Dès lors que le salarié n’a invoqué aucune réserve dans sa lettre de démission et qu’il ne justifie, par aucune pièce, de l’existence d’un différend avec l’employeur ou de revendications auprès de ce dernier, préalablement aux demandes qu’il a formées devant la juridiction prud’homale, sa demande de requalification en licenciement ne peut être que rejetée.
En outre, il est observé que le salarié a sollicité la requalification de sa démission plus de 18 mois après le courrier qu’il a adressé à l’employeur et qu’il a l’honnêteté de reconnaître dans ses écritures, qu’il a demandé à quitter l’entreprise et à être dispensé du préavis parce qu’il souhaitait donner suite à une promesse d’embauche dans une nouvelle société.
C’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la démission était claire et non équivoque et qu’ils ont débouté le salarié de l’ensemble de ses demandes à ce titre.
_____________________________________________________________________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-2
ARRÊT DU 06 AOUT 2021
N° 2021/295
Rôle N° RG 18/07167��N° Portalis DBVB-V-B7C-BCLAF
Y X
C/
A B
Association UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes–Formation paritaire d’AIX-EN-PROVENCE en date du 26 Mars 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 14/01131.
APPELANT
Monsieur Y X, demeurant […]
Représenté par Me Frédéric BUSSI, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIME
Maître A B es qualité de mandataire judiciaire à la liquidation de la société ESKIS MULTIMEDIA RCS 492897 343, demeurant […] […]
Représenté par Me C Laurent GIRAUD, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
Association UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE Représentée par son directeur M. C D, demeurant […]
Représentée par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
Les parties ont été avisées de ce que l’affaire serait jugée selon la procédure sans audience prévue par l’article 6 de l’ordonnance n°2020-1400 du 18 novembre 2020 et ne s’y sont pas opposées dans le délai de quinze jours.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Août 2021.
COMPOSITION DE LA COUR
Madame Rose-Marie PLAKSINE, Président de chambre
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
Madame Gwenaelle LEDOIGT, Conseiller
qui en ont délibéré.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Août 2021,
Signé par Madame Rose-Marie PLAKSINE, Président de chambre et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE :
M. Y X a été engagé par la société à responsabilité limitée (SARL) Eskis Multimédia, suivant contrat à durée indéterminée à compter du 16 mars 2009, en qualité de chargé de clientèle.
À compter du 15 avril 2011, M. Y X a été affecté à un poste de chef de projet.
Dans le dernier état de la relation contractuelle, régie par les dispositions de la convention collective des entreprises de publicité et assimilées, le salarié percevait une rémunération mensuelle brute de 1430, 25 euros, à laquelle s’ajoutait une prime d’ancienneté de 64,20 euros et des commissions. Sur les douze derniers mois la moyenne de ses rémunérations s’est élevée à 1927,86 euros.
Le 07 janvier 2014, le salarié a démissionné de son emploi, par un courrier ainsi libellé :
‘Par la présente, je vous informe de ma décision de démissionner du poste de commercial que j’occupe au sein de votre société depuis le 23 mars 2009.
Je vous remercie de me dispenser d’effectuer le préavis.
Je vous remercie de faire préparer les documents de fin de contrat (certificat de travail, attestation Pôle Emploi et reçu pour solde de tout compte).
Je reste à votre disposition afin de préparer au mieux mon départ.’
Le 24 juin 2014, M. Y X a saisi le conseil de prud’hommes d’Aix-en-Provence pour contester sa démission, pour solliciter l’application de la convention collective Syntec et son repositionnement au statut cadre, ainsi que pour réclamer diverses sommes à titre de rappel d’heures supplémentaires et de prime d’ancienneté et des dommages et intérêts pour violation des règles relatives à la durée du travail, pour retard dans le paiement des salaires, pour modification unilatérale du contrat de travail, pour illicéité de la clause de non concurrence et une indemnité pour travail dissimulé.
Par jugement du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence en date du 30 juin 2016, la SARL Eskis Multimédia a été placée en liquidation judiciaire et Maître A B a été désigné en qualité de mandataire liquidateur.
