Contrat à durée déterminée d’usage : 11 juillet 2022 Cour d’appel de Toulouse RG n° 19/02228

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Contrat à durée déterminée d’usage : 11 juillet 2022 Cour d’appel de Toulouse RG n° 19/02228
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11/07/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/02228

N° Portalis DBVI-V-B7D-M64X

AMR/ASC

Décision déférée du 25 Mars 2019

Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE

( 17/01016)

Mme KRYGIEL

[O] [E]

C/

Organisme POLE EMPLOI SERVICES

CONFIRME PARTIELLEMENT

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

Madame [O] [E]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Hafida CHTIOUI, avocat au barreau de TOULOUSE

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 31555.2019.023050 du 21/10/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de TOULOUSE)

INTIME

Organisme POLE EMPLOI SERVICES est représenté par son directeur régional

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Françoise DUVERNEUIL de l’ASSOCIATION VACARIE – DUVERNEUIL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 Novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant A.M. ROBERT, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

A.M. ROBERT, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par M. DEFIX, président, et par R. CHRISTINE, faisant fonction de greffier, ayant prété serment le 11 avril 2022.

EXPOSE DU LITIGE

Suite à un contrôle effectué par les services de Pôle Emploi Midi Pyrénées courant mars 2015, Mme [O] [E], chanteuse et intermittente du spectacle, s’est vue notifier un trop perçu au titre de l’Aide au Retour à l’Emploi (ARE) d’un montant de 14.366,16 € par courrier du 18 mai 2015 pour la période cotisée du 1er avril 2013 au 3 mars 2014.

Elle a saisi l’instance paritaire régionale d’une demande d’effacement qui a été rejetée suivant courrier en date du 28 janvier 2016

Par acte d’huissier du 22 février 2017 elle a fait assigner Pôle Emploi Midi Pyrénées devant le tribunal de grande instance de Toulouse en annulation de ces décisions lui refusant les droits sur la période litigieuse considérée et en indemnisation de ses préjudices.

Pôle Emploi Services est intervenu volontairement comme disposant d’une compétence nationale exclusive pour statuer sur les droits à prestations des salariés privés d’emploi relevant du cinéma spectacle.

Par jugement du 25 mars 2019 assorti de l’exécution provisoire cette juridiction a reçu Pôle Emploi Services en son intervention volontaire, mis hors de cause Pôle Emploi Midi Pyrénées, condamné Mme [E] à payer à Pôle Emploi Services la somme de 14.366,16 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, débouté Mme [E] de l’ensemble de ses demandes et condamné Mme [E] à payer à Pôle Emploi Services la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de l’instance.

Par déclaration en date du 13 mai 2019 enregistrée au greffe sous le numéro RG 19/2228 Mme [E] a interjeté appel en demandant ‘d’infirmer le jugement critiqué en toutes ses dispositions et notamment en ce qu’il a considéré qu’il n’existe pas de lien de subordination entre elle et l’association [4] qui l’emploie, a mis à sa charge le règlement d’une somme de 14.366,16 € au profit de Pôle Emploi Service, l’a condamnée au versement d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts et l’a condamnée aux entiers dépens’.

Par ordonnance en date du 19 novembre 2020, le magistrat chargé de la mise en état a dit n’y avoir lieu à nullité de la déclaration d’appel, déclaré recevable la demande de radiation présentée par Pôle Emploi Services et dit n’y avoir lieu de faire droit à cette demande de radiation.

DEMANDES DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 15 octobre 2021, Mme [E], appelante, demande à la cour, au visa des articles L.7121-2, L.7121-3 et L.7121-4 du code du travail, de :

Réformant le jugement dont appel en toutes ses dispositions et statuant de nouveau,

– constater l’existence d’un contrat de travail la liant avec l’association ‘[4]’,

En conséquence,

– dire qu’elle justifie remplir les conditions d’octroi de l’indemnité ARE pour la période visée par le contrôle (20 avril 2013 au 3 mars 2014),

– dire que la somme de 14 366,16 € qui lui a été versée au titre des indemnités ARE pour la période cotisée du 20 avril 2013 au 3 mars 2014 lui demeure acquise,

– condamner Pôle Emploi Services à lui verser l’arriéré des indemnités Aide au Retour à l’Emploi pour les périodes cotisées à compter du mois de mars 2015 jusqu’au réexamen effectif de son dossier,

– enjoindre à Pôle Emploi Services de réexaminer sa situation à compter du mois de mars 2015 à ce jour sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à venir,

– condamner Pôle Emploi à lui payer la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts correspondant au préjudice moral et matériel souffert par cette dernière et son fils,

– condamner Pôle Emploi à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Pôle Emploi à supporter les entiers dépens de première instance et d’appel.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 8 novembre 2019, l’organisme Pôle Emploi Services, intimé, demande à la cour, au visa de l’article L.5425-8 du Code du travail, de :

– rejeter l’appel de Mme [E], lequel est en tout état de cause mal dirigé,

– confirmer sa mise hors de cause,

Par conséquent,

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel, et condamner Mme [E] à lui payer la somme de 14 366,16 € outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure,

– y ajouter sa condamnation aux dépens de première instance et d’appel outre l’octroi d’une somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon les dispositions de l’article L 5422-1 du code du travail, relatif à l’allocation d’aide au retour à l’emploi, «Ont droit à l’allocation d’assurance les travailleurs involontairement privés d’emploi ou dont le contrat de travail a été rompu conventionnellement selon les modalités prévues aux articles L 1237-11 et suivants, aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure’».

Selon l’article 1er du règlement général annexé à la convention de l’assurance chômage du 14 mai 2014, «’Le régime d’assurance chômage assure un revenu de remplacement dénommé allocation d’aide au retour à l’emploi, pendant une durée déterminée, aux salariés involontairement privés d’emploi qui remplissent des conditions d’activité désignées par période d’affiliation, ainsi que des conditions d’âge, d’aptitude physique, de chômage, d’inscription comme demandeur d’emploi, de recherche d’emploi».

L’article L 7121-3 du code du travail prévoit que « tout contrat par lequel une personne s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un artiste du spectacle en vue de sa production, est présumé être un contrat de travail dès lors que cet artiste n’exerce pas l’activité qui fait l’objet de ce contrat dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce ».

La période d’avril 2013 à mars 2014

En l’espèce, Mme [E] a demandé à bénéficier de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (Are) en qualité d’intermittente du spectacle en avril 2013 au titre notamment des prestations artistiques réalisées pour le compte de l’association [4].

Pôle Emploi Services conteste la qualité de salariée de Mme [E] en faisant valoir l’absence de lien de subordination avec son principal employeur, l’association [4].

Mme [E] a justifié pour la période considérée (avril 2013 à mars 2014), en produisant les contrats de travail, avoir été embauchée dans le cadre de plusieurs contrats à durée déterminée d’usage en qualité de chanteuse.

L’association [4], dont l’objet est de « promouvoir de nouveaux talent dans les métiers du spectacle (‘) et d’aider ces talents tant dans l’accompagnement technique et artistique qu’administratif et financier (…) », est titulaire d’une licence d’entrepreneur de spectacle.

En vertu des dispositions rappelées ci-dessus Mme [E] bénéficie de la présomption de contrat de travail qui ne peut être détruite que s’il est constaté que l’intéressée exerce l’activité faisant l’objet du contrat dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce.

Cependant il ressort des éléments produits au débat que si elle n’exerce ou n’a exercé personnellement aucune fonction de direction ou de trésorier au sein de l’association [4], Mme [E] en est adhérente et a un lien de parenté avec son président, son trésorier et sa secrétaire, que sur le site internet de l’association il est indiqué comme siège social l’adresse de l’association et comme siège administratif l’adresse de Mme [E] et que sur le site internet de la chanteuse les coordonnées de contact sont celles de l’association ainsi que sur les flyers de ses spectacles.

Par ailleurs il ressort des déclarations du président de l’association et des déclarations de Mme [E] elle-même qu’elle effectue régulièrement à titre bénévole des travaux administratifs pour l’association ainsi que de la prospection, en contrepartie d’un forfait mensuel de 50 €, et ce, en dehors de ses périodes de travail pour l’association en qualité d’intermittent du spectacle.

Enfin les contrats produits révèlent qu’elle négocie des frais associatifs pour le compte de l’association sur ses contrats d’artistes individuels en contrepartie de sa renonciation à ses frais de route.

Au final, l’ensemble de ces éléments permet de constater que l’intéressée a exercé, durant la période considérée, une activité au sein de l’association lui conférant un rôle incompatible avec un lien de subordination.

En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné Mme [E] à payer à Pôle Emploi Services la somme de 14366,16 € au titre de la période du 20 avril 2013 au 3 mars 2014.

La demande de réouverture des droits à Are à compter du mois de mars 2015

L’Annexe X au règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 instaure un régime dérogatoire au régime général relatif à l’indemnisation du chômage pour les intermittents du spectacle en prévoyant que pour en bénéficier, les intéressés doivent justi’er avoir effectué un minimum de 507 heures de travail au cours des 319 jours qui précèdent la fin de leur dernier contrat de travail, et que dans cette hypothèse, lorsque la condition de travail précitée est satisfaite, ils béné’cient de droits à l’assurance chômage pour une durée de 243 jours.

La détermination de ces heures de travail est fixée par l’article 3 de cette annexe selon les modalités suivantes : lorsque l’activité est déclarée sous forme de cachets isolés, chaque cachet est converti en une durée forfaitaire de 12 heures, le maximum de cachets pouvant être retenus par mois étant de 28jours.

Mme [E] a sollicité le renouvellement de ses droits à l’allocation d’aide au retour à l’emploi à compter de mars 2015 puis de décembre 2015.

Sur la première période, de mars 2014 à février 2015 elle justifie de 720 heures travaillées mais seules 312 heures peuvent être prises en compte, les contrats concernant l’association [4] totalisant 408 heures ne pouvant être pris en considération en l’absence de lien de subordination, étant précisé qu’au surplus durant cette période il ressort de l’attestation du président de l’association et des copies des affiches éditées pour l’occasion que Mme [E] a effectué bénévolement les mardi et mercredi soir de 18h à 20h et le mercredi après-midi de 14h à 16h pendant la période scolaire, contrevenant ainsi aux dispositions de l’article L 5426-2 du code du travail.

Sur la seconde période, de février 2015 à décembre 2015, elle justifie de 624 heures travaillées mais seules 240 heures peuvent être prises en compte, les contrats concernant l’association [4] totalisant 384 heures ne pouvant être pris en considération en l’absence de lien de subordination.

Il apparaît ainsi que le volume d’activité de Mme [E] exercé en dehors de l’association ne lui permet pas d’atteindre les 507 heures de travail minimum requises par les textes.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [E] de ses demandes de ces chefs.

La demande de dommages et intérêts

Eu égard aux développements qui précèdent Mme [E] ne peut prétendre à des dommages et intérêts au titre du préjudice moral causé par les décisions de refus de prise en compte de ses droits par Pôle Emploi Services, le jugement étant confirmé en ce qu’il l’a déboutée de cette demande.

Les demandes annexes

Succombant, Mme [E] supportera les dépens de première instance ainsi que retenu par le premier juge, et les dépens d’appel.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

– Confirme le jugement rendu le 25 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Toulouse sauf sa disposition relative aux frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

– Condamne Mme [O] [E] aux dépens d’appel ;

– Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

Le GreffierLe Président

R. CHRISTINEM. DEFIX

 


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