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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 83C
19e chambre
ARRET N°
REPUTE CONTRADICTOIRE
DU 16 NOVEMBRE 2022
N° RG 20/02826
N° Portalis DBV3-V-B7E-UGPD
AFFAIRE :
[U] [C]
…
C/
S.A.S. AFRIMEDIA
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Octobre 2020 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE-BILLANCOURT
N° Chambre :
N° Section : AD
N° RG : F 14/00058
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
la SELARL Brihi-Koskas & Associés
la SELARL SIMON ASSOCIES
la SCP HADENGUE & ASSOCIES
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEIZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [U] [C]
né le 24 Novembre 1988 à Libourne
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentant : Me Zoran ILIC de la SELARL Brihi-Koskas & Associés, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0137 substitué par Me Olivia MAHL, avocat au barreau de PARIS
SYNDICAT NATIONAL DES MEDIAS CFDT
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentant : Me Zoran ILIC de la SELARL Brihi-Koskas & Associés, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0137 substitué par Me Olivia MAHL, avocat au barreau de PARIS
APPELANTS
****************
S.A.S. ALLIANCE prise en la personne de Maître [E] [J] es qualité de liquidateur de la Société AFRIMEDIA.
N° SIRET : 509 085 098
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représentant : Me Hubert MARTIN DE FREMONT de la SELARL SIMON ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0411
Association UNEDIC, DÉLEGATION AGS CGEA IDFO
[Adresse 2]
[Localité 10]
Représentant : Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98 – N° du dossier 2000886
S.E.L.A.S. CID & ASSOCIES CID & ASSOCIES, représentée par Maître [V] [W], ès qualité d’administrateur judiciaire de la société AFRIMEDIA
N° SIRET : 509 851 499
[Adresse 6]
[Localité 7]
Non constitué
S.A.S. AFRIMEDIA
N° SIRET : 509 085 098
[Adresse 5]
[Localité 9]
Non constitué
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 18 Octobre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MONTAGNE, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Isabelle MONTAGNE, Président,
Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,
Madame Laure TOUTENU, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE,
EXPOSE DU LITIGE
[U] [C] a été engagé par la société Afrimédia suivant un contrat de travail à durée déterminée d’usage à compter du 3 août 2009 en qualité de chargé d’antenne relevant de la fonction production et du métier de monteur, catégorie non cadre, niveau de classification 2, en référence aux dispositions de la convention collective nationale des chaînes thématiques. Ce contrat a été suivi d’un second contrat à durée déterminée d’usage à compter du 1er janvier 2010 aux mêmes fonctions puis par avenant signé le 23 juin 2010, les relations de travail se sont poursuivies suivant un contrat à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2010 mentionnant des fonctions de responsable d’antenne, niveau de classification 3.
A compter de juillet 2011, le salarié est devenu ‘responsable coordination des productions’, ces fonctions étant mentionnées aux termes d’un avenant au contrat de travail prenant effet à compter du 1er décembre 2012.
A l’issue des élections professionnelles du 16 octobre 2012, le salarié a été élu membre de la délégation unique du personnel.
Par lettre datée du 19 mars 2014, le salarié s’est plaint à son employeur de sa situation professionnelle au sein de l’entreprise en invoquant subir des agissements graves ayant pour effet une dégradation de ses conditions de travail et un changement de poste et de responsabilités et des humiliations portant atteinte à son état de santé. Par lettre datée du 24 mars 2014, l’employeur a répondu au salarié. Par une lettre datée du 24 avril 2014, le salarié a réitéré ses doléances en les détaillant.
Le 24 mars 2014, [U] [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur ainsi que le paiement de dommages et intérêts pour violation du statut protecteur, pour discrimination syndicale et pour licenciement nul outre des indemnités de rupture. Le syndicat national des médias Cfdt est intervenu volontairement à l’instance.
Par lettre datée du 13 mars 2015, remise en mains propres le même jour, [U] [C] a pris acte de la rupture de son contrat de travail.