Le 26 mars 2018, le conseil de prud’hommes d’Aix-en-Provence, dans sa section activités diverses, a statué comme suit :
—déboute Monsieur Y X de ses demandes relatives au statut cadre
—dit et juge que la démission de Monsieur Y X est claire et non équivoque et produit les effets d’un licenciement pour cause réelle et sérieuse
—déboute Monsieur Y X de l’ensemble de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail
—fixe la créance de Monsieur Y X sur la liquidation judiciaire de la SARL Eskis Multimédia, représentée par son Mandataire Liquidateur, Maître A B, aux sommes de :
* 7500 ‘ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l’illicéité de la clause de non-concurrence
* 1000 ‘ au titre de l’article 700 du code de procédure civile
—ordonne l’exécution provisoire sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile
—déboute Monsieur Y X de ses autres demandes
—déclare le présent jugement opposable au C.G.E.A. de Marseille
—dit que l’obligation du C.G.E.A. de Marseille de faire l’avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail, compte tenu du plafond applicable (articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail), ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L. 3253-19 du code du travail
—dit que les dépens seront inscrits en frais de liquidation judiciaire.
Par déclaration du 25 avril 2018, M. Y X a relevé appel de cette décision dont il a reçu notification le 4 avril 2018.
Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 14 décembre 2018, aux termes desquelles M. Y X demande à la cour d’appel de :
—infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a limité la demande de dommages et intérêts à titre de réparation de la nullité de clause de non-concurrence à la somme de 7500 ‘, débouté
M. Y X de ses demandes relatives au statut cadre, en ce qu’il a dit et jugé que la démission de Monsieur Y X est claire et non équivoque et produit les effets d’un licenciement pour cause réelle et sérieuse, en ce qu’il a débouté M. Y X de l’ensemble de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail et en ce qu’il a débouté Monsieur Y X de ses autres demandes
Et statuant à nouveau
—dire qu’Eskis relevait de la CCN des Bureaux d’études (Syntec) et que le métier de chef de projet de M. X à compter d’avril 2011 relevait de la position conventionnelle Cadre, position 2.2 de cette convention collective
—délivrer des bulletins de salaire et des documents de fin de contrat mentionnant les fonctions de chef de projet et le statut cadre position 2.2 de la CCN des Bureaux d’études courant d’avril 2011 à février 2014
—ordonner le versement des cotisations «cadres» auprès des organismes de retraite et la régularisation, notamment auprès de l’AGIRC, de sa situation pour la période courant d’avril 2011 à février 2014
—dire que la démission produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse
—fixer au passif de la société Eskis les créances suivantes :
* 26434,44 ‘ bruts à titre de rappel de salaire en application du minimum conventionnel
* 2643,44 ‘ bruts à titre d’incidence congés payés sur rappel de salaire en application du minimum conventionnel
* 20 ‘ Bruts à titre de rappel de prime d’ancienneté
* 2 ‘ Bruts à titre d’incidence congés payés sur rappel prime d’ancienneté
* 24594,03 ‘ bruts à titre de rappel d’heures supplémentaires dans le cas où la Cour de céans attribue à M. X le statut cadre position 2.2 de la CCN Syntec à compter d’avril 2011 ou
17214,82 ‘ dans le cas contraire
* 2459,40 ‘ bruts à titre d’incidence congés payés sur rappel d’heures supplémentaires dans le cas où la Cour de céans attribue à M. X le statut cadre position 2.2 de la CCN Syntec à compter d’avril 2011 ou 1721,48 ‘ dans le cas contraire
* 6061,14275 ‘ bruts à titre d’indemnité compensatrice de contreparties obligatoires en repos dans le
cas où la Cour de céans attribue à M. X le statut cadre position 2.2 de la CCN Syntec ou 3525,07 ‘ bruts dans le cas contraire
* 6061,14275 ‘ bruts à titre d’incidence congés payés sur indemnité compensatrice de contreparties obligatoires en repos dans le cas où la Cour de céans attribue à M. X le statut cadre position 2.2 de la CCN Syntec ou 352,51 ‘ dans le cas contraire
* 5000 ‘ à titre de dommages et intérêts pour violation des règles relatives à la durée du travail (pause déjeuner, travail dominical, durée maximale quotidienne)
* 15763,80 ‘ nets à titre d’indemnité pour travail dissimulé
* 1000 ‘ à titre de dommages et intérêts pour retard dans le paiement des salaires
* 5000 ‘ à titre de dommages et intérêts pour modification unilatérale du contrat de travail
* 7881,90 ‘ bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis dans le cas où la Cour de céans attribue à M. X le statut cadre position 2.2 de la CCN Syntec, ou 4467,11 ‘ en cas de rappel d’heures supplémentaires, 3855,73 ‘ bruts dans le cas contraire
* 788,19 ‘ bruts à titre d’incidence congés payés sur indemnité compensatrice de préavis dans le cas où la Cour de céans attribue à M. X le statut cadre position 2.2 de la CCN Syntec, 446,71 ‘ en cas de rappel d’heures supplémentaires ou 385,57 ‘ dans le cas contraire
* 4332,05 ‘ à titre d’indemnité de licenciement dans le cas où la Cour de céans attribue à
M. X le statut cadre position 2.2 de la CCN SYNTEC, 3685,37 ‘ bruts en cas de rappel d’heures supplémentaires ou 3180,98 ‘ dans le cas contraire
* 13345,92 ‘ bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse
* 7500 ‘ à titre de dommages et intérêts pour réparer la nullité de la clause de non concurrence
* 1000 ‘ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause de première instance
* 1500 ‘ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel
—dire que ces créances seront opposables au CGEA qui devra en garantir le paiement.
Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 18 octobre 2018, aux termes desquelles Me A B, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Eskis Multimédia demande à la cour d’appel de :
—confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions
—débouter le salarié pour le surplus de ses demandes
—réserver les dépens en frais privilégiés de liquidation.
Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 12 avril 2021, aux termes desquelles l’AGS, CGEA de Marseille demande, pour l’essentiel, à la cour d’appel de :
—confirmer le jugement du 26 mars 2018 en ce qu’il a débouté M. Y X de ses demandes
relatives au statut de cadre
—confirmer le jugement du 26 mars 2018 en ce qu’il a dit que la démission de M. Y X était claire et non équivoque
—réformer le jugement en ce qu’il a accordé à M. Y X
* 7500 ‘ à titre de dommages et intérêts en réparation de l’illicéité de la clause de non-concurrence
* 1000 ‘ au titre de l’article 700 du code de procédure civile
—débouter M. Y X de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions d’appel.
L’AGS, CGEA de Marseille rappelle les conditions de sa garantie.
Conclusions auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé des faits de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties.
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 17 mai 2021.
MOTIFS DE LA DECISION :
1/ Sur la convention collective applicable
Alors que la SARL Eskis Multimédia a appliqué la convention collective des entreprises de la publicité et assimilées, M. Y X soutient que l’activité réelle de l’entreprise ne ressortait pas de la publicité mais consistait dans la création de sites web, le web design et le marketing web, ainsi que l’indique son site Internet (pièce 62). En conséquence, il considère que la SARL Eskis Multimédia aurait dû appliquer la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs conseils et des sociétés de conseil (dite Syntec) qui s’adresse, notamment, aux métiers du secteur de l’informatique et, notamment, aux ‘éditeurs de logiciels’, de ‘portail internet’ et ‘autres activités informatiques’. Il relève, à cet égard, que les métiers de développeur web ou multimédia, web master ou chef de projet web font l’objet d’une classification dans cette convention collective.
Toutefois, il ressort des propres écritures du salarié que celui-ci exerçait les fonctions de ‘commercial’, comme 2 des 4 autres employés de la société et, que seul un salarié était affecté à une activité de ‘développeur’, les missions spécifiquement techniques d’élaboration de sites web étant confiées à une autre société ‘Sud Multimédia’. Ainsi, il apparaît que la SARL Eskis Multimédia avait principalement pour activité la commercialisation de produits de communication digitale, ce qui s’assimile bien à une activité de publicité. D’ailleurs, les emplois de ‘chargé de clientèle’ et de ‘chef de projet’ occupés par le salarié, dont il ne conteste pas qu’ils correspondaient bien à ses fonctions, sont bien répertoriés dans la convention collective des entreprises de publicité et assimilées.
En conséquence, c’est à bon escient que les premiers juges ont débouté M. Y X de sa demande d’application des dispositions de la convention collective des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs conseils et des sociétés de conseil, ainsi que de ses demandes subséquentes de :
—repositionnement au statut Cadre position 2.2 de la convention collective Syntec
—de rappel de salaire pour un montant de 26434,44 euros, outre les congés payés afférents, au titre du minimum conventionnel applicable pour cette classification
—délivrance de bulletin de salaire et de documents de fin de contrat mentionnant le statut cadre, position 2.2 de la convention collective Syntec
—de versement de cotisations ‘cadres’ auprès des organismes de retraite et de régularisation auprès de l’AGIRC.
