Contrat à durée déterminée d’usage : 23 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/09376

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Contrat à durée déterminée d’usage : 23 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/09376
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 3

ARRET DU 23 NOVEMBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/09376 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CATDE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juillet 2019 Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de LONGJUMEAU – RG n° 17/00419

APPELANT

Me [P] [J] ès-qualité de mandataire de la SARL PROJEF

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représenté par Me Frédéric ENSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1350

Me [X] [C] ès-qualité d’administrateur judiciaire de la SARL PROJEF

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Frédéric ENSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1350

SARL PROJEF

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Frédéric ENSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1350

INTIMÉ

Monsieur [Y] [H]

[Adresse 7]

[Localité 9]

Représenté par Me Aldjia BENKECHIDA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0556

PARTIE INTERVENANTE

Société UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 6]

[Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 6]

Représentée par Me Hélène NEGRO-DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0197

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique MARMORAT, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Véronique MARMORAT, présidente de chambre, présidente de formation

Madame Anne MÉNARD, présidente de chambre

Madame Fabienne ROUGE, présidente de chambre

Greffier, lors des débats : Madame Cécile IMBAR

ARRET :

– Contradictoire

– Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– Signé par Madame Véronique MARMORAT, présidente de chambre et par Madame Sarah SEBBAK greffière en préaffectation à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [Y] [H], né le 10 décembre 1963, a travaillé pour la société Projef ayant pour activité la mise en place d’animations commerciales dans les magasins de bricolage, à compter du 10 février 2012, selon plusieurs contrats de travail à durée déterminée en qualité d’animateur commercial. Cette collaboration s’est achevée, le 29 novembre 2015.

Le 3 juillet 2017, le salarié a saisi en requalification de ces contrats en contrat à durée indéterminée à temps plein, en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en diverses demandes indemnitaires et salariales le Conseil des prud’hommes de Longjumeau lequel par jugement du 12 juillet 2019, statuant en formation de départage, a requalifié à compter du 10 février 2012 l’ensemble des contrats d’intervention à durée déterminée de monsieur [Y] [H] avec la société Projef en un contrat de travail à durée indéterminée, dit que la rupture de son contrat de travail à la date du 29 novembre 2015 s’analyse en un licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse et a, principalement, condamné l’employeur aux dépens à verser à monsieur [H] les sommes suivantes :

titre

somme en euros

indemnité de requalification

1 144,45

indemnité compensatrice de préavis

congés payés afférents

2 288,90

228,89

indemnité légale de licenciement

858,34

indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

6 866,70

article 700 du code de procédure civile

1 500,00

La société Projef a interjeté appel de cette décision le 20 septembre 2019.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 23 mai 2022, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société Projef, ainsi que la société AJ Partenaires représentée par maître [C] [X] en qualité d’administrateur judiciaire, et maître [J] [P], mandataire judiciaire de la société Projef, demandent à la cour d’infirmer le jugement en ces condamnations et, statuant à nouveau, de

Déclarer recevable et bien-fondée l’intervention volontaire de la Selarl AJ Partenaires

Constater l’intervention de maître [P]

A titre principal :

Dire et juger qu’il n’y a pas lieu de requalifier les contrats de travail à durée déterminée d’usage en un contrat de travail à durée indéterminée

Ordonner le remboursement des sommes versées à monsieur [H]

Débouter monsieur [H] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

A titre subsidiaire :

Réduire les dommages et intérêts alloués à de plus justes proportions

En tout état de cause :

Condamner monsieur [H] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens

Par conclusions signifiées par voie électronique le 30 mars 2022, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, monsieur [H] demande à la cour de confirmer le jugement rendu le 12 juillet 2019 en ce qu’il a prononcé la requalification des contrats à durée déterminée de monsieur [H] en un seul contrat à durée indéterminée de droit commun et sur les sommes fixées aux titres de l’indemnité de requalification, de l’indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, de l’indemnité de licenciement, de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l’infirmer en ce qu’il a rejeté sa demande de requalification en contrat de travail à temps plein, et statuant, de nouveau de condamner la société Projef aux dépens et à lui verser la somme de 7 666,08 euros au titre de rappel de salaire, outre celles de 766,60 euros pour les congés payés afférents et de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Le salarié demande également la remise des bulletins de salaire rectifiés conformément à la décision à intervenir.

Dans ses conclusions par voie électronique le 28 avril 2021, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, l’association Unédic délégation Ags Cgea de [Localité 6] demande à la cour de lui donner acte à la concluante des conditions et limites de l’intervention et de la garantie de l’AGS, d’infirmer le jugement et de débouter monsieur [H] de ses demandes, fins et conclusions.

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

Motifs

Sur la mise hors de cause des organes de la procédure collective

Il résulte des pièces de la procédure qu’après avoir été placé sous sauvegarde de justice par jugement prononcé le 14 février 2019 par le Tribunal de commerce de Besançon, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte le 4 novembre 2020 par la même juridiction à l’égard de la société Projef et, la société AJ Partenaires, représentée par maître [X] en qualité d’administrateur, et maître [P] en qualité de mandataire judiciaire désigné. Par jugement du 5 mai 2021, un plan de redressement a été arrêté par le Tribunal de commerce de Besançon pour une durée de 10 années et désigné maître [P] en qualité de commissaire au plan. En conséquence, il convient de mettre hors de cause les organes de la procédure collective soit société AJ Partenaires représentée par maître [C] [X] en qualité d’administrateur judiciaire, et maître [J] [P], mandataire judiciaire de la société Projef ainsi que l’association Unédic délégation Ags Cgea de [Localité 6].

