Contrat à durée déterminée d’usage : 18 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/12384

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Contrat à durée déterminée d’usage : 18 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/12384
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Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRET DU 18 MAI 2022

(n°2022/ , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/12384 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CBEUD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Novembre 2019 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’EVRY COURCOURONNES – RG n° 19/00396

APPELANT

Monsieur [X] [J]

[Adresse 6]

[Localité 8]

Représenté par Me Aldjia BENKECHIDA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0556

INTIMES

Me [E] [V] ès qualités de mandataire judiciaire de Société PROJEF

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représenté par Me Frédéric ENSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1350

Me [S] [P] (SELARL AJ PARTENAIRES) ès qualités d’administrateur judiciaire de Société PROJEF

[Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 1]

Représenté par Me Frédéric ENSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1350

SARL PROJEF

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Frédéric ENSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1350

PARTIE INTERVENANTE :

Association AGS CGEA DE [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée par Me Hélène NEGRO-DUVAL de la SAS DUVAL LEGAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0197

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 mars 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS ET DU LITIGE

M. [J] a travaillé pour le compte de la société Projef en qualité d’animateur commercial coefficient 120 dans le cadre de plusieurs CDD d’usage du 5 janvier 2012 au 14 décembre 2018.

A compter du mois de décembre 2018, la société Projef a cessé de fournir des missions à M. [J].

Par jugement du 14 février 2018, le tribunal de commerce de Besançon a ouvert une procédure de sauvegarde à l’égard de la société Projef. Me [P] a été désigné administrateur judiciaire et Me [V] mandataire judiciaire.

La convention collective applicable est celle des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire.

Par requête en date du 21 mai 2019, M. [J] a saisi le conseil de prud’hommes aux fins d’obtenir la requalification de ses contrats de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et la condamnation de la société Projef au paiement de diverses sommes.

Par jugement rendu le 14 novembre 2019, le conseil de prud’hommes d’Evry a condamné la société Projef à verser une somme de 2 129,19 euros à M. [J] à titre de rappel de prime de précarité, mais l’a débouté du surplus de ses demandes.

Par déclaration en date du 18 décembre 2019, M. [J] a interjeté appel de cette décision.

Par jugement du 4 novembre 2020, la société Projef a été placée en redressement judiciaire. Un plan de continuation a été arrêté le 5 mai 2021.

Dans ses conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 10 janvier 2022, auxquelles il est fait expressément référence, M. [J] demande à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il lui a alloué la somme de 2 129,19 euros à titre de rappel de prime de précarité.

l’Infirmer pour le surplus et ce faisant :

– Vu l’art L 1242-1 du code du travail

– Juger que les contrats à durée déterminée exécutés par M. [J] doivent être requalifiés en un seul contrat à durée indéterminée, les contrats en cause ayant eu pour objet et pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise, et ne satisfaisant pas à l’obligation légale de mentionner un motif de recours.

– Vu les articles L 3123-14 et suivants du code du travail

– Vu l’absence de mention du volume des heures de travail et de la répartition des horaires dans la semaine

– Vu la disponibilité totale exigée du salarié

– Vu l’exécution par le salarié de plusieurs mois de travail à temps plein

– Juger que les contrats conclus par M. [J] avec la SARL Projef doivent être requalifiés en un contrat à temps plein

– Fixer le salaire de référence de M. [J] à la somme de 1 498,49 euros (151,67 heures au taux contractuel de 9,88 euros)

– Condamner en conséquence la SARL Projef à payer à M. [J] la somme de 25 692,54 euros au titre du rappel de salaire au titre du temps plein, ainsi que la somme de 2 569,25 euros au titre des congés payés afférents

– Juger que les dites sommes produirons intérêt au taux légal à compter du 20 mai 2019, date de saisine du conseil de prud’hommes

– Vu l’absence de paiement de la prime de précarité et des majorations d’heures supplémentaires

– Vu les dispositions des art. L8221-5, L8223-1 et L3123-17 et suivants :

– Vu les poursuites pénales dont a fait l’objet la société Projef

– Condamner la société Projef à payer à M. [J] la somme de 8 990,94 euros au titre de l’indemnité pour travail dissimulé (6 mois de salaire art. L8223-1)

– Vu l’article L 1245-2 du code du travail :

– Condamner la SARL Projef, à payer à M. [J] la somme de 1 498,49 euros au titre de l’indemnité de requalification.

– Fixer la date de rupture du contrat au 31 décembre 2018 (dernier bulletin de salaire)

– Condamner la SARL Projef, à payer à M. [J] :

– 2 996,99 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

– 299,69 euros au titre des congés payés afférents

– 1 027,27 euros à titre d’indemnité légale de licenciement

– 11 987,92 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause (8 mois de salaire barème Macron)

– Condamner la société Projef à payer la somme de 1500 euros au titre de l’art. 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de 1ère instance et d’appel.

– Subsidiairement, et si par impossible la société Projef venait justifier de son insolvabilité, malgré le plan de redressement lui ayant été consenti :

– Condamner le mandataire judiciaire à inscrire l’intégralité des sommes précitées au passif de la procédure collective, et l’AGS à garantir les dites sommes dans les limites légales de sa garantie.

– Condamner la société Projef à remettre les bulletins de salaire rectifiés.

Dans leurs ultimes conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 3 janvier 2022, auxquelles il est fait expressément référence, la société Projef, prise en la personne de Me [E] [V], es qualité de commissaire à l’exécution du plan de la S.A.R.L Projef, et la SELARL AJ PARTENAIRES, représentée par Me [S] [P], es qualité d’administrateur judiciaire, demandent à la cour de :

à titre principal :

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Evry en toutes ses dispositions

– condamner M. [J] à rembourser une somme de 12 141,92 euros au titre des indemnités kilométriques indues.

A titre subsidiaire :

– Fixer le salaire moyen de M. [J] à 727,76 euros bruts.

– Limiter le montant de l’indemnité de licenciement à 1 262,75 euros nets, l’indemnité compensatrice de préavis à 1 455,22 euros bruts outre 145,55 euros bruts au titre des congés payés y afférents

– Réduire les dommages et intérêts alloués à de plus justes proportions.

En tout état de cause :

– Condamner M. [J] au paiement de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 28 avril 2021, l’AGS demande à la cour de :

– Donner acte à la concluante des conditions et limites de l’intervention et de la garantie de l’AGS et Dire que la décision à intervenir ne sera opposable à l’AGS que dans les conditions, limites et plafonds de sa garantie,

– Confirmer le jugement dont appel et débouter M. [J] de ses demandes, fins et conclusions,

– Rejeter les demandes de fixation de créances qui ne sont ni fondées dans leur principe ni justifiées dans leur montant et en tout état de cause, réduire aux seuls montants dûment justifiés les montants des créances susceptibles d’être fixées, notamment à titre de salaires et à titre d’indemnités.

La clôture a été prononcée par ordonnance en date du 18 janvier 2022.

MOTIFS

– Sur la recevabilité de la demande au titre du travail dissimulé.

Les intimés soulèvent l’irrecevabilité de la demande de M. [J] tendant au paiement d’une indemnité au titre du travail dissimulé dès lors qu’elle ne figurait pas dans la requête introductive d’instance de celui-ci.

La cour rappelle en effet que l’article 8 du décret n° 1016-660 du 20 mai 2016 a abrogé à compter du 1er août 2016 l’article R. 1452-6 du code du travail qui consacrait la règle de l’unicité de l’instance sur le fondement duquel, l’article 564 du code de procéure civile n’était pas applicable en matière d’appel prud’homal en sorte qu’il était possible de présenter en appel, des demandes nouvelles. Dès lors, à compter du 1er août 2016, les demandes nouvelles en cause d’appel, y compris en matière prud’homale, doivent être d’office déclarées irrecevables par application de l’article 564 précité sauf si elles sont formulées pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

En l’espèce, la demande de M. [J] au titre du travail dissimulé n’avait pas été formulée devant le conseil de prud’hommes mais elle n’a été présentée pour la première fois que dans ses conclusions d’appel du 13 férier 2020.

Par suite, cette réclamation nouvelle en cause d’appel, doit êre déclarée irrecevable étant observé qu’elle ne tend pas à opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

– Sur la requalification en contrat de travail à durée indéterminée

M. [J] fait valoir qu’il a été employé pendant 7 années par la société Projef, toujours au même poste, en vertu de dizaines de contrats successifs, et a reçu chaque mois un bulletin de salaire durant toute cette période, que son emploi était lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise, et que les contrats en cause ne faisaient état d’aucun motif de recours.

Les intimés répliquent successivement qu’au vu des dispositions légales et de la convention collective applicable, l’emploi d’un animateur commercial est par nature temporaire et il est dès lors d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée, que les animations commerciales ne sont pas permanentes mais aléatoires et non planifiées à l’avance, qu’il ne s’agit donc pas d’un emploi lié à l’activité normale et permanente de la société, que les missions de M. [J] étaient temporaires et qu’enfin chaque CDD précisait le motif de recours «CDD d’usage d’animation commerciale».

L’article L1242-2 3° du code du travail autorise la conclusion d’un contrat de travail à durée déterminée pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire dans le cas d’emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

L’information, les activités d’enquête et de sondages figurent à l’article D1242-1 8° du code du travail identifiant ces secteurs d’activités; ce qui est expressément admis par M. [J].

En outre, le contrat de travail de celui-ci est conclu en application de la convention collective des prestataires de services et particulièrement de l’accord du 13 février 2006 relatif aux activités de l’animation commerciale lequel stipule expressément que les activités d’animation commerciale se déroulent autour d’actions limitées dans le temps et l’espace, obligeant les organisateurs, afin de répondre aux besoins du client dans le respect des droits des salariés, à un aménagement et une organisation du travail dans les limites des garanties fixées par la loi.

Ces dispositions doivent néanmoins être interprétées à la lumière de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en ‘uvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, et impose de vérifier que le recours à l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.

Aussi, la seule qualification conventionnelle de « contrat d’intervention à durée déterminée d’animation commerciale » n’établit pas qu’il peut être conclu, dans ce secteur de l’animation ou de la promotion commerciale, des contrats à durée déterminée d’usage successif pour tout poste et en toutes circonstances.

Il appartient au juge de rechercher si, pour l’emploi considéré, il est effectivement d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée et de vérifier si le recours à des contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.

En vertu de l’article L1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Si la société Projef expose que le code du travail autorise expressément la succession de CDD d’usage sans limitation de durée, et qu’au regard de l’accord collectif précité puis de la convention collective, M. [J] était embauché sur un poste pour lequel il était d’usage constant de ne pas recourir à un CDI, encore s’agissait-il qu’il soit réellement affecté sur

un emploi par nature temporaire et non sur un poste lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

En outre, l’article L.1242-12 du code du travail dispose que le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée.

La charge de la preuve du contenu du CDD, et notamment de la nature temporaire de l’emploi, pèse sur l’employeur qui a choisi de recourir à ce type de contrat.

En l’espèce, c’est M. [J] qui produit ces CDD dans sa pièce 1.

Il sera d’emblée relevé que les contrats faisaient référence de manière générique à l’«usage constant de ne pas recourir à un CDD en raison de la nature de l’activité exercée…» sans indication d’un motif précis.

En outre l’importance du nombre de contrats sur l’ensemble de la période considérée (une centaine de CDD), le volume journalier annuel du salarié (certains contrats étant conclus pour un certain nombre de jours dans le mois, ce nombre de journées variant chaque mois), ainsi que la constance de l’emploi occupé (invariablement affecté à l’animation, le merchandising et la démonstration de produits) démontrent que le poste de M. [J] correspondait à un emploi ressortant de l’activité permanente de la société et non d’une activité temporaire.

En application des dispositions précitées, le contrat de travail de M. [J] doit être requalifié en contrat à durée indéterminée. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

– Sur la requalification en contrat à temps plein

M. [J] sollicite cette requalification en faisant valoir que le nombre de jours à travailler d’un mois à l’autre étant totalement imprévisible, qu’il devait s’astreindre à être à la totale disposition de l’employeur, qu’il ne pouvait s’organiser pour compléter son temps partiel, et que sa durée de travail avait d’ailleurs été portée à temps complet à plusieurs reprises.