2/ Sur la modification unilatérale du contrat de travail
M. Y X fait valoir, qu’alors qu’il avait été engagé comme ‘commercial’ et pour développer la clientèle de la société, il s’est vu imposer un changement de fonction, le 15 avril 2011, pour devenir ‘chef de projet’, ce qui impliquait qu’il était désormais chargé de la gestion des projets de création des sites web, du suivi de leur développement, des questions budgétaires, de la coordination des intervenants et de la satisfaction des clients, ainsi qu’en atteste un graphiste freelance ayant effectué des prestations pour l’agence REAL qui a elle-même collaboré avec la société Eskis (pièce 47).
Le salarié appelant affirme, en conséquence, que l’employeur a modifié de façon unilatérale son contrat de travail et il demande à ce qu’il lui soit alloué la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi de ce chef.
Cependant, la cour rappelle que l’employeur peut, au titre de son pouvoir de direction, confier de nouvelles tâches au salarié ou l’affecter à un autre poste, si les nouvelles missions correspondent à sa qualification, ce simple changement des conditions de travail ne requérant pas son accord préalable. En l’espèce, il n’est aucunement prétendu par M. Y X qu’il ne disposait pas de la qualification ou des compétences requises pour exercer les missions de chef de projet, dont il soutient, d’ailleurs, qu’il les a menées à bien durant quasiment trois ans. Le salarié ne s’explique pas non plus sur le préjudice qu’il aurait subi en raison de son changement de fonction et dont il demande réparation. A cet égard, il convient de relever que la lecture des bulletins de salaire produits aux débats attestent qu’aucune modification n’est intervenue dans la rémunération de M. Y X et qu’il a, notamment, continué à percevoir des commissions, dans les mêmes proportions qu’avant avril 2011, jusqu’à la date de sa démission.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande de ce chef.
3/ Sur la demande de rappel au salaire sur minimum conventionnel
Le salarié appelant forme une demande de rappel de rémunération au titre du minimum salarial prévu par la convention collective Syntec mais, également, pour celui applicable pour la convention collective nationale des entreprises de publicité. Pour autant, la cour observe que le montant qu’il réclame, à savoir 26434,44 euros, outre les congés payés afférents, renvoie à un tableau de calcul qui ne prend en compte que les minima conventionnels prévues par la convention collective Syntec.
Par ailleurs, si le salarié dénonce le fait que sa rémunération variable (dont il affirme avoir toujours méconnu les modalités de calcul) n’aurait servi que de variable d’ajustement pour permettre à l’employeur de respecter le minimum conventionnel, alors que son salaire fixe aurait toujours été inférieur à ce chiffre, il est relevé par l’AGS-CGEA de Marseille que la convention collective nationale des entreprises de publicité prévoit que le minimum conventionnel doit être entendu comme la moyenne des rémunérations sur les 12 derniers mois, en ce compris les parts variables.
La moyenne annuelle des salaires versés à M. Y X ayant toujours été supérieure aux minima prévus par la convention collective nationale des entreprises de la publicité, l’appelant sera débouté de sa demande de ce chef.
4/ Sur les heures supplémentaires
En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci.
M. Y X précise qu’alors qu’il était prévu à l’article 8 de son contrat de travail qu’ ‘il s’obligeait à respecter les horaires de présence suivants :du lundi au vendredi, de 09h00 à 12h00 et de 14h00 à 18h00″. Il arrivait, fréquemment, qu’il soit contraint de travailler durant la pause méridienne ou de terminer son activité à 18h30 et19 heures. Il sollicite, en conséquence, un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires pour un montant total de 17214,82 euros, outre 1721,48 euros au titre des congés payés afférents.
Au soutien de sa demande il verse aux débats :
—des mails adressés de mars 2009 à janvier 2014 en dehors des horaires prévus à son travail (pièces 11 à 37)
—une attestation de M. G H, graphiste freelance (pièce 47) et de M. Steeve Seghieri, stagiaire d’avril à juillet 2011 (pièce 48) témoignant qu’il lui arrivait, souvent, de travailler entre midi et 14h00, ainsi qu’après 18h00.
—des mails de l’employeur imposant au salarié de ne comptabiliser que 7 heures de travail quotidien (pièces 61, 41, 46)
—des courriels mentionnant 34 heures de travail sur 4 jours et 41 heures sur 5 jours (pièces 39 et 40) ‘une bonne journée de 09h00 à 19h30 non stop’ (pièce 43) un courriel du salarié mentionnant qu’il avait fini à 20h00 (pièce 49)
—un décompte global des heures supplémentaires effectuées chaque semaine à partir de l’exploitation des mails édités pour la période de mars 2009 à janvier 2014 (pièce 54).
La cour observe que le décompte ‘reconstitué’ par M. Y X est insuffisamment probant et précis pour permettre à l’employeur d’y répondre puisqu’il n’indique pas, pour chaque jour, les heures de début et de fin de son service, ni ses temps de pause. En outre, il ne peut être tenu compte des heures d’émission de mails pour considérer que le salarié se trouvait toujours à son poste de travail. Les attestations versées aux débats et émanant d’un salarié extérieur à l’entreprise et d’un stagiaire ayant été employé deux mois dans la société sont insuffisantes pour établir la réalité des heures supplémentaires qui auraient été effectuées par le salarié. Les courriels de l’employeur produits par l’appelant ne font qu’illustrer les rappels qui étaient adressés aux salariés de n’effectuer que 7 heures quotidiennes de travail. Enfin, il était prévu au contrat de travail que les éventuels dépassements d’heure donneraient lieu à des récupérations dont il n’est pas prétendu par M. Y X qu’il n’en aurait pas bénéficié.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté M. Y X de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, ainsi que de celles subséquentes au titre de la contrepartie obligatoire en repos et de leurs congés payés afférents et de sa demande de dommages et intérêts pour violation des règles relatives à la durée du travail, qui s’appuie sur la même évaluation imprécise des horaires de travail supposément accomplis.
5/ Sur le travail dissimulé
M. Y X revendique une indemnité de 15763,80 euros pour travail dissimulé en retenant que l’employeur a sciemment dissimulé les heures supplémentaires effectuées et en prétendant qu’il aurait ‘payé la rémunération variable sous forme d’heures supplémentaires pour échapper durant toute la durée d’application de la loi TEPA au paiement des charges sur la rémunération variable’.
Les affirmations du salarié étant non étayées et l’appelant échouant à démontrer que l’employeur aurait, de façon intentionnelle, mentionné sur les bulletins de salaire un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué; cette intention ne pouvant résulter de la seule existence d’heures supplémentaires non rémunérées; c’est à juste titre que les premiers juges ont débouté M. Y X de sa demande de ce chef.
6/ Sur la prime d’ancienneté
M. Y X indique que la prime d’ancienneté était assise sur le minimum conventionnel mais que ce dernier n’a pas été réactualisé sur les bulletins de salaire à compter de 2013, puisque ceux-ci ont mentionné 3% de 1574 euros, au lieu de prendre en compte 3% de 1605 euros, soit une différence de 0,93 euros par mois et un solde de prime d’ancienneté qu’il estime à 11,16 euros dans le corps de ses écritures et à 20 euros dans le dispositif.
Le mandataire liquidateur et l’AGS-CGEA de Marseille n’articulant aucune contestation par rapport à cette demande, il sera alloué à M. Y X la somme de 11,16 euros (12 x 0,93) à titre de rappel de prime d’ancienneté, pour les 12 mois de l’année 2013 qui ont précédé sa démission.
7/ Sur le retard dans le paiement des salaires
M. Y X explique, que les dates de paiement de son salaire, qui intervenaient la plupart du temps le 4 ou le 5 du mois, étaient parfois reportées au 10 et au-delà, comme en témoignent ses relevés bancaires (pièce 71) qui attestent qu’il lui est arrivé de n’être payé que le 18 du mois suivant.
En conséquence, il sollicite une somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans le paiement des salaires.
La cour rappelle que l’article L. 3242-1 du code du travail prévoit que le paiement de la rémunération doit être effectué une fois par mois, s’agissant des salariés mensualisés. En l’espèce, il n’est justifié par M. Y X que de 5 retards de quelques jours au-delà du mois devant séparer le paiement de deux rémunérations durant toute la durée de la relation contractuelle et le salarié ne précise pas le préjudice dont il a souffert en raison de ces défaillances.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande de ce chef.
8/ Sur la démission
En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci.
M. Y X affirme que c’est en raison des griefs précédemment exprimés à savoir : la modification unilatérale de son contrat de travail, le non-paiement de ses heures supplémentaires et le retard dans le paiement de ses salaires qu’il a été amené à démissionner.
Il demande à ce que sa démission soit requalifiée en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et qu’il lui soit alloué les indemnités subséquentes.
Toutefois, la cour constate que le salarié n’a invoqué aucune réserve dans sa lettre de démission du 07 janvier 2014 et qu’il ne justifie, par aucune pièce, de l’existence d’un différent avec l’employeur ou de revendications auprès de ce dernier, préalablement aux demandes qu’il a formées devant la juridiction prud’homale. En outre, il est observé que M. Y X a sollicité la requalification de sa démission plus de 18 mois après le courrier qu’il a adressé à l’employeur et qu’il a l’honnêteté de reconnaître dans ses écritures, qu’il a demandé à quitter l’entreprise et à être dispensé du préavis parce qu’il souhaitait donner suite à une promesse d’embauche dans une nouvelle société.
En cet état, c’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la démission était claire et non équivoque et qu’ils ont débouté le salarié de l’ensemble de ses demandes à ce titre.
9/ Sur la clause de non-concurrence
L’article 9.3 du contrat de travail, intitulé ‘non-concurrence/discrétion’ prévoyait :
‘ En cas de rupture du contrat, pour quelque cause que ce soit, le salarié s’interdit pendant une période de deux ans à compter de la rupture de s’intéresser directement ou indirectement à toute activité pouvant, pour son compte personnel ou non, concurrencer l’activité de l’employeur.
Cette obligation est valable pour la région PACA.
En cas de rupture du contrat, pour quelque cause que ce soit, le salarié s’interdit pendant une période de deux ans à compter de la rupture, de contacter directement indirectement, pour son compte personnel ou celui d’un tiers, l’un des clients de l’employeur pour lui proposer des prestations de même nature que celle relative à son activité’
M. Y X constate que cette clause est nulle à défaut d’avoir prévu une contrepartie pécuniaire. Il ajoute, qu’en dépit de la dégradation des relations contractuelles, il s’est trouvé contraint de rester dans les effectifs de la société car sa liberté de travailler était entravée par les conditions de la clause de non-concurrence et qu’il n’a pu donner suite à des propositions d’emploi
qui lui ont été faites durant la relation contractuelle. C’est d’ailleurs uniquement parce qu’il lui a été proposé un poste sans relation avec son emploi que le salarié a finalement pu quitter Eskis Multimédia.
Le salarié appelant demande la confirmation du jugement en ce qu’il lui a alloué une somme de 7500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l’illicéité de la clause de non-concurrence. Par ailleurs, il souligne que puisque le mandataire liquidateur a, également, sollicité la confirmation de cette condamnation, l’appel incident formé par l’AGS-CGEA de Marseille ne saurait avoir pour effet de remettre en cause la fixation au passif de cette créance mais uniquement de limiter les conditions de sa garantie.
Mais, dès lors que l’AGS-CGEA de Marseille a intérêt à ce que cette créance ne soit pas admise eu égard à la mise en oeuvre de sa garantie légale telle qu’elle est sollicitée par le salarié, et qu’il n’a pas été contesté la recevabilité de son appel incident, il n’y a pas lieu de dire que celui-ci se trouverait limité dans ses effets.
Or, il est relevé, à juste titre, par l’AGS-CGEA de Marseille que M. Y X ne justifie nullement du préjudice qui serait résulté de l’illiceité de la clause de non-concurrence prévue à son contrat de travail et qu’il ne produit aucune pièce pour établir qu’il se serait trouvé contraint de refuser des offres d’emploi en raison des conditions fixées par cette clause. Enfin, il n’est pas contesté que si M. Y X a démissionné pour accepter une offre d’emploi dans un autre secteur d’activité c’est, notamment, parce que celle-ci prévoyait une rémunération plus gratifiante.
Il s’ensuit qu’à défaut de justifier d’un préjudice le salarié sera débouté de sa demande de ce chef et le jugement infirmé sur ce point.
10/ Sur les autres demandes
L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.
M. Y X, partie succcombante, supportera les dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a :
—fixé la créance de Monsieur Y X sur la liquidation judiciaire de la SARL Eskis Multimédia, représentée par son Mandataire Liquidateur, Maître A B, aux sommes de :
* 7500 ‘ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l’illicéité de la clause de non-concurrence
* 1000 ‘ au titre de l’article 700 du code de procédure civile
—débouté M. Y X de sa demande de rappel de prime d’ancienneté
—ordonné l’exécution provisoire sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile
—dit que les dépens seront inscrits en frais de liquidation judiciaire
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Fixe la créance de M. Y X au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Eskis Multimédia, représenté par Me A B mandataire liquidateur, à la somme de 11,16 euros à titre de rappel de prime d’ancienneté,
Déboute M. Y X de sa demande de rappel de salaire et congés payés afférents au titre des minima conventionnels, de sa demande de dommages et intérêts pour illicéité de la clause de non-concurrence, ainsi que de toutes ses autres demandes,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. Y X aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT