Contrat à durée déterminée d’usage : 21 novembre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/02330

·

·

Contrat à durée déterminée d’usage : 21 novembre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/02330
Ce point juridique est utile ?

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/02330 – N° Portalis DBVH-V-B7F-ICTD

EM/EB

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES

07 juin 2021

RG :20/00253

[P]

C/

S.A.S. SEQUENCE 4

Grosse délivrée le 21 NOVEMBRE 2023 à :

– Me

– Me

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 21 NOVEMBRE 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NIMES en date du 07 Juin 2021, N°20/00253

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Mme Delphine OLLMANN, Greffier, lors des débats et Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier lors du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 23 Mai 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 26 Septembre 2023 prorogé à ce jour

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

Madame [E] [P]

née le 15 Juin 1978 à [Localité 4] (13)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Eve SOULIER de la SELARL EVE SOULIER-JEROME PRIVAT-THOMAS AUTRIC, avocat au barreau D’AVIGNON

INTIMÉE :

S.A.S. SEQUENCE 4

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Karine JAPAVAIRE, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me François MAIRIN, avocat au barreau de TARASCON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 24 Avril 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 novembre 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :

Mme [E] [P] a été engagée à compter du 21 juin 2017, suivant contrat à durée déterminée d’usage ‘extra’ dont le terme était fixé au 28 juin 2017, en qualité d’aide cuisinière par la SAS Séquence 4. Plusieurs autres contrats à durée déterminée ont été conclus par la suite en 2017, en 2018 et en 2019.

Par requête du 07 avril 2020, Mme [E] [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Nîmes pour obtenir la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée à compter du 02 mai 2018, pour qu’il soit dit et jugé que la rupture de la relation de travail s’analyse en un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse et pour condamner la SAS Séquence 4 au paiement de diverses sommes à titre de rappels de salaire et à caractère indemnitaire.

Par jugement du 07 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Nîmes a :

– débouté Mme [E] [P] de l’ensemble de ses demandes,

– débouté la SAS Séquence 4 de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– laissé les dépens à la charge de Mme [E] [P].

Par acte du 16 juin 2021, Mme [E] [P] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 26 janvier 2023, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 24 avril 2023 à 16 heures et fixé l’examen de l’affaire à l’audience du 23 mai 2023 à laquelle elle a été retenue.

Aux termes de ses dernières conclusions du 16 septembre 2021, Mme [E] [P] demande à la cour de :

– recevoir son appel,

– le dire bien fondé en la forme et au fond,

En conséquence,

– réformer le jugement rendu en date du 7 juin 2021 en ce qu’il :

– la déboute de l’intégralité de ses demandes,

Sur l’exécution du contrat de travail,

– prononcer la requalification de la relation contractuelle en relation contractuelle à durée indéterminée à compter du 1er juin 2018,

– condamner l’employeur au paiement des sommes suivantes :

– 1 521,25 euros à titre d’indemnité de requalification,

– 10 648 euros à titre de rappel de salaire sur la période d’inactivité d’octobre 2018 à avril 2019,

– 4 837,44 euros à titre de rappel de salaire pour les heures non rémunérées de mai 2019 à septembre 2019,

– 483,74 euros de congés payés y afférents,

Sur la rupture du contrat de travail,

A titre principal,

– dire et juger que la rupture anticipée s’analyse comme un licenciement nul survenu pendant une suspension du contrat de travail,

En conséquence,

– condamner l’employeur au paiement des sommes suivantes :

– 1 521,25 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 152,12 euros de congés payés y afférents,

– 507,08 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 9 127,5 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul,

A titre subsidiaire,

– dire et juger que la rupture anticipée s’analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

– condamner l’employeur au paiement des sommes suivantes :

– 1 521,25 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 152,12 euros de congés payés y afférents,

– 507,08 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 5 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause,

– condamner l’employeur au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du CPC et les dépens,

– condamner l’employeur aux entiers dépens.