Par jugement du 30 janvier 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Afrimédia et a désigné la Selarl Cid & associés, mission conduite par maître [V] [W] en qualité d’administrateur judiciaire de ladite société ainsi que la Selas Alliance, mission conduite par maître [E] [J] en qualité de mandataire judiciaire de ladite société.
Par jugement du 8 février 2019, cette juridiction a prononcé la liquidation judiciaire de la société Afrimédia et a désigné la Selas Alliance, mission conduite par maître [E] [J] en qualité de liquidateur judiciaire de ladite société.
Par jugement mis à disposition le 13 octobre 2020, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt a mis hors de cause maître [V] [W] ès qualité d’administrateur judiciaire, a débouté [U] [C] de toutes ses demandes ainsi que le syndicat national des médias Cfdt et les autres parties de toutes leurs demandes, a dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile et a condamné [U] [C] aux entiers dépens.
Le 11 décembre 2020, [U] [C] et le syndicat national des médias Cfdt ont interjeté appel à l’encontre de ce jugement.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 12 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, [U] [C] et le syndicat national des médias Cfdt demandent à la cour d’infirmer le jugement, de juger que la prise d’acte de [U] [C] doit s’analyser en un licenciement nul car reposant sur une discrimination syndicale et ayant été prononcée en violation du statut protecteur, de fixer le salaire de référence de [U] [C] à 2 338 euros brut mensuel, de :
– fixer au passif de la société Afrimédia les sommes suivantes :
. au profit de [U] [C] :
* 4 308,54 euros à titre d’indemnité de licenciement,
* 4 676 euros à titre d’indemnité de préavis et 467,60 euros au titre des congés payés y afférents,
* 28 056 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
* 58 450 euros pour violation du statut protecteur,
* 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale,
*10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et de la convention collective,
juger que ces créances sont opposables à l’Unedic, Délégation Ags Cgea d’Ile de France Ouest, . au profit du syndicat national des médias Cfdt, 1 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l’article L. 2132-3 du code du travail,
– condamner solidairement la société Alliance Mission, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Afrimédia, la société Cid et associés en sa qualité d’administrateur judiciaire de la société Afrimédia et l’Unedic, Délégation Ags Cgea d’Ile de France Ouest, à verser au titre de l’article 700 du code de procédure civile :
* à [U] [C] la somme de 4 000 euros Ht,
* au syndicat des médias Cfdt la somme de 1 000 euros Ht,
– condamner la société Alliance Mission en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Afrimédia aux entiers dépens,
– assortir l’ensemble des condamnations des intérêts à taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes,
– prononcer sur le fondement de l’article 1154 du code civil la capitalisation des intérêts.
Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 7 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la société Alliance Mission représentée par maître [E] [J] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Afrimédia demande à la cour de :
– à titre principal, confirmer le jugement en ce qu’il a débouté [U] [C] de ses demandes, et y ajoutant, le condamner au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– à titre subsidiaire, juger irrecevable la demande du syndicat national des médias Cfdt et en toute hypothèse son éventuelle créance inopposable à la procédure collective et non justifiée, et réduire le quantum des dommages et intérêts et indemnités à de plus justes proportions,
– en tout état de cause, rejeter la demande d’article 700 du code de procédure civile, débouter l’appelant de toute demande de condamnation des organes de la procédure, fixer l’éventuelle créance allouée au salarié au passif de la société, dire que les sommes fixées sont brutes de charges et cotisations sociales, juger que le jugement de liquidation judiciaire a définitivement arrêté le cours des intérêts.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 29 juillet 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, l’Unedic, Délégation Ags Cgea d’Ile de France Ouest demande à la cour de :
– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
– juger irrecevables les demandes de condamnations de l’Ags, débouter [U] [C] et le syndicat national des médias Cfdt de leurs demandes,
– subsidiairement, ramener à de plus justes proportions la demande de dommages et intérêts pour licenciement nul à 14 028 euros, ramener à 18 704 euros la demande de dommages intérêts pour violation du statut protecteur,
– en tout état de cause, la mettre hors de cause s’agissant des frais irrépétibles de la procédure, juger qu’elle ne saurait garantir les demandes du syndicat, juger que la demande qui tend à assortir les intérêts au taux légal ne saurait prospérer postérieurement à l’ouverture de la procédure collective, fixer l’éventuelle créance allouée au salarié au passif de la société, juger que le Cgea ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-19 à 21 et L. 3253-17 du code du travail, juger que l’obligation du Cgea de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé établi par le mandataire judiciaire.
