont le même commercial.

-M. [M] avait signé les plans remis lors des promesse et vente.

-Le dol porte sur un élément déterminant. L’aire est le long de leur terrasse.

-La fenêtre de leur chambre donne sur la terrasse.

-L’aire de stationnement n’est pas actuellement utilisée.

-Les containers sont stockés de l’autre côté de la rue.

-Les bacs sont néanmoins ramassés les vendredis et samedis matin, occasionnent des nuisances.

-La commune a indiqué que la zone ne serait pas déplacée.

-Elle sera utilisée.

-Le prix au m2 est de 358,10 euros. L’aire dévalorise l’immeuble.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 12 mai 2021 , M. [M] a présenté les demandes suivantes :

Vu les pièces, Vu les article 555 ,696 et suivants et 700 du Code de procédure civile,

-Dire et juger irrecevable et en tout cas mal fondée la demande de la SARL NORMANDIS dirigée à l’encontre de Monsieur [H] [M],

A titre principal :

En conséquence,

Dire et juger et en tant que de besoin déclarer l’action en intervention forcée pour la première fois en cause d’appel de la SARL NORMANDIS à l’encontre de Monsieur [H] [M] irrecevable comme ne satisfaisant pas aux conditions de l’article 555 du code de procédure civile.

À titre subsidiaire :

-Débouter la SARL NORMANDIS de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions, y compris celles à venir, dirigées à l’encontre de Monsieur [H] [M],

En toute hypothèse,

-Condamner la SARL NORMANDIS aux entiers dépens de la présente instance, dont distraction sera faite bénéfice de la SELARL AVOCIM, conformément dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

-Condamner la SARL NORMANDIS à payer à Monsieur [M] la somme de 3.500,00 € par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

A l’appui de ses prétentions, M. [M] soutient notamment que :

-Il a été assigné le 12 février 2021 par la société Normandis.

-Sa mise en cause est irrecevable. Il n’est pas lié à la société Normandis par contrat.

-Le seul contrat d’agent commercial est entre lui et la société CTC.

-Il n’existe pas d’évolution du litige fondant sa mise en cause.

-Les factures relatives à sa commission ont été établies par la société Clemorinands.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l’ordonnance de clôture en date du 17 mars 2022 .

SUR CE

-sur le dol

L’article 1137 du code civil dispose que le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manoeuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.

Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.

Selon l’article 1138 du code civil, le dol est également constitué s’il émane du représentant, gérant d’affaires, préposé ou porte-fort du cocontractant.

Les époux [G] n’agissent pas en nullité de la vente mais en indemnisation du préjudice subi du fait du dol imputé au vendeur.

La société Normandis, promoteur est venderesse professionnelle. Elle est tenue d’une obligation d’information, tenue de prouver qu’elle a exécuté cette obligation.

Elle ne conteste pas que les plans annexés au compromis puis à l’acte de vente ne permettaient d’aucune manière aux époux [G] de savoir que le lot qu’ils achetaient se trouvait à proximité immédiate d’une aire de stationnement des poubelles.

L’aire longe leur terrasse et jardin.

Il est certain que le promoteur-vendeur détenait cette information, information qui figure de manière apparente sur les plans d’aménager remis à la mairie avant la vente des lots.

La société Normandis ne démontre, ni ne prétend avoir donné cette information sensible à ses clients.

Elle ne propose aucune explication convaincante sur la disparition suspecte, inexplicable et inexpliquée de l’aire de stationnement sur les plans soumis pour signature aux acquéreurs alors même qu’elle apparaît sur les plans remis aux acquéreurs des autres lots du lotissement.

M. [M] a attesté le 22 janvier 2020 avoir remis aux acquéreurs des plans ‘ne décrivant pas l’environnement’, en d’autres termes dessinant l’aire litigieuse.

Il se présente lui-même comme agent commercial des sociétés Normandis (vendeur) et CTS (constructeur).

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il retenu un dol à la charge du vendeur, les manoeuvres dolosives du représentant du vendeur engageant la responsabilité du vendeur.

-sur le préjudice

La société Normandis a mandaté un huissier de justice aux fins de constat.

Il résulte du constat réalisé les 2, 10, 11, 14 février 2022 que l’aire de stationnement n’est pas actuellement utilisée pour stationner des poubelles et ou conteneurs.

Elle reste inutilisée.

Parfois, une voiture y stationne.

Il n’est pas soutenu ni démontré que l’inutilisation de l’aire soit liée ou non à la procédure en cours.

L’aire de stockage longe la propriété des époux [G].

Si les époux [G] ne subissent pas de préjudice de jouissance effectif, ils subissent un préjudice car un risque existe que l’aire soit effectivement utilisée conformément à sa destination initiale.

Leur lot est affecté d’une moins-value.

Le préjudice subi de ce fait sera évalué à la somme de 15 000 euros.

-sur les autres demandes

Il résulte des dernières conclusions déposées par la société Normandis qu’elle ne forme aucune demande contre M. [M] qui a constitué avocat et conclu, n’a pas tiré les conséquences des dernières conclusions notifiées par la société Normandis.

Il résulte de l’article 696 du code de procédure civile que ‘ La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. (…).’

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d’appel seront fixés à la charge de la société Normandis.

Il est équitable de condamner la société Normandis à payer aux intimés la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile .

Il est équitable de laisser à la charge de M. [M] les frais irrépétibles qu’il a exposés.

PAR CES MOTIFS

statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

-confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné la société Normandis à payer aux époux [G] la sommes de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts

Statuant de nouveau sur le point infirmé :

-condamne la société Normandis à payer aux époux [G] la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts

Y ajoutant :

-déboute les parties de leurs autres demandes

-condamne la société Normandis aux dépens d’appel dont distraction au profit de la Selarl Avocim

-laisse à la charge de M. [M] les frais irrépétibles qu’il a exposés en appel

-condamne la société Normandis à payer aux époux [G] la somme de 3500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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