Sur la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée

Principe de droit applicable :

Aux termes de l’article L. 1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Son article L.1242-2 précise notamment qu’un tel contrat ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, (…°) pour 3° les emplois à caractère saisonnier ou dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu.

Selon l’accord du 13 février 2006 relatif aux activités de l’animation commerciale, la prestation d’animation ou de promotion commerciale consiste essentiellement dans des actions de présence publicitaire, distribution d’échantillons et/ou de promotion des ventes en grands magasins, GMS ou dans les lieux ou espaces publics, d’un produit ou service ou d’un groupe de produits ou services précisément déterminée.

Toutefois, ces activités se déroulent autour d’actions limitées dans le temps et l’espace, obligeant les organisateurs, afin de répondre au besoin du client dans le respect des droits des salariés, à un aménagement et une organisation du travail dans les limites et les garanties fixées par la loi.

L’animateur est celui qui participe à la réalisation d’une animation commerciale temporaire.

Le contrat d’intervention à durée déterminée d’animation commerciale est un contrat de travail à durée déterminée conclu spécifiquement pour pourvoir l’emploi par nature temporaire d’un animateur commercial, en application des dispositions de l’article L 122-1-1-3 du Code du travail devenu L. 1242-2, 3° du code du travail.

Application en l’espèce

La société Projef expose que la convention collective des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire prévoit que l’animation commerciale constitue une activité pour laquelle il est d’usage de recourir au contrat à durée déterminée et que chaque contrat à durée déterminée du salarié préciserait expressément qu’il s’agit d’un ‘CDD d’usage d’animation commerciale’et qu’il était engagé pour une animation temporaire. L’employeur précise que l’emploi d’un animateur commercial serait par nature temporaire s’agissant d’une tâche précise et limitée dans le temps puisque les animations commerciales ne sont pas permanentes, les demandes d’animation commerciale étant aléatoires, non planifiées à l’avance.

Monsieur [H] fait valoir qu’il aurait été employé pendant 3 ans et 9 mois par la société, toujours au même poste, en vertu de dizaines de contrats successifs et aurait reçu chaque mois un bulletin de salaire, durant toute cette période et qu’ainsi, son emploi serait bien lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Il résulte des pièces produites par le salarié que les contrats à durée déterminée le liant à la société Projef ne comportent pas, comme l’ont justement précisé les premiers juges, de définition du motif du recours à ce type de contrat ni de précision sur la prestation commerciale en raison de laquelle ils ont été conclus. L’employeur se contente de produire un bon de commande.

En outre, les contrats produits établissent qu’hormis, les périodes où monsieur [H] prenait ses congés, il a travaillé tous les mois entre le 10 novembre 2012 et le 23 novembre 2015, ce qui établit qu’il participait à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

En conséquence, il convient de confirmer à la fois la requalification des contrats à durée déterminée et les montants des sommes retenues par les premiers juges pour l’indemnisation de la rupture du contrat de travail qui ont été justement apprécié et sont conformes aux pièces versées aux débats.

Sur la requalification du contrat de travail en contrat à temps plein

Principe de droit applicable :

Selon l’article L 3123-14 du code du travail dans sa version applicable, le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit qui doit mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition entre les jours ou les semaines du mois de la durée de travail.

Application en l’espèce

Monsieur [Y] [H] soutient que sa relation de travail doit être requalifiée à temps plein et demande à ce titre des rappels de salaire. Il indique qu’il serait resté à disposition de l’entreprise durant toute cette période : de telle sorte, l’exigence de disponibilité serait remplie et qu’il aurait effectué de manière occasionnelle un temps plein : en mars, août et octobre 2012, en avril 2013, en juillet 2014 et en juillet 2015.

Il résulte de l’examen des contrats produits que chacun d’eux comporte pour la période considérée le nombre de jours, la liste des dates et la mention suivante :” le salarié est embauché sur la base de 7 heures de travail par jour dont 0,50 consacrées à la formation, la préparation et la restitution de la feuille de présence”. En pratique, les vendeurs des magasins de bricolage montraient à l’animateur commercial les caractéristiques du produit devant faire l’objet de la démonstration avant celle-ci, ce qui nécessitait aucun travail de préparation en dehors des horaires de présence dans le magasin, défini dans le contrat. Ainsi, ces contrats sont suffisamment précis pour considérer que les exigences légales sont remplies, d’autant, monsieur [H] avait une connaissance préalable suffisante pour pourvoir organiser son temps pendant les périodes interstitielles.

En conséquence, il convient de confirmer la décision de rejet de cette demande décidée par le Conseil des prud’hommes.

Par ces motifs

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l’article 450 du code de procédure civile,

Met hors de cause les organes de la procédure collective soit société AJ Partenaires représentée par maître [C] [X] en qualité d’administrateur judiciaire, maître [J] [P], mandataire judiciaire de la société Projef et l’association Unédic délégation Ags Cgea de [Localité 6].

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne monsieur [H] à verser à la société Projef la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Condamne monsieur [H] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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