Les appelants ont fait signifier à la Selarl Cid et Associés représentée par maître [V] [W] en sa qualité d’administrateur judiciaire de la société Afrimédia :
– par acte d’huissier du 1er février 2021, la déclaration d’appel,
– par acte d’huissier du 24 mars 2021 les conclusions et pièces.
Celle-ci n’a pas constitué avocat. Par application de l’article 474 du code de procédure civile, l’arrêt sera réputé contradictoire.
Une ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 4 octobre 2022.
MOTIVATION
Sur la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié aux torts de l’employeur
Dans la mesure où la demande du salarié de résiliation judiciaire du contrat de travail a été suivie d’une prise d’acte de la rupture du contrat de travail, il y a lieu d’examiner le bien-fondé de cette prise d’acte, en prenant en considération l’ensemble des faits invoqués par le salarié.
Au soutien de sa prise d’acte de la rupture du contrat de travail, [U] [C] impute à la société Afrimédia :
– une modification unilatérale de ses fonctions, qui s’est traduite par une rétrogradation,
– une dégradation de ses conditions de travail,
– une atteinte à son état de santé,
– des faits de discrimination syndicale,
en relevant que son sort a été partagé par l’ensemble des représentants du personnel. Il réclame en conséquence la fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société Afrimédia de sa créance au titre des indemnités de licenciement et de préavis, ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement nul, discrimination syndicale et violation du statut protecteur.
Le liquidateur judiciaire de la société Afrimédia fait valoir que les manquements reprochés ne sont pas établis et ont de surcroît été allégués tardivement sans être de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail et que le salarié doit par conséquent être débouté de toutes ses demandes.
Lorsqu’un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements invoqués sont suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail, soit, dans le cas contraire, d’une démission.
La charge de la preuve des faits qu’il allègue à l’encontre de l’employeur à l’appui de sa prise d’acte pèse sur le salarié.
S’agissant de la modification unilatérale des fonctions qui s’est traduite par une rétrogradation
Le salarié fait valoir qu’avant les élections professionnelles, il a connu une évolution de carrière rapide et favorable, mais qu’à partir de sa prise de mandat, il n’a plus été convié aux réunions stratégiques auxquelles il était jusqu’alors convié ; qu’un nouveau responsable est apparu entre lui et la direction ; qu’il a été progressivement privé de toute fonction managériale et de tout pouvoir d’initiative ; qu’à compter de septembre 2013, il a été privé de ses missions concernant l’Africa News Room et a été progressivement affecté à un emploi de scripte, qui constitue un poste différent, s’accompagnant d’une déqualification et d’une perte de prérogatives.