Mme [E] [P] soutient que :

– la relation de travail a débuté le 1er juin 2018 sans qu’un contrat de travail écrit n’ait couvert la période entre cette date et celle de la date d’effet du contrat à durée déterminée suivant , le 08 juin 2018, qu’il en est de même pour les mois de juillet, août et septembre 2018 ainsi que pour le mois de mai 2019 pour lequel aucun contrat n’a été conclu ; elle n’a pas signé le contrat de travail du 05 septembre 2019 au motif qu’aucun contrat ne lui avait été remis ; l’employeur est de mauvaise foi lorsqu’il tente de faire croire qu’elle avait refusé de signer ce contrat ; elle a été embauchée depuis pas moins de trois années en contrats d’extra successifs, de sorte que le caractère temporaire de son emploi n’était pas avéré et que la requalification doit s’imposer ; enfin, faisant référence à l’article 14 de la convention collective applicable, elle avait dépassé les 60 heures au regard des heures réalisées par trimestre ;

– à titre subsidiaire, la rupture anticipée du contrat s’analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; la rupture du contrat de travail étant intervenue sans motif légitime et alors qu’aucune procédure n’était mise en place et respectée, il est manifeste que la rupture anticipée s’analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En l’état de ses dernières écritures en date 20 septembre 2021, la SAS Séquence 4 demande à la cour de :

– débouter Mme [E] [P] de son appel comme étant dénué de fondement,

– confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

– débouter Mme [E] [P] de sa demande de requalification des contrats de travail d’ ‘extra’ en contrat de travail à durée indéterminée,

– la débouter de toutes ses demandes subséquentes,

– constater que Mme [E] [P] ne rapporte pas la preuve de s’être tenue à la disposition de son employeur pendant les périodes interstitielles, la débouter de tout rappel de salaire à ce titre,

– constater que les relations contractuelles ont été rompues par l’arrivée du terme du dernier contrat ‘d’extra’,

En conséquence,

– débouter Mme [E] [P] de toute prétention au titre de la rupture du contrat de travail,

– débouter Mme [E] [P] de toute prétention au titre des heures supplémentaires,

– la condamner au paiement de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

La SAS Séquence 4 fait valoir que :

– tous les contrats de travail ont été régularisés par la salariée ; concernant le mois de juin 2018, la date portée sur le bulletin de paie est celle du mois civil au cours duquel la prestation de travail a été effectuée, comme tous les bulletins de paie remis ; Mme [E] [P] ne prouve pas la réalité d’une prestation de travail en dehors de la période indiquée sur le contrat de travail alors qu’elle est débitrice en preuve ; il en est de même pour les mois de juillet, août et septembre 2018 ; le contrat de septembre 2019 n’a pas été signé par l’appelante et elle démontre que c’est la salariée qui a refusé de le signer ; elle ne peut donc pas se prévaloir de sa propre turpitude ; elle n’a pas non plus travaillé trois ans ; elle a eu recours à ses services sur une période de temps s’étalant du 21/06/2017 au 05/09/2019 de mai à septembre de chaque année et n’a été présente qu’au cours de 15 mois non consécutifs d’avril à septembre de chaque année, pendant la période touristique ; par ailleurs, Mme [E] [P] confond les heures avec les jours ; elle n’a jamais travaillé plus de 60 jours au cours d’un trimestre ;

– Mme [E] [P] est défaillante dans l’administration de la preuve s’agissant des périodes d’inactivité d’octobre 2018 à avril 2019 et la salariée est muette quant à sa situation professionnelle au cours de ces périodes et alors que l’établissement était fermé au cours des périodes pour lesquelles elle sollicite un rappel de salaire ; en tout état de cause, le quantum de sa prétention est disproportionné ;

– les relations contractuelles de travail ont été rompues par l’arrivée à son terme du dernier contrat d’ ‘extra’ qui a été exécuté du 01 au 05 septembre 2019 ; elle lui a adressé le 02 septembre 2019 tous les documents de fin de contrat et son solde de tout compte qu’elle n’a jamais contesté ; en tout état de cause, si la cour jugeait que la rupture des relations contractuelles serait abusive, elle ne saurait allouer une indemnité supérieure à un mois de salaire, la requalification ne pouvant être prononcée qu’à partir d’avril 2019 ;

– le seul document manuscrit produit par la salariée pour justifier du nombre d’heures supplémentaires non rémunérées, totalement unilatéral à l’exclusion de tout autre élément objectif, ne permet pas de satisfaire aux exigences de la jurisprudence constante en la matière ; les heures de travail étaient précisément notées sur les contrats de travail et la salariée n’a formulé aucune observation durant l’exécution de son contrat de travail ni même à l’expiration de chacun des contrats d’ ‘extra’.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

MOTIFS :

Sur la demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée :

L’article L1242-12 du code du travail dispose que le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée.

Il comporte notamment :

1° Le nom et la qualification professionnelle de la personne remplacée lorsqu’il est conclu au titre des 1°, 4° et 5° de l’article L. 1242-2 ;

2° La date du terme et, le cas échéant, une clause de renouvellement lorsqu’il comporte un terme précis ;

3° La durée minimale pour laquelle il est conclu lorsqu’il ne comporte pas de terme précis ;

4° La désignation du poste de travail en précisant, le cas échéant, si celui-ci figure sur la liste des postes de travail présentant des risques particuliers pour la santé ou la sécurité des salariés prévue à l’article L. 4154-2, la désignation de l’emploi occupé ou, lorsque le contrat est conclu pour assurer un complément de formation professionnelle au salarié au titre du 2° de l’article L. 1242-3, la désignation de la nature des activités auxquelles participe le salarié dans l’entreprise;

5° L’intitulé de la convention collective applicable ;

6° La durée de la période d’essai éventuellement prévue ;

7° Le montant de la rémunération et de ses différentes composantes, y compris les primes et accessoires de salaire s’il en existe ;

8° Le nom et l’adresse de la caisse de retraite complémentaire ainsi que, le cas échéant, ceux de l’organisme de prévoyance.

L’article L1245-1 du même code dispose :

– dans sa version applicable du 24/09/2017 au 22/12/2017 qu’est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L. 1242-1 à L. 1242-4, L. 1242-6, L. 1242-7, L. 1242-8-1, L. 1242-12, alinéa premier, L. 1243-11, alinéa premier, L. 1243-13-1, L. 1244-3-1 et L. 1244-4-1, et des stipulations des conventions ou accords de branche conclus en application des articles L. 1242-8, L. 1243-13, L. 1244-3 et L. 1244-4. La méconnaissance de l’obligation de transmission dans le délai fixé par l’article L. 1242-13 ne saurait, à elle seule, entraîner la requalification en contrat à durée indéterminée. Elle ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ( la méconnaissance de l’obligation de transmission du contrat de mission au salarié dans le délai fixé par l’article L. 1242-13 ne saurait, à elle seule, entraîner la requalification en contrat à durée indéterminée. Elle ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être supérieure à un mois de salaire, pour la version applicable à compter du 22/12/2017)

L’article 14 de la convention collective nationale 1997-04-30 des hôtels, cafés restaurants prévoit que les contrats à durée déterminée sont établis conformément à la législation en vigueur. Les conditions d’emploi des extras et des saisonniers sont précisées comme suit:

1. Extras

L’emploi d’extra qui, par nature, est temporaire est régi par les dispositions légales en vigueur.

Un extra est engagé pour la durée nécessaire à la réaiisation de la mission. Il peut être appelé à être occupé dans un établissement quelques heures, 1 journée entière ou plusieurs journées consécutives dans les limites des durées définies par l’article 21.2.c.

Un extra qui se verrait confier par le même établissement des missions pendant plus de 60 jours dans un trimestre civil pourra demander la requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée (…).

En l’espèce, plusieurs contrats d’usage ‘extra’ ont été conclus entre Mme [E] [P] et la SAS Séquence 4 le :

– 21/06/2017 jusqu’au 28/06/2017 (8 jours)

– 06/07/2017 jusqu’au 21/07/2017 (16 jours)

– 02/08/2017 au 23/08/2017 (22 jours)

– 28/04/2018 pour la période du 01/05/2018 au 31/05/2018 (32 jours)

– 05/06/2018 pour la période du 08/06 au 29/06/2018 (22 jours)

– 05/07/2018 pour la période du 06/07/2018 au 28/07/2018 (23 jours)

– 03/08/2018 pour la période du 07/08 au 30/08/2018 (24 jours)

– 02/09/2018 pour la période du 06/09 au 15/09/2018 (10 jours)

– 29/06/2019 pour la période du 09/06/2019 au 29/06/2019 (21 jours)

– 02/07/2019 pour la période du 04/07/2019 au 21/07/2019 (18 jours)

– 30/08/2019 pour la période du 02/08/2019 au 24/08/2019 (23 jours)

– 01/09/2019 pour la période du 01/09/2019 au 05/09/2019 (5 jours).

Mme [E] [P] sollicite la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée au motif, d’une part, qu’elle avait poursuivi ses missions de travail en qualité d’aide cuisinière sans qu’un contrat de travail écrit n’ait été conclu à compter du 1er juin 2018, pour les mois de juillet, août et septembre 2018 et pour le mois de mai 2019, d’autre part, qu’elle n’a pas signé le contrat de travail pour le mois de septembre 2019, contestant avoir refusé de signer le document comme le soutient l’employeur ; Mme [E] [P] produit notamment à l’appui de sa demande un bulletin de salaire du mois de juin 2018 édité par la SAS Séquence 4 sur lequel sont mentionnées la date du 01/06/2018 qui correspondrait à la date d’entrée au sein de la société et celle du 30/06/2018.

La SAS Séquence 4 soutient que la première date figurant sur le bulletin de salaire correspond à celle du mois civil au cours duquel la prestation de travail a été effectuée comme tous les bulletins de salaire de paie remis.

Force est de constater que la seule production des bulletins de salaire sur lesquels sont mentionnés la période de la ‘paye’ est insuffisante pour établir la réalité d’un travail effectif aux périodes revendiquées par la salariée, dans la mesure où la comparaison entre les dates de travail fixées dans les différents contrats de travail et celles figurant sur les bulletins de salaire ne sont pas systématiquement concordantes et qu’il en résulte incontestablement des erreurs matérielles, étant précisé que la salariée ne sollicite pas avoir travaillé pour toutes les périodes ‘de discordance’.

Quant au contrat de travail daté du 1er septembre 2019, il est constant qu’il n’a pas été signé par Mme [E] [P].

La SAS Séquence 4 produit deux attestations établies par Mme [K] [X], retraitée et de M. [M] [J], retraité et client du restaurant, selon lesquelles Mme [D], responsable de la SAS Séquence 4 a remis en main propre à Mme [E] [P] son contrat de travail le 05 septembre 2019 qu’elle a refusé de signer ‘parce qu’elle avait mal à la main’, alors qu’elle aurait dû faire depuis le début du mois.

Enfin, Mme [E] [P] soutient avoir travaillé depuis pas moins de trois années consécutives en contrats d’usage ‘extra’, et se prévaut de l’absence du caractère temporaire de son emploi alors que la convention collective applicable le prévoit, ce qui justifie la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.

Or, d’une part, il convient de relever que Mme [E] [P] opère une confusion dans les unités puisqu’elle évoque des missions d’une durée totale de 60 heures par trimestre alors que la convention collective applicable mentionne en son article 14, 60 jours, d’autre part, que la durée des différentes missions confiées par la SAS Séquence 4 à Mme [E] [P] dans le cadre des différents contrats à durée déterminée ci-dessus listés, n’a manifestement pas dépassé les 60 jours au cours de chaque trimestre civil pour les années 2017, 2018 et 2019.

Il se déduit des éléments qui précèdent que la demande de requalification présentée par Mme [E] [P] n’est pas fondée ; le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

A défaut de faire droit à sa demande de requalification, les demandes tendant à la condamnation de la SAS Séquence 4 au paiement d’une indemnité de requalification et à un rappel de salaire pour la période d’inactivité ne peuvent pas prospérer.

Mme [E] [P] sera donc déboutée de ces chefs de demande et le jugement entrepris confirmé sur ce point.

Sur la demande d’heures supplémentaires :

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures supplémentaires de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précisées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l’opposition à l’exécution de celle-ci de l’employeur se trouvant alors indifférente.

Le salarié peut revendiquer le paiement d’heures supplémentaires à raison de l’accord tacite de l’employeur.

En l’espèce, Mme [E] [P] sollicite un rappel de salaires à ce titre d’un montant de 4837,44 euros pour la période comprise entre mai et septembre 2019 et produit à cet effet :

– un document manuscrit sur lequel sont mentionnés pour chaque jour le début et la fin de la journée de travail et le nombre total d’heures travaillées pour la période comprise entre le 01 mai 2019 et le 05 septembre 2019,

– un tableau récapitulatif des heures qu’elle dit avoir réellement effectuées, chaque mois, pendant la même période, le nombre d’heures payées, le nombre d’heures travaillées non rémunérées et le montant des rappels de salaire.

En réponse, la SAS Séquence 4 indique que le nombre d’heures travaillées figure sur les bulletins de salaire et est mentionné sur les différents contrats de travail, que la salariée n’a formulé aucune observation durant l’exécution de la relation contractuelle et qu’elle a signé un solde de tout compte qu’elle n’a jamais dénoncé dans le délai de six mois .

La société intimée produit à cet effet :

– un solde de tout compte daté du 30 septembre 2018 sur lequel est mentionnée la somme de 468,50 euros correspondant au salaire brut à hauteur de 702,39 euros ( salaire de base 560 euros, avantages nourriture 78,54 euros et indemnité compensatrice de congés payés 63,85 euros), des retenues au titre des cotisations sociales à hauteur de 155,35 euros et au titre des avantages repas MG à hauteur de 78,54 euros,

– un solde de tout compte daté du 05 septembre 2019 signé par Mme [E] [P] et portant la mention ‘bon pour règlement des sommes indiquées’ et qui porte sur une somme totale de 193,61 euros : 381,14 euros au titre du salaire de base, 14,48 euros à titre d’indemnité compensatrice de nourriture, 60,96 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés et une retenue de 210,63 euros pour absence entrée/sortie.

Il n’est pas contesté que le solde de tout compte signé 05 septembre 2019 n’a pas été dénoncé par la salariée, étant précisé qu’il mentionnait expressément l’article L1234-20 du code du travail , le délai pendant lequel elle pouvait le contester et l’avertissement selon lequel passé le délai de six mois, elle ne pouvait plus contester les sommes qui y sont mentionnées.

En conséquence, ce reçu pour solde de tout compte a un effet libératoire pour l’employeur, de sorte que Mme [E] [P] n’est plus en droit de prétendre à un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires.

Mme [E] [P] sera déboutée de ce chef de demande et le jugement entrepris confirmé sur ce point.

Sur la rupture de la relation contractuelle :

A défaut de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la demande présentée par Mme [E] [P] tendant à requalifier la rupture de la relation contractuelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut pas prospérer, quand bien même la salariée justifie notamment par la production d’une attestation de paiement des indemnités journalières par la caisse primaire d’assurance maladie du Gard, avoir été prise en charge au titre d’un accident de travail survenu le 05 septembre 2019, jour de la rupture de la relation de travail.

Dès lors, ses demandes d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité de licenciement, d’indemnité pour licenciement nul et de dommages et intérêts pour préjudices moral et financier ne sont pas fondées et seront rejetées, tout comme ses demandes présentées à titre subsidiaire et motivées par le fait que la rupture du contrat de travail serait intervenue sans motif légitime et sans mise en place et respect d’une quelconque procédure de licenciement.

Au vu de l’ensemble de ces considérations, il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud’homale et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes le 07 juin 2021,

Condamne Mme [E] [P] à payer à la SAS Séquence 4 la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne Mme [E] [P] aux dépens de la procédure d’appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x