Les intimés opposent que chaque contrat de travail précisait expressément les jours travaillés et la durée de travail journalière de sorte que M. [J] n’était pas dans l’impossibilité de prévoir son rythme de travail, ni ne se trouvait dans l’obligation de se tenir à disposition de l’employeur.

Il est constant qu’en l’absence de précision sur la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail et de sa répartition entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, le contrat doit être requalifié en contrat à temps complet si le salarié a été mis dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il pourrait travailler chaque mois et s’est trouvé dans l’obligation de se tenir en permanence à la disposition de l’employeur. Il en résulte que pour que le contrat à temps partiel soit requalifié à temps complet, le salarié doit s’être trouvé dans l’impossibilité de prévoir son rythme de travail et s’être également trouvé dans l’obligation de se tenir à la disposition permanente de son employeur. Dès lors que le contrat de travail précise les jours et les heures travaillées, il appartient au salarié de démontrer qu’il était tenu de rester à la disposition permanente de son employeur.

En l’espèce, M. [J] ne démontre pas qu’il était dans l’impossibilité de prévoir son rythme de travail, ni qu’il était dans l’obligation de se tenir en permanence à la disposition de la société. En effet l’examen des contrats de travail versés aux débats démontre que ceux-ci précisaient expressément les jours travaillés et la durée de travail journalière. Pour chaque mission, un nouveau CDD était conclu qui mentionnait expressément les jours de travail ainsi que la durée de travail journalière. Ainsi le salarié était informé à l’avance de son rythme de travail. Il pouvait d’ailleurs refuser de régulariser un CDD ou faire part de ses indisponibilités afin de se libérer sur un autre poste. Il n’était donc pas tenu de rester à la disposition permanente de l’employeur ainsi qu’il le prétend.

Il résulte de ce qui précède que la demande de M. [J] tendant à voir juger que les contrats conclus avec la SARL Projef soient requalifiés en un contrat à temps plein sera rejetée. Ses reclamations subséquentes tendant à la condamnation de la société à lui verser un rappel de salaires de ce chef sera pareillement rejetée.

M. [J] fait valoir que le deuxième motif de requalification à temps plein résulterait de l’examen des bulletins de salaires selon lesquels il aurait travaillé à temps plein durant les mois de juillet 2014, juillet 2015, juillet et août 2016 et il soutient que l’accomplissement d’heures complémentaires ne peut avoir pour effet de porter la durée du travail au niveau de la durée légale. Il ajoute que lorsque le recours à des heures complémentaires a pour effet de porter la durée du travail d’un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale ou conventionnelle, le contrat de travail à temps partiel doit, à compter de sa première irrégularité, être requalifié en contrat de travail à temps plein.

En application de l’article L. 3123-17 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, le nombre d’heures complémentaires accomplies par un salarié à temps partiel au cours d’une même semaine ou d’un même mois ou sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l’article L.3122-2 ne peut être supérieur au dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue dans son contrat. Ce seuil peut certes être porté au tiers de la durée stipulée au contrat par « une convention ou un accord collectif de branche étendu ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement » (C. trav., art. L. 3123-18); mais, par application du deuxième alinéa de l’article L. 3123-17, les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail accomplie par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement. En cas de non-respect de cette règle, le contrat doit être requalifié en un contrat à temps complet.

Sur les 4 périodes précitées pour lesquelles M. [J] prétend avoir effectué des heures complémentaires – qui auraient eu pour effet selon lui de porter la durée du travail à un temps plein – à savoir les mois de juillet 2014 (161 heures), juillet 2015 (161 heures), juillet 2016 (154 heures), août 2016 (154 heures), il apparaît plutôt, à la lecture des CDD produits, que ces derniers n’avaient prévu aucune heure complémentaire mais avaient dûment précisé la durée mensuelle du travail qui était respectivement organisée comme suit : 25 jours en juillet 2014, 23 jours en juillet 2015, 22 jours en juillet 2016. M. [J] ne fournit pas son contrat pour le mois d’août 2016.

Il apparaît ainsi que chaque contrat précisait la durée de travail mensuel puisque celle-ci dépendait du nombre de journées d’animation à effectuer.

Il n’y a donc eu aucune heure complémentaire au sens des dispositions précitées et dès lors M. [J] ne saurait davantage demander la requalification de son contrat à temps partiel en contrat à temps plein sur ce fondement. Ses demandes subséquentes au titre des rappels de salaires sera donc rejetée.

– Sur l’indemnité de requalification

En vertu de l’article L1245-2 du code du travail, lorsque le conseil de prud’hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l’employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. Cette disposition s’applique sans préjudice de l’application des dispositions du titre III du présent livre relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée.

Le salaire brut moyen de M. [J], en l’état des pièces versées aux débats doit être fixé à la somme de 727,76 euros bruts.

Il lui sera alloué la somme de 1400 euros à titre d’indemnité de requalification.

-Sur les indemnités de rupture :

Compte tenu de la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée, la rupture de cette relation survenue en décembre 2018 s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il convient donc de statuer ci-après sur le montant des indemnités dues à M. [J].

– sur l’indemnité de licenciement

En vertu de l’article L1234-9 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

M. [J] sollicite la somme de 1027,27 euros de ce chef et il doit être fait droit à cette réclamation. Le jugement entrepris étant infirmé.

– sur l’indemnit compensatrice de préavis

En application des articles L. 1234-1 et L. 1234-2 du code du travail, le salarié a droit à un délai-congé dont la durée varie en fonction de l’ancienneté; qu’avec une ancienneté supérieure à 2 ans, comme tel est le cas en l’espèe, la durée du prévis est fixée à 2 mois.

M. [J] a droit à une indemnité compensatrice de préavis de 1455,52 euros bruts outre 145,55 euros bruts au titre des congés payés afférents. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

– sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La cessation des relations contractuelles à compter de décembre 2018 par le fait de l’employeur qui n’a plus donné de missions à son salarié – et alors même que les CDD ont été requalifiés en CDI – est constitutive d’une rupture abusive du contrat de travail aux torts de la société qui doit s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le salarié est donc fondé en sa demande indemnitaire de ce chef.

Compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération de M. [J], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences de la rupture contractuelle à son égard, tels qu’ils résultent des pièces versées aux débats, la cour retient que l’indemnité à même de réparer intégralement le préjudice du salarié doit être évaluée à la somme de 3000 euros.

– Sur la remise de bulletins de salaires rectifiés

Dès lors qu’il n’a pas été fait droit à la demande de rappels de salaire, il ne saurait être fait droit à cette demande.

– Sur la demande en remboursement au titre des indemnités kilométriques

Les intimés sollicitent la condamnation de M. [J] à payer la somme de 12 141,92 euros de ce chef.

Il apparaît cependant qu’aucune des pièces versées aux débats ne permet de justifier de cette demande. Celle-ci sera donc rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

Enfin, il sera alloué une somme de 1000 euros à M. [J] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

DÉCLARE irrecevable la demande indemnitaire présentée au titre du travail dissimulé.

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il a débouté M. [J] de la demande en requalification de ses CDD en contrat à durée indéterminée et de ses demandes indemnitaires de ce chef.

Statuant à nouveau,

DIT que le contrat de travail de M. [J] doit être requalifié en contrat à durée indéterminée.

DIT que la rupture de la relation contractuelle survenue en décembre 2018 s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse

CONDAMNE la société Projef, prise en la personne de Me [E] [V], es qualité de commissaire à l’exécution du plan de la S.A.R.L Projeff, et la SELARL AJ PARTENAIRES, représentée par Me [S] [P], es qualité d’administrateur judiciaire à payer à M. [J] les sommes suivantes :

-1400 euros à titre d’indemnité de requalification.

-1027,27 euros à titre d’indemnité légale de licenciement.

-1455,52 euros bruts au titre de l’indemnit compensatrice de préavis outre 145,55 euros au titre des congés payés afférents

– 3000 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

-1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

DÉBOUTE les parties de leurs conclusions plus amples ou contraires.

CONDAMNE la société Projef, prise en la personne de Me [E] [V], es qualité de commissaire à l’exécution du plan de la S.A.R.L Projeff, et la SELARL AJ PARTENAIRES, représentée par Me [S] [P], es qualité d’administrateur judiciaire aux dépens.

DÉCLARE le présent arrêt opposable à l’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de [Localité 11]

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE

 


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