Ces allégations sont établies par la production des pièces numérotées 10 à 18, 20, 23, 27, 28-1 à 28-3, 5, 6, 7, 24, 59, 29, 32, 44, 41 (plannings), 53, 54 et 65 produites par le salarié, consistant en:
– des échanges de courriels professionnels entre le salarié, ses collègues et sa hiérarchie, établissant sa position de manager dès le mois de juillet 2011, ce qui ressort de la mention de responsable de coordination de production figurant sur ses bulletins de paie, qui n’ a été officialisée que par avenant au contrat de travail prenant effet à compter du 1er décembre 2012 ;
– un organigramme de novembre 2012 le désignant comme ‘responsable coordination des productions’ ;
– des courriels et lettres à sa hiérarchie en mai et juin 2014 au sujet de ses demandes de validation de congés non validées ;
– un tableau mentionnant 38 samedis ou dimanches travaillés par le salarié sur les six derniers mois mais seulement 12 et 14 pour chacun de ses deux collègues responsables coordinateurs de production pour la même période ;
– des invitations à des réunions du Comdir à destination de tous les managers dont lui-même entre juin 2010 et février 2012 ;
– une attestation d’une ancienne collègue, [Y] [Z], rédigée de manière précise et détaillée indiquant notamment que les conditions de travail du salarié se sont dégradées à partir de novembre 2012, celui-ci se voyant retirer progressivement l’ensemble de ses fonctions et celui-ci ne participant plus à aucune réunion de direction et qu’il est devenu scripte, s’occupant du suivi et de la mise en ligne du journal télévisé, passant ainsi de responsable de la grille à scripte de la newsroom ;
– des échanges de courriels le 20 décembre 2012 avec sa hiérarchie au sujet de l’attribution d’un bureau situé à distance des collègues avec lesquels il collaborait et [A] [O] lui écrivant en réponse notamment : ‘je suis par ailleurs convaincu qu’une collaboration efficace ne nécessite pas forcément une proximité physique’ ;
– un échange de courriels entre le salarié et le dirigeant, M. [B] les 29 et 31 mai 2013 aux termes desquels ce dernier répond à son courriel pourtant dénué de tout abus de langage en ces termes : ‘tu n’as aucune raison ou aucun mobile sur le fond comme sur la forme d’envoyer ce type de mail. Tu n’a aucunément la moindre compétence et autorisation pour te mêler de nos engagements contractuels avec nos prestataires. Je ne veux aucune confusion sur notre mode de fonctionnement et sur tes responsabilités. Je ne veux aucune suggestion, ni initiative aussi louable soit-elle mais qui est complètement déplacé sur tous les aspects eu égard notre mode de fonctionnement. Merci de respecter tes prérogatives et la confidentialité de nos accords avec des tiers’,
puis après que le salarié lui ait indiqué que l’objet de sa demande lui semblait être légitime au regard des demandes à répétition qui lui formulaient les éditorialistes et lui ayant indiqué être ‘confus pour le désagrément occasionné’, le dirigeant lui répond en des termes autoritaires notamment : ‘ce n’est ni ton rôle, ni ta fonction, ni ta responsabilité active ou passive’, ‘point barre’, ‘tu n’as aucun droit, ni aucune légitimité à évoquer la teneur de leur contrat, ni à nous adresser ce type de mail’, ‘je ne veux plus voir ce type de mail de ta part, quelqu’en soit’, ‘que ce soit clair une fois pour toute. Discussion close’ ;
– ses plannings de travail dont il ressort notamment qu’il a été affecté sur le poste de scripte 21 jours sur 21 en octobre 2013, 15 jours sur 18 en novembre 2013, 10 jours sur 13 en décembre 2013 et 19 jours sur 19 en mars 2014 ;
– des échanges de courriels avec sa hiérarchie en septembre 2014 se plaignant de sa charge de travail importante en tant que scripte, étant seul présent à la rédaction (notamment le 4 septembre et le 25 septembre 2014) ;
– sa fiche de poste et celle de scripte, dont il ressort que les fonctions sont différentes.
La matérialité de ces faits est établie.
S’agissant de la dégradation des conditions de travail
Le salarié fait valoir qu’il subissait un isolement professionnel et géographique suite à la nouvelle organisation des bureaux mise en place par l’employeur en décembre 2012 ; que suite à sa demande de résiliation judiciaire, il s’est retrouvé en charge de 60 % des week-ends, alors qu’ils étaient trois salariés concernés ; qu’à son retour d’arrêt de travail pour maladie en mai 2014, l’employeur a refusé de lui accorder ses congés payés ; qu’il a fait l’objet de mesures vexatoires et de reproches injustifiés, le dirigeant passant alors d’un tutoiement amical à un vouvoiement révérencieux dans ses écrits et de mises en cause humiliantes publiquement.
Ces faits sont établis par les pièces précédemment citées ainsi que les pièces du salarié numérotées 29, 41, 56, 46, 47, 66, 9, 25, 31, 30, 32, 43, 52 consistant en :
– des courriels et lettres à sa hiérarchie en mai et juin 2014 au sujet de ses demandes de validation de congés non validées puis refusées sans motif, le contraignant à reporter ses congés ;
– un tableau mentionnant 38 samedis ou dimanches travaillés par le salarié sur les six derniers mois et seulement 12 et 14 pour chacun de ses deux collègues responsables coordinateurs de production comme lui pour la même période ;
– un courriel de reproches au salarié (‘je constate que tu as délaissé complètement cette tâche’) lui indiquant : ‘je veillerai à ce que plus aucun dysfonctionnement de notre service ne sera possible’, adressé le 14 juin 2013 par son supérieur, [A] [O], en mettant six autres personnes en copie, dont le dirigeant et des membres de la direction ;
– un courriel de M. [B] adressé à l’ensemble du personnel le 31 décembre 2014 félicitant notamment les deux collègues du salarié, responsables de coordination, sans l’évoquer, mais en le ciblant comme les autres élus du personnel comme ayant participé à la dégradation du climat social de l’entreprise ;
– des échanges de courriels le 3 octobre 2014, sa hiérarchie lui reprochant la longueur d’une pause déjeuner alors qu’il justifie de la fausseté de cette accusation par l’historique de ses révisions établissant qu’il était à son poste de travail à 12h53 et 12h54.
Il en résulte que la matérialité de ces faits est établie.
S’agissant de la dégradation de son état de santé
Le salarié fait valoir que sa hiérarchie n’a pas réagi à ses alertes, le contraignant à saisir le Chsct, qu’il a dû faire face à une surcharge de travail anormale, sans possibilité de prendre ses pauses déjeuner, tous manquements à l’origine d’une dégradation de sa santé.
Ces faits sont établis par les pièces du salarié numérotées 48, 49, 50, 36, 37, 40, 45, 45-1 consistant en :
– un courriel adressé à sa hiérarchie le 8 juillet 2014 faisant état d’insultes dont il a été l’objet de la part d’un journaliste-présentateur la veille et deux procès-verbaux de réunion du Chsct des 16 juillet et 17 octobre 2014 mentionnant cet incident ; celui du 17 octobre 2014 rapporte que la direction a indiqué n’avoir pris aucune mesure car les versions de l’incident des deux protagonistes étaient différentes ;
– des échanges de courriels du salarié et de sa hiérarchie en février et mars 2014 aux termes desquels le salarié alerte sa hiérarchie sur sa surcharge de travail à son poste de scripte, l’obligeant à travailler en continu entre 8 et 9 heures sans pouvoir prendre ses pauses déjeuner (notamment les 18 et 24 février et 3 mars 2014), dans des termes dénués d’abus, et un courriel de [G] [B] lui demandant le 3 mars 2014 d”adopter un comportement et une attitude plus responsable’, l’accusant de porter ‘des accusations complètement farfelu’, qualifiant son mail d”inadmissible’ et lui reprochant d’adopter ‘une attitude de provocation et de dénigrement’.
Le salarié produit en outre en pièce 40 ses convocations auprès de la médecine du travail pour un suivi avec un psychologue du travail (31 mars, 15 avril et 14 mai 2014), en pièce 45 ses arrêts de travail pour maladie pour les périodes du 2 au 16 avril 2014 et la prolongation du 16 avril au 2 mai 2014 mentionnant ‘syndrome anxio-dépressif – surmenage’ et en pièce 45-1 une prescription établie par le docteur [T] [F] de ‘seroplex’ et de ‘xanax’.
Il résulte de ces pièces que la matérialité de ces faits est établie.
S’agissant de faits de discrimination syndicale
Aux termes de l’article L. 1132-1 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur à la date de la saisine du conseil de prud’hommes, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.
Aux termes de l’article L. 2141-5 du même code : ‘Il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de disciplines et de rupture du contrat de travail’.
En application de l’article L. 1134-1 du même code, lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Au soutien de la discrimination syndicale, le salarié fait valoir qu’à compter de son élection, l’employeur a modifié unilatéralement son contrat entraînant une rétrogradation, a dégradé ses conditions de travail, ce qui a eu des répercussions sur sa santé, l’a traité différemment de ses collègues.
Ces faits sont établis par les pièces précédemment citées.
Il résulte de tout ce qui précède que le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte à raison de son activité syndicale.
Il incombe à l’employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le liquidateur de la société Afrimédia critique la portée des éléments et pièces produits par le salarié et fait valoir que la modification du périmètre d’activité du salarié notamment dans le cadre de difficultés économiques importantes ayant mené à la réorganisation de l’activité et de l’organisation intervenue de la société ne saurait être de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail dans la mesure où le salarié a continué d’exercer ses fonctions sans émettre de contestation pendant près de deux ans après son élection. Ce faisant, le liquidateur de la société Afrimédia ne justifie pas que l’ensemble des faits sus-retenus étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Il s’ensuit que la discrimination en raison de l’activité syndicale du salarié est établie.
Les manquements de l’employeur, s’agissant d’agissements de discrimination en raison de l’activité syndicale du salarié, ont été d’une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail du salarié.
Au regard de la violation du statut protecteur du salarié, la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié aux torts de l’employeur produit les effets d’un licenciement nul. Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ces chefs de demandes.
Sur les conséquences pécuniaires de la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié aux torts de l’employeur produisant les effets d’un licenciement nul
Le salarié, dont la prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur produit les effets d’un licenciement nul, a droit en premier lieu aux indemnités de rupture suivantes :
– une indemnité de licenciement qui sera fixée, au regard de son ancienneté comprise entre le 3 août 2009 et le 13 mars 2015 et de son salaire brut mensuel de 2 338,42 euros, à la somme de 4 308,54 euros, suivant le calcul proposé par le salarié, non contesté et qui est exact, par application des dispositions conventionnelles applicables,
– une indemnité compensatrice de préavis à hauteur de deux mois de salaire en application des dispositions légales et conventionnelles, qui sera fixée à la somme de 4 676 euros, outre une indemnité compensatrice de congés payés incidents qui sera fixée à 467,60 euros.
Par ailleurs, le salarié a droit à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice illicite du licenciement et au moins égale à celle prévue par l’article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, à savoir les salaires des six derniers mois.
Eu égard à l’âge du salarié au moment de la rupture (27 ans), à son ancienneté dans l’entreprise, à sa rémunération, aux circonstances de la rupture telles que résultant des pièces produites et des débats, il convient de fixer sa créance au titre de l’indemnité en réparation de la nullité du licenciement à hauteur de 14 100 euros.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ces chefs de demandes.
Sur la violation du statut protecteur
En application des articles L. 2411-1 et suivants du code du travail dans leur rédaction applicable au litige, le salarié, investi d’un mandat de délégué du personnel, bénéficiait de la protection contre le licenciement prévue par le livre IV du code du travail.
Celui-ci qui ne demande pas la poursuite du contrat de travail illégalement rompu a droit à une indemnité pour violation de son statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis son éviction jusqu’à l’expiration de la période de protection, dans la limite de deux ans, durée minimale légale de son mandat, augmentée de six mois.
Le salarié calcule sa demande d’indemnité au titre de la violation du statut protecteur sur la base d’un mandat de quatre années en faisant valoir qu’il a été élu pour un mandat de quatre ans conformément aux dispositions légales et que les dispositions du protocole d’accord pré-électoral invoqué par le liquidateur qui ne saurait être assimilé à un accord collectif sont entachées de nullité et doivent être écartées.
Le liquidateur de la société Afrimédia fait valoir que le protocole d’accord pré-électoral du 21 septembre 2012 précise que les mandats des représentants du personnel seront d’une durée de trois ans et que l’indemnité au titre de la violation du statut protecteur doit par conséquent être calculée en prenant en compte une durée de mandat de trois ans et non de quatre ans comme le demande le salarié.
Il ressort des dispositions de l’article L. 2314-26 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige que les délégués du personnel sont élus pour quatre ans.
L’article L. 2314-27 du même code dispose que par dérogation aux dispositions de l’article L. 2314-26, un accord de branche, un accord de groupe ou un accord d’entreprise, selon le cas, peut fixer une durée du mandat des délégués du personnel comprise entre deux et quatre ans.
Le protocole d’accord pour les élections de la délégation unique produit aux débats a été signé le 21 septembre 2012 entre la direction de la société Afrimédia et le syndicat national des journalistes et stipule que : ‘par accord unanime, les signataires décident de déroger au mandat de quatre ans pour établir la durée de celui-ci à trois ans’.
Ce protocole d’accord ne constitue pas un accord d’entreprise dans la mesure où il n’a pas été signé par une ou des organisations syndicales de salariés représentatives dans l’entreprise Afrimédia ou de représentants du personnel, de délégués du personnel ou de salariés mandatés de l’entreprise dans les conditions des articles L. 2232-16, L. 2232-21, L.2232-24 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige. Il ne peut donc servir de fondement à la dérogation prévue par l’article L. 2314-27, relative à la durée du mandat des délégués du personnel.
Il convient par conséquent de calculer l’indemnité pour violation du statut protecteur sur la base du mandat de quatre années comme retenu par le salarié.
Au regard de la période de protection qui courait entre la prise d’acte de la rupture du 13 mars 2015 et jusqu’au 16 avril 2017 (terme du mandat : 16 octobre 2016, augmenté de six mois), il convient de faire droit à la demande du salarié et de fixer sa créance indemnitaire au titre de la violation du statut protecteur à la somme de 58 450 euros. Le jugement sera infirmé sur ce point.
Sur l’indemnisation du préjudice subi du fait de la discrimination syndicale
Le salarié demande à être indemnisé du préjudice causé par la discrimination syndicale subie à hauteur de 15 000 euros en faisant valoir qu’il a subi un préjudice professionnel, moral et de santé.
Le liquidateur de la société Afrimédia conclut au débouté de cette demande en relevant que le salarié fonde sa demande notamment sur une décision du tribunal correctionnel ayant condamné l’ancien dirigeant de la société pour discrimination syndicale mais que la société elle-même n’était pas poursuivie, preuve que les faits ne lui sont pas imputables.
Outre que le salarié ne fonde pas sa demande d’indemnisation sur la décision pénale à laquelle se réfère le liquidateur judiciaire qui concerne un autre salarié de la société, la discrimination syndicale retenue est imputable à la société Afrimédia, en sa qualité d’employeur du salarié.
Il convient de réparer le préjudice subi par le salarié du fait de la discrimination syndicale en lui allouant une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
Sur l’exécution déloyale du contrat de travail et de la convention collective
Force est de constater que dans ses écritures, le salarié forme une demande d’indemnisation au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail et de la convention collective en renvoyant à ses développements relatifs à la discrimination syndicale, sans énumérer aucun fait différent. Dans ces conditions, il convient de le débouter de sa demande de ce chef et de confirmer le jugement sur ce point.
Sur l’atteinte à l’intérêt collectif de la profession représentée par le syndicat
Sur le fondement de l’article L. 2132-3 du code du travail, le syndicat national des médias Cfdt forme une demande de dommages et intérêts à hauteur de 1 000 euros en réparation de la discrimination subie par l’un de ses membres du fait de son appartenance à un syndicat. Il ajoute que la fin de non-recevoir formée par le liquidateur judiciaire de la société doit être rejetée dès lors qu’elle est manifestement dilatoire et soulevée de manière tardive en appel.
Le liquidateur de la société Afrimédia fait valoir que la demande de dommages et intérêts du syndicat est irrecevable et en toute hypothèse inopposable à la procédure collective au motif qu’il n’a pas déclaré sa créance à la procédure collective en application des articles L. 622-24 et L. 631-14-1 du code de commerce.
Il résulte des articles L. 622-24 et R. 622-21 du code de commerce qu’à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception des salariés, adressent la déclaration de leur créance au mandataire judiciaire dans le délai de quinze jours ou un mois selon la qualité des créanciers.
Il ressort de l’article L. 622-26 du même code qu’à défaut de déclaration dans les délais prévus à l’article L. 622-24 et à moins que le juge-commissaire ne relève les créanciers de leur forclusion dans certaines conditions, leur créance est inopposable à la liquidation judiciaire.
Le syndicat national des médias Cfdt n’a pas déclaré sa créance, née antérieurement à l’ouverture de la procédure collective auprès du mandataire judiciaire. Il en résulte que celle-ci, sans être irrecevable, est inopposable à la procédure collective.
Il convient par conséquent de débouter le syndicat national des médias Cfdt de sa demande de fixation de créance au passif de la procédure collective de la société Afrimédia au titre de l’atteinte à l’intérêt collectif de la profession. Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la fixation des créances du salarié au passif de la liquidation judiciaire de la société Afrimédia
Il est rappelé que la procédure ne peut tendre qu’à la fixation du montant des créances qui soit ayant une origine antérieure au jugement d’ouverture de la procédure collective soit étant liées à la rupture du contrat de travail intervenue dans les quinze jours suivant le jugement de liquidation judiciaire, sont soumises au régime de la procédure collective.
En conséquence, les créances du salarié seront fixées au passif de la procédure collective de la société Afrimédia.
Sur les intérêts au taux légal
En application des dispositions de l’article L. 622-28 du code du commerce, le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 30 janvier 2018 qui a prononcé l’ouverture d’une procédure collective au bénéfice de la société Afrimédia a arrêté le cours des intérêts légaux.
Les créances de nature salariale de [U] [C] portent donc intérêts légaux à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes jusqu’au 30 janvier 2018. La capitalisation de ces intérêts est ordonnée dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil.
Les créances de nature indemnitaire allouées par le présent arrêt ne produisent pas d’intérêts légaux.
Sur la garantie de l’Ags
Il y a lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l’Ags Cgea d’Ile-de-France Ouest qui ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et de déclarer que l’obligation de l’Ags de faire l’avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Au regard de la solution du litige, le jugement sera infirmé en ce qu’il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.
Il convient de condamner la société Alliance Mission représentée par maître [E] [J] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Afrimédia aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’à payer à [U] [C] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le syndicat national des médias Cfdt sera débouté de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt réputé contradictoire,
INFIRME le jugement sauf en ce qu’il a mis hors de cause maître [V] [W] ès qualité d’administrateur judiciaire de la société Afrimédia, en ce qu’il a débouté [U] [C] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et de la convention collective et en ce qu’il a débouté le syndicat national des médias Cfdt de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de l’article L. 2132-3 du code du travail,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
DIT que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par [U] [C] aux torts de la société Afrimédia produit les effets d’un licenciement nul,
FIXE les créances de [U] [C] au passif de la procédure collective de la société Afrimédia aux sommes suivantes :
* 4 308,54 euros à titre d’indemnité de licenciement,
* 4 676 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
* 467,60 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés incidents,
* 14 100 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
* 58 450 euros à titre d’indemnité pour violation du statut protecteur,
* 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale,
DIT que les créances de nature salariale de [U] [C] portent intérêts légaux à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes jusqu’au 30 janvier 2018,
ORDONNE la capitalisation de ces intérêts dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil,
DIT que les créances de nature indemnitaire de [U] [C] allouées par le présent arrêt ne produisent pas d’intérêts légaux,
DECLARE le présent arrêt opposable à l’Ags Cgea d’Ile-de-France Ouest qui ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et DECLARE que l’obligation de l’Ags de faire l’avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,
CONDAMNE la société Alliance Mission représentée par maître [E] [J] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Afrimédia aux dépens de première instance et d’appel,
CONDAMNE la société Alliance Mission représentée par maître [E] [J] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Afrimédia à payer à [U] [C] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Morgane BACHE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,