Contrat à durée déterminée d’usage : 10 août 2023 Cour d’appel d’Angers RG n° 22/00108

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Contrat à durée déterminée d’usage : 10 août 2023 Cour d’appel d’Angers RG n° 22/00108
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COUR D’APPEL

d’ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N°

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00108 – N° Portalis DBVP-V-B7G-E6UR

numéro d’inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LA ROCHE SUR YON, décision attaquée en date du 18 Décembre 2017, enregistrée sous le n° 17/00173

ARRÊT DU 10 Août 2023

APPELANTE :

Madame [Y] [R] épouse [I]

[Adresse 7]

[Localité 1] SLOVAQUIE

représentée par Maître Inès RUBINEL de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocat au barreau d’ANGERS, postulant et par Maître BRAUD, avocat au barreau de la ROCHE SUR YON, avocat plaidant

INTIMEE :

Association ROCHE VENDEE BASKET CLUB Association régie par la Loi du 1er juillet 1901, SIREN n° 408 643 799, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par Me Stéphane CONTANT de la SCP IN-LEXIS, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 22-075C, postulant et par Maître BERTRAND, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 11 Mai 2023 à 9 H 00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :

Président : Mme Marie-Christine DELAUBIER

Conseiller : M. Yoann WOLFF

Conseiller : Mme Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN

Greffier lors du prononcé : Mme Jacqueline COURADO

ARRÊT :

du 10 Août 2023, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Marie-Christine DELAUBIER, conseiller faisant fonction de président et par Mme Jacqueline COURADO, adjoint administratif, faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE

L’association sportive Roche Vendée Basket Club (ci-après dénommée l’association RVBC) regroupe environ 400 adhérents, dont 330 joueurs licenciés pratiquant le basket-ball à tous les niveaux. Elle emploie moins de onze salariés et applique la convention collective nationale du sport.

Après avoir évolué pendant plusieurs saisons au niveau de la deuxième division nationale du basket-ball féminin professionnel (ligue féminine 2 : LF2), l’équipe féminine n°1 du club a accédé à la ligue féminine LF1, soit la première division, à compter de la saison 2017-2018.

Mme [Y] [I] née [R] a été engagée par l’association RVBC en qualité de joueuse de basket professionnelle dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée d’usage courant pour une saison à compter du 1er août 2009. Six contrats de même nature ont été successivement conclus à l’occasion des saisons suivantes, dont le dernier en date du 30 juin 2016 à effet du 1er septembre 2016 au 31 mai 2017 pour la saison 2016-2017.

Le 11 mai 2017, Mme [I] a été placée en arrêt maladie. La relation de travail a pris fin au 31 mai suivant au terme du dernier contrat de travail, date à laquelle la salariée a quitté définitivement l’effectif du club.

Mme [I] a saisi le conseil de prud’hommes de La Roche-sur-Yon par requête du 21 juillet 2017 pour obtenir la requalification de ses contrats de travail à durée déterminée d’usage successifs en un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er août 2009 et la condamnation de l’association RVBC à lui verser une indemnité de requalification. Elle sollicitait également que soit prononcée la nullité de la rupture de son contrat de travail compte tenu de sa suspension pour accident de travail et la condamnation de l’association RVBC à lui verser, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, des dommages et intérêts de ce chef, une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité de licenciement, une indemnité pour travail dissimulé, des dommages et intérêts pour perte de droits à l’assurance vieillesse, le paiement de plusieurs compléments salariaux, un rappel de prime d’ancienneté outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 18 décembre 2017, le conseil de prud’hommes a :

– dit que le contrat à durée déterminée d’usage conclu le 30 juin 2016 pour la saison sportive, courant du 1er septembre 2016 au 30 mai 2017, n’est pas conforme aux exigences de la loi du 27 novembre 2015 et qu’il (doit) être requalifié en contrat à durée indéterminée ;

– condamné l’association RVBC à verser à Mme [I] les sommes suivantes :

* 3 222 euros net au titre de l’indemnité de requalification,

* 3 222 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

* 19 333 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul intervenu durant une période de protection au titre des accidents du travail,

* 1 300 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– dit que les sommes dues au titre des salaires et accessoires de salaire porteront intérêts de droit au taux légal à compter de la requête soit le 21 juin 2017 et les autres sommes à compter du prononcé du jugement ;

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit sur l’indemnité de préavis conformément aux dispositions des articles R. 1454-14 et R.1454-28 du code du travail ;

– ordonné à l’association RVBC de rectifier les bulletins de salaire et les documents de fin de contrat conformément à la décision ;

– débouté Mme [I] du surplus de ses demandes ;

– débouté l’association RVBC de ses demandes reconventionnelles ;

– condamné l’association RVBC aux entiers dépens de l’instance y compris les frais éventuels de recouvrement de la décision.

L’association RVBC a interjeté appel de ce jugement par déclaration transmise au greffe de la cour d’appel de Poitiers le 12 janvier 2018 et enregistrée sous le numéro RG 18/00263 et Mme [I] par déclaration d’appel enregistrée le 16 janvier 2018 sous le numéro RG 18/00290.

Par une ordonnance du 30 août 2018, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux instances sous la référence RG n°18/00263.

Par arrêt en date du 19 septembre 2019, la cour d’appel de Poitiers a :

– rejeté la demande de Mme [I] tendant au rejet des dernières conclusions de l’association RVBC du 20 mai 2019 ;

– dit n’y avoir lieu à communication de pièces complémentaires, s’agissant notamment du registre du personnel de l’association RVBC ;

– confirmé le jugement s’agissant, de première part, de la prescription de la demande de requalification des contrats de travail conclus par Mme [I] avant le 20 juillet 2015 en application de l’article L1471-1 du code du travail et, de seconde part, de la requalification du contrat de travail à durée déterminée d’usage conclu le 30 juin 2016 pour la saison 2015-2016 en contrat de travail à durée indéterminée avec tous effets de droit ;

Réformé partiellement le jugement :

– s’agissant du montant de la rémunération mensuelle brute de Mme [I] au titre du contrat de travail du 30 juin 2016 et, statuant à nouveau, fixé celle-ci à la somme de 2 334,75 euros ;

– s’agissant du montant de l’indemnité de requalification due à Mme [I] et, statuant à nouveau, condamné l’association RVBC au visa de l’article L.1245-2 du code du travail à la somme de 2 334,75 euros ;

– en ce qu’il a ordonné que les cotisations retraite correspondant à la somme du forfait logement (6000 euros / an) soient rétablies au titre de la saison 2016/2017 et que les bulletins de paie soient rectifiés en conséquence et, statuant de nouveau :

– rejeté la demande de Mme [I] du chef de l’indemnisation pour perte au titre de ses droits à retraite ;

– réformé le jugement en ce qu’il dit le licenciement de Mme [I] nul et, statuant à nouveau :

– dit le licenciement de Mme [I] sans cause réelle et sérieuse du fait de la requalification du contrat de travail à durée déterminée du 30 juin 2016 avec tous effets de droit ;

– condamné l’association RVBC à payer à Mme [I] les sommes suivantes :

* 2 334,75 euros à titre d’indemnité de requalification,

* 2 334,75 euros à titre d’indemnité de préavis,

*14 008,50 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail, ces sommes majorées des intérêts légaux à compter de l’arrêt ;

– rejeté les autres demandes de Mme [I] ;

– rejeté les demandes de l’association RVBC contraires au dispositif de l’arrêt;

– condamné l’association RVBC aux dépens et dit n’y avoir lieu à indemnité en cause d’appel sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [I] a formé un pourvoi en cassation.

Par un arrêt du 4 novembre 2021, la chambre sociale de la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt rendu le 19 septembre 2019 par la cour d’appel de Poitiers, sauf en ce qu’il a :

– rejeté la demande de Mme [I] tendant au rejet des dernières conclusions de l’association RVBC du 20 mai 2019 ;

– dit n’y avoir lieu à communication des pièces complémentaires, s’agissant notamment du registre du personnel de l’association RVBC ;

– ordonné la requalification du contrat de travail à durée déterminée d’usage conclu le 30 juin 2016 pour la saison 2015-2016 en contrat de travail à durée indéterminée avec tous effets de droit ;

– dit n’y avoir lieu à indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné l’association RVBC aux dépens.

La Cour de cassation a remis en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant le dit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d’appel d’Angers.

Enfin, la Haute cour a condamné l’association RVBC aux dépens et à payer à Mme [I] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur le premier moyen relatif à la prescription de la demande en requalification des contrats de travail de Mme [I] conclus avant le 20 juillet 2015, la Cour de cassation a rappelé que le délai de prescription d’une action en requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au contrat à durée déterminée énoncé au contrat a pour point de départ, en cas de succession de contrats à durée déterminée, le terme du dernier contrat de travail et que le salarié est en droit, lorsque la demande en requalification est reconnue fondée, de se prévaloir d’une ancienneté remontant au premier contrat de travail irrégulier.

La Cour a relevé ensuite que pour retenir la prescription de la demande en requalification des contrats conclus avant le 20 juillet 2015, l’arrêt retenait que la salariée fondait sa demande en requalification sur les conditions de forme des contrats des 23 juin 2009, 1er juin 2010, 1er juin 2011, 31 juillet 2012, 15 mai 2015 et 20 septembre 2014 au regard de l’absence de définition précise du motif de leur recours au visa de l’article L. 1232-12 du code du travail, en sorte que c’est à leur date respective de conclusion qu’il convenait de se placer pour apprécier l’éventuelle prescription de son action, que cependant la joueuse avait saisi la juridiction prud’homale le 21 juillet 2017, de sorte que l’action était prescrite pour ce qui concerne les contrats souscrits avant le 21 juillet 2015.

La Haute cour a jugé qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que la joueuse soutenait avoir été engagée pour occuper un emploi participant de l’activité normale de l’association, ce dont elle aurait dû déduire que l’action en requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée n’était pas prescrite et que la salariée pouvait demander que la requalification produise ses effets à la date du premier engagement irrégulier, la cour d’appel a violé les articles L. 1471-1 et L. 1245-1 du code du travail dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et l’article L. 1242-1 du code du travail.

Sur le second moyen pris en sa première branche relatif à rémunération mensuelle brute de Mme [I], au montant de l’indemnité au titre de l’article L. 1245-2 du code du travail, et au rétablissement des cotisations retraite correspondant à la somme de 6 000 euros par an au titre de la saison 2016/2017, la Cour de cassation a jugé que la cour d’appel de Poitiers, avait modifié l’objet du litige et par conséquent violé l’article 4 du code de procédure civile.

Sur le même moyen pris en sa troisième branche relatif à la prise en charge par l’employeur du coût du logement de la salariée, la Cour, au visa de l’article L. 3221-3 du code du travail, a jugé que la cour d’appel avait privé sa décision de base légale en retenant que la prise en charge par l’employeur des frais de logement à hauteur de 6000 euros ne relevait pas d’un élément de rémunération au sens des articles L. 3221-3 du code du travail et L. 242-1 du code de la sécurité sociale mais de frais professionnels liés à l’exercice de l’activité sportive sur la saison au même titre que les frais de déplacement et de séjours, dont l’URSSAF, lors de ses contrôles, n’avait pas considéré à ce jour qu’ils devaient être pris en compte au titre d’un avantage en nature ce, sans préciser en quoi les frais de logement pris en charge par l’employeur avaient été exposés par la joueuse pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur.

Sur le quatrième moyen pris en sa seconde branche relatif à la nullité du licenciement de Mme [I], la Cour de cassation a jugé que la cour d’appel de Poitiers avait violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail en statuant sans tirer les conséquences légales de ses constatations ce, alors qu’elle avait relevé que la joueuse avait présenté le 10 mai 2017 un nouvel arrêt de travail sur la période du 11 au 18 mai 2017 et qu’elle avait demandé son rattachement à l’accident du travail du 20 février 2017, ce dont il se déduisait que l’employeur avait connaissance de l’origine professionnelle de l’accident.

En outre, la Cour a jugé au visa de l’article 624 du code de procédure civile, que :

– la cassation sur le deuxième moyen a entraîné, par voie de conséquence, la cassation sur le chef de dispositif relatif au débouté de la demande d’indemnité pour travail dissimulé qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire (réponse au troisième moyen pris en sa quatrième branche) ;

– la cassation sur le deuxième moyen fixant la rémunération mensuelle brute de la joueuse à 2334,75 euros entraînait, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif relatifs à l’indemnité de préavis et l’indemnité sur le fondement de l’article L. 1235-3 du code du travail, qui sont dans sa dépendance nécessaire, et :

– la cassation sur le premier moyen du chef de la prescription de la demande en requalification en contrat à durée indéterminée des contrats à durée déterminée conclus avant le 20 juillet 2015, entraînait, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif relatif au débouté de la demande d’indemnité de licenciement qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire (réponse au cinquième moyen) ;

– la cassation sur les premier et troisième moyens, du chef de la prescription de la demande en requalification en contrat à durée indéterminée des contrats à durée déterminée conclus avant le 20 juillet 2015 et du débouté de la demande d’indemnité pour travail dissimulé entraînait, par voie de conséquence, la cassation sur les chefs du dispositif relatifs aux salaires dus en contrepartie de l’emploi dans les conditions d’un travail dissimulé au cours des saisons 2014/2015 à 2016/2017, qui s’y rattachent par un lien de dépendance nécessaire (réponse au sixième moyen) ;

– la cassation sur le second moyen, du chef du montant de la rémunération de la joueuse, a entraîné, par voie de conséquence, la cassation sur le chef de dispositif relatif à la perte des droits à l’assurance-vieillesse qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire (réponse au septième moyen pris en sa troisième branche).

Mme [I] a saisi la présente cour, désignée cour de renvoi par déclaration de saisine après cassation reçue au greffe le 18 février 2022.

L’association Roche Vendée Basket Club a constitué avocat en qualité de partie intimée le 10 mars 2022.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 3 mai 2023 et l’affaire fixée à l’audience collégiale du 11 mai 2023.

*

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Mme [I], dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 30 mars 2023, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

– la recevoir en sa saisine, la dire bien fondée et y faisant droit ;

– infirmer la décision de première instance sur tous les chefs encore en cause en suite de la cassation intervenue et lui portant grief ainsi que ceux qui en dépendent, et particulièrement en ce qu’elle :

– a jugé prescrites ses demandes fondées sur la requalification de ses contrats de travail conclus avant le 20 juillet 2015 en application de l’article L.1471-1 du code du travail ;

– a dit que le contrat à durée déterminée d’usage conclu le 30 juin 2016 pour la saison sportive, courant du 1er septembre 2016 au 30 mai 2017 n’est pas conforme aux exigences de la loi du 27 novembre 2015 et qu’il (doit) être requalifié en contrat à durée indéterminée ;

– l’a déboutée de sa demande fondée sur le moyen de dissimulation d’emploi salarié et de sa demande de rappel de salaire portant sur toutes autres sommes qu’elle pouvait estimer lui être dues au titre de la rémunération ;

– a dit que sa rémunération brute s’établit à la somme de 2 594 euros outre 628 euros, soit la somme de 3 222 euros brut mensuels [à l’exclusion de tous autres accessoires de salaire (indemnités d’entraînement, primes de match’)] ;

– a limité la condamnation de l’association à lui verser les sommes suivantes :

* 3 222 euros au titre de l’indemnité de requalification,

* 3 222 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

* 19 333 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul intervenu durant une période de protection au titre des accidents du travail ;

– a dit que les sommes dues au titre des salaires et accessoires de salaires porteront intérêts de droit au taux légal à compter de la requête soit le 21 juin 2017 et les autres sommes à compter du prononcé du jugement ;

– l’a déboutée de sa demande indemnitaire correspondant à la période antérieure au contrat signé le 30 juin 2016 ;

– bien qu’ils aient refusé de ‘reconsidérer’ l’ancienneté de la salariée à compter de 2009, les premiers juges ont admis sa demande en paiement de l’indemnité dite ‘ancienneté’, mais ils ont dit que la somme correspondante aurait été réglée à sa bénéficiaire, qui l’aurait confirmé, ce qui est contesté ;

– a limité la condamnation de l’association RVBC à lui verser 1 300 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– l’a déboutée du surplus de ses demandes.

– confirmer le jugement n°17/00173 rendu le 18 décembre 2017 par le conseil de prud’hommes de La Roche-sur-Yon, en ce qu’il a jugé que la rupture illicite de son contrat de travail du fait de l’association sportive RVBC, s’analyse en un licenciement de nul effet, et qu’elle est bien fondée à solliciter la condamnation de l’association RVBC ;

Et statuant à nouveau sur les chefs critiqués :

– dire et juger que le contrat de travail ayant existé entre les parties est un contrat à durée indéterminée dont les effets remontent au 1er août 2009 ;

– constater la violation en connaissance de cause par l’association RVBC de prescriptions légales conventionnelles et réglementaires impérieuses de nature notamment à caractériser l’existence de situations constitutives de travail illégal ;

– dire et juger que l’association RVBC a commis à l’occasion de son emploi, des faits prévus par les articles L 8221-3 et L 8221-5 du code du travail, caractéristiques de la dissimulation d’activité et d’emploi salarié ainsi que des fautes préjudiciables à la salariée d’une particulière gravité engageant la responsabilité de l’employeur ;

– ordonner l’établissement de bulletins de paie rectifiés faisant notamment mention de tous les accessoires de salaire conformément à l’article R 3243-1 du code du travail ;

– condamner en conséquence l’association RVBC à lui payer les sommes suivantes :

* 4 494,11 euros à titre d’indemnité de requalification,

* 8 988,22 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 8 988,22 euros à titre d’indemnité de licenciement,

* 26 964,66 euros en réparation du préjudice résultant du caractère illicite de la rupture,

* 26.964,66 euros à titre d’indemnité forfaitaire prévue par l’article L 8223-1 du code du travail,

* 21 240,62 euros, pour perte de droits à prestations de l’assurance-vieillesse,

* 20 610,56 euros, à titre d’arriéré de salaire, ou subsidiairement 20 600 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance,

* 5 750,51 euros à titre de prime complémentaire dite ‘ancienneté’ ;

– dire que les créances salariales ci-dessus porteront intérêts de droit au taux légal en vigueur à compter du jour de la demande, et les indemnités ayant le caractère de dommages-intérêts à compter du prononcé de l’arrêt ;

– débouter l’association RVBC de toutes demandes plus amples ou contraires ;

– condamner l’association RVBC au paiement d’une indemnité d’un montant de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens et frais concernant l’instance pendante devant la cour, conformément à l’article 699 du code de procédure civile, et de la même somme (3 500 euros) pour les frais irrépétibles exposés en premier instance.

Mme [I] fait valoir en substance que le délai de prescription de l’action en requalification de contrats de travail à durée déterminée d’usage successifs dépourvus de motifs précis et ne respectant pas le formalisme d’ordre public court à compter du terme du dernier contrat à durée déterminée conclu, soit le 31 mai 2017. À cet égard, elle souligne que l’association RVBC l’a recrutée pour pourvoir un emploi de joueuse professionnelle permanent du 1er août 2009 au 31 mai 2017. Elle ajoute qu’aucun des contrats à durée déterminée conclus ne fait mention du motif précis de recours à ce type de contrat de travail. Elle rappelle alors que la relation de travail née de contrats successifs conclus sans motif précis et sans respect du formalisme exigé par la loi est nécessairement à durée indéterminée à compter de la date d’effet du premier contrat irrégulier. La salariée sollicite alors la requalification des contrats de travail à durée déterminée conclus de manière irrégulière en contrat de travail à durée indéterminée.

Mme [I] relève ensuite les irrégularités des contrats de travail conclus avec l’association RVBC soulignant la volonté de celle-ci de dissimuler une partie de son travail. Elle assure ainsi que la pratique consistant à recourir à des contrats à durée déterminée successifs de moins d’un an et sans motif précis est illégale dans la mesure où elle devait nécessairement, lors des périodes d’inter-saisons, participer aux activités sportives préparatoires organisées par le club au titre de la saison considérée en vue des compétitions. Elle ajoute que l’association RVBC n’a pas déclaré les accessoires de salaire aux organismes sociaux de recouvrement de cotisations sociales dont la prise en charge de son logement et le versement de sommes versées en contrepartie de l’entraînement et du coaching de jeunes joueurs. Elle fait enfin observer qu’elle a repris son poste en période de suspension de son contrat de travail sans avoir préalablement bénéficié d’une visite médicale de reprise à la suite de son arrêt de travail pour accident du travail survenu le 21 février 2017.

En conséquence, elle s’estime fondée à solliciter outre l’indemnité forfaitaire due au titre du travail dissimulé, le rétablissement de ses salaires pour les périodes travaillées dans des conditions irrégulières de nature à caractériser ce travail dissimulé ce, durant la période triennale ayant précédé la rupture illicite de son contrat de travail.

À titre subsidiaire, elle sollicite des dommages et intérêts au titre de la perte de chance d’obtenir le paiement de salaires se rapportant aux mêmes périodes considérées.

Concernant ensuite son salaire de référence, Mme [I] rappelle que la fourniture d’un logement par son employeur et la somme versée en contrepartie de la mission d’encadrement et de formation des jeunes joueurs du club au titre de la saison 2016/2017 constituent des avantages en nature devant être inclus dans sa rémunération mensuelle brute et pris en compte en particulier pour le calcul de l’indemnité compensatrice de préavis et de l’indemnité de licenciement.

La salariée soutient par ailleurs que la rupture de son contrat de travail est nulle dans la mesure où son contrat de travail était suspendu en raison d’une rechute subie en suite de son accident de travail survenu le 21 février 2017.

Mme [I] sollicite encore la réparation de son préjudice résultant de la perte de droits au titre de l’assurance-vieillesse et notamment au titre de la retraite complémentaire pour les périodes atteintes par la prescription.

Enfin, Mme [I] conteste fermement avoir reçu l’indemnité ‘ancienneté’ prévue par l’avenant du contrat de travail du 30 juin 2016 au titre de la saison sportive 2016/2017 et soulève la défaillance probatoire de l’association RVBC sur ce point. Elle conclut que la régularisation mentionnée sur le bulletin de paie du mois de septembre 2017 ne démontre pas la réalité du versement de le prime d’ancienneté sollicitée.

*

L’association sportive Roche Vendée Basket Club, dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 28 juillet 2022, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

– vu l’introduction de l’action par acte du 21 juillet 2017, confirmer que l’action tendant à requalification des 5 contrats à durée déterminée courant jusqu’au 31 mai 2014 fondée sur le motif de recours au contrat à durée déterminée est prescrite ;

– infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a fixé le montant de l’indemnité de requalification prévue à l’article L1245-2 du code du travail à la somme de 3 222 euros net et juger qu’elle représente 2 334,75 euros brut ;subsidiairement, en cas de valorisation de l’avantage en nature logement, à la somme de 2 436,55 euros ;

– infirmer au vu des dispositions des articles L. 1226-9 et L. 1226-19 du code du travail le jugement dont appel et rejeter toutes demandes, fins et conclusions du chef de nullité de la rupture du contrat de travail ;

Subsidiairement,

– juger que l’indemnisation y afférente doit être limitée à la somme de 14 008,5 euros (6 x 2 334,75 euros), et subsidiairement, à celle de 14 619,30 euros (6 x 2 436,55 euros) ;

– infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a fixé le montant de l’indemnité de préavis à la somme de 3 222 euros brut et juger qu’elle représente 2 334,75 euros brut et subsidiairement à celle de 2 436,55 euros ;

Sur les dommages-intérêts :

– vu l’introduction de l’action par acte du 21 juillet 2017, confirmer que tout grief formulé au titre de faits antérieurs au 20 juillet 2015 est prescrit ;

– confirmer que les griefs formulés au titre de la période postérieure au 20 juillet 2015 ne caractérisent pas une quelconque situation de travail dissimulé et rejeter toutes demandes, fins et conclusions de ce chef ;

– subsidiairement, juger que l’indemnité forfaitaire prévue à l’article L8223-1 du code du travail s’évalue à 14 008,5 euros (6 x 2 334,75 euros), et très subsidiairement, à celle de 14 619,30 euros (6 x 2 436,55 euros) ;

Sur les arriérés de salaires :

– juger que la prétention tendant au paiement d’une somme de 20 610 euros d’arriérés de salaire est partiellement irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile dès lors que cette même demande était en dernier formulée à hauteur de 16 908 euros devant les premiers juges ;

– pour le surplus, juger que la demande en paiement d’une somme de 9 050,98 euros de rappel de salaire afférente à la saison 2014/2015 est partiellement irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile dès lors que cette même demande était en dernier formulée à hauteur de 16 908 euros devant les premiers juges ;

– et que celles relatives aux deux saisons suivantes doivent être rejetées dès lors qu’elles sont sans objet pour la première et infondée pour la seconde ;

– juger que la demande subsidiaire tendant au paiement des mêmes sommes au titre du préjudice résultant de la perte de chance d’obtenir le paiement d’un salaire, constitue une demande nouvelle irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile ;

– juger que le rejet de la prétention relative à la « prime complémentaire d’ancienneté» ne fait pas partie des chefs de jugement expressément critiqués visés par l’acte d’appel formulée par l’intéressée le 16 janvier 2018, en sorte que le rejet de cette demande par les premiers juges présente un caractère définitif insusceptible d’être remis en cause dans le cadre de la présente instance ;

– juger que cette demande ne figure pas au nombre de celles visées par le dispositif des conclusions d’appel signifiées le 16 juin 2022, en sorte que la cour n’en n’est pas saisie ;

– pour ces deux raisons, rejeter la prétention formulée par Mme [I] de ce chef ;

– par suite, confirmer le rejet de toutes demandes, fins et conclusions du chef de réparation du préjudice de perte de droit à l’assurance vieillesse ;

– réformer les dispositions du jugement dont appel en ce qu’il l’a déboutée de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, condamner Mme [I] au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en première instance ;

– condamner Mme [I] au paiement d’une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés à hauteur d’appel, outre au paiement des entiers dépens de l’instance.

L’association sportive Roche Vendée Basket Club soutient que le délai de prescription de l’action en requalification de contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée court à compter du terme du dernier contrat de travail conclu lorsqu’elle porte sur le motif de recours à ce type de contrat. Elle estime alors que l’action en requalification des cinq premiers contrats de travail à durée déterminée est prescrite dans la mesure où le terme du dernier contrat était fixé au 31 mai 2014.

À titre subsidiaire, l’employeur fait valoir qu’il a justement appliqué les règles relatives au contrat de travail à durée déterminée s’agissant du recrutement de Mme [I]. À cet égard, il rappelle qu’il relève du secteur du sport et qu’il pouvait alors recourir à des contrats à durée déterminée d’usage conclus pour la durée de la saison sportive, lesquels n’avaient pas pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente du club. Il ajoute que l’emploi des joueurs professionnels de manière temporaire est justifié par la nécessité de constituer un collectif de joueurs sportivement cohérent pour atteindre l’objectif de performance inhérent au sport professionnel.

S’agissant de l’indemnité de requalification et du salaire de référence à retenir, l’association RVBC soutient que la prise en charge des frais de logement ne constitue pas un remboursement de frais professionnels susceptible d’être pris en compte au titre du salaire de référence mais une simple prise en charge de frais professionnels directement versés au propriétaire de l’appartement par l’employeur. Elle assure ensuite que Mme [I] n’a jamais réalisé l’entraînement des jeunes de sorte qu’aucun complément salarial ne peut lui être versé à ce titre. Elle estime alors que le salaire de référence à retenir s’élève à 2 334,75 euros ou subsidiairement à 2 436,55 en cas de valorisation de l’avantage en nature ‘logement’.

L’employeur souligne ensuite que Mme [I] ne démontre pas que la suspension de son contrat de travail le 31 mai 2017 serait liée aux conséquences d’un accident du travail ni qu’il aurait eu connaissance de l’origine professionnelle de la maladie à l’origine de la suspension du contrat de travail. Il précise encore que la suspension du contrat de travail pour accident du travail a cessé le 30 mars 2017. En tout état de cause, il fait observer que le 31 mai 2017 correspond au terme du contrat de travail à durée déterminée conclu avec Mme [I] et qu’elle n’avait aucune raison de penser que la suspension du contrat de travail était imputable à un accident de travail ou à une maladie professionnelle.

L’association RVBC estime encore qu’en application de l’article L. 1471-1 du code du travail, Mme [I] n’est pas recevable à invoquer des griefs antérieurs à 2015 au soutien de sa demande d’indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé et, qu’en toute hypothèse, les griefs formulés sont insusceptibles de caractériser la dissimulation d’emploi invoquée.

L’employeur sollicite également le rejet de la demande de paiement de la ‘prime d’ancienneté’ soulignant que Mme [I] n’a formulé aucune demande à cet égard dans sa déclaration d’appel du 16 janvier 2018 rendant le jugement de première instance définitif à cet égard. À titre subsidiaire, il indique que la salariée n’a pas chiffré le quantum de sa demande.

Enfin, l’association RVBC soutient que la demande relative à la perte aux droits à retraite est prescrite pour tous les contrats de travail conclus avant le 20 juillet 2015 et que la salariée n’a subi aucune perte de droits à l’acquisition d’une pension de retraite dans la mesure où elle a été régulièrement rémunérée pour la période de septembre 2016 à mai 2017. À titre subsidiaire, elle relève le caractère surévalué des calculs présentés par la salariée.

* **

MOTIVATION

I- Sur la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée :

Au soutien de son action en requalification, Mme [I] affirme que les sept contrats de travail à durée déterminée successifs en cause, en ce compris le dernier en date du 30 juin 2016, ont été conclus au visa de l’ancien article L. 121-1 du code du travail, pour la durée d’une saison sportive, ce qui ne constitue pas le motif précis exigé par la loi et ce encore, pour pourvoir un emploi de joueuse professionnelle de basket-ball dépourvu de caractère par nature temporaire, emploi participant au contraire à l’activité normale et permanente de son employeur.

La salariée ajoute que si le sport professionnel fait partie des secteurs d’activité déterminés permettant le recours au contrat à durée déterminée d’usage, il reste que le contrat du sportif professionnel doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif, étant précisé que la seule référence au texte du code du travail prévoyant cette faculté est insuffisante à cet égard, que l’employeur n’a pas entendu appliquer les règles du contrat à durée déterminée spécifique destinées au sportif professionnel et qu’en tout état de cause, la loi nouvelle du 27 novembre 2015 n’est pas applicable aux contrats conclus avant le 28 novembre 2015.

Elle prétend alors qu’aucun des contrats litigieux, conclus au titre des saisons sportives 2009/2010 à 2015/2016, dont la durée n’est pas conforme à la durée conventionnelle et réglementaire applicable, ne comporte la mention de son motif, ni d’éléments concrets et précis établissant leur caractère par nature temporaire et ne satisfait aux dispositions légales impératives, notamment celles des articles L. 1242-1 (interdiction de pourvoir un emploi permanent) et L. 1242-12 (conditions de forme).

Mme [I] relève que l’employeur ne rapporte pas la preuve dont la charge lui appartient du caractère temporaire de l’emploi qu’il a pourvu en recourant à des contrats à durée déterminée successifs.

L’association RVBC objecte que si l’action en requalification de Mme [I] est fondée sur le motif du recours visé au contrat pour les cinq premiers contrats d’usage, le motif de la requalification retenu par la cour d’appel de Poitiers pour le sixième contrat à durée déterminée est le non-respect de la durée minimale de douze mois prévue par l’article L. 222-2-4 du code du sport applicable depuis le 27 novembre 2015, étant rappelé que cette disposition est devenue définitive. Elle ajoute qu’en conséquence, dès lors que le point de départ de la prescription diffère selon le fondement de l’action en requalification, la prescription de l’action en requalification des cinq premiers contrats à durée déterminée fondée sur le motif des recours au contrats à durée déterminée, laquelle a commencé à courir au terme du cinquième d’entre eux, soit le 31 mai 2014, alors que l’action avait été engagée plus de trois années après, est prescrite en application de l’article L. 1471-1 du code du travail.

Subsidiairement, l’association conclut au rejet de l’action en requalification des contrats à durée déterminée d’usage pour absence de motif suffisant. Elle fait valoir qu’au-delà de l’aléa sportif, le caractère temporaire du contrat à durée déterminée se justifiait par la nécessité, s’agissant d’un sport collectif, de constituer un collectif de joueurs sportivement cohérent pour atteindre l’objectif de performance inhérent au sport professionnel, ce qui suppose en cas de remplacement d’un joueur, la modification de l’effectif en place aux fins d’adaptation de l’un ou l’autre joueur aux caractéristiques sportives du nouveau venu en vue de maintenir l’équilibre d’ensemble.

Elle affirme en conséquence que ce sont des raisons objectives qui ont justifié le recours au contrat à durée déterminée d’usage au sens des articles L. 1242-2 3° et D.1242-1 5° du code du travail.

*

I-a) Sur la prescription :

Selon l’article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

En application de l’article L. 1245-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance précitée, par l’effet de la requalification des contrats à durée déterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée irrégulier.

Il en résulte que le délai de prescription d’une action en requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au contrat à durée déterminée énoncé au contrat a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats à durée déterminée, le terme du dernier contrat et que le salarié est en droit, lorsque la demande en requalification est reconnue fondée, de se prévaloir d’une ancienneté remontant au premier contrat irrégulier.

En l’espèce, la relation de travail entre Mme [I] et l’association RVBC est caractérisée par la signature de sept contrats à durée déterminée d’usage conclus dans les conditions suivantes :

– contrat à durée déterminée d’usage du 23 juin 2009 (effet du 1er août 2009 au 31 mai 2010) ;

– contrat à durée déterminée d’usage du 1er juin 2010 (effet du 1er août 2010 au 31 mai 2011) ;

– contrat à durée déterminée d’usage du 1er juin 2011 (effet du 1er août 2011 au 31 mai 2012) ;

– contrat à durée déterminée d’usage du 31 juillet 2012 (effet du 1er août 2012 au 30 avril 2013) ;

– contrat à durée déterminée d’usage du 15 mai 2013 (effet du 1er août 2013 au 31 mai 2014) ;

– contrat à durée déterminée d’usage du 20 septembre 2014 (effet du 1er octobre 2014 au 30 avril 2016) ;

– contrat à durée déterminée d’usage du 30 juin 2016 (effet du 1er septembre 2016 au 31 mai 2017).

Mme [I] a saisi la juridiction prud’homale par requête du 21 juillet 2017.

En application des principes ci-dessus rappelés, dès lors que Mme [I] soutient avoir été engagée au titre de tous les contrats à durée déterminée d’usage conclus depuis le 23 juin 2009 en ce compris le dernier en date du 30 juin 2016 pour occuper un emploi participant de l’activité normale de l’association, l’action en requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, engagée le 21 juillet 2017, soit dans les deux ans du terme du dernier contrat (31 mai 2017) n’est pas prescrite, la salariée étant en droit, lorsque la demande en requalification est reconnue fondée, de se prévaloir d’une ancienneté remontant au premier contrat irrégulier.

L’absence de cassation de l’arrêt de la cour d’appel de Poitiers en ce que celui-ci a confirmé la requalification du contrat à durée déterminée du 30 juin 2016 en contrat à durée indéterminée, motivé par la cour par le non-respect des dispositions de l’article L. 222-2-4 du code du sport applicable depuis le 27 novembre 2015, ne saurait modifier le point de départ du délai de prescription tel que prétendu par l’employeur, dès lors que Mme [I] soutenait et soutient encore présentement avoir été engagée au titre de l’ensemble des contrats à durée déterminée conclus avec l’association RVBC durant la relation de travail pour occuper un emploi participant de l’activité normale de l’association.

Mme [I] est donc bien recevable en sa demande de requalification des contrats de travail à durée déterminée conclus du 23 juin 2009 au 15 mai 2015 en un contrat de travail à durée indéterminée en ce que celle-ci est fondée sur le motif du recours au contrat de travail à durée déterminée énoncé au contrat et le fait qu’elle aurait été engagée pour occuper un emploi participant de l’activité normale de l’association.

Le jugement sera infirmé en ce que rejetant les demandes présentées par Mme [I] au titre de la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée pour les contrats conclus avant le 20 juillet 2015, il a considéré prescrites les demandes de la salariée ayant trait aux contrats signés sur la période comprise entre le 23 juin 2009 et le 15 mai 2015.

I-b) Sur le fond :

En application de l’article L. 1242-1 du code du travail, un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Aux termes de l’article L. 1242-2 du code du travail “sous réserve des dispositions de l’article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et seulement dans les cas suivants : […]

-3° emplois à caractère saisonnier […] emplois pour lesquels dans certains secteurs définis par décret, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois […]”.

L’article D.1242-1 du même code précise que :

‘En application du 3° de l’article L. 1242-2, les secteurs d’activité dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois sont les suivants : […] 5° le sport professionnel.’

Le recours au contrat de travail à durée déterminée d’usage ne dispense pas toutefois l’employeur d’établir un contrat écrit comportant la définition précise de son motif.

Au surplus, s’il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1245-1 et D. 1242-1 du code du travail, que dans les secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu’il est d’usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive numéro 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de ces contrats est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi (Soc., 23 janvier 2008, pourvoi n° 12-17.882 ; Soc., 12 janvier 2010, pourvoi n° 08-40.053 ).

Il revient alors au juge de rechercher si, l’emploi confié à la salariée, fait partie de ceux pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée et si l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs était justifiée par l’existence d’éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de ces emplois et qu’ainsi il ne sert pas à pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Chacun des contrats de travail litigieux prévoit en substance en son article 1er -objet du contrat- que l’employeur engage la joueuse en qualité de basketteuse professionnelle (ou de joueuse professionnelle de basket) ‘ligue féminine 2″.

Il stipule de manière invariable qu’à ce titre, la joueuse participera aux activités sportives ayant un rapport direct avec sa fonction, matchs, entraînements, et autres missions liées à celles-ci. Il est ajouté que ‘le présent contrat est un contrat à durée déterminée dit d’usage et conclu au titre du 3° de l’article L. 122-1-1 du code du travail’, article cependant déjà abrogé à la date du premier contrat à durée déterminée en date du 23 juin 2009, ce depuis le 1er mai 2008 par l’ordonnance n°2007-329 du 12 mars 2007.

Ces contrats ont été conclus pour une durée inférieure à 12 mois à l’exception de celui du 20 septembre 2014.

Aucun motif n’est énoncé pour justifier le recours au contrat à durée déterminée sauf à relever que Mme [I] est engagée à chaque fois au titre de la saison du championnat de LF2.

Il est constant que Mme [I] a donc été employée en qualité de joueuse de basket-ball professionnelle pour jouer en compétition au sein du club durant 8 saisons consécutives du championnat de LF2 en ayant toujours occupé le même poste de meneuse de jeu.

Certes, il ne fait pas débat que le non-recours au contrat à durée indéterminée dans le secteur du sport professionnel correspond à une pratique généralisée et donc à un usage constant. Il reste cependant à l’employeur d’apporter des éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi et justifiant le non-recours au contrat à durée indéterminée, étant observé que l’aléa sportif ou le résultat des compétitions sont des motifs inopérants (Soc., 17 décembre 2014, n°13-23.176 ; plus récemment : Soc., 4 décembre 2019, pourvoi n° 18-11.989).

De la même manière, les conditions d’exercice telles que le rythme annuel d’une saison, ou plurimensuel d’un championnat national ne rendent pas nécessairement par nature temporaire l’emploi de joueuse de basket professionnel alors qu’il est manifeste que cet emploi de meneuse de jeu en équipe 1 durant huit saisons consécutives est en lien avec l’activité permanente de l’association RVBC centrée sur la pratique du basket à tout niveau avec, particulièrement mise en avant, l’équipe féminine n°1 ayant évolué pendant plusieurs saisons au niveau LF2.

La seule saisonnalité sportive n’est pas un critère objectif établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi au regard de l’activité normale et permanente de l’association sportive et de la durée de la relation contractuelle ayant existé entre les parties.

L’association RVBC se prévaut du fait que le basket est un sport collectif obligeant à constituer une équipe cohérente pour atteindre l’objectif de performance inhérent au sport professionnel, qu’il n’existe pas de poste individuel qui soit durable et permanent dans une équipe professionnelle de sport collectif dès lors que par hypothèse tout est affaire de groupe, que dans le basket-ball, cette cohérence suppose qu’un groupe de joueurs soit physiquement et techniquement compatibles les uns avec les autres pour occuper de manière optimale les 5 postes du terrain, tous spécialisés, que le remplacement d’un joueur ‘clé’ tel que le pivot, impose de souvent modifier l’effectif en place pour adapter l’ailier, l’arrière ou le meneur de jeu aux caractéristiques sportives (techniques ou physiques) du nouveau venu, le tout devant tenir compte des inévitables variations dans l’implication, le talent et/ou l’état de forme des joueurs eux-mêmes et qu’enfin, la nature même de l’équilibre est d’être temporaire.

Toutefois, ces éléments ne permettent pas davantage d’établir que Mme [I] occupait un emploi par nature temporaire alors que celle-ci a toujours été engagée au poste de meneuse de jeu ce, durant les huit saisons consécutives, sans que l’arrivée d’une nouvelle joueuse ait pu manifestement remettre en cause la cohérence de l’équipe au point pour l’association de devoir se séparer d’un autre joueur qui aurait pu être Mme [I]. Les éléments apportés par l’employeur sont communs à tout sport collectif où la recherche d’un équilibre basé sur la comptabilité des caractéristiques physiques et techniques est une constante générale en la matière, à l’instar de toute activité professionnelle exercée collectivement où l’esprit d’équipe est fondamental et justifie la recherche d’un équilibre reposant sur la compatibilité des caractères et la complémentarité des expertises apportées par chaque membre de l’équipe.

La nécessité invoquée par l’association RVBC commune à la plupart des sports collectifs constitue donc une justification d’ordre général, et non pas un motif précis suffisant propre à l’emploi en cause et établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi considéré.

Ainsi, l’association RVBC ne produit pas d’élément spécifiquement lié à l’emploi de joueuse professionnelle de basket -meneuse de jeu- de son équipe féminine occupé durant huit saisons sportives consécutives.

De surcroît, il doit être relevé que l’article 4 de chaque contrat de travail à durée déterminée stipule de nombreuses obligations à la charge de la joueuse, pour lesquelles elle s’engageait à :

– participer à toutes les compétitions officielles ou amicales, internationales ou nationales dans lesquelles l’employeur se trouvera engagé, ainsi qu’à tous les entraînements organisés par l’employeur et à toute rencontre ou manifestation sportive organisée par la FFBB ;

– s’entraîner dans le cadre de la structure technique de l’employeur, soigner sa condition physique pour obtenir le meilleur rendement possible dans son activité ainsi qu’adopter une hygiène de vie, une conduite irréprochable, avant, pendant et après les entraînements et rencontres, afin d’éviter de porter atteinte aux intérêts de l’employeur et au renom de l’équipe, et de se tenir à un devoir de réserve ;

– être à la disposition de l’employeur pour toute manifestation promotionnelle ou toute autre action publicitaire ou commerciale organisée par ou dans l’intérêt de l’employeur, respecter les équipements sportifs fournis par les partenaires de l’association ;

– céder ses droits d’exploitation collective de son image en faveur de l’employeur ;

– ne pas pratiquer une autre discipline sportive ou une activité de loisir susceptibles de nuire à l’exercice de sa profession salariée, à quelque titre que ce soit.

Il en résulte que l’engagement de Mme [I] en qualité de joueuse professionnelle dépassait sa seule participation au championnat de LF2 et plus généralement à des compétitions sportives, et exigeait des actions ou des abstentions ayant pour but de servir l’activité, la promotion de l’association RVBC et la progression du club dans son classement, autant d’éléments qui remettent en cause le motif du recours au contrat à durée déterminée et confirment que la joueuse professionnelle occupait un emploi durable et permanent dans la structure.

Enfin, s’agissant du contrat conclu le 30 juin 2016 pour la saison 2016-2017, celui-ci a été requalifié en contrat à durée indéterminée en raison du non-respect des règles prévues par le code du sport issues de la loi n°2015-1541 du 27 novembre 2015 visant à protéger les sportifs de haut niveau et professionnels et à sécuriser leur situation juridique et sociale, en particulier l’article L. 222-4-2 du code du sport.

Le conseil de prud’hommes a considéré que le contrat à durée déterminée d’usage conclu le 30 juin 2016 postérieurement à la loi du 27 novembre 2015 ce pour une durée déterminée allant du 1er septembre 2016 au 31 mai 2017, n’avait pas respecté la disposition relative à la durée de 12 mois définissant la saison sportive, disposition à caractère d’ordre public de sorte que la requalification en un contrat à durée indéterminée s’imposait.

L’arrêt de la cour d’appel de Poitiers en ce qu’il confirme la requalification du contrat de travail à durée déterminée d’usage conclu le 30 juin 2016 pour la saison 2015-2016 (en réalité 2016-2017) n’a pas été cassé par la Haute cour.

Il apparaît que de fait et plus généralement ce contrat ne se réfère nullement aux nouvelles dispositions du code du sport applicables aux contrats conclus à compter du 27 novembre 2015 et qu’il est rédigé de la même manière que les contrats précédents par référence à l’article L. 122-1-1 du code du travail abrogé par l’ordonnance n°2007-329 du 12 mars 2007 précitée.

Ce contrat stipule, comme les précédents, que Mme [I] est engagée en qualité de joueuse professionnelle pour opérer au sein de son équipe première qui évoluera dans le championnat de ligue féminine 2 de basket-ball et qu’à ce titre, elle participera aux activités sportives ayant un rapport direct avec ses fonctions, matchs, entraînements et autres missions liées à celles-ci.

Le contrat a donc été conclu dans les mêmes conditions que les autres contrats sauf à rappeler, ainsi que l’ont relevé le conseil de prud’hommes et la cour d’appel de Poitiers, son non-respect des dispositions désormais applicables de la loi du 27 novembre 2015 précitée.

Du tout, il résulte qu’en l’absence d’éléments concrets et précis apportés par l’employeur pour justifier le recours au contrat à durée déterminée et établir le caractère temporaire par nature de l’emploi, Mme [I], qui a occupé durablement un emploi participant de l’activité normale de l’association, est recevable et fondée en sa demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, et donc à se prévaloir d’une ancienneté remontant au premier contrat irrégulier, soit en l’occurrence le contrat du 23 juin 2009.

En conséquence, il y a lieu d’infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de requalification de Mme [I] des contrats de travail conclus avant le 15 novembre 2015 en contrat à durée indéterminée et de requalifier ces contrats en un contrat de travail à durée indéterminée. Cette requalification produira ses effets à compter du premier contrat irrégulier conclu avec l’association RVBC le 23 juin 2009 à effet au 1er août 2009.

II- Sur l’indemnité de requalification due en suite de la requalification en contrat à durée indéterminée :

En application de l’article L. 1245-2 du code du travail, lorsqu’il est fait droit à la demande en requalification du contrat à durée déterminée, la juridiction saisie doit d’office condamner l’employeur à payer au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire et plus précisément, au dernier salaire mensuel perçu avant la saisine de la juridiction. Elle n’est accordée qu’une fois, même en présence de plusieurs contrats à durée déterminée irréguliers.

La détermination de l’indemnité requalification nécessite préalablement de fixer le montant du salaire de référence sur lequel les parties sont en désaccord en particulier s’agissant d’une part, de la question de l’inclusion des congés payés dans le salaire brut, d’autre part de celle de la prise en charge par l’employeur du logement et enfin, de celle de la contrepartie des entraînements délivrés par Mme [I] au club.

II-a) Sur l’inclusion des congés payés :

L’association RVBC expose qu’en application de l’article 5.1 § 3 du contrat de travail, le montant du salaire brut contractuel versé à Mme [I] intégrait l’indemnité compensatrice des congés payés acquis pendant la durée du contrat, cette indemnité se valorisant au minimum à 10% de la rémunération brute servie, de sorte que le montant du salaire brut mensuel, hors indemnité compensatrice de congés payés, s’établit à la somme brute de 2334,75 euros. Elle ajoute que Mme [I] ne peut soutenir qu’elle n’a jamais compris les règles de décompte de ses congés ni qu’elle était dans l’incapacité de contrôler les montants versés dès lors qu’elle a toujours usé de ses droits à congés plus que de raison notamment pour se rendre en son pays d’origine aux fêtes de fin d’année, objet de négociation. Elle précise qu’aucune somme ne lui a jamais été retenue au titre de la prise de ses congés, bénéficiant d’un régime plus favorable que le régime légal et qu’au surplus, les modalités de calcul de l’indemnité de congés payés résultent nécessairement des dispositions de l’article L. 3141-24 du code du travail sans qu’il soit nécessaire de les reproduire en intégralité au contrat de travail lui-même.

Mme [I] rétorque que la clause litigieuse qui se borne à prévoir une simple équivalence financière n’est pas valide dès lors qu’elle ne permet pas l’exercice effectif du droit à congés ni de s’assurer qu’elle a effectivement reçu la majoration correspondant à son droit au congés payés. Elle relève que l’employeur n’a pas fait mention des droits à congés payés acquis ni des droits pris sur les bulletins de salaire ou sur leur annexe ce, alors qu’elle devait bénéficier de droits à congés supplémentaires d’origine conventionnelle. Elle soutient en conséquence qu’elle n’a pas pu comprendre la répartition des sommes versées ni la prise des congés payés non mentionnée sur ses bulletins de paie de sorte qu’il était impossible de vérifier qu’elle avait reçu la majoration de droits afférents aux congés payés.

*

Selon l’article L. 3141-3 du code du travail, le salarié a droit a un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La convention collective nationale du sport prévoit un régime particulier en son article 12.7.2.2.1 en ce que le droit annuel à congés payés des sportifs sera de trois jours ouvrables par mois de travail effectif, sans que la durée du congé exigible puisse excéder 36 jours ouvrables réparties selon les modalités qu’il énonce.

Ainsi que le rappellent les parties, il est admis de procéder à une intégration de l’indemnité de congés payés dans le salaire qui se trouve être forfaitisé, sous réserve que cette inclusion résulte d’une convention expresse entre les parties et ne soit pas défavorable au salarié.

S’il est ainsi possible d’inclure l’indemnité de congés payés dans la rémunération forfaitaire lorsque des conditions particulières le justifient, cette inclusion doit résulter d’une clause contractuelle transparente et compréhensible, ce qui suppose que soit clairement distinguée la part de rémunération qui correspond au travail, de celle qui correspond aux congés, et que soit précisée l’imputation de ces sommes sur un congé déterminé, devant être effectivement pris. (Soc., 14 novembre 2013, pourvoi n° 12-14.070 ; Soc., 22 mai 2019, pourvoi n° 17-31.517).

En l’espèce, aux termes de l’article 5.1 du contrat de travail, l’employeur s’engage envers la joueuse, en contrepartie des obligations imposées, à lui verser une rémunération mensuelle nette de 2500 euros pour 151.67 heures par mois, et indique : ‘Ces sommes incluent la liquidation du droit à congés payés’ puis ‘les rémunérations ci-dessus comprennent les congés payés’.

Cette clause se borne à stipuler une rémunération globale incluant l’indemnité de congés payés sans clairement distinguer la part correspondant au travail, de celle se rapportant aux congés, ni que soit précisée l’imputation de ces sommes sur un congé déterminé, devant être effectivement pris.

L’examen des bulletins de salaire ne révèle pas une quelconque ventilation des sommes réglées. Le versement de l’indemnité de congés payés devant être distinguée du salaire ne l’est aucunement. Il n’est pas fait mention des droits à congés payés acquis, ni des droits pris sur les bulletins de paie ou en annexe.

Contrairement à ce que soutient l’association RVBC, il ne peut se déduire de l’avenant à son dernier contrat de travail portant notamment sur l’engagement de l’employeur d’ accorder à la salariée 14 jours de congés payés continus à Noël pour qu’elle puisse se rendre en Slovaquie la parfaite compréhension par Mme [I] de la clause litigieuse comme précisément les conséquences en termes de rémunération de la prise de ce congé. Au demeurant, l’employeur affirme à tort qu’aucune somme n’a jamais été retenue au titre de la prise de ses congés par Mme [I] alors qu’en l’occurrence le bulletin de salaire de décembre 2016 mentionne à ce titre une retenue de 770,84 euros brut.

En conséquence, la clause litigieuse n’étant ni compréhensible ni transparente, celle-ci ne saurait produire effet et l’association RVBC n’est pas fondée à invoquer ces dispositions pour voir fixer le salaire brut mensuel après déduction d’une indemnité compensatrice de congés payés de 10%, à la somme de 2334,75 euros au lieu de 2594 euros.

II-b) Sur les frais de logement :

Mme [I] rappelle que la fourniture d’un logement par son employeur et la prise en charge de son coût par ce dernier constitue un avantage en nature devant être intégré dans le montant de sa rémunération, dès lors qu’il ne s’agit pas de remboursement de frais professionnels. Elle précise que l’absence de prétendue anomalie relevée par l’URSSAF lors d’un précédent contrôle intervenu en 2011 ne vaut pas approbation tacite de la pratique du club par l’organisme social. Elle ajoute que les sommes versées à un salarié constituent des frais d’entreprise exclus de l’assiette des cotisations sociales si elles répondent à des frais d’exploitation et non à des éléments de rémunération ce, uniquement si ces frais revêtent un caractère exceptionnel, s’ils sont engagés dans l’intérêt de l’entreprise et exposés en dehors de l’exercice normal de l’activité du salarié, critères en l’espèce non remplis. Enfin, elle relève que le logement n’est pas mis à la disposition du salarié gratuitement ou moyennant une participation si faible qu’elle ne peut être assimilée à un loyer, que la prise en charge du logement à hauteur de 500 euros par mois est assimilable à un loyer de sorte qu’il n’y a pas lieu à évaluer l’avantage en nature par référence à l’article 2 de l’arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l’évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale tel que prétendu subsidiairement par l’employeur. En définitive, elle considère que ce complément de salaire convenu doit être intégré au montant de sa rémunération brute à hauteur de 628,59 euros.

L’association RVBC objecte qu’un accord était intervenu pour la mise à disposition d’un logement indépendant correspondant à la valeur locative de 500 euros par mois, précisant que ce loyer est payé directement au propriétaire par le club sans être versé à la joueuse. Elle affirme qu’il ne s’agit pas d’un remboursement de frais professionnels susceptible d’une requalification en salaire mais d’une prise en charge directe par l’employeur des frais de logement exposés par Mme [I], soit une charge d’exploitation directement exposée par le club de sorte qu’il n’y a pas lieu à requalifier cette prise en charge par l’employeur des frais de logement exposés par Mme [I]. Elle explique que ce dispositif a été mis en place pour répondre à la situation particulière des sportifs professionnels devant se déplacer d’une région à une autre, voire d’un pays à l’autre, ce qui rend difficile la gestion des réalités matérielles d’une installation temporaire. Elle ajoute que les conditions de la prise en charge de ce logement n’ont jamais été considérées par l’URSSAF comme devant donner lieu à la prise en compte d’un avantage en nature, aucune anomalie n’ayant été relevée à ce titre à l’occasion d’un contrôle réalisé par l’organisme.

Subsidiairement, l’association fait valoir que la prise en charge par l’employeur de frais afférents au logement du salarié, lorsqu’ils ne répondent pas à la définition de frais professionnels, n’est pas constitutive d’un salaire net au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

Elle précise que cet avantage devrait être valorisé sous la forme d’un ajout à l’assiette des cotisations de sécurité sociale au sens de l’article 2 de l’arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l’évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale et en application de son barème indexé sur le nombre de pièces du logement et sur le montant du salaire rapporté au PMSS.

*

L’article 12.6.1-structure de rémunération du salarié- prévoit que la rémunération, dont le montant annuel respecte les minima, comprend un salaire fixe et des avantages en nature valorisés dans le contrat (…). Il est précisé que dans tous les cas, tout élément de rémunération individuelle convenu entre les parties ou garanti par l’employeur doit être intégré au contrat de travail (ou précisé le cas échéant par voie d’avenant) et être exprimé en montant brut.

L’avenant au contrat de travail du 30 juin 2016 stipule en son point 1-Logement : ‘Conditions identiques cette saison, à savoir 500 euros par mois, soit la somme annuelle de 6000 euros’. Les bulletins de salaire mentionnent en toute fin une somme de 500 euros sous l’intitulé ‘autres frais’ non soumis à cotisations sociales.

Aux termes de l’article L. 3221-3 du code du travail, ‘constitue une rémunération au sens du présent chapitre, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l’employeur au salarié en raison de l’emploi de ce dernier.’

Les avantages en nature sont des éléments de rémunération qui, en vertu des dispositions de l’article R.3243-1 du code du travail, doivent figurer sur les bulletins de paie.

En application de ces dispositions, la prise en charge, par l’employeur, d’un logement constitue un avantage qu’il y a lieu d’inclure dans le montant de la rémunération du salarié.

Ne sont exclus de la rémunération perçue par le salarié que les éléments correspondant soit à des gratifications à caractère aléatoire ou temporaire, soit à des remboursement de frais.

Les frais qu’un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur, doivent lui être remboursés sans qu’il puisse être imputés sur la rémunération.

L’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale donne pour assiette aux cotisations ‘toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail’ et ne permet ‘de déduction au titre des frais professionnels que dans les conditions fixées par arrêté ministériel’.

Selon les dispositions de l’article 1er de l’arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, ‘les frais professionnels s’entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l’emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l’accomplissement de ses missions’.

En l’espèce, il ne fait pas débat que l’association RVBC, conformément à son engagement, a pris en charge le coût du logement de Mme [I] à [Localité 2] en payant directement le propriétaire ce, pendant la durée de la relation contractuelle.

Cette prise en charge du logement constitue un avantage qu’il y a lieu d’inclure dans le montant de la rémunération du salarié.

Aucun élément allégué par l’association RVBC ne permet de qualifier autrement cette prise en charge.

La provenance de Mme [I] d’un pays étranger et son besoin de logement durant une saison conduisant à une installation temporaire ne permettent nullement de qualifier les frais pris en charge par l’employeur de frais exposés par la salariée pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur, ni de charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l’emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l’accomplissement de ses missions. Les frais litigieux n’ont pas pour objet de compenser un surcoût nécessité par l’activité sportive de Mme [I] et doivent être distingués des frais de déplacement ou de séjour ponctuels nécessités par l’activité sportive liée à sa participation à des compétitions sur l’ensemble du territoire national en cours d’exécution du contrat. Il n’est pas contesté que la joueuse était logée de manière principale dans ce logement à [Localité 2].

Enfin l’intégration de la prise en charge du logement dans le montant de la rémunération ne saurait se traduire ni se réduire pour le salarié par une évaluation réalisée en application de l’article 2 de l’arrêté du 10 décembre 2002.

Dès lors que l’employeur ne considérait pas la prise en charge comme un élément de rémunération de la salariée, il doit être retenu que le montant stipulé à l’avenant n’était pas exprimé en brut.

Par suite, il convient d’inclure dans le montant de la rémunération brute de Mme [I] le complément de rémunération de 628,59 euros brut au titre des frais de logement constitutif d’un avantage en nature.

II-c) Sur les primes d’entraînement :

Mme [I] expose que suivant avenant à son contrat de travail du 30 juin 2016, les parties ont convenu qu’en contrepartie de la mission d’entraînement et de coaching de jeunes joueurs du club, l’association lui verserait une somme de 4000 euros, somme qu’elle a effectivement perçue en juin 2017 de sorte qu’aucun motif ne justifie d’exclure ce montant de sa rémunération brute. Elle relève que ce versement n’a pas été mentionné sur un quelconque bulletin de paie ni assujetti à cotisations sociales. Elle ajoute que ce versement ne peut avoir été réalisé au titre de l’ancienneté , alors que la prime ancienneté s’élevait à la somme de 4500 euros et non 4000 euros, et était exigible uniquement en juin 2018.

L’association RVBC rétorque que l’engagement de Mme [I] était conditionné expressément à la disponibilité de la joueuse alors que Mme [I] n’a jamais réalisé une quelconque intervention d’entraînement. Elle ajoute que le chèque de 4000 euros encaissé en juin 2017 était afférent à une indemnité d’ancienneté dont rien n’indique qu’elle constitue un complément de salaire. Elle conclut que la somme litigieuse ne saurait être retenue dans le calcul du salaire de référence.

*

Le point 3 -Entraînements en club- de l’avenant au contrat de travail du 30 juin 2016 stipule que ‘la joueuse accepte d’entraîner des jeunes du club selon ses disponibilités qu’exige l’équipe dans laquelle elle joue(L2 ou autre). Pour cette mission, une somme de 4000 euros est acceptée pour une période allant de septembre 2016 à mai 2017 (base 8 mois à 500 euros/mois).’

Mme [I] verse aux débats diverses pièces telles que plusieurs attestations de parents de jeunes joueuses assurant la présence de la salariée en qualité d’entraîneuse de leur fille pour la saison 2016-2017 en particulier le mercredi de 14H30 à 16H ainsi que lors des matchs le samedi ‘selon le planning de coaching’, ou encore les feuilles de marque reprenant le déroulement et les résultats des matchs de l’équipe de jeunes joueuses U 11 de l’association sur lesquelles la salariée est mentionnée en qualité d’entraîneuse ou entraîneuse adjointe de l’équipe, présente aux matchs à plusieurs reprises en octobre 2016, février, mars et avril 2017, une attestation de Mme [G] [V] joueuse professionnelle au sein de l’association RVBC affirmant que ‘Mme [I] a entraîné au sein de l’association RVBC des équipes de jeunes joueuses durant la saison 2016/2017″ et enfin, une lettre de recommandation établie par l’association RVBC le 15 octobre 2016 faisant état du ‘partage de connaissances et de compétences de Mme [I] auprès d’une grande partie de nos équipes de jeunes (garçons et filles U9 à U20), ses précisions techniques et ses interventions ayant grandement participé à l’évolution de nos différents licenciés’ (pièce 49).

Ces éléments établissent que Mme [I] a bien assuré l’encadrement et le coaching d’une équipe de jeunes joueuses durant la saison 2016-2017.

Au surplus, le relevé du compte bancaire communiqué par la salariée révèle un versement de 4000 euros le 12 juin 2017.

Ce montant ne peut correspondre à la prime complémentaire dite ‘ancienneté’ prévue à l’avenant en contrepartie de l’absence d’obtention de contrat pour la saison 2017/2018 d’un montant de 4500 euros et exigible en juin 2018.

En conséquence, il convient d’intégrer au montant de la rémunération brute mensuelle de Mme [I] la somme de 500 euros net, soit 628,59 euros brut.

Du tout, sur la base du dernier mois de salaire mensuel perçu par Mme [I], soit la somme de 2594, 17 euros, sans opérer de déduction d’une quelconque indemnité de congés payés, mais en tenant compte de l’avantage en nature lié au logement et de la prime d’entraînement, il sera considéré que Mme [I] est en droit de prétendre à une indemnité de requalification d’un montant de 3851,35 euros.

Le jugement sera infirmé en ce qui concerne le quantum de l’indemnité allouée à ce titre par le conseil de prud’hommes.

III- Sur l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé :

Mme [I] expose que l’association RVBC a commis des faits de nature à caractériser une situation de travail dissimulé pendant les huit saisons sportives, en ce que celle-ci :

– a déclaré tardivement ses emplois aux organismes sociaux et ce, pour une durée inférieure à celle de la saison officielle sans tenir compte de sa participation aux activités sportives préparatoires organisées par le club, périodes durant lesquelles l’association lui donnait le statut d’amateur ;

– s’est abstenue de déclarer aux organismes sociaux chargés du recouvrement des charges sociales, comme de faire apparaître sur les bulletins de paie, l’ensemble des sommes qui lui ont été versées -en particulier les accessoires de salaire tels que la prise en charge de son logement et le versement de sommes en contrepartie de l’entraînement et le coaching de jeunes joueuses- ;

– ne s’est pas affiliée aux services de santé au travail de sorte que la joueuse n’a pas bénéficié de visites médicales obligatoires telles qu’une visite de reprise à l’issue de ses arrêts de travail pour accident du travail ;

– a transféré sur Pôle emploi partie de sa rémunération.

La salariée ajoute que l’ampleur des irrégularités dénoncées et leurs contours révèlent le caractère intentionnel des agissements de l’association RVBC, professionnelle du sport qui ne peut valablement invoquer son ignorance de la loi et de la réglementation en la matière. Elle évoque la mise en place d’un véritable système organisé de recrutement de joueurs professionnels en méconnaissance des obligations et règles impérieuses procédant par dissimulation, confusions des durée et motif du contrat à durée déterminée au seul motif de l’existence d’intersaisons lesquelles sont totalement absentes en basket ball. Elle explique que l’emploi d’un joueur professionnel pour la durée d’une saison n’est pas limité aux périodes durant lesquelles se déroulent les compétitions officielles mais correspond aussi à celles pendant lesquelles les équipes se préparent et s’entraînent avant le début des premières compétitions officielles (pendant deux à trois mois). Elle fait valoir qu’elle était titulaire d’une licence sportive d’une durée d’une année en vertu du règlement fédéral ce qui l’empêchait de se mettre au service d’une autre association ou société sportive. Elle estime aussi que ‘qualifiée’ pour jouer en compétition, elle s’est maintenue de façon constante à la disposition de l’association sportive dont elle était membre et qui l’avait affiliée à la FFBB au titre de la saison sportive considérée.

En définitive, elle considère qu’elle était placée à la disposition permanente du club et que la dissimulation d’emploi résulte des manquements de l’association aux règles de droit et ce, dans la seule recherche d’économies.

L’association RVBC fait valoir que toute prétention fondée sur les dispositions de l’article L. 8221-5 du code du travail qui reposerait sur un grief antérieur au 20 juillet 2015 est prescrite, l’action présentée à ce titre constituant une contestation des conditions d’exécution du contrat de travail soumise au délai de prescription biennale de l’article L. 1471-1 du code du travail.

Elle en déduit que les demandes relatives à l’activité salariée en intersaison sont prescrites à l’exception de l’intersaison 2016 pour laquelle un unique courriel de juillet 2015 n’est pas suffisant pour démontrer l’existence d’un contrat de travail

L’employeur prétend qu’en tout état de cause, les éléments avancés par Mme [I] sont insusceptibles de caractériser une dissimulation d’emploi salarié.

Il soutient ainsi que :

-même avérée, la régularisation de la déclaration d’embauche auprès des organismes sociaux après l’embauche effective du salarié n’induit pas nécessairement une dissimulation d’activité dès lors que l’ensemble des rémunérations perçues par la salariée depuis le début d’exécution du contrat ont été payées et déclarées ;

– dans les limites de la prescription applicable, Mme [I] ne caractérise pas l’existence d’un contrat de travail durant l’avant-saison 2016, dans la mesure où d’une part, le seul programme de préparation physique estivale remis aux joueuses par courriel du 1er juillet 2015 pour 6 semaines ne pouvait être assimilé à des séances d’entraînement collectives organisées et obligatoires et où d’autre part, les matchs amicaux constituaient de simples exercices de cohésion de groupe et de mise en condition physique contre des équipes de plus faible niveau ;

– l’inscription à Pôle emploi au terme contractuel d’un contrat à durée déterminée est de droit, droit que Mme [I] n’a fait que librement exercer ;

– la prise en charge du logement occupé par Mme [I] n’a jamais été considérée par l’URSSAF comme devant donner lieu au décompte d’un avantage en nature ;

– les sommes versées au titre de déplacement, trajets vers la Slovaquie et prise en charge d’un forfait de frais d’hébergement ont bien été portées sur les bulletins de paie lorsqu’elles relevaient de l’assiette des cotisations sociales du régime général ;

– le défaut de suivi médical ne relève pas d’une situation de travail dissimulé au sens de l’article L. 8221-1 du code du travail.

*

III-a) Sur la prescription :

Il résulte des dispositions de l’article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 en vigueur à la date de la saisine du conseil de prud’hommes par Mme [I] que ‘ “Toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit (…)”.

L’article L. 8223-1 du code du travail dispose qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Il résulte de ces dernières dispositions que l’indemnité forfaitaire est due quelle que soit la qualification de la rupture du contrat de travail, et que l’indemnité n’est due qu’en cas de rupture du contrat de travail.

Le délai de prescription de l’action en paiement de l’indemnité forfaitaire n’ayant pu courir avant que cette indemnité soit exigible, c’est- à- dire avant la rupture du contrat de travail survenue le 31 mai 2017, la saisine du conseil de prud’hommes par acte du 21 juillet 2017 s’inscrit par conséquent dans le délai de deux ans de l’article L.1471-1 du code du travail.

Enfin, la cour ayant fait droit à la demande de requalification des contrats de travail à durée déterminée conclus entre l’association RVBC et Mme [I] en contrat à durée indéterminée avec effet au 1er août 2009, il s’en suit que la salariée est recevable à invoquer des griefs antérieurs au 20 juillet 2015.

III-b) Sur le bien fondé:

L’article L.8221-5 du code du travail dispose qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ce texte n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.

– Sur le défaut d’adhésion au service de santé au travail et de visites médicales de contrôle et de reprise :

Le défaut d’adhésion au service de santé au travail et l’absence de suivi médical ne constituent pas des éléments de nature à constituer un travail dissimulé par dissimulation d’emploi.

– Sur la tardiveté des déclarations préalables à l’embauche et l’exercice d’une activité en intersaison :

Aux termes de l’article L. 1221-10 du code du travail visé par l’article L. 8221-5 1° précité, l’embauche d’un salarié ne peut intervenir qu’après déclaration nominative accomplie par l’employeur auprès des organismes de protection sociale désignés à cet effet.

Il ressort des pièces produites par Mme [I], que l’association RVBC a procédé à sa déclaration préalable à l’embauche :

– le 31 octobre 2013 pour une embauche déclarée comme réalisée le 12 octobre 2013 (pièce 4) ;

– le 29 octobre 2015 pour une embauche déclarée comme réalisée le 1er octobre 2015 (pièce 58) ;

– le 3 octobre 2016 pour une embauche déclarée comme réalisée le1er septembre 2016 (pièce 60).

Ces déclarations ne sont donc pas intervenues antérieurement à l’embauche de Mme [I].

L’employeur justifie certes que les salaires qu’il estimait devoir antérieurement à la déclaration d’embauche en exécution des termes des contrats de travail, ont été versés à la salariée et déclarés aux organismes sociaux, précisant en particulier que l’intégralité de la rémunération versée en septembre 2016 a été soumise aux cotisations de sécurité sociale selon bulletins de salaire des mois de septembre et octobre 2016.

Cependant, il doit être relevé une contradiction entre la date d’embauche déclarée et la date de prise d’effet des contrats de travail correspondants. Ainsi, l’association RVBC a déclaré une date d’embauche du 12 octobre 2013 alors que le contrat de travail conclu le 15 mai 2013 mentionne une prise d’effet au 1er août 2013, une date d’embauche du 1er octobre 2015 alors que Mme [I] bénéficiait d’un contrat de travail du 20 septembre 2014 à effet au 1er octobre 2014 jusqu’au 30 avril 2016.

Par ailleurs, pour justifier de l’exercice d’une activité en intersaison qui aurait dû être rémunérée et valablement déclarée, Mme [I] verse aux débats les éléments suivants :

– un courriel du 1er août 2013 de l’entraîneur M. [X] adressé aux joueuses par lequel il indique envoyer ‘la pré-reprise et la programmation des matchs amicaux. Les premiers matchs amicaux sont programmés le week-end du 7-8 septembre. C’est à dire qu’après une semaine d’entraînements…On joue…je compte sur vous pour arriver bien physiquement et réaliser votre propre pré-reprise. Vous trouverez de quoi faire…Bonne continuation et au 31’ (pièce 32) ; est joint à ce mail, un programme de pré-reprise préparation physique ainsi que le planning de reprise saison 2013-2014 de ligue 2 dont le premier match est en date des 7 et 8 septembre 2013 ;

– un courriel du 17 juillet 2014 de M. [M], responsable de la préparation physique, qui transmet à chaque joueuse en pièce jointe la préparation estivale (quatre semaines-partie aérobie, partie renforcement type gainage et partie vitesse/vivacité) se concluant par ces mots : ‘Nous comptons sur vous pour arriver dans un état de forme convenable le lundi 25 août. Bonnes vacances à toutes et au 25 août’ ;

– des courriels de M. [X] aux mêmes fins du 14 juillet 2014 (programme de reprise à partir du 25 août) et du 1er juillet 2016 rédigé en ces termes : ‘on vous envoie les programmes pour arriver en pleine forme le mardi 16 août. Merci de bien respecter le programme de [O] et de lui faire suivre les séances demandées. La prépa sera courte : 5 semaines. Il est donc important de réaliser une pré-reprise de qualité’. Le programme des matchs amicaux joint à ce document fait état de rencontres les 27 août 2016 ([Localité 3]-RBVC) et 31 août (CSP [Localité 5]-RVBC) ;

– un extrait de Ouest-France publié le 24 août 2016 relatant le stage de cohésion de deux jours organisé à la mer et mentionnant que les entraînements pour la saison 2016-2017 avaient repris ‘semaine dernière'(soit semaine du 15 au 19 août 2016) ; une autre coupure du même quotidien du 1er septembre 2016 faisant état de la rencontre amicale contre le BCSP de [Localité 5]’15 jours après avoir retrouvé le parquet pour le début de la préparation’;

– une attestation de Mme [G] [V] joueuse professionnelle au sein de l’association RVBC affirmant que ‘Mme [I] était présente aux premières séances d’entraînements collectifs et stages préparatoires dès le (illisible) août de l’année 2016″.

Pour sa part, l’association RVBC communique une attestation de M. [X] qui déclare que Mme [I] n’a pas participé en tant que joueuse aux deux premiers matchs amicaux contre [Localité 3] et [Localité 5], se trouvant malade ou blessée à cette période et que son absence était sans conséquence dans la mesure où sa participation aux activités du mois d’août n’était pas impérative s’agissant essentiellement d’activités destinées à la cohésion du groupe.

S’agissant de la période d’août 2013, le contrat de travail à durée déterminée conclu le 15 mai 2013 est à effet du 1er août 2013 et aucun bulletin de paie n’est communiqué concernant le mois août 2013, étant précisé que l’absence de versement de salaire pour cette période n’est pas contestée.

Le seul envoi d’un programme de préparation physique par l’entraîneur à ses joueuses pour les aider au maintien de leur forme physique tel qu’exigé compte tenu de leur niveau de jeu ne saurait caractériser en soi l’accomplissement par Mme [I] d’une activité qui aurait due être rémunérée et déclarée. Il reste toutefois que titulaire d’un contrat de travail en date du 15 mai 2013à effet du 1er août 2013 valablement enregistré, Mme [I] avait interdiction d’obtenir une licence et d’évoluer pour une autre association ou société sportive en application de l’article 718 du règlement général de la fédération française de basket-ball.

Surtout, il apparaît que les joueuses devaient reprendre leur activité à compter du 31 août 2013 et le planning mentionne 9 matchs amicaux avant la reprise du championnat de ligue 2 le12 octobre 2013, date correspondant à celle de sa date d’embauche. Les premiers bulletins de paie versés portent sur le mois d’octobre 2013 ce encore à compter du 12 octobre 2013 uniquement.

Il sera rappelé que Mme [I] avait contractuellement l’obligation de ‘participer à toutes les compétitions officielles’ mais aussi aux ‘compétitions amicales, internationales ou nationales dans lesquelles l’employeur se trouvera engagé, à tous les entraînements organisés par l’employeur et à toute rencontre ou manifestation sportive organisée par la FFBB’, ainsi que celle de ‘s’entraîner dans le cadre de la structure technique de l’employeur, soigner sa condition physique pour obtenir le meilleur rendement possible dans son activité ainsi qu’adopter une hygiène de vie, une conduite irréprochable, avant, pendant et après les entraînements et rencontres, afin d’éviter de porter atteinte aux intérêts de l’employeur et au renom de l’équipe’ comme celle de ‘se tenir à un devoir de réserve’.

Par suite, au regard de l’ensemble de ces éléments, il sera considéré que l’employeur aurait dû rémunérer Mme [I] pour les mois d’août et septembre 2013, déclarer et soumettre ses rémunérations à cotisations sociales et procéder à sa déclaration d’embauche bien avant le 12 octobre 2013, soit, à tout le moins, antérieurement à la date de la prise d’effet du contrat de travail fixée au 1er août 2013.

S’agissant de la saison 2014-2015, un planning intitulé par l’association RVBC elle-même ‘planning de reprise saison 2014-2015 ligue 2″ indiquait une reprise officielle le lundi 25 août avec un entraînement physique collectif de 10 à 12H et du basket de 16 à 18H les cinq premiers jours, un stage en bord de mer du 1er au 3 septembre puis une alternance de séances collectives de basket et de musculation entrecoupées de matchs amicaux ou de tournois. Or, le contrat de travail a été conclu le 20 septembre 2014 avec effet au 1er octobre 2014 alors que le contrat précédant avait pris fin au 31 mai 2014. De surcroît, le bulletin de paie du mois d’octobre 2014 mentionne une ‘retenue pour entrée en cours de mois du 1er au 14 octobre 2014″ alors que la reprise du championnat de LF2 est en date du 27 septembre 2014 tel qu’indiqué sur le planning précité et le tableau des résultats du championnat LF2 2014-2015 communiqué par Mme [I] (pièce 22.3) sans que l’employeur ne produise aucun élément pour justifier cette retenue. Au surplus, les coupures de presse communiquées par Mme [I] attestent de sa participation à plusieurs matchs courant septembre et début octobre 2014 (pièces 22.7 à 22.12, 22.15 à 22.17).

Il est manifeste que Mme [I] a accompli une activité au profit de l’association RVBC et sous son lien de subordination mais ce, sans être rémunérée ni déclarée sur la période du 25 août au 14 octobre 2014 ce, nonobstant la date de prise d’effet figurant au contrat ne correspondant pas à la réalité de la situation.

Enfin, concernant la saison 2016-2017, le contrat de travail conclu le 30 juin 2016 prenait effet le 1er septembre 2016 mais les éléments produits par Mme [I] établissent que son activité a débuté à tout le moins dès le 16 août 2016 par la reprise d’entraînements collectifs, de stages de cohésion et la prévision de matchs amicaux, peu important que celle-ci ait été malade ou blessée sans pouvoir participer à ces dernières rencontres ou qu’une éventuelle absence à de tels matchs ou à un stage de cohésion soit de moindre gravité qu’à un match de compétition officielle dès lors que cette participation relevait de ses obligations contractuelles. Il est manifeste que cette préparation collective, organisée sous l’autorité d’un entraîneur et la surveillance d’un préparateur physique, constituait le préalable nécessaire pour permettre aux basketteuses d’être prêtes à jouer les compétitions de la ligue nationale, et donc une prestation de travail exécutée sous la subordination de l’association RVBC, ainsi que le révèlent les échanges de SMS entre M. [X] et Mme [I] à compter du 21 août 2016 (pièce 45).

Ces seuls éléments établissent que, pour les saisons 2013-2014, 2014-2015 et 2016-2017, Mme [I] était mise à disposition de l’employeur et, plus encore, exerçait une activité dès la reprise des entraînements collectifs et matchs amicaux, soit antérieurement à la date de la saison de compétitions officielles correspondant le plus souvent à la date de prise d’effet figurant au contrat. Il est manifeste que, nonobstant cette date de prise d’effet, Mme [I] accomplissait des activités sous la subordination de son employeur dès lors qu’elles relevaient de ses obligations contractuelles, lesquelles, de fait, ne se limitaient aucunement à la stricte période du championnat de LF2. L’association RVBC aurait dû pour ces périodes procéder à la déclaration d’embauche préalablement, établir les bulletins de paie correspondant à la rémunération à verser à la joueuse, et ainsi soumettre ces rémunérations à cotisations sociales.

Enfin, il a été considéré que les accessoires de salaire tels que la prise en charge du logement de Mme [I] au cours de la relation de travail ou encore les sommes allouées en contrepartie de l’entraînement ou du coaching de jeunes joueuses durant la saison 2016/2017 devaient être incluses dans la rémunération de Mme [I]. Ces accessoires auraient dû faire l’objet de déclarations aux organismes sociaux de recouvrement de cotisations sociales en application des articles R. 3243-1 6ème alinéa et L. 242-1 du code de la sécurité sociale, dans leur version applicable au présent litige, nonobstant l’absence d’observations ou de redressement émis par l’URSSAF sur ce point.

Ces diverses irrégularités par leur répétition d’année en année traduisant un certain systématisme révèlent que l’employeur a agi délibérément dans le but de se soustraire à ses obligations légales.

Les éléments matériel comme intentionnel de l’infraction de travail dissimulé résultent des pièces du dossier et, dans ces circonstances, l’infraction de travail dissimulé est donc caractérisée au sens des dispositions légales précitées.

Le jugement sera infirmé sur ce point et l’association RVBC sera condamnée à payer à Mme [I] une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, soit la somme de 23 108,1 euros.

IV- Sur les rappels de salaire au titre des périodes de travail dissimulé :

Mme [I] fait valoir qu’outre la créance indemnitaire prévue à l’article L. 8223-1 du code du travail, elle peut prétendre aux salaires dus en contrepartie de son emploi dans les conditions d’un travail dissimulé au cours des saisons 2014/2015 à 2016/2017 ce, suivant le régime de la prescription appliquée à une telle action en vertu de l’article L. 3245-1 du même code.

IV-a) Sur l’irrecevabilité des demandes nouvelles :

L’employeur considère que les prétentions formulées par Mme [I] désormais à hauteur d’appel pour un montant total de 20 610,56 euros au titre des arriérés de salaire réclamés pour les saisons 2014/2015, 2015/2016 et 2016/2017 au lieu de 16 908 euros tel que sollicité en première instance, sont partiellement irrecevables en ce que cette réévaluation constitue une demande nouvelle en application de l’article 564 du code de procédure civile.

*

Les conclusions de première instance prises dans l’intérêt de Mme [I] versées aux débats révèlent que celle-ci avait sollicité une somme totale de 16 908 euros au lieu de 20 610,56 euros réclamés présentement à titre d’arriérés de salaire. Cette différence est expliquée par la demande de prise en compte du forfait logement au titre de l’évaluation du salaire de base.

Dès lors, cette réévaluation ne constitue pas une demande nouvelle en ce qu’elle tend aux mêmes fins, à savoir le paiement de salaires correspondant aux mêmes périodes que celles mentionnées devant les premiers juges.

En application des articles 565 et 566 du code de procédure civile, la fin de non-recevoir soulevée par l’association RVBC sera rejetée.

IV-b) Sur le bien fondé des demandes :

Liminairement, il sera relevé que Mme [I] réclame le paiement de salaires non pas au titre des périodes interstitielles en conséquence de son action en requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée mais en contrepartie de son emploi dans les conditions d’un travail dissimulé au cours des saisons 2014/2015 à 2016/2017.

– S’agissant de la période du 1er juillet au 15 octobre 2014 (saison 2014/2015) :

Mme [I] sollicite une somme totale de 9050,98 euros à titre de rappel de salaire correspondant à la période du 1er juillet 2014 au 30 septembre 2014 et à celle du 1er au 15 octobre 2014, ce sur la base d’une rémunération mensuelle de 2484,82 euros (soit 1856,82 euros +628 euros pour la prise en charge des frais de logement).

La salariée soutient que le contrat de travail souscrit le 20 septembre 2014 à effet au 1er octobre suivant a reçu un commencement d’exécution dès le mois de juillet 2014 conformément à la date de commencement de la saison sportive fixée par les règles de la FFBB et les consignes de l’entraîneur du club notifiées à la joueuse et qu’il aurait dû prendre fin au terme de la saison sportive considérée fixée par la FFBB le 30 juin 2015.

*

Il sera rappelé que la perception par le salarié d’allocations chômage pendant les périodes litigieuses n’est pas de nature à démontrer que le salarié s’est tenu à la disposition de l’employeur et que les juges du fond n’ont pas à déduire des rappels de salaire alloués le cas échéant les sommes perçues au titre des allocations chômage.

Le contrat de travail a été souscrit le 20 septembre 2014 à effet au 1er octobre 2014. Il s’en suit que depuis le 1er juillet 2014, et alors que le précédent contrat de travail avait pris fin le 31 mai 2014, Mme [I] n’était pas titulaire d’un contrat de travail lui interdisant d’évoluer pour une autre association ou société sportive en application de l’article 718 du règlement général de la fédération française de basket-ball. Au surplus, Mme [I] a été licenciée pour la saison 2014/2015 le 4 septembre 2014 (pièce 55 de Mme [I]).

Le seul fait que Mme [I] ait été titulaire d’une licence, document d’identité sportive valable pour une saison sportive (saison d’une année au 30 juin de l’année suivante), conformément à l’article 401 du règlement général de la FFB, même établi, ne saurait suffire à caractériser la mise à disposition de l’association RVBC et l’accomplissement de prestations de travail au profit de l’association RVBC. Au contraire, celle-ci demeurait libre de s’engager auprès d’un autre club à compter du 1er juillet 2014. En tout état de cause, celle-ci pouvait exercer une autre activité rémunérée même en lien avec le basket par exemple en délivrant des cours particuliers ou même collectifs ou dans tout autre domaine.

Surtout, Mme [I] ne démontre pas que jusqu’à la reprise d’entraînement collectif du 25 août 2014, celle-ci ait accompli des prestations de travail au profit de l’association RVBC sous la subordination de l’employeur et devant être rémunérée ni même qu’elle ait été maintenue à sa disposition, l’invitation de l’entraîneur sportif à suivre individuellement un programme de pré-reprise étant insuffisante à l’établir.

En revanche, à compter du 25 août 2014, il a été précédemment retenu que Mme [I], en participant à la reprise des entraînements collectifs, stages de cohésion et matchs même amicaux, était non seulement à la disposition de l’employeur mais avait accompli des prestations de travail sous la subordination de l’association RVBC, lesquelles, de fait, ne se limitaient pas à sa seule participation aux compétitions officielles de L2.

Dès lors, l’association RVBC sera condamnée au paiement des salaires dus pour la période comprise entre le 25 août 2014 et le 14 octobre 2014. Si le contrat de travail du 20 septembre 2014 ne stipule pas expressément l’avantage ‘logement’, il apparaît que Mme [I] en bénéficiait déjà au regard du tableau manuscrit signé par le trésorier de l’association RVBC communiqué par la joueuse (pièce 3.6) et de la formulation utilisée dans le cadre de l’avenant au contrat du 30 juin 2016 concernant cet avantage (‘conditions identiques à cette saison’). Or, Mme [I] ne prétend nullement avoir été dans l’obligation d’avoir à trouver à se loger à ses frais durant la période de reprise des entraînements du 25 août au 14 août 2014.

Pour ces raisons, sur la base d’un salaire mensuel de 1856,82 euros, correspondant à la rémunération brute allouée mensuellement à Mme [I] au titre de cette saison, l’association RVBC sera condamnée au paiement d’une somme de 3190,47 euros brut à titre de rappel de salaire sur la période du 25 août au 14 octobre 2014.

– Au titre de la période du 1er mai au 30 juin 2016 (saison 2015/2016) :

Mme [I] réclame une somme de 6375,26 euros brut (2x 3187,63 euros brut) au titre de la période du 1er mai au 30 juin 2016. Elle explique que le contrat de travail aurait dû prendre fin le 30 juin 2016 à minuit et non le 30 avril 2016 alors que ‘qualifiée’ pour jouer en compétition, elle était ainsi mise à la disposition permanente du club dont elle était membre sans pouvoir être titulaire d’une licence sportive au sein d’un autre club durant la période réglementaire considérée, peu important qu’elle ait ou non perçu des allocations chômage de Pôle emploi.

L’association RVBC conclut à l’absence de toute relation salariale caractérisée par le maintien d’un lien de subordination à l’occasion de la période d’intersaison considérée, étant rappelé que la joueuse ne conteste pas avoir été indemnisée par Pôle emploi tout au long de cette période.

*

Le contrat de travail signé le 20 septembre 2014 pour une durée supérieure à 12 mois, stipule en son article 6 le versement d’une rémunération mensuelle pour la période du 1er octobre 2014 au 30 avril 2016.

Comme précédemment, il sera considéré que le seul fait que Mme [I] ait été titulaire d’une licence (saison d’une année au 30 juin de l’année suivante), même établi, conformément à l’article 401 du règlement général de la FFB ne saurait suffire à caractériser la mise à disposition de l’association RVBC. Au surplus, au 1er mai 2016, Mme [I] n’était plus liée par un contrat de travail et celle-ci était libre d’exercer une quelconque activité rémunérée même en lien avec le basket par exemple en délivrant des cours particuliers ou même collectifs ou dans un autre domaine comme de s’engager auprès d’un autre club (qui lui aurait fait délivrer une licence à compter du 1er juillet 2016). Le championnat LF2 était achevé et Mme [I] ne soutient pas qu’elle

poursuivait les entraînements collectifs ou des stages en vue de la saison suivante pour laquelle elle n’avait pas encore signé le moindre contrat.

Dès lors, en l’absence de tout autre élément attestant de la mise à disposition de Mme [I] au service de l’association RVBC et de l’exécution d’une prestation de travail sous la subordination de l’employeur durant la période considérée, celle-ci sera déboutée de sa demande de rappel de salaire.

Subsidiairement, Mme [I] réclame à titre de dommages et intérêts la réparation de son préjudice en ce que les manquements de l’employeur à ses obligations contractuelles, conventionnelles et réglementaires impératives ont fait obstacle momentanément à l’exercice de son métier et l’ont privée corrélativement d’une contrepartie pécuniaire à laquelle elle aurait pu prétendre si elle avait été régulièrement employée.

L’employeur soulève l’irrecevabilité de cette demande non formulée devant les premiers juges de sorte qu’en application de l’article 564 du code de procédure civile, elle constitue une demande nouvelle, donc irrecevable.

A titre subsidiaire et au fond, il souligne que le préjudice d’une perte de chance ne peut jamais, par hypothèse, être égal à celui résultant de l’avantage escompté et rappelle que Mme [I] a passé l’été en Slovaquie et qu’elle percevait les allocations versées par Pôle emploi de sorte qu’elle n’établit pas le préjudice allégué.

Cette demande de dommages et intérêts, non formée devant les premiers juges et visant à réparer le préjudice causé par la perte de chance de Mme [I] d’exercer son métier et d’en percevoir la contrepartie pécuniaire ne tend pas aux mêmes fins que celle ayant pour objet le rétablissement de salaires en paiement d’une activité exercée au sein de l’association RVBC dans des conditions irrégulières. Elle constitue une demande nouvelle devant être déclarée irrecevable.

– Au titre de la période comprise entre le 1er juillet et le 31 août 2016 (saison 2016/2017) :

Mme [I] sollicite le rétablissement de sa rémunération sur la période comprise entre le 1er juillet et le 31 août 2016, soit la somme de 5184,32 euros. Elle précise que le contrat de travail conclu le 30 juin 2016 aurait dû prendre effet dès le 1er juillet suivant et non le 1er septembre 2016 tel que stipulé ce, conformément à la législation et la réglementation en vigueur.

L’association RVBC conclut à l’absence de toute relation salariale caractérisée par le maintien d’un lien de subordination à l’occasion de la période d’intersaison considérée, étant rappelé que, selon les dires de Mme [I] elle-même, celle-ci a passé l’été 2016 en Slovaquie et qu’en outre, la joueuse ne conteste pas avoir été indemnisée par Pôle emploi tout au long de cette période.

*

Il a été retenu précédemment que le contrat de travail conclu le 30 juin 2016 prenait effet le 1er septembre 2016 mais que les éléments produits par Mme [I] établissent que son activité a débuté à tout le moins dès le 16 août 2016 par la reprise d’entraînements collectifs, de stages de cohésion et la prévision de matchs amicaux, peu important que celle-ci ait été malade ou blessée sans pouvoir participer à ces dernières rencontres, qu’il était manifeste que cette phase de préparation collective et organisée sous l’autorité d’un entraîneur et d’un préparateur physique constituait le préalable nécessaire pour permettre aux joueuses d’être prêtes à jouer des compétitions de la ligue nationale, et qu’elles constituent une prestation de travail exécutée sous la subordination de l’association RVBC.

Au surplus, sur la période du 1er juillet au 15 août 2016, s’il est établi que Mme [I] a passé l’été en Slovaquie jusqu’à la reprise des entraînements précités, ainsi que la joueuse l’indiquait dans ses conclusions d’appelante du 13 avril 2018 communiquées par l’employeur (pièce 26 p 11 § 4) comme devant la présente cour (p 26), il apparaît aussi que ce séjour a été convenu expressément entre les parties, avec de surcroît un versement de 1000 euros par l’employeur à ce titre. Il est ainsi manifeste que le contrat de travail du 30 juin 2016 avait déjà pris effet au 1er juillet 2016, qu’à cette date Mme [I] avait interdiction de s’engager auprès d’une autre association ou société en qualité de joueuse professionnelle et était mise à disposition de l’association RVBC.

Elle est donc en droit de percevoir sa rémunération dès le 1er juillet 2016 dont à déduire l’équivalent en brut de la somme de 1000 euros net déjà versée.

Enfin, le même avenant stipule l’octroi de l’avantage logement pour un montant de 500 euros sur une période de 12 mois, correspondant à 6000 euros au total. Mme [I] ne conteste pas qu’elle bénéficiait de cet avantage durant la période considérée.

En conséquence, sur la base salariale brut de 2592,16 euros selon les bulletins de paie correspondant à la période de septembre à décembre 2016, l’association RVBC sera condamnée à payer à Mme [I] la somme de 3838,86 euros brut pour la période du 1er juillet au 31 août 2016.

En définitive, l’association RVBC sera condamnée à payer à Mme [I] une somme totale de 7029,33 euros brut à titre de rappel de salaire.

V- Sur la rupture de la relation de travail :

V-a) Sur la nullité de la rupture :

La rupture de la relation de travail est intervenue au terme du derniercontrat de travail signé le 30 juin 2016, soit le 31 mai 2017.

Mme [I] fait valoir qu’au jour de la rupture du contrat de travail requalifié en contrat à durée indéterminée, celui-ci était suspendu en raison d’un arrêt de travail consécutif à son accident de travail de sorte que la rupture illicite de la relation de travail doit produire les effets d’un licenciement nul en application des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail.

L’association RVBC relève que Mme [I] ne démontre aucunement qu’au 31 mai 2017, jour de la rupture de la relation de travail, le contrat de travail était suspendu en raison des conséquences de son accident de travail ni que l’employeur en avait connaissance.

Elle ajoute que si Mme [I] a effectivement été victime d’un accident de travail le 20 février 2017 pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie pour la période du 21 février au 30 mars 2017, la suspension du contrat de travail avait cessé à cette date. Elle précise que si Mme [I] a présenté un nouvel arrêt maladie pour la seule période du 11 au 18 mai 2017, la joueuse ne l’a pas informée de sa demande de prise en charge au titre de l’accident de travail précédent et n’a jamais fourni à la caisse de certificat médical susceptible d’attester de la réalité de la lésion invoquée. Elle affirme ainsi avoir eu connaissance de cette demande seulement un mois plus tard, à réception du refus de prise en charge de l’arrêt de travail au titre de la législation professionnelle notifiée le 30 juin 2017.Enfin, elle indique que l’intéressée a pu finalement obtenir le rattachement à l’accident du travail en produisant par la suite un certificat médical daté du 30 mai 2017, ce dont elle a été informée par courrier de la caisse du 13 novembre 2017.

*

En application des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail, au cours des périodes de suspension du contrat de travail du salarié consécutives à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l’employeur ne peut rompre ce contrat que s’il justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance de ces dispositions étant nulle.

Les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’employeur a connaissance de l’origine professionnelle de la maladie ou de l’accident.

Au cours de la période de suspension du contrat de travail, l’employeur ne peut rompre le contrat que s’il justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie. Il en est ainsi, alors même qu’au jour du licenciement, l’employeur a été informé d’un refus de prise en charge au titre du régime des accidents du travail ou des maladies professionnelles.

Liminairement, il sera considéré qu’eu égard à la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, l’association RVBC n’est pas fondée à se prévaloir des dispositions de l’article L. 1226-19 du code du travail qui dispose que les période de suspension du contrat de travail consécutives à un accident de travail ne font pas obstacle à l’échéance du contrat de travail à durée déterminée.

A l’appui de ses prétentions fondées sur la nullité de la rupture de son contrat de travail, Mme [I] verse aux débats :

-l’attestation d’accident du travail du 20 février 2017 faisant état de ‘douleurs très fortes au talon’ (pièce 15) ;

-le compte-rendu d’échographie du même jour mentionnant en conclusion ‘signe d’aponévrosite plantaire d’insertion calcanéenne droite sans signe de complication’ (pièce 16) ;

-l’arrêt de travail prescrit le 6 mars 2017 jusqu’au 26 mars suivant (pièce 17.2) ;

-la prolongation de l’arrêt de travail du 27 au 31 mars 2017 (pièce 17.3) ;

-l’avis de notification en date du 20 mars 2017 de la prise en charge par la caisse de l’accident du travail du 20 février 2017 (pièce 40) ;

– l’avis d”arrêt de travail sur le formulaire accident du travail ‘de rechute’ du 11 mai 2017 jusqu’au 19 mai suivant avec la mention: ‘lésion initiale le 27/03/2017 [corrigé manuscritement au ’20 février 2017″] aponévrosite plantaire droite’ (pièce 17.4) ;

-le certificat médical du 19 mai 2017 prescrivant des soins jusqu’au 30 juin suivant (pièce 17.5) ;

-le certificat médical du 30 mai 2017 d’arrêt de travail jusqu’au 1er septembre 2017 pour ‘récidive aponévrosite droite dès la reprise activité physique et professionnelle ; attente IRM et avis médecin du sport à [Localité 4]’ rappelant la date de l’accident du 20 février 2017 (pièce 17.6) ;

– l’attestation de salaire accident du travail signée le 30 juin 2017 par le responsable administratif et financier de l’association RVBC sollicitant la subrogation au titre du maintien de salaire pour la période des 30 et 31 mai 2017 ;

– le courrier de la caisse du 13 novembre 2017, indiquant à Mme [I] : ‘suite à votre demande du 27 septembre 2017, je vous confirme que votre certificat médical en date du 30 mai 2017 a bien été pris en compte comme prolongation d’arrêt de travail sur votre dossier accident du travail du 20 février 2017″ (pièce 53) ;

– l’ attestation de paiement des indemnités journalières établie par la caisse le 20 décembre 2017 au titre de la période du 1er janvier au 20 décembre 2017.

L’association Roche Vendée Basket Club communique pour sa part une lettre datée du 30 juin 2017 que la caisse lui a adressée pour l’informer que suite à la déclaration d’accident survenu à sa salariée (référencée à la date du 10 mai 2017), elle procédait, faute de certificat médical initial, au classement du dossier.

L’ensemble de ces éléments établit qu’au 31 mai 2017, le contrat de travail était suspendu dès lors que Mme [I] justifie d’un arrêt de travail signé par le médecin prescripteur la veille de la rupture du contrat sur un formulaire Cerfa ‘accident du travail/maladie professionnelle’, rechute prise en charge par la caisse tel que notifié le 13 novembre 2017. Cet avis fait état d’une ‘récidive aponévrosite plantaire droite’, terme figurant également sur l’avis du 19 mai 2017 et il ne peut être contesté que Mme [I] était placée en arrêt de travail le 31 mai 2017 suite à une rechute des lésions occasionnées par l’accident de travail du 20 février 2017, l’ensemble des avis d’arrêt ou de soins médicaux, établis au moyen du formulaire Cerfa dédié aux arrêts de travail d’origine professionnelle, visant au surplus un siège de lésion identique.

L’employeur fait valoir qu’il ignorait alors les démarches accomplies par Mme [I] aux fins de la prise en charge des arrêts subis à compter du 11 mai 2017 au titre de la législation professionnelle, ce qui semble surprenant dans la mesure où la caisse informe habituellement immédiatement l’employeur d’une telle démarche. En tout état de cause, il ne prétend nullement ne pas avoir été destinataire des divers avis d’arrêts de travail ou de soins de sa salariée, tous établis au moyen du formulaire Cerfa dédié aux arrêts de travail d’origine professionnelle, en particulier celui établi le 30 mai 2017, la veille de la rupture. L’association RVBC ne soutient aucunement que le certificat médical d’arrêt de travail du 30 mai 2017 ait été antidaté et soit un faux. Enfin, le bulletin de paie de mai 2017 communiqué par l’employeur mentionne des ‘retenues pour accident du travail du 11 mai au 31 mai 2017″.

Par suite, il doit être considéré qu’au-delà de l’attention nécessairement portée par l’employeur sur la condition physique et l’état de santé d’une joueuse d’un tel niveau, les mentions figurant sur le bulletin de paie de mai 2017, l’utilisation par le médecin prescripteur de formulaires Cerfa accident du travail / maladie professionnelle tant pour le certificat médical du 11 au 19 mai avec sélection de la case ‘rechute’ et mention de la date d’accident du 20 février 2017, que pour le certificat prescrivant des soins pour la période du 19 mai au 30 juin 2017 (avec la mention prolongation) et enfin pour le certificat médical (de prolongation) prescrivant un arrêt de travail du 30 mai au 1er septembre 2017, révèlent que l’association RVBC, destinataire de ces avis, avait connaissance, lorsque la rupture est intervenue au 31 mai 2017, de l’origine professionnelle de l’affection dont souffrait Mme [I] ce, alors même qu’ il n’avait pas encore été informé de la prise en charge ou non de cette rechute au titre de la législation professionnelle.

En conséquence, la rupture du contrat au 31 mai 2017 ne pouvait intervenir qu’à la condition que l’employeur justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie, ce dont il ne fait pas état.

Dans ces conditions, il y a lieu de dire que la rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions de l’article L. 1226-9 du code du travail doit produire les effets d’un licenciement nul en application de l’article L. 1226-13 du même code, de sorte que le jugement déféré est confirmé de ce chef.

V-b) Sur les conséquences de la rupture :

Le salarié dont le licenciement est nul et qui ne réclame pas sa réintégration a droit d’une part, aux indemnités de rupture et, d’autre part, à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite de la rupture et au moins égale à celle prévue par l’article L. 1235-3du code du travail dans sa version alors applicable, soit 6 mois de salaire.

Compte-tenu de la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, il y a lieu de faire remonter l’ancienneté de la salariée au 1er août 2009, date d’effet du premier contrat à durée déterminée d’usage.

– Sur les dommages et intérêts au titre de la nullité de la rupture :

Mme [I] sollicite la somme de 26 964,66 euros correspondant à 6 mois de salaire sur la base d’une rémunération mensuelle de 4 494,11 euros comprenant les accessoires de salaire alors que l’association RVBC demande subsidiairement à la cour de limiter le montant à allouer à la somme de 14 008,50 euros (soit 2334,75 euros x 6 mois), ou plus subsidiairement encore à la somme de 14 619,30 euros (2436,55 euros x 6 mois).

Le préjudice subi par Mme [I] du fait de la rupture nulle, compte tenu de son âge au moment de la rupture (33 ans), d’une ancienneté de 8 ans au sein de l’association RVBC, d’un salaire mensuel brut de 3851,35 euros et de l’absence de toute information concernant sa situation postérieurement à la rupture, notamment sur la question de savoir si elle a ou non retrouvé un emploi, sera réparé par l’allocation d’une somme que la cour est en mesure de fixer à 23 108,10 euros, le jugement étant infirmé de ce chef.

– Sur l’indemnité compensatrice de préavis :

Mme [I] sollicite une somme de 8988,22 euros représentant deux mois de salaire brut en ce compris les accessoires de salaire, eu égard à son ancienneté supérieure à deux ans et en application des articles 4.4.3.2 et 4.4.3.3 de la convention collective nationale du sport.

L’association RVBC rétorque que le montant de cette indemnité ne saurait être supérieur à la somme de 2334,75 euros outre les congés payés afférents ou subsidiairement à celle de 2436,55 euros.

Selon l’article L. 1234-1 (3°) du code du travail, lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis de deux mois s’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans. Lorsqu’il n’exécute pas le préavis, le salarié a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice, conformément à l’article L. 1234-5.

Selon l’article L. 1234-5 du même code, elle correspond aux salaires et avantages qu’aurait perçus le salarié s’il avait accompli son travail pendant cette période. Le salaire à prendre en considération englobe tous les éléments de rémunération auxquels la salariée aurait pu de toutes évidences prétendre si elle avait exécuté normalement son préavis, à l’exclusion des primes et indemnités représentant des remboursements de frais réellement engagés.

Ces dispositions ne sont applicables que si la loi, la convention ou l’accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d’ancienneté de services plus favorable pour le salarié.

L’article 4.4.3.2 de la convention collective nationale du sport prévoit une durée de préavis identique à celle prévue légalement, soit une durée de deux mois pour les salariés non-cadres bénéficiant d’une ancienneté supérieure à deux ans.

Mme [I], non cadre et d’une ancienneté supérieure à deux ans compte tenu de la requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée,est en droit de solliciter une indemnité compensatrice de préavis égale à 2 mois de salaire.

Le salaire (et avantages) que Mme [I] aurait perçus si elle avait travaillé durant cette période doit être fixé à la somme de 3851,35 euros.

En conséquence, le jugement sera infirmé quant au montant de l’indemnité compensatrice de préavis alloué à Mme [I] et l’association RVBC sera condamnée à payer à Mme [I]la somme de 7 702,7 euros.

– Sur l’indemnité de licenciement :

Mme [I] sollicite en application de l’article 4.4.3.3 de la convention collective nationale du sport une somme de 8988,22 euros à titre d’indemnité de licenciement correspondant à 2 mois de salaire brut.

En application de l’article L. 1234-9 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent litige, le salarié titulaire d’un contrat à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail .

L’article R. 1234-2 du même code, dans sa version applicable aux faits de l’espèce, précise qu’elle ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d’ancienneté.

L’article R. 1234-4 ajoute que le salaire à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :

– soit le douzième de la rémunération des 12 derniers mois précédent le licenciement ;

– soit le tiers des trois derniers mois . Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n’est prise en compte que dans la limite d’un montant calculé à due proportion.

Le montant de l’indemnité est établi en fonction du salaire réel global accessoires compris.

Les dispositions de la convention collective nationale du sport relatives à l’indemnité de licenciement, plus favorables que les dispositions légales, doivent par conséquent prévaloir sur ces dernières.

En effet, l’article 4.4.3.3 Indemnité de licenciement prévoit que :

‘Le licenciement, quel qu’en soit le motif, de tout salarié ayant au moins 1 an d’ancienneté dans l’entreprise donne lieu au versement d’une indemnité, sauf faute grave ou lourde.

Cette indemnité est équivalente à :

– 1 / 5 de mois de salaire par année pour les 5 premières années d’ancienneté dans l’entreprise ;

– 1 / 4 de mois de salaire par année de la 6e à la 10e année de présence dans l’entreprise ;

– 1 / 3 de mois de salaire par année pour les années de présence dans l’entreprise au-delà de 10 ans.

Pour le calcul du nombre d’années de présence, les périodes assimilées à du temps de travail effectif, telles que définies à l’article 7. 1. 2, sont à prendre en compte.

Le salaire à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité est, selon le cas le plus favorable, soit la moyenne des 12 derniers mois, soit la moyenne des 3 derniers mois, étant entendu que toute prime ou gratification perçue pendant cette période est prise en compte pro rata temporis.’

En l’espèce, la moyenne des trois derniers mois de salaire est plus favorable à Mme [I] que la moyenne des 12 derniers mois de sorte que sur la base d’une rémunération de 3851,35 euros, et tenant compte d’une ancienneté de 8 ans (préavis inclus), le calcul de l’indemnité de licenciement s’établit comme suit :

3851,35 euros /5= 770,27 x 5 = 3851,35 euros

3851,35 euros /4 = 962,84 euros x 3 = 2888,52 euros

Total : 6739,87 euros.

Il y a donc lieu d’infirmer le jugement ayant débouté Mme [I] de sa demande d’indemnité de licenciement, et de faire droit à cette demande ce, dans la limite d’un montant de 6 739,87 euros, somme au paiement de laquelle l’association RVBC doit être condamnée.

VI- Sur la prime dite ‘ancienneté’ :

Mme [I] réclame une somme de 5750,51 euros à titre de prime complémentaire dite ‘ancienneté’ en exécution de l’avenant au contrat de travail du 30 juin 2016.

Elle estime que le dispositif du jugement l’ayant déboutée de cette demande n’est en rien définitif dès lors que l’effet dévolutif de l’appel porte sur les chefs de jugement expressément critiqués mais aussi sur ceux qui en dépendent en application de l’article 562 du code de procédure civile.

Or, elle rappelle qu’elle avait critiqué le jugement en ce qu’il avait rejeté une partie de ses demandes en particulier s’agissant de sa demande de reconnaissance de l’ancienneté acquise au sein du club. Elle considère qu’elle a par là-même implicitement critiqué le chef relatif à la revendication d’un droit à prime complémentaire dite ‘ancienneté’.

L’association RVBC, au visa des articles 4, 5, 562 et 954 du code de procédure civile conclut au rejet de cette demande, au motif que le rejet de la prétention relative à la « prime complémentaire d’ancienneté» ne fait pas partie des chefs de jugement expressément critiqués visés par l’acte d’appel formulée par l’intéressée le 16 janvier 2018, en sorte que le rejet de cette demande par les premiers juges présente un caractère définitif insusceptible d’être remis en cause dans le cadre de la présente instance. Elle ajoute que cette demande ne figure pas au nombre de celles visées par le dispositif des dernières conclusions d’appel signifiées le 16 juin 2022, en sorte que la cour, qui ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions déposées, n’en n’est pas saisie en application de l’article 954 du code de procédure civile.

*

Aux termes de l’article 562 du code de procédure civile, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Liminairement, il sera rappelé que la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt de la cour d’appel de Poitiers sauf en ce qu’il a :

– rejeté la demande de Mme [I] tendant au rejet des dernières conclusions de l’association RVBC du 20 mai 2019 ;

– dit n’y avoir lieu à communication des pièces complémentaires, s’agissant notamment du registre du personnel de l’association RVBC ;

– ordonné la requalification du contrat de travail à durée déterminée d’usage conclu le 30 juin 2016 pour la saison 2015-2016 en contrat de travail à durée indéterminée avec tous effets de droits ;

– dit n’y avoir lieu à indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné l’association RVBC aux dépens.

Il en résulte que l’arrêt a été cassé en ses dispositions rejetant ‘les autres demandes de Mme [I]’, étant relevé que la cour reprenait dans l’exposé du litige la demande de condamnation de l’association RVBC en paiement d’une somme de 5750,51 euros à titre de prime complémentaire ‘ancienneté’ et constatait dans les motifs de sa décision que la dite prime avait été réglée par anticipation. En conséquence, il sera considéré qu’en rejetant les autres demandes de Mme [I], la cour d’appel a rejeté la demande de la joueuse formulée au titre de la prime ‘ancienneté’ et que ces dispositions ont donc été cassées par la Haute cour.

Dès lors, la cause et les parties sont remises dans l’état où elles se trouvaient avant le dit arrêt.

Le jugement du conseil de prud’hommes de la Roche-sur-Yon, dans ses motifs, rappelle que l’avenant au contrat du 30 juin 2016 en son point n°5 stipule que ‘la joueuse n’ayant pas obtenu de contrat pour la saison 2017/2018, ce qu’elle accepte, demande un complément dit ‘ancienneté’ de 4500 euros. Si pas de nouveau contrat en 2017/2018, la dite somme sera exigible en juin 2018, à la joueuse, libre de tout contrat …’

La conclusion du paragraphe consacré à cette prime, est libellé en ces termes : ‘le Conseil, après avoir entendu les parties à l’audience sur ce point, constate que cette obligation a bien été réalisée conformément aux dispositions du contrat du 30 juin 2016 (avenant) prend acte que la somme de 4500 euros dont le paiement avait été sollicité au titre de la présente instance, a bien été réglé à Mme [I], ce qu’elle confirme’.

Dans le dispositif de la décision, le conseil ‘déboute la demanderesse du surplus de ses demandes’.

La déclaration d’appel de l’association RVBC du 12 janvier 2018 mentionne les chefs du jugement expressément critiqués sans reprendre le chef ayant ‘débouté la demanderesse du surplus de ses demandes’.

Celle adressée par la voie électronique par Mme [I] le 16 janvier 2018 fait état d’un appel partiel ‘en ce que les premiers juges (…) ont débouté la salariée de sa demande de reconnaissance de l’ancienneté acquise au sein de l’association sportive qui l’a employée abusivement et irrégulièrement sous contrats à durée déterminée d’usage successifs depuis le 1er août 2009 (…)’.

Au regard de la formulation utilisée par Mme [I], il doit être constaté que celle-ci n’a pas expressément critiqué le chef du jugement la déboutant du surplus de ses demandes, en particulier de sa demande de prime ‘ancienneté’.

De surcroît, contrairement à ce qu’affirme Mme [I], la demande en paiement de la prime dite ‘ancienneté’ en exécution de l’avenant au contrat de travail, nonobstant l’intitulé de cette prime donné par Mme [I], ne dépend pas de sa demande de reconnaissance de l’ancienneté acquise au sein de l’association sportive qui l’a employée abusivement et irrégulièrement sous contrats à durée déterminée d’usage successifs depuis le 1er août 2009, cette dernière demande étant formée dans le cadre de son action en requalifation de sa relation de travail en contrat à durée indéterminée.

En effet, la demande en paiement de la prime litigieuse ne dépend aucunement de la requalification ou non des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée mais porte uniquement sur l’exécution de l’avenant au dernier contrat à durée déterminée, prime intitulée littéralement à l’avenant ‘prime complémentaire’ et uniquement conditionnée par l’absence de nouveau contrat pour la saison 2017/2018.

Par ailleurs, il est constant que Mme [I] n’a pas procédé, dans le délai pour conclure au fond, à une nouvelle déclaration d’appel régularisant le vice de forme qui ne peut être régularisé par des conclusions au fond prises dans le délai requis énonçant les chefs critiqués du jugement manquants, dès lors que seul l’acte d’appel emporte dévolution des chefs critiqués du jugement conformément à l’article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile.

Du tout, il ressort que la présente cour n’est pas valablement saisie de la demande en paiement de Mme [I] de la prime complémentaire ‘ancienneté’.

VII- Sur les demandes relatives à la perte de droit à prestations de l’assurance vieillesse :

Mme [I] fait valoir que par l’effet de la requalification des contrats à durée déterminée successifs, elle est réputée avoir été employée à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche et donc être en droit d’obtenir la reconstitution de sa carrière ainsi que la régularisation de sa rémunération.

La salariée assure aussi que le préjudice subi pour perte de droits à la retraite résulte des manquements de l’employeur à ses obligations déclaratives, lequel a dissimulé une partie de l’activité et de l’emploi salarié et donc soustrait des éléments de rémunération des déclarations faites aux organismes sociaux chargés du recouvrement des cotisations sociales, de sorte qu’il s’agit d’une action en contestation de l’assiette des cotisations retenue par l’employeur fondée sur l’article 1231-1 du code civil (anciennement 1147). Elle en déduit que cette action est soumise à la prescription de droit commun dont le point de départ ne court qu’à compter de sa liquidation par la salariée de ses droits à la retraite et qu’en l’occurrence la perte des droits à la pension de retraite complémentaire est avéré et déterminable.

Elle évalue son préjudice, distinct de celui résultant du défaut de paiement de rémunération, à la somme de 21 240,62 euros au titre de la période comprise entre 2009 et 2017.

L’association RVBC relève que la prétention formulée par Mme [I] résulte directement de l’action en requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, laquelle est prescrite pour tous les contrats conclus avant le 20 juillet 2015, de sorte qu’il y a lieu de lui appliquer le même régime de prescription.

L’employeur ajoute que seule la demande portant sur la saison 2016/2017 serait en conséquence recevable mais non fondée, puisque Mme [I] a été régulièrement rémunérée pour la période courant du 1er septembre 2016, date de prise d’effet du contrat, à mai 2017. Enfin, il précise qu’en cas de condamnation à des compléments salariaux par la cour, ceux-ci seraient nécessairement soumis aux cotisations légales nécessaires à l’acquisition par Mme [I] des droits à la retraite correspondants.

Enfin, il relève subsidiairement le caractère erroné des calculs présentés dès lors que Mme [I] ajoute aux salaires perçus des ‘accessoires’ dont elle ne précise ni les objets, ni les montants, et qu’elle n’explique pas davantage les sommes correspondant aux salaires qui, selon la joueuse, auraient dû être versés au titre des périodes interstitielles.

*

VII-a) Sur la prescription :

La salariée réclame des dommages et intérêts pour réparation du préjudice causé par la faute de l’employeur qui n’a pas satisfait à son obligation d’affiliation à un régime de retraite et de régler les cotisations en découlant.

La prescription applicable dépend toutefois de la nature de la créance, sans s’arrêter à la qualification donnée par la partie demanderesse.

Ainsi, si une demande portant sur la contestation de l’assiette des cotisations retenue par l’employeur sur les salaires versés est soumise à la prescription de droit commun, laquelle ne court qu’à compter de la liquidation par le salarié de ses droits à la retraite, l’action en paiement des cotisations de retraite assises sur des salaires dus obéit à la prescription applicable aux salaires.

Ici, Mme [I] explicite sa demande, en page 73 de ses conclusions, en précisant in fine que ‘les accessoires de salaire et les sommes correspondantes aux salaires retenus pour les calculs sont ceux versés et ceux normalement dus dont le paiement a été demandé précédemment dans (ses) conclusions’.

Il en résulte que cette demande telle qu’exposée est double :

– elle porte d’une part, sur les conséquences de la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et de son activité non rémunérée et exécutée dans des conditions irrégulières, donc sur le non-paiement de cotisations afférentes à des salaires et accessoires non versés. A ce titre et au regard du calcul proposé par la salariée (évaluation des points de retraite selon le régime de retraite complémentaire Arrco devenu Agirc/Arrco), la demande ne tend qu’à pallier l’absence de paiement de cotisations de retraite assises sur des salaires et accessoires normalement dus, nonobstant cette demande qualifiée de dommages et intérêts. Elle est donc soumise à la prescription applicable aux créances de salaire prévue à l’article L. 3245-1 du code du travail (en ce sens, Soc. 22 octobre 2014, pourvoi n°1316936, Bull. 2014, V, n°250). En effet, dès lors que le droit au paiement des salaires et avantages est prescrit, l’action en paiement des cotisations d’assurance vieillesse et de retraite complémentaire l’est aussi.

En l’espèce, pour une action engagée le 21 juillet 2017, la durée de la prescription applicable est de trois ans de sorte que la demande, en ce qu’elle a trait pour partie sur les conséquences de la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée , ne peut porter que sur les trois dernières années précédant la rupture du contrat au 31 mai 2017, soit sur la période du 31 mai 2014 au 31 mai 2017.

– La demande de Mme [I] porte d’autre part, sur la contestation de l’assiette des cotisations retenue par l’employeur sur les salaires et accessoires versés, en ce que certains éléments de la rémunération de Mme [I] tels que principalement l’avantage logement dont elle a pourtant bénéficié ou les primes d’entraînement versées n’ont pas été pris en compte dans l’assiette de ses cotisations en particulier aux différents régimes de retraite complémentaire. En ce cas, la demande de dommages et intérêts en vue de réparer le préjudice résultant d’insuffisances dans le versement des cotisations de régimes de retraite est soumise à la prescription de droit commun quinquennale de l’article 2224 du code civil, laquelle ne court qu’à compter de la liquidation par le salarié de ses droits à la retraite. En conséquence, cette partie de la demande n’est pas prescrite.

VII -b) Sur le montant sollicité :

Pour justifier de la perte de droits subie au seul titre du régime de retraite Arrco devenu Agirc/Arrco, Mme [I] présente deux tableaux de calculs à la lecture duquel il est expressément renvoyé, afin de reconstituer le nombre de points qui aurait dû être acquis, comparé au nombre de points figurant sur son relevé de situation individuelle sur la base de la valeur du point au 1er novembre 2022 de 1,3498. Elle en déduit une pension annuelle correspondante à 1160,69 euros (859,90 points x 1,3498), soit un capital de 21 240,62 euros (rente de 1160,69 x 18,3). Elle accompagne cet exposé de son relevé de carrière émis par l’assurance retraite (édité au 29 août 2017), les états de relevé de situation individuelle dans les régimes de retraite légalement obligatoire -retraite de base et retraite complémentaire- édités le 30 août 2017 et le relevé des rémunérations et accessoires de salaires (tableau récapitulatif au titre de la période août 2009 à juin 2017 dans lequel sont détaillés les avantages en nature et primes d’entraînement devant être pris en compte dans l’assiette de cotisation selon Mme [I]), documents dont elle a reporté les données dans ses tableaux de calcul.

Il sera relevé que si Mme [I] a bénéficié de l’avantage logement depuis le début de la relation contractuelle même si celui-ci apparaît sur les bulletins de paie à titre de ‘frais’, il n’est pas suffisamment établi que la salariée a entraîné de jeunes joueuses avant la saison 2016/2017. Les attestations versées évoquent la seule dernière saison et l’avenant au contrat de travail du 30 juin 2016 ne révèle aucun élément laissant à penser que les parties ont entendu reconduire les stipulations contractuelles des saisons passées sur ce point.

Au regard de ces éléments et des sommes allouées précédemment à Mme [I] ‘au titre des arriérés de salaire’, le préjudice subi par la salariée résultant de la perte de ses droits au titre du régime de retraite tant au titre des rémunérations et accessoires dus et non versés (depuis le 31 mai 2014) qu’à celui des rémunérations et accessoires versés et non déclarés (avantage logement depuis 2009 et prime d’entraînement saison 2016/2017) sera évalué à la somme totale de 9000 euros, somme au paiement de laquelle sera condamnée l’association RVBC.

VIII- Sur les intérêts :

Conformément aux articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances de nature salariale porteront intérêt à compter de la convocation de l’employeur devant le conseil de prud’hommes, et les créances indemnitaires à compter de la décision qui les ordonne. Le jugement sera infirmé de ce chef.

IX -Sur la remise des documents sociaux :

Il y a lieu d’ordonner à l’association RVBC de rectifier les bulletins de salaire et les documents de fin de contrat conformément à la présente décision.

X- Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Le jugement dont appel sera confirmé sur les dépens et frais irrépétibles.

Il est équitable d’allouer à Mme [I] une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile d’un montant de 3 000 euros qui vaudra pour ses frais irrépétibles exposés uniquement devant la présente cour.

L’association RVBC sera déboutée de sa demande présentée sur le même fondement et condamnée aux entiers dépens de la procédure d’appel devant la présente cour.

***

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant dans les limites de sa saisine résultant de l’arrêt de la Cour de cassation, par arrêt contradictoire, prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe,

Vu le jugement du conseil de prud’hommes de La Roche-Sur-Yon du 18 décembre 2017 (RG n°17/00173),

Vu l’arrêt de la cour d’appel de Poitiers du 19 septembre 2019 (RG n°18/00263),

Vu l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 4 novembre 2021 (arrêt n°1216 F-D pourvoi n°R 19-24.378),

CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de la Roche-sur-Yon le 18 décembre 2017 en ce qu’il a :

– condamné l’association RVBC à payer à Mme [Y] [I] née [R] des dommages et intérêts pour licenciement nul mais l’infirme quant au montant alloué ;

– débouté l’association RVBC de ses demandes reconventionnelles ;

– condamné l’association RVBC à payer une somme de 1300 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

INFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT que la cour n’est pas valablement saisie de la demande en paiement de Mme [Y] [I] née [R] de la prime complémentaire ‘ancienneté’ ;

REJETTE la fin de non-recevoir soulevée par l’association RVBC au titre de la prescription de l’action tendant à la requalification des contrats à durée déterminée courants jusqu’au 31 mai 2014 fondée sur le motif du recours ;

REJETTE la fin de non-recevoir soulevée par l’association RVBC au titre de la prescription de la demande d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé reposant sur des griefs antérieurs au 20 juillet 201 5 ;

REJETTE la fin de non-recevoir soulevée par l’association RVBC en application de l’article 564 du code de procédure civile et relative aux demandes en paiement d’arriérés de salaire présentées par Mme [Y] [I] née [R] ;

DÉCLARE irrecevable comme nouvelle la demande subsidiaire formée par Mme [I] au titre de la perte de chance d’obtenir le paiement de rémunérations ;

DÉCLARE partiellement irrecevable comme prescrite la demande formée par Mme [I] au titre de la perte de droits à prestations de l’assurance-vieillesse relatives aux rémunérations et accessoires dus et non versés sur la période antérieure au 31 mai 2014 ;

DÉCLARE Mme [I] recevable et fondée en sa demande de requalification des contrats à durée déterminée conclus sur la période comprise entre le 23 juin 2009 et le 15 mai 2015 en contrat de travail à durée indéterminée, ainsi qu’à se prévaloir d’une ancienneté remontant au premier contrat irrégulier conclu le 23 juin 2009 à effet au 1er août 2009 ;

REQUALIFIE la relation de travail ayant existé entre Mme [I] et l’association RVBC en un contrat à durée indéterminée dont les effets remontent au 1er août 2009;

DIT que la rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1226-9 du code du travail produit les effets d’un licenciement nul en application de l’article L. 1226-13 du même code ;

CONDAMNE l’association RVBC à payer à Mme [I] les sommes suivantes :

– 3 851,35 euros au titre de l’indemnité de requalification ;

– 23 108,10 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

– 7 029,33 euros brut à titre de rappel de salaire ;

– 23 108,10 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

– 7 702,70 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;

– 6 739,87 euros à titre d’indemnité de licenciement ;

– 9 000,00 euros au titre de la perte de droits à prestations de l’assurance-vieillesse ;

DIT que les créances de nature salariale porteront intérêt à compter de la convocation de l’employeur devant le conseil de prud’hommes, et les créances indemnitaires à compter de la décision qui les ordonne ;

ORDONNE à l’association RVBC de rectifier les bulletins de salaire et les documents de fin de contrat conformément à la présente décision ;

CONDAMNE l’association RVBC à payer à Mme [I] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés sur renvoi de cassation ;

CONDAMNE l’association RVBC aux dépens de la procédure devant la présente cour.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Jacqueline COURADO Marie-Christine DELAUBIER